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La saga de Ia Cinq (suite et fin) V andenbeylaardt Lise Universite de Liege In het eerste dee/ (verschenen in het vorig nummer) van dit artikel kwamen de onderhandelingen die de toekenning van de concessie voorafgingen, de inhoud van de concessie-overeenkomst en het lastencohier aan bod. Dit tweede dee/ gaat dieper in op het bestaan van de "Cinq" en de vele incidenten die zich sinds haar oprichting voordeden. La premiere partie de cet expose traitait des negociations qui ont precede /'attribution de Ia concession de Ia "Cinq", du contenu du contrat de con- cession et du cahier de charges. Cette partie-ci concerne plus specialement Ia vie de Ia "Cinq" et les nombreux incidents qui sont survenus depuis sa creation. The first part of this article treated the negotiations prior to the grant of the concession of the French TV channel "Ia Cinq", the contents of the agreement and the specifications. This part studies the existence of the "Cinq" and the incidents which fre- quently occurred since its establishment. § 2 VIE DE LA CINQ. A. Convention entre T.D.F. et France 5 a propos de Ia diffusion de Ia Cinq. Le journal Le Monde et l'hebdomadaire Le Point declencherent une nou- velle polemique fin decembre 1985 en publiant des extraits de }'accord preparatoire entre T.D.F. et Ia Cinq signe le 18 novembre 1985. La com- paraison du tarif consenti a Ia Cinq par rapport aux tarifs des chaines publiques est en effet assez deroutante ( ± 51,8 millions pour Ia Cinq contre 516,6 TF 1, 519,5 A2 et 455 FR 3). Le president de telediffusion dut s'en expliquer a Ia presse. II dementit !'existence de tout privilege et de tarif de faveur. Le chiffre de 51,8 millions fut obtenu en appliquant le meme tarif qu'aux chaines publiques au nombre d'emetteurs de Ia Cinq estime en 1986. Ce tarif se fonde sur Ia population desservie par chaque emetteur. Or, le nombre de telespectateurs touches en principe fin 1986 (28 millions) est deux fois moins important que pour les chaines publiques et le nombre d'emetteurs se limite a 60 contre 3000 pour les chaines publi- ques! A cela s'ajoutent divers abattements: - comme certains des nou- veaux emetteurs seront installes dans des lieux differents de ceux utilises 171

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La saga de Ia Cinq (suite et fin)

V andenbeylaardt Lise Universite de Liege

In het eerste dee/ (verschenen in het vorig nummer) van dit artikel kwamen de onderhandelingen die de toekenning van de concessie voorafgingen, de inhoud van de concessie-overeenkomst en het lastencohier aan bod. Dit tweede dee/ gaat dieper in op het bestaan van de "Cinq" en de vele incidenten die zich sinds haar oprichting voordeden.

La premiere partie de cet expose traitait des negociations qui ont precede /'attribution de Ia concession de Ia "Cinq", du contenu du contrat de con­cession et du cahier de charges. Cette partie-ci concerne plus specialement Ia vie de Ia "Cinq" et les nombreux incidents qui sont survenus depuis sa creation.

The first part of this article treated the negotiations prior to the grant of the concession of the French TV channel "Ia Cinq", the contents of the agreement and the specifications. This part studies the existence of the "Cinq" and the incidents which fre­quently occurred since its establishment.

§ 2 VIE DE LA CINQ.

A. Convention entre T.D.F. et France 5 a propos de Ia diffusion de Ia Cinq.

Le journal Le Monde et l'hebdomadaire Le Point declencherent une nou­velle polemique fin decembre 1985 en publiant des extraits de }'accord preparatoire entre T.D.F. et Ia Cinq signe le 18 novembre 1985. La com­paraison du tarif consenti a Ia Cinq par rapport aux tarifs des chaines publiques est en effet assez deroutante ( ± 51,8 millions pour Ia Cinq contre 516,6 TF 1, 519,5 A2 et 455 FR 3). Le president de telediffusion dut s'en expliquer a Ia presse. II dementit !'existence de tout privilege et de tarif de faveur. Le chiffre de 51,8 millions fut obtenu en appliquant le meme tarif qu'aux chaines publiques au nombre d'emetteurs de Ia Cinq estime en 1986. Ce tarif se fonde sur Ia population desservie par chaque emetteur. Or, le nombre de telespectateurs touches en principe fin 1986 (28 millions) est deux fois moins important que pour les chaines publiques et le nombre d'emetteurs se limite a 60 contre 3000 pour les chaines publi­ques! A cela s'ajoutent divers abattements: - comme certains des nou­veaux emetteurs seront installes dans des lieux differents de ceux utilises

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par les chaines actuelles, les telespectateurs devront reorienter leur antenne ou en acquerir une autre. Cet "handicap" justifie un premier abattement de 25% sur la facture de la Cinq. Les dirigeants de la Cinq ne souhaitaient pas securiser leur reseau c'est-a­dire doubler les emetteurs de fas:on a garantir la continuite du service sans interruption en cas de panne ( comme elle devrait etre obligee de le faire d'ailleurs puisqu'elle est titulaire d'un service public). IIs se sont finalement engages a accepter la securisation du reseau au plus tard pour 1989; en echange, un abattement de 17,5% par emetteur leur fut consenti.

II faut tenir compte egalement de la montee en charge progressive du reseau. Le 13 janvier 1986, le conseil d'administration de l'etablissement public de diffusion approuva ce projet de convention qui fut signe le 16 janvier 1986. Suite a la redaction du nouveau contrat de concession, cette convention fut annulee et resignee par les nouveaux partenaires T.D.F. et la societe Fran­ce 5 le 8 fevrier 1986 (un arrete approuvant cette convention fut publie au Journal Officielle 18 fevrier 1986). Le gouvernement a done reussi le coup de force de sortir vainqueur de cet imbroglio juridique (tout au moins jusqu'a la decision du Conseil d'Etat). Cependant, il se heurta, sur le ter­rain meme, a la mauvaise volonte du Maire de Paris a propos de la Tour Eiffel.

B. Guerilla juridico-politique du Maire de Paris

Jacques Chirac refusa l'acces ala Tour aux techniciens de T.D.F. charges d'installer les emetteurs de la Cinq, pretextant des raisons de securite. II avait, en effet, fait proceder le meme jour' le 15 janvier 1986, a divers travaux sur Ia Tour Eiffel la rend ant ainsi inaccessible pour 15 jours ! LeMaire de Paris entend sanctionner, de cette fas:on cavaliere, les promo­teurs de la Cinq a qui il reproche d'avoir commence des travaux sur l'im­meuble de la regie de la Cinq sans les avoir declares prealablement a la Mairie. Ces travaux visaient a installer sur le toit de la regie une plate-for­me destinee a porter l'antenne d'emission vers la Tour Eiffel. Jacques Chi­rae fit dresser un proces-verbal qui fut notifie au tribunal. Georges Fillioud brandit de son cote un decret modifiant le code d'urbanis­me. "Afin de permettre ala Cinq de demarrer dans les delais exiges par le gouvernement, un decret du 15 janvier 1986 (publie au Journal Officielle 16 janvier) a prevu que !'installation des antennes d'emission ou de recep­tion de signaux radio-electriques dont aucune dimension n'excede quatre metres, est dispensee de permis de construire" (L'Actualite juridique -droit administratif- 20 fevrier 1986, p. 85). Jacques Chirac invoque la non declaration prealable, Georges Fillioud lui repond par un decret entre en vigueur le 16 janvier 1986 (en principe non retroactif) dispensant du permis de batir! Quoi qu'il en soit l'equipe des

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techniciens de T.D.F. refoulee une nouvelle fois le 21 janvier 1986 par le personnel de Ia Tour, revint en force escortee par le commissaire de police. Ils se prevalent cette fois d'un arrete du 17 janvier 1986 autorisant l'eta­blissement public de diffusion a mettre en oeuvre sur la Tour Ia servitude prevue a !'article 34-1 de la loi de 1982 et d'un arrete du prefet du 20 janvier 1986 permettant a T.D.F. d'installer a sa convenance les emetteurs au sommet de la Tour! La societe de la Tour Eiffel, vaincue par ce deferle­ment d'artillerie, introduisit un recours au tribunal administratif.

C. Lancement de la Cinq

Apres sa victoire a l'arrache sur la Tour Eiffel, la Cinq est enfin prete a diffuser. Le capital de la societe France 5 (50.000.000 FF) est boucle mi-fevrier. 40% des parts sont detenues par la Fininvest, holding de Ber­lusconi et la S.E.P.C., holding des participations fran~aises, rassemble 60% des parts. La presse a repondu a l'appel de Jerome Seydoux (22 novembre 1985) qui l'invitait a participer au capital de la Cinq. Une socie­te independante reunissant divers groupes de pre sse prit 4% des parts (groupe Marie Claire, de la Cote Desfosses, les editions en Direct (tierce magazine), les editions du Kiosque (Rock and Folks), de l'Etudiant, des Nouvelles litteraires, d'Excelsior Publications (science et vie), de la societe d'information economique et financiere (lnvestir), de la societe des Nou­velles d'edition et de presse (auto-hebdo), de Temps retrouve et de V.S.D.) (Le Monde du 16 fevrier 1986). La Cinq fit une entree remarquee le 20 fevrier 1986 sur la scene de l'audio­visuel. Elle connut cependant de nombreuses difficultes techniques. Selon les responsables de la chaine, un foyer sur cinq ne parvient pas a recevoir Ia Cinq, selon le syndicat des antennes 75% des habitants de la capitale ont de serieuses difficultes ala capter. "Une enquete sur toutes les zones de diffusion de la cinquieme chaine par mediametrie revele que, alors que 77% des telespectateurs ont essaye de capter la nouvelle television, 31% n'y sont pas parvenus, sur les 46% des foyers qui ont ete plus chanceux, 41% se plaignent d'une image defectueuse" (Le Monde du 27 fevrier 1986). La Cinq, malgre ces difficultes, a neanmoins remporte un grand succes de curiosite. 30% de telespectateurs sur la zone de diffusion auraient regarde au moins une fois le lancement de la Cinq du 20 fevrier 1986. L'audience se serait stabilisee a 28% durant les premiers jours de diffusion (Le Monde du 27 fevrier 1986).

D. Reaction de 1' opposition

L'opposition, en desespoir de cause, echafaude des solutions pour se de­barrasser de la Cinq apres mars 1986 dans !'hypothese ou le Conseil d'Etat n'annulerait pas la concession.

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Les -programmes du R.P.R. et de l'U.D.F. prevoient le depot en debut de legislature (en cas de victoire de la droite) d'un projet de loi de reorienta­tion globale dans lequel pourrait figurer }'abrogation du regime de conces­sion de service public ou le vote d'un texte specifique prealable a cette loi de reorientation abolissant la concession de la Cinq. Cette solution com­porte cependant un inconvenient: !'obstruction de la "future" opposition, obstruction qui pourrait avoir pour effet de grossir les indemnites dues a la Cinq en cas de resiliation. 11 serait facile de parer a cette eventualite, en retirant tout simplement la concession a France 5. Au nom du principe du parallelisme des formes, le nouveau gouvernement pourrait au moyen d'une simple lettre et d'un decret resilier la concession de la Cinq. Mais cette option d'urgence risquerait par sa brutalite de nuire "electoralement" ala droite. En effet, les telespectateurs, electeurs potentiels, n'apprecierai­ent guere d'etre prives du jour au lendemain de cette nouvelle chaine de television. La politique de l'ecran blanc est a proscrire. L'opposition prefererait de loin ne pas a voir a intervenir, l'annulation par le Conseil d'Etat restant la solution revee.

E. T.V. 6.

Le 29 janvier 1986, le gouvernement annon~a !'attribution de la sixieme chaine au groupe Gaumont, Publicis, N.R.J. et la Societe generale de ges­tion, de distribution et de marketing. Le contrat de concession fut publie au Journal Officiel le 21 fevrier 1986. 11 s'agit d'une chaine a dominante musicale. La Haute Autorite rendit un avis plus favorable a T.V. 6 qu'a la Cinq (le 19 fevrier 1986). Cependant, elle ne s'estime pas convaincue de la necessi­te de creer une chaine a dominante musicale dont la viabilite financiere est douteuse. Elle critique le contrat de concession qui reprend !'ensemble des clauses techniques preferentielles du contrat de la Cinq. Elle reaffirme sa volonte de voir renforcee la programmation fran~aise, de voir respectes le regime de diffusion des oeuvres cinematographiques et la limitation de la diffu­sion des spots publicitaires a 12% du temps d'antenne. T.V. 6 commen~a a diffuser officiellement le 1 er mars 19 8 6.

F. Dossier satellite T.D.F. 1.

Le gouvernement, le 11 mars 1986, a cinq jours des elections Iegislatives attribua deux des canaux disponibles du satellite T.D.F. 1 au Consortium europeen pour la television commerciale. Cette societe reunit le groupe Fininvest, Maxwell, la Societe allemande Beta taurus et la S.E.P.C., hol­ding des participations fran~aises au capital de la Cinq. "T.D.F. 1 trans­mettra la Cinq et la future septieme chaine a vocation culturelle. Ces qua-

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tres canaux sont attribues pour une duree de 16 ans au prix de 55 millions de francs par an et par canal" (Le Monde du 13 mars 1986).

G. Elections legislatives.

Les elections legislatives du 16 mars consacrerent Ia victoire de Ia droite. L'ex-opposition, desormais au pied du mur, reitera sa volonte de modifier Ia loi relative a Ia communication audiovisuelle. Elle annon~a ilne politi­que de privatisation, la mise en place d'une nouvelle "Haute Autorite" qui serait chargee d'attribuer les frequences, !'abrogation du regime des con­cessions, Ia resiliation des contrats de Ia Cinq, de T.V. 6 et des contrats sur le satellite T .D.F. 1.

H. Arret du Conseil d'Etat du 16 avril 1986 (1).

Le Conseil d'Etat se pronon~a le 16 avril 1986 sur les differents recours deposes principalement par la C.L.T., le B.L.I.C., et Ia societe d'auteurs et compositeurs dramatiques en decembre 1985 et en janvier 1986. Le Conseil d'Etat devait examiner cinq requetes dirigees contre Ia decision de signer le contrat du 19 novembre 1985, le contrat lui-meme et le cahier des charges annexe, cinq requetes contre le decret du 7 janvier 1986 pris en application de !'article 79 de Ia loi de 1982 et enfin six requetes dirigees contre le decret pu 18 janvier 1986 portant approbation du traite de con­cession et du cahier des charges de la Cinq, contre ce contrat et le cahier des charges et contre Ia decision du Secretaire d'Etat charge des Techni­ques de Ia communication de signer ces documents.

1. Les requetes dirigees contre le premier contrat.

Le gouvernement en accord avec ses partenaires, Seydoux, Berlusconi et Riboud a declare les premiers documents nuls et non avenus par un ave­nant du 17 janvier 1986 complete le 23 janvier 1986. Le premier contrat et le premier cahier des charges ont done ete "annules" retroactivement. Ces requetes sont devenues sans objet. Ce retrait est regu­lier puisqu'il est intervenu dans le delai prevu.

2. Les requetes dirigees contre le decret du 7 janvier 1986.

Les requerants contestent Ia legalite du decret du 7 janvier 1986 pris en application de !'article 79 de Ia loi de 1982. Ils soutiennent que ce decret

(1) CE. Ass. 16 avril 1986: Aff. Compagnie Luxembourgeoise de Telediffusion et autres. Reg. no 75040,75087,75110, 75141,75525,75575,76616. Actualite juridique- Droit administratif- 20 mai 1986, p. 328.

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aurait du etre pris apres l'avis de Ia Haute Autorite et du Conseil national de Ia communication audiovisuelle, qu'il ne definit pas de fa~on suffisam­ment precise les regles de fonctionnement des services concedes (passant sous silence !'organisation de Ia coexistence entre les concessionnaires et les organismes de service public, Ia conciliation de Ia liberte et du pluralis­me de Ia communication audiovisuelle sur Ia liberte de presse etc.). Ils en deduisent que !'article 79 de Ia loi ne pouvait done pas entrer en vigueur et que Ia concession est par consequent depourvue de base legale. Le Conseil d'Etat, apres avoir rappele qu'aticune disposition de Ia loi n'im­pose Ia consultation de Ia Haute Autorite pour adopter un decret d'appli­cation et le caractere facultatif de Ia consultation du C.N.C.A. estima: "qu'il appartient a l'autorite administrative ayant le pouvoir d'approuver les contrats de concession prevus a I' article 79 de Ia loi, de s'assurer que les personnes morales de droit public ou de droit prive ... sont a meme de respecter !'ensemble des dispositions de Ia loi et notamment les droits et les obligations des organismes de service public de Ia radiodiffusion sonore et de Ia television regis par le Titre III de Ia loi ... ". "Que ce pouvoir peut s'exercer sans qu'il soit besoin de determiner par des mesures reglementai­res des regles de procedure pour le choix des concessionnaires ou des regles de portee generale destinees a garantir que le service concede sera exploite conformement a Ia loi ou encore des regles relatives a Ia remune­ration du concessionnaire; que I' article 79 de Ia loi etant ainsi susceptible de recevoir application sans qu'intervienne au prealable une mesure regle­mentaire ... ". (Arret du Conseil d'Etat du 16 avril 1986 o.c., page 330.)

Des lors, qui peut le plus, peut le moins, le gouvernement pouvait tres bien se limiter a certains domaines seulement (duree concession, rapports entre T.D.F. et les concessionnaires ... ) comme ill'a fait par le decret du 7 jan­vier 1986. Le commissaire du gouvernement rappelle a cette occasion dans ses COJ?.­

clusions que le contrat de concession de Canal Plus a ete attribue sur le SCiJl fondement de !'article 79 de Ia loi. Les requerants contestent egalement Ia legalite des articles 3 et 6 de ce decret. L'article 3 soumet a l'avis de Ia Haute Autorite, tout cahier des charges des services concedes. Ils pretendent que cet article viole Ia loi sur Ia communication, articles 12 et 13 (l'article 12 institue Ia Haute Autorite, !'article 13 prevoit que Ia Haute Autorite veillera au respect, par les orga­nismes qui en sont charges, des missions de service public mentionnees dans Ia loi) en ce qu'illimite Ia consultation de Ia Haute Autorite au seul cahier des charges. L'article 6, qui soumet a !'approbation conjointe du Ministre des P.T.T. et du Ministre charge des Techniques de Ia communi­cation, Ia convention passee entre le concessionnaire et T.D.F., porterait atteinte a l'autonomie financiere et administrative de cet etablissement pu­blic de diffusion.

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En vertu de !'article 15 de la loi, seulle cahier des charges doit etre soumis a la Haute Autorite. Aucune disposition ne prevoit la consultation de Ia Haute Autorite a propos du contrat de concession. Le Conseil d'Etat pour­suit en precisant qu'un contrat de concession ne pourrait sans violer les dispositions de !'article 15 contenir des obligations de service public non soumises ala Haute Autorite. On se rappellera le transfert de !'article 2 de !'ancien contrat de concession au nouveau cahier des charges. Le Conseil d'Etat considera quant a !'article 6 qu'il avait pu legalement ajouter au decret relatif a !'organisation de l'etablissement public de diffusion notam­ment a ses articles 8 go, 9 et 10 relatifs au pouvoir du conseil d'admini­stration et du president de cet etablissement. D'autre part, le gouverne­ment tient de !'article 110 de Ia loi de 1982 le pouvoir de fixer les condi­tions d'organisation et de fonctionnement de cet etablissement cree par 1' article 34 de la meme loi. .

3. Les requetes dirigees contre le decret du 18 janvier 1986 portant appro­bation du traite de concession et du cahier des charges du 17 janvier 1986~ contre le contrat de concession et le cahier des charges et contre Ia decision de signer ces deux documents.

La societe France 5, qui s'est portee partie intervenante a !'instance, soule­va !'incompetence du Conseil d'Etat a connahre les conclusions tendant a l'annulation du contrat de concession et du cahier des charges. En effet, si le Conseil d'Etat est competent pour examiner le decret d'approbation, acte detachable du contrat, il ne peut connaitre d'un recours, pour exces de pouvoir dirige contre le traite de concession car il s'agit d'un acte con­tractuel qui releve de la competence des tribunaux administratifs. En ce qui concerne le cahier des charges, bien qu'il contienne des dispositions presentant un caractere reglementaire, le Conseil d'Etat, suivant les con­clusions du commissaire du gouvernement, se declara incompetent. 11 en serait autrement s'il s'agissait d'un cahier des charges type. Le cahier des charges constitue l'un des elements du contrat de concession et ne peut faire l'objet d'un recours pour exces de pouvoir. Les requetes dirigees con­tre le contrat de concession lui-meme et le cahier des charges furent des lors ecartees. Cependant, le Conseil d'Etat, saisi d'une requete en annulation contre le decret d'approbation, s'estima competent pour connaitre des conclusions dirigees contre la decision de conceder le service public, contre le contrat de concession et le cahier des charges en raison du lien de connexite qui les unit a ce decret.

* Les requerants soulevent trois illegalites dont le decret du 18 janvier 1986 serait entache. • lis soutiennent que la procedure suivie pour choisir le concessionnaire est irreguliere.

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D'une part, un appel a la concurrence aurait du etre realise, l'Etat ne pouvant invoquer le principe du libre choix du concessionnaire. D'autre part, la C.L.T. pretend que sa candidature affirmee a plusieurs reprises fut ecartee irregulierement pour n'avoir pas ete examinee au prealable. Le Conseil d'Etat rappela a ce propos la regie du libre choix du conces­sionnaire en matiere de concession de service public, precisant qu'aucune disposition en matiere audiovisuelle ne derogeait a ce principe. Le gouver­nement a pu legalement conceder la Cinq sans avoir organise au prealable un appel a la concurrence. C'est la stricte application du droit des concessions. 11 repondit a !'argu­ment de la C. L. T. qu'il ne ressortait pas des pieces du dossier que sa candidature fut ecartee sans etre examinee' que de toute fa~on, le gouver­nement avait le libre choix du concessionnaire et n'avait pas a avertir la C.L. T. des raisons de ce choix, ni du deroulement des negociations. • La consultation de la Haute Autorite serait irreguliere et ce pour deux motifs: premierement, cette procedure ne se resumerait qu'a une simple formalite puisque le Secretaire d'Etat charge des Techniques de la commu­nication aurait declare a la presse que le gouvernement ne tiendrait aucun compte de cet avis. Deuxiemement, cette consultation aurait du porter sur le contrat de concession. Le Conseil d'Etat considera que le gouvernement avait dispose d'un delai suffisant (deux jours ! ) pour examiner cet avis et que le requerant n'apportait pas la preuve de ce que cet examen n'eut pas eu lieu. On aurait pu reprocher le defaut de consultation du traite de concession si les requerants avaient soutenu, a raison, que ce contrat con­tenait en fait des obligations de service public, ce qui n'est pas le cas en l'espece; le Conseil d'Etat precisa surabondamment que ce contrat fut communique quand meme ala Haute Autorite pour information. • Le Ministre de la Culture aurait lors d'une emission televisee le 23 jan­vier 1986 tenu des propos embarrasses concernant !'attribution de lacon­cession a la Cinq. Les requerants en deduisent qu'il n'aurait des lors pas contresigne ce decret du 18 janvier 1986 en parfaite connaissance de cau­se, que ce contreseing ne vaut pas approbation. Le Conseil d'Etat repondit brievement a cet argument quelque peu fantai­siste. En effet, en contresignant ce decre.t, le Ministre a necessairement donne son approbation. 11 est evident que les etats d'ame du Ministre quels qu'ils soient ne peuvent etre allegues pour contester la Iegalite d'un decret ! On constatera que les requerants ne laissent rien au hasard !

~- Les requerants denoncent ensuite les irregularites qui entacheraient !'en­semble de !'operation de concession . • 11s reprennent a ce propos !'argumentation developpee a l'encontre du decret du 7 janvier 1986 a titre d'exception d'illegalite cette fois. L'article 79 n'est pas entre en vigueur puisque son decret d'application est illegal d'ou !'operation est depourvue de base legale. (Voir supra la reponse du Conseil d'Etat ala requete dirigee contre.le decret du 7 janvier 1986.)

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• Ils accusent ensuite le gouvernement de s'etre rendu coupable d'un de­tournement de procedure dans la mesure oil le contrat de concession du 17 janvier 1986 approuve par le decret du 18 janvier 1986 n'aurait eu pour objet que la regularisation du premier contrat. Le Conseil d'Etat refuta ce moyen: "considerant, en premier lieu, que le fait pour le gouvernement d'avoir rapporte dans le delai du recours pour exd~s de pouvoir la decision du 19 novembre 1985 attribuant la conces­sion de la cinquieme chaine a une societe en voie de formation, puis apres avoir precise, par le decret du 7 janvier 1986 certaines modalites d'applica­tion de 1' article 79 de la loi du 19 juillet 19 82 de conceder' sur des bases juridiques nouvelles et apres consultation de la Haute Autorite de la com­munication audiovisuelle, !'exploitation de cette cinquieme chaine ala So­ciete France 5, creee entretemps, n'etablit pas que ladite decision a ete prise a l'issue d'une procedure irreguliere". (Arret du Conseil d'Etat du 16 avril 1986, o.c., page 331.) Voila resume en un seul considerant toutes les acrobatics du gouvernement ! • Les requerants deduisent de !'article 8 du cahier des charges en vertu duquella Cinq ne peut tirer ses ressources ni de la redevance ni de l'abon­nement, que le contrat conclu ne peut etre qualifie de concession de service public. Ils invoquent a l'appui un avis du Conseil d'Etat de 1980: "un contrat, quel qu'en soit l'objet, qui ne prevoit pas que le cocontractant de !'administration perc,;:oit sur les usagers, avec lesquels il noue des relations contractuelles des redevances pour service rendu, ne peut etre qualifie de concession de service public". Le commissaire du gouvernement fit remarquer que la jurisprudence du Conseil d'Etat etait bien plus nuancee qu'il n'y paraissait. Cette jurispru­dence exclut certes categoriquement la notion de concession lorsque le cocontractant est remunere par !'administration elle-meme, mais elle ac­cepte d'autres modes de remuneration que la redevance. 11 cite ace propos le cas d'un concessionnaire de la capture des chiens errants et de l'enleve­ment des depouilles des betes mortes qui tirait une grande partie de sa remuneration des depouilles des animaux abandonnes. Le critere est done que le concessionnaire retire d'une maniere ou d'une autre sa remuneration de !'exploitation du service concede. Des lors, pourquoi pas des ressources publicitaires qui sont en fonction de I' audience de la chaine? Le Conseil d'Etat enterina les conclusions du commissaire du gouverne­ment, considerant que le legislateur "n'avait pas entendu subordonner I' at­tribution des contrats de concession prevus a I' article 79 de la loi au verse­ment par les usagers d'une redevance pour service rendu ou perc,;:ue au profit du concessionnaire; que la Societe France 5 devra tirer l'essentiel de ses ressources de !'exploitation du service et notamment de la diffusion de messages d'ecrans publicitaires; qu'ainsi le contrat litigieux a bien le carac­tere d'une concession de service public au sens de !'article 79 de la loi du 29 juillet 1982". (Arret du Conseil d'Etat du 16 avril 1986, o.c., page 331.)

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• Les requerants font valoir que cette operation de concession serait con­traire au decret-loi du 12 novembre 1938 concernant la nationalite des concessionnaires de service public. L'Etat ne peut octroyer de concession de service public qu'a des Frans:ais. Or, les statuts de la Cinq prevoient un vice-president au conseil d'administration de nationalite italienne et deux membres etrangers au conseil d'administration. Ils attaquent en outre !'ar­rete derogatoire du Premier Ministre du 17 janvier 1986. Le commissaire du gouvernement rectifia les conclusions des requerants sur un point : les statuts de la Cinq ne stipulent pas que deux des membres seraient de nationalite etrangere mais que deux des membres devraient etre choisis parmi les actionnaires titulaires d'actions de categorie A, deux par­mi les titulaires d'actions B. L'article 5 des statuts precise que les actions A doivent appartenir a des personnes de nationalite frans:aise. On ne peut deduire de cette disposition que toutes les actions B appartiennent a des etrangers. En ce qui concerne la vice-presidence, il est vrai que les statuts violeraient le decret de 1938 s'il n'y avait pas ete deroge par un arrete du Premier Ministre conformement a ce ·decret-loi. Le Premier Ministre a pris le 17 janvier 1986 sur proposition du Secretaire d'Etat charge des Techniques de la communication un arrete derogatoire parfaitement legal.

~- Les requerants pretendent tirer trois illegalites des clauses du contrat de concession. • L'Etat en reservant une priorite d'acces du concessionnaire a tous les moyens de diffusion violerait le principe du pluralisme de la communica­tion audiovisuelle (article 2 de la loi du 29 juillet 1982) et (article 79. Les services ... font I' objet de concession ... ) par la constitution d'un veritable monopole de fait (article 2, 2° du contrat de concession, article 2, 3°, article 3 ). Le Conseil d'Etat estima que ces priorites consenties a la Societe France 5 ne portent pas atteinte aux services garantis par la loi aux etablissements du secteur public et ne font pas obstacle a ce que d'autres concessions soient accordees dans des conditions analogues. Que priorite n'etait pas synonyme de monopole ! • Les articles 10 et 11 "assurance tous risques sur le plan financier" serai­ent contraires aux theories de l'imprevision et du fait du prince. En pre­voyant un droit a indemnite au concessionnaire si un desequilibre interve­nait dans !'exploitation du service suite a des circonstances exterieures ala volonte des cocontractants, !'article 10 violerait les principes admis en matiere d'imprevision. L' article 11 qui reserve un droit a resiliation ou a indemnisation en cas de modification legislative' reglementaire ou contrac­tuelle degradant les conditions d'exploitation de la chaine porterait attein­te a la theorie du fait du prince. En outre, cet article empieterait sur la competence du legislateur. Le Conseil d'Etat constata que les stipulations

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des articles 10 et 11 se bornaient "a determiner et a amenager sur le plan contractuel, dans les hypotheses qu'elles envisagent, les droits des conces­sionnaires". (Arret du Conseil d'Etat du 16 avril1986, op cite, page 332.) Que !'article 11 dans la mesure oil il aurait pour effet d'engager l'Etat a indemniser ou a accorder la resiliation si des modifications legislatives, reglementaires ou contractuelles, bouleversaient l'economie du contrat, ne fait pas pour autant "e~hec a !'application des dispositions qui seraient ulterieurement edictees par le legislateur". (Arret du Conseil d'Etat du 16 avril 1986, op cite, page 332.) • La legalite des clauses dites de "la chaine la plus favorisee" est egalement mise en cause (article 7 et 13 du contrat de concession). L'article 7 assure a la Cinq le benefice des conditions d'exploitation, de programmation ou de diffusion aussi favorables que celles dont viendrait a beneficier tout service de television francophone, diffusant sur }'ensemble du territoire national. Aux termes de 1' article 13, le concedant gar an tit au concessionnaire !'application immediate et de plein droit de toutes disposi­tions Iegislatives, reglementaires et contractuelles ainsi que tousles avanta­ges techniques dont viendrait a beneficier toute entr~prise privee exploi­tant un service de television par voie hertzienne destine au public en gene­ral. Ces clauses porteraient atteinte selon les requerants au pluralisme de la communication audiovisuelle (article 2 loi de 1982) et au droit des concessions. L'article 13 pourrait egalement empieter sur la competence du legislateur. Le commissaire du gouvernement · souligna que la proteqion du conces­sionnaire est inherente a la notion de concession de service public. Le concedant a meme la faculte de conferer au concessionnaire l'exclusivite du service concede. Qu'il n'a done enfreint aucune regie du droit des con­cessions en protegeant le concessionnaire contre la concurrence ou en lui garantissant des conditions d'egale concurrence. "Dans un cadre Iegislatif qui non seulement exclut le monopole mais impose le pluralis·me, elles tendent a garantir au concessionnaire des conditions d'egalite de concur­rence avec toute entreprise privee exploitant un service concurrent. Loin de porter atteinte au pluralisme de la communication audiovisuelle elles tendent, d'une certaine fac;on a le maintenir dans un contexte tres insta­ble". (Conclusions du commissaire du gouvernement - Revue de Droit Public et Sciences politiques en France eta l'etranger, 3-1986, page 871.) Le Conseil d'Etat le suivit. II precisa egalement que l'article 13 n'empietait pas sur la competence du Iegislateur pour les memes motifs que pour I' article 11. Les .parties ont en effet admis que cette clause pourrait ne pas jouer en prevoyant I' article 11, 2° qui ouvre au concessionnaire un droit a resiliation ou a indemnite en cas de non respect de !'article 13. 11 est done evident que cette clause ne lie en rien le legislateur. Ils reprochent a !'article 8 de violer la loi sur la propriete litteraire et artistique (modifiee par la loi du 3 juillet 1985) et de porter atteinte aux droits moraux des auteurs en autorisant la Cinq a interrompre ses pro-

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grammes par des ecrans publicitaires. Ils arguent que le cahier des charges aurait du prescrire que cette interruption ne pouvait intervenir qu'apres avoir recueilli l'autorisation des auteurs. Le Conseil d'Etat se contenta de declarer qu'aucune disposition de la loi sur les droits d'auteurs n'interdit par elle-meme !'interruption de la diffu­sion d'une oeuvre cinematographique par un message publicitaire et que !'article 8 ne dispensait pas le concessionnaire du respect des droits d'au­teurs. Le non respect de ces droits est sanctionne par les tribunaux judici­aires. 11 faut noter a cet egard que la Cinq connut de gros ennuis avec les realisateurs americains qui lui ont meme interdit la diffusion de leurs films (exemple: American Gigolo; la Feline fut rediffuse sans coupure (LeMan­de du 15 mars 1986, page 26)). Les requerants pretendent que I' article 8, faute de precision quant aux modalites d'acces ala publicite sur la Cinq, entralnerait une rupture d'ega­lite d'acces a la publicite et violerait le principe de la liberte de commerce. La Cinq aurait retenu des tarifications ecartant les petits annonceurs. Ces moyens furent ecartes par le Conseil d'Etat parce qu'aucune disposi­tion legislative ne prevoit !'obligation aux parties a un contrat de conces­sion de determiner les conditions d'acces a la publicite. Les modalites de tarification adoptees par la Cinq n'ont aucune incidence sur la legalite du decret approuvant le cahier des charges. • En ce qui concerne les articles relatifs au cinema, (articles 4 et 6), les requerants font valoir que les articles 4 et 6 meconnaltraient les disposi­tions 88 et 88-1 de la loi de 1982. L'article 6 en ne prevoyant que la possibilite pour le concessionnaire de prendre des participations a la production d'oeuvres cinematographiques ne respecterait pas !'obligation creee par l'article 88 qui stipule que "les services publics de television et les services de communication audiov1suel­le, contribuent au developpement des activites cinematographiques selon les modalites fixees par le cahier des charges". Le commissaire du gouvernement fit remarquer que si !'article 88 creait bien une obligation, il en avait confie le soin d'en determiner le contenu au cahier des charges. Le gouvernement etait done parfaitement libre de limi­ter cette obligation de contribution a la possibilite de prendre des partici­pations. Quant a }'article 4, il violerait !'article 88-1 de la loi du 29 juillet 1982 qui impose au cahier des charges de fixer le volume des oeuvres diffusees ( cet article 88-1 a ete introduit par la loi du 13 decemb~e 1985).· Aux termes de cet article, "les dispositions des cahiers des charges et les decrets relatifs au regime de diffusion des oeuvres cinematographiques par les organismes prevus au Titre II edes services de communication audiovi­suelle relevant du Titre V de la presente loi, doivent notamment preciser

* Les requerants contestent enfin I a legalite des articles 4, 6 et 8 du cahier des charges.

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en fonction de la nature du service, le volume et la nationalite des oeuvres diffusees ... ". Or, l'article 4 approuve par de<;:ret du 18 janvier 1986 ne fixe pas le nombre total de diffusions d'oeuvres cinematographiques auquelle concessionnaire est autorise a proceder pendant une periode determinee. En se contentant de preciser que 60% au moins des oeuvres cinematograp­hiques doivent provenir des Etats membres de la Communaute et 50% au moins doivent etre d'expression originale franc,;:aise et que le pourcentage de films d'expression originale franc,;:aise a preciser sur les cinq derniers excercices devra atteindre 25%, I' article 4 ne respecte pas !'obligation d'imposer un nombre total de films qui peuvent etre diffuses. 11 est contrai­re a !'article 88-1 de la loi. Le gouvernement se defendit en invoquant l'avenant du 18 fevrier 1986 public au Journal Officiel avant le demarrage de la chaine. Cet avenant limite la diffusion a 250 titres par an. Les requerants riposterent en attaquant cet avenant : - il a ete adopte sans consultation de la Haute Autorite ; - il se borne a prevoir que le nombre de films diffuses n'excedera pas 250

titres par an, sans prevoir aucune limitation des possibilites de rediffu­sion des titres. Des lors, il ne fixe pas le "volume" des oeuvres comme l'exige l'article 88-1.

Le premier grief fut rejete. Le gouvernement en adoptant cet avenant a repris le texte meme propose par la Haute Autorite dans son avis du 15 janvier 1986. De plus, un mois seulement s'est ecoule entre cette consulta­tion et cet avenant sans qu'aucune circonstance nouvelle ne rende necessai­re une nouvelle consultation. Par contre, le second a retenu toute !'attention du commissaire du gouver­nement et du Conseil d'Etat. II est clair que le legislateur a voulu par l'emploi du terme "volume" que l'on determine le nombre total des films diffuses. "Pour une chaine publi­que qui ne diffuse qu'une seule fois les m~mes programmes, ce nombre peut correspondre au nombre de titres. Pour une chaine qui, comme la Cinq, est autorisee a rediffuser sans-limite ses programmes, c'est le produit du nombre de titres par le nombre de diffusions de ces films". (Conclu­sions du commissaire du gouvernement- op cite, page 875.) En outre, cet avenant porte atteinte a l'esprit de la loi du 29 juillet 1986 qui a tenu a proteger la frequentation des salles de cinema. Une liberte totale de rediffusion des films risquerait de causer sa ruine. Le commissaire poursuit en citant l'exemple du cahier des charges de Canal plus, qui non seulement precise le nombre de rediffusions mais egalement les heures de rediffusion. Or, la Cinq rediffuse quatre fois le meme programme, ce qui fait un nombre total de 1000 films diffuses par an. Et rien ne lui interdit d'en faire plus ni d'en faire moins. Le Secretaire d'Etat charge des Techniques de la communication fit valoir qu'ils avaient repris les memes termes que la Haute Autorite, qui avait egalement employe le mot "titre". Le commissaire du gouvernement lui

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repondit que la Haute Autorite inscrivait cet article "dans le cadre d'un cahier des charges plus contraignant qui comportait un service quotidien plus court, des obligations de production originale importantes et qui ne comportait pas dans son esprit, semble-t-il, de liberte totale de rediffusion des programmes". II decida que cet avenant n'avait pas eu pour effet de couvrir le vice dont etait entache le cahier des charges. Le Conseil d'Etat en fit autant. II considera en outre que cette illegalite affectait }'ensemble des conditions dans lesquelles le concessionnaire etait autorise a diffuser des oeuvres cinematographiques, estimant toutefois que cet article 4 etait detachable des autres clauses du cahier des charges. En effet, si le volume des films 'n'est pas fixe, toutes les dispositions determi­nant des quotas perdent leur sens puisque la base de reference n'est pas arretee. II annula le decret du 18 janvier 1986 en tant qu'il approuve l'article 4 du cahier des charges et la decision du Secretaire d'Etat Georges Fillioud de signer le cahier des charges en tant qu'il comporte tet article 4. Consequence immediate de cet arret : la Cinq ne peut plus diffuser de films jusqu'a ce que les modalites de diffusion soient negociees a nouveau avec le gouvernement. . Le Conseil d'Etat renvoie en quelque sorte la balle au gouvernement. Le Conseil d'Etat aura rendu deux services au gouvernement: il a recorinu le pouvoir discretionnaire de l'Etat dans le cadre de la concession de service public ; ce qui ne peut que justifier aux yeux de la nouvelle majorite l'abandon de cette procedure au nom du liberalisme et de la transparence, et en permettant ala Cinq de continuer a emettre, il debarrasse le gouver­nement de l'epineux probleme de l'interim entre une chaine privee de base legale et une loi encore a venir. JeroineSeydoux demandera, le jour meme de l'arret du Conseil d'Etat, un rendez-vous a Philippe Leotard, ministre de la Culture et de la communi­cation pour renegocier le regime de diffusion. Cet appel fut reformule a plusieurs reprises sans succes. Le gouvernement n'etait pas presse evidemment que la Cinq soit de nou­veau en mesure de diffuser des films. II esperait que cette privation eritrai­nerait une perte d'audience de 'la Cinq, reduisant du meme couples indem­nites en cas de resiliation. En fait, les chases ne se sont pa~ derpulees de cette fas:on; contre toute _attente, la Cinq a reussi }'exploit d'augmenter considerablement son taux d'audience. Des taux de 7% ont ete enregistres pendant les mois de juillet et aout 1986 (3% au printemps). La Cinq s'etait positionnee aupres des telespectateurs comme une chaine de varietes, de jeux et de films. Cinter­diction de diffuser des films jointe aux vacances des animateurs durant l'ete, a oblige les dirigeants de la chaine a se limiter aux series americaines. Ce changement de creneau a obtenu un succes inattendu. A Ia rentree, la Cinq, connaissant quelques difficultes financieres suite au desinteret des

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publicitaires, abandonna sa politique des programmes a grand spectacle. Le decret du 30 juillet 1986 (2) portant resiliation de la concession provo­qua, en effet, nombre d'annulations de commande publicitaire. (Les com­mandes publicitaires sont passees de 430 millions a 350 millions). La Cinq entama de nouvelles negociations avec le B.L.I.C. a propos de la diffusion de films. Les parties parvinrent a un accord qui fut enterine par le Ministre de la Culture et de la communication le 24 octobre 1986. Cet enterine­ment s'effectua par simple lettre aux responsables de la chaine afin d'eviter une nouvelle redaction du cahier des charges de la Cinq qui doit etre reattribuee a de nouveaux operateurs en fevrier 1987. Les modalites de diffusion desormais imposees a la cinquieme chaine s'alignent sur les regles des chaines publiques (grille de programmation, delais de diffusion des films, quotas de films fran~ais). La chaine s'engage

. a ne diffuser que 192 films par an au lieu de 250 prevus initialement et a consacrer au moins 10,4% de ses ressources a l'achat de films. Cet engage­ment de la Cinq sera maintenu si celle-ci triomphe lors de }'attribution des frequences en fevrier 1987. L'accord intervenu entre les parties est le resul­tat de concessions reciproques: le B.L.I.C. avait tout interet a accepter les negociations car la Cinq s~ trouvait a la tete d'un lot de films dont elle avait regie 50% des droits seulement a la reservation, le solde devant etre verse ala diffusion ... Les dirigeants de la chaine ontaccepte, quanta eux, de se plier aux exigences du B.L.I.C. afin de pouvoir maintenir leur taux d'audience. En effet, les series americaines pouvaient concurrencer sans trop de malles programmes de vacances des chaines puliques durant l'ete; mais ala rentree, la Cinq aurait connu quelques difficultes a conserver un taux d'audience de 7% sans le cinema. Ce taux d'audience est primordial pour la Cinq : il sera pris en consideration lors du calcul des indemnites si elle perd la concession et il constituera un argument de legitimite aux yeux de la C.N.C.L. chargee de redistribuer les deux chaineS privees, la Cinq et TV 6.

I. Nouveau projet de loi sur l'audiovisuel.

Le Conseil des ministres adopta le 11 juin 1986 le nouveau projet de loi sur l'audiovisuel. Ce projet simplifie le cadre juridique des televisions privees. II ne maintient en effet que deux regimes juridiques : la declaration prealable pour les services de communication audiovisuelle distribues par d.ble autres que les services de television et de radiodiffusion, exemple : telematique interacti­ve, television en circuit ferme (hotel); l'autorisation de la Commission nationale de la communication et des libertes (qui remplacera la Haute

(2) Voir page 17.

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Autorite) pour tousles autres services, television par voie hertzienne locale ou npn et par cable. 11 justifie le maintien d'une legislation en la matiere en raison des contrain­tes techniques telles que la rarete des frequences, et de la necessite de veiller au respect de l'ordre public et au bon fonctionnement des services publics. Pour les services par voie hertzienne, la commission disposera de bandes de frequences qui lui seront affectees par decision du Premier Ministre, elle autorisera l'usage des frequences. 11 sera prevu une procedure de mise en concurrence des candidats de ma­niere a respecter l'egalite de traitement et de veiller a leur publicite pour les services de radiodiffusion sonore et de television par voie hertzienne. Des criteres tels que !'experience, la capacite financiere, !'effort de creation devront etre retenus dans le choix du candidat. La Commission nationale de la communication et des libertes attribuera par une decision unique le droit d'usage d'une frequence et autorisera le fonctionnement du service de communication. Le regime d' autorisation vaudra done pour to us les services hertziens lo­caux ou nationaux. La concession de service public est ecartee, "elle donnerait a l'Etat conce­dant des pouvoirs de libre choix du concessionnaire qui iraient a l'encontre de l'objectif de mise en concurrence "ouverte" des operateurs. Elle consti­tuerait une exception peu justifiable au bloc des competences de la conces­sion, enfin, plus fondamentalement, les activites de radiodiffusion et de television ne sont pas considerees comme relevant par elles-memes du ser­vice public, meme si elles peuvent comporter des missions d'interet gene­ral''. (Expose des motifs du projet adopte le 11 juin 1986 par le Conseil des ministres. ) Ce projet prevoyait la resiliation des contrats de la Cinq et de TV 6 "oc­troyes dans des conditions de precipitation et d'arbitraire". Article 103: "les concessions accordees en application de !'article 79 de la loi du 29 juillet 1982 pour }'exploitation de service de television, dont le finance­ment ne fait pas appel a la remuneration de la part des usagers, sont resilies de plein droit a la date de publication de la presente loi. Cette resiliation ouvre le droit a l'indemnisation du prejudice eventuellement subi par le concessionnaire." La concession de Canal plus sera maintenue, car cette chaine est "financee par des contributions des usagers conformement aux principes generaux du droit des concessions". Un decret fixera les obligations generales auxquelles sera soumise !'exploi­tation des services autorises par voie hertzienne. Les obligations particulie­res seront determinees par la C.N.C.L. La C.N.C.L. retirera ou suspendra les autorisations en cas de manquement grave et saisira le juge administra­tif si necessaire. Les services de radio et television par cable recevront leur autorisation sur proposition des communes ou groupes de communes de la

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C.N.C.L. Cependant, les conditions de procedure seront fixees ulterieure­ment par decret car les questions techniques se posent differemment. Le projet prevoit un plafond (20%) pour la part du capital des societes titulaires d'une autorisation qui pourra etre detenue par des personnes physiques ou morales etrangeres. La fixation de ce plafond vise a eviter desormais la constitution de societe titulaire d'une autorisation de teledif­fusion du type "France 5", ou la Fininvest, holding italien de Monsieur Berlusconi, detient 40% des parts. Cette disposition telle qu'elle est redigee, a l'etat de projet, est susceptible d'etre interpretee comme une violation du Traite de Rome puisqu'elle n'in­troduit aucune distinction entre les personnes morales ou physiques etran­geres et europeennes, ni meme de reserve quant aux engagements interna­tionaux de la France (3 ). Aucune personne ne pourra detenir plus de 25% du capital d'une societe titulaire (idem). Le projet prevoit la privatisation de TF 1. L'Etat sera autorise a ceder au secteur prive le capital de TF 1 (10% aux salaries, 40% feront l'objet d'un appel public a l'epargne, 50% seront cedes a un groupe d'acquereurs de­signe par la C.N.C.L.).

§ 3. MORT DE LA CINQ?

A. Loi du .30 septembre 1986 portant reforme de l'audiovisuel et les de­crets du 30 juillet 1986 portant resiliation de Ia Cinq et de TV 6.

Le Senat adopta le projet gouvernementalle 24 juillet 1986. Ill'amenda considerablement notamment sur la composition et le role des delegations parlementaires, sur !'existence du Conseil national de l'audiovisuel, sur certains points concernant la privatisation de TF 1 et enfin sur la resilia­tion des concessions de la Cinq et de TV 6 et du maintien de Canal plus. Le Senat considera qu'il n'appartenait pas au Iegislateur de decider du maintien ou de la resiliation des concessions. II n'etait pas non plus favorable a une discrimination entre la chaine cryp­tee et les deux autres chaines. Le gouvernement retira les deux articles portant resiliation de la Cinq et de TV 6, se laissant ainsi la responsabilite de les denoncer par decret. Le 30 juillet 1986, le gouvernement prit deux decrets portant resiliation des concessions de la Cinq et de TV 6. lis furent publies au Journal Offi­ciel le 2 aout 1986. L'artide premier de ces deux decrets precise: "la concession accordee ala societe pour I' exploitation du service de television

(3) II faut noter que cet article a ete revu dans ce sens: I' article 40 de Ia loi sur Ia liberte de communication promulguee le 30 septembre 1986 est redige comme suit: "sous reserve des engagements internationaux souscrits par Ia France, aucune personne de nationalite etrange-re ... ".

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par voie hertzienne est resiliee dans les conditions prevues au traite, a compter de !'expiration du troisieme mois suivant la date d'installation de la ·nouvelle autorite qui aura competence pour delivrer les autorisations d'usage de frequences". Les dirigeants de la sixieme chaine deposerent un recours au Conseil d'Etat contre le decret du 30 juillet 1986. La societe France 5 lui emboita le pas le 26 septembre 1986. Ils invoquerent essentiellement deux moyens d'ille­galite: les decrets du 30 juillet 1986 sont illegaux car ils font reference a un texte non encore vote. La loi relative a la liberte de la communication instituant la C.N.C.L. (4) n'a ete adoptee que le 12 aout 1986 (promulgu­ee le 30 septembre 1986). Ces decrets portant resiliation des concessions ne respectent pas les clauses d'annulation prevues aux contrats de conces­sion aux cahiers des charges. En octobre 1986, des editeurs musicaux -(Arena, Pathe Marconi, E.M.I., Scorpio Mllsic) introduisirent un recours en annulation pour exd:s de pouvoir contre le decret du 30 juillet 1986 relatif a Ia resiliation de TV 6. Le Conseil d'Etat se pronons:a le 2 fevrier 1987 sur les differents re­cours (5). Suivant les conclusions du commissaire du gouvernement, il annula le decret du 30 juillet 1986 portant resiliation de TV 6 et se declara incom­petent pour connaitre du recours de la societe France 5. Une des condi­tions de recevabilite du recours au Conseil d'Etat est, en effet, !'absence de recours parallele. Or, dans le cadre du contrat de concession de la Cinq et de TV 6, c'est le tribunal administratif qui doit trancher les differends opposant l'Etat a ses concessionnaires. Le Conseil d'Etat, competent pour connaitre du recours en annulation des editeurs musicaux contre le decret d.u 30 juillet 1986 portant resiliation de TV 6, examina neanmoins au fond -le recours depose par TV 6 etant donne le lien de connexite entre les deux recours. Le Conseil d'Etat rappela que le pouvoir de resiliation est une prerogative normale de l'Etat et qu'il peut l'exercer en dehors des clauses prevues. Cependant, il precisa que l'autorite ne peut retirer Ia concession que pour des motifs d'interet general justifiant a Ia date a laquelle elle prend sa decision que !'exploitation du service concede doit etre abandonne. Le gouvernement, en l'espece, s'etait appuye dans son decret de resiliation sur un texte de loi modifiant certes le paysage audiovisuel, mais non encore vote ni promulgue. Le Conseil d'Etat a done estime que ce motif ne pou­vait etre retenu. Il ne restait done plus au gouvernement qu'a adopter un nouveau decret de resiliation de la concession de TV 6 avant le 28 fevrier 1987, date de cessation de Ia concession initialement prevue. En ce qui

(4) Voir page 15. (5) CE. Ass. 2 fevrier 1987: Aff. Societe TV 6, Scorpion Music, Arena, Pathe Marconi, E.M.I. Aff. Societe France 5. Revue francyaise de droit administratif- 3- 1987- Janvier­Fevrier, p. 41-42.

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concerne la Cinq, le gouvernement n'attendit pas la decision du tribunal administratif pour prendre un nouveau decret etant donne la similitude des deux affaires. L' Assemblee N ationale adopt a le pro jet de loi relatif a la liberte de com­munication le 13 aout 1986. Le gouvernement engagea une nouvelle fois sa responsabilite sur base de !'article 49 § 3 de la Constitution estimant que le pro jet avait deja ete discute suffisamment au Senat .( 180 heures de debats, 1836 amendements). Le Ministre de la Culture et de la communi­cation reussit !'exploit de faire adopter par l'Assemblee Nationale six amendements retablissant son texte initial. 11 parvient a faire admettre la vente au plus offrant de TF 1, la suppression du plafonnement a 5% de la duree des films des interruptions publicitaires, le plafonnement des recettes des chaines publiques a compter de 1987 pour trois ans, la suppression du C.N.C.A. Le 18 aout 1986, 80 deputes socialistes saisissent le Conseil constitution­nel. Ils font valoir principalement quatre griefs a l'encontre de cette loi. Ils estiment inconstitutionnelles les dispositions concernant le remplace­ment de la Haute Autorite par la Commission nationale de la communica­tion et des libertes, le regime des autorisations d'utilisation des frequences hertziennes, la privatisation de TF 1 et les dispositions destinees a garantir le respect du pluralisme de la communication.

1. Le remplacement de Ia Haute Autorite par Ia C.N.C.L.

Les socialistes pretendent que si le legislateur est en droit de modifier la denomination de la Haute Autorite, de changer sa composition ou de modifier ses attributions, il ne lui appartient pas de mettre fin au mandat des membres de cette Haute Autorite. Que signifie, en effet, l'independan­ce declaree d'une institution si les membres y sont remplaces au gre des alternances politiques ? Le Conseil constitutionnel estima conforme a la Constitution la decision de mettre fin, au moment de la substitution de la Haute Autorite par la C.N.C.L., au mandat des membres de la Haute Autorite. "II est a tout moment loisible au legislateur' statuant dans le domaine qui lui est reserve par !'article 34 de la Constitution, de modifier des textes anterieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant le cas echeant d'autres dispositions; ( ... ). Que cependant, l'exercice de ce pouvoir ne saurait aboutir a priver de garanties legales des exigences de caractere constitutionnel." "Considerant que I a substitution ala Haute Autorite ( ... ) de la C.N.C.L. n'a pas, a elle seule, pour effet depriver de garanties legales des exigences de caractere constitutionnel". (Decision du Conseil constitutionnel du 18 septembre 1986 n° 217 DC­Actualite juridique- Droit administration- 20 fevrier 1987, page 102.)

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2. Le regime juridique d'utilisation des frequences hertziennes.

Les fn!quences hertziennes, selon le Parti socialiste, constituent un bien fini et limite appartenant au domaine public. Cette appartenance au do­maine public decoule de la rarete des frequences hertziennes jointe au fait que le developpement de la television par voie hertzienne interesse au plus haut point l'exercice des libertes publiques. De sorte qu'a ce mode de communication, service public par nature, ne peut etre applique un regime d'autorisation administrative exclusif de !'ap­plication des regles du service public. Seul le regime de concession de service public satisfait a ces exigences d'interet general. Le Conseil constitutionnel mit fin aux polemiques doctrinales en declarant que ce mode de communication ne constitue pas par nature une activite de service public: "Considerant qu'il appartient au legislateur competent en vertu de !'article 34 de la Constitution pour fixer les regles concernant les garanties fondamentales accordees aux citoyens pour l'exercice des libertes publiques, de concilier, en l'etat actuel des techniques et de leur ma!trise, l'exercice de la liberte de communication telle qu'elle resulte de !'article 11 de la Declaration des Droits de l'Homme, avec d'une part, les contraintes techniques inherentes aux moyens de la communication audiovisuelle et d'autre part les objectifs de valeur constitutionnelle que sont la sauvegarde de l'ordre public, le respect de la liberte d'autrui et la preservation du caractere pluraliste des courants d'expression socio-culturels auxquels ces modes de communication, par leur influence considerable, sont suscepti­bles de porter atteinte ;" (Decision du Conseil constitutionnel du 18 sep­tembre 1986 no 86- 217 DC, op cite, page 103 ). "Considerant que pour la realisation ou la conciliation de ces objectifs, le legislateur n'est pas tenu de soumettre !'ensemble de la television par voie hertzienne au regime juridique applicable aux services publics ni d'adopter un regime de conces­sion; qu'en effet, ce mode de communication ne constitue pas une activite de service public ayant son fondement dans des dispositions constitution­nelles; que par la suite et quelle que soit la nature juridique de l'espace hertzien, il est loisible au legislateur de soumettre le secteur prive de la communication audiovisuelle a un regime d'autorisation administrative sous reserve d'assurer la garantie des objectifs de valeur constitutionnelle ci-dessus rappeles". (Decision du Conseil constitutionnel du 18 septembre 1986 n° 86- 217 D C, op cite, page 103.)

3. La privatisation de TF 1.

Les socialistes estiment non conforme ala Constitution la privatisation de TF 1 operee hors le cadre de la concession de service public. Le Conseil constitutionnel apres avoir rappele !'argumentation developpee a propos du regime juridique des frequences hertziennes, va declarer la cession de TF 1 au prive conforme a la Constitution.

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4. Le pluralisme de la communication audiovisuelle.

Les deputes socialistes jugent insuffisantes et imprecises les dispositions de la loi destinees a garantir le pluralisme de la communication audiovisuelle, objectif de valeur constitutionnelle. lis visent essentiellement }'absence de regles destinees a limiter la "concentration multimedia". L'article 39 ne prevoit de limitation en matiere de participation au capital d'une societe privee titulaire d'une autorisation qu'au sein d'une meme societe. Cet article ne rencontre pas !'hypothese de la participation d'une meme personne dans plusieurs societes titulaires chacune d'une autorisa­tion relative a un service de television par voie hertzienne desservant !'en­semble du territoire. L'article 41 qui interdit a un meme operateur decreer ou d'acquerir deux chaines de television dans une meme zone geographi­que, peche egalement par son insuffisance. En effet, un meme operateur pourra creer ou acquerir plusieurs chaines s'il prend le soin d'agir dans des zones differentes. Cette fois, le Conseil con­stitutionnel se rallia a la these des deputes relative au controle des concen­trations. II jugea les articles 39 et 41 non conformes a la Constitution. Les articles 28 a 31 furent juges inseparables des articles 39 et41. Ces articles definissent les conditions dans lesquelles les autorisations de radiodiffusion et de television sont accordees au secteur prive. La C.N.C.L. ne serait en effet pas a meme du fait des insuffisances de la loi relative au controle des concentrations de faire pleinement droit a l'exi­gence constitutionnelle de limitation des concentrations. Le Conseil constitutionnel decida de ne pas abroger les articles de la loi du 29 juillet 1982 relatifs a la Haute Autorite afin d'eviter !'apparition d'un vide juridique decoulant de la suppression des articles relatifs a la concen­tration et au pluralisme. La Haute Autorite aurait done du demeurer tem­porairement en place aux cotes de la C.N.C.L. en assurant certaines mis­sions comme les attributions d'autorisation d'emettre aux radios et aux televisions locales jusqu'a !'abrogation de la loi de 1982. Cependant, le gouvernement prit un decret le 29 septembre 1986 portant cessation des fonctions de la Haute Autorite a dater de !'installation de la C.N.C.L. Le 12 novembre 1986, date d'installation de la C.N.C.L., la Haute Auto­rite disparaissait officiellement. Le gouvernement a agi de la sorte dans le but d'eviter que les deux instan­ces aient a sieger cote a cote pendant plusieurs semaines. De plus, deux des membres de la Haute Autorite ont ete designes pour faire partie de la nouvelle instance (Gabriel de Broglie, Jean Aubin). La loi, amputee des dispositions declarees non conformes a la Constitution par la decision du 18 septembre 1986 du Conseil constitutionnel, fut promulguee le 30 sep­tembre 1986. Le Conseil des Ministres adopta le 1er octobre 1986 le projet de loi anti-concentration reprenant les diverses dispositions invali­dees par le Conseil constitutionnel.

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Le texte fut vote le 8 novembre 1986. II fut promulgue le 27 novembre 1986 soit le dernier jour utile du delai constitutionnel. Le President a done utilise tout le delai qui lui etait imparti pour examiner les nouvelles dispo­sitions. Les articles 39 et 41 furent revus et corriges dans le sens preconise par le Conseil constitutionnel. (Voir page 20 : a contrario les griefs formu­les par le Conseil constitutionnel).

B. Attribution de Ia cinquieme chaine.

Le 26 janvier 1987, le gouvernement adopta deux decrets en execution de l'artide 27-1 de la loi relative ala liberte de communication. Ces decrets ont pour objet de determiner pour !'exploitation de certains services de television (diffuses par voie hertzienne, terrestre ou par satellite), les regles applicables a la publicite, au parrainage et le regime de diffusion des oeu­vres cinematographiques et audiovisuelles. Ces decrets limitent a 192 par an les oeuvres cinematographiques qui peuvent etre diffusees par les cha1-

. nes privees. Le nombre de diffusions avant 22 h 30 ne peut depasse_r 144. Ces limitations s'entendent de !'ensemble des diffusions et rediffusions de quelque nature qu'elles soient. lis portent !'interdiction· de diffuser des oeuvres cinematographiques le mercredi soir et le vendredi soir a !'exception des oeuvres de cine-dubs diffusees apres 22 h 30, le samedi toute la journee et le dimanche avant 20 h 30. lis fixent a trois ans le delai a respecter entre la diffusion du film et }'obten­tion du visa d'exploitation. Pour les oeuvres coproduites par les services de television, ce delai pourra etre negocie sans toutefois etre inferieur a deux ans. II est prevu cependant une possibilite de derogation accordee par le Ministre de la Culture et de la Communication, un delai de dix-huit mois restant incompressible. Les oeuvres cinematographiques et les oeuvres audiovisuelles diffusees de­vront pour 60% au mains d'entre elles etre d'origine communautaire et pour 50% au mains d'entre elles etre d'expression originale fran~aise. Le gouvernement pose egalement une serie de d:gles relatives a la publicite. Les messages publicitaires concernant les boissons alcoolisees de plus de 9 degres, l'edition litteraire, musicale, le cinema, la presse ecrite et la distri­bution sont interdits. L'obligation de programmation des spots publicitai­res dans des ecrans specialises est prevue. L'interruption des emissions par des ecrans publicitaires est autorisee. Toutefois, il est precise que lorsqu'une oeuvre cinematographique est interrompue par un ecran publi­citaire, celui-ci ne pourra comporter des messages d'une duree totale supe­rieure a six minutes. Les decrets reglementent en outre le parrainage des emissions. Ce regime se differencie de celui impose ala Cinq par le cahier des charges de janvier 1986.

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On se rappellera en effet que le cahier des charges autorisait la Cinq a diffuser des oeuvres cinematographiques le samedi et le dimanche avant 14 heures. Le delai de diffusion des films etait fixe a 24 mois jusqu'en 1990. Les quotas (de 50% et 60% d'oeuvres provenant de la Communaute eco­nomique europeenne) n'etaient effectifs qu'a la fin du cinquieme exercice. La Cinq etait autorisee a diffuser a partir du 31 decembre 1987 de la publicite pour les secteurs de la presse et de la distribution. La C.N.C.L. prit deux decisions le 15 janvier 1987 fixant l'une les regles generales applicables aux services de television prives a vocation nationale diffuses en clair par voie hertzienne terrestre, !'autre les obligations parti­culieres applicables aux memes services de television prives (Journal Offi­ciel du 27 janvier 1987). La cinquieme et la sixieme chaine sont soumises aux obligations generales de programmation suivantes : diffuser un pourcentage de programmes d'expression originale franc;aise atteignant 30% des la premiere annee et 50% a partir de la troisieme, a partir de la troisieme annee 60% des oeuvres audiovisuelles diffusees doivent emaner des Etats membres de la Communaute economique europeenne. La societe d'exploitation d'un service de television prive doit consacrer 15% de son chiffre d'affaires ala production d'oeuvres d'expression origi­nale franc;aise (fiction, animation, documentaires de creation, programmes de recherche et de creation). En ce qui concerne les obligations particulieres, il est prevu que la societe do it assurer un service quotidien de 10 heures au minimum de program­mes propres. Cette duree ne comprend pas la diffusion repetee du meme programme dit "en boucle". La societe doit programmer et faire diffuser a partir de la seconde annee, un volume annuel minimum de 300 heures d'emissions d'expression origi­nale franc;aise en premiere diffusion en France, consacrees a des oeuvres de fiction et a des documentaires. La societe est tenue de programmer des emissions consacrees a la science, a !'education et a la formation ainsi qu'aux arts et aux spectacles vivants (et notamment douze spectacles dra­matiques, lyriques ou choregraphiques au moins par an). Le temps consacre a la diffusion de messages publicitaires ne peut etre superieur a neuf minutes par heure d'antenne en moyenne quotidienne sans pouvoir depasser douze minutes pour une heure donnee. Ces differentes mesures tant generales que particulieres traduisent trois preoccupations essentielles de la C.N.C.L.: la protection du secteur fran­c;ais de la creation audiovisuelle, la preservation de l'identite nationale des chaines et la delimitation de la publicite. Un premier appel d'offre aux candidatures de la cinquieme et sixieme chaine fut publie le 28 janvier 1987 au Journal Officiel ainsi que la liste des frequences disponibles. Le depot des dossiers etait prevu pour le 9 fevrier 1987. Cependant, l'annulation par le Conseil d'Etat, le 2 fevrier

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1987' du decret du 30 juillet 1986 portant resiliation de la concession de TV 6, remit tout en question. En effet, le premier appel d'offre fut invalide, les frequences de TV 6 n'auraient pas du etre considerees comme vacantes. Ce n'est qu'apres la publication au Journal Officiel le 3 fevrier 1987 de deux nouveaux decrets du 2 fevrier 1987 annulant les concessions de la Cinq et de TV 6, qu'un nouvel appel d'offre put etre valablement lance; le depot des dossiers fut postpose d'un jour. Le 10 fevrier 19 87, sept dossiers de candidatures furent deposes a la C.N.C.L., deux pour la cinquieme chaine et cinq pour la sixieme chaine. Les deux candidats pour !'exploitation de la cinquieme chaine etaient la Societe d'exploitation de Ia cinquieme chaine (Groupe Hersant 25%, Groupe Berlusconi 25%, Mutuelles agricoles 15%, Groupe Chargeurs (Je­rome Seydoux) 10%, Societe Centrale d'investissement 5%, Credit Lyon­nais 5%, Les Echos 5%, Videotron (Canada) 3%, Union industrielle de Credit 2°/o, Expor 1%) et Occidentale media T.V. (Generale occidentale (Jimmy Goldsmith, proprietaire de !'Express) 25%, David de Rothschild et associes 25%, Compagnie du Midi 25%, Packer (Groupe australien) 20% et MM. Worms et Cie 5%). Pour !'exploitation de la sixieme chaine, la C.N.C.L. res:ut les dossiers suivants: Metropole T.V. (C.L.T. - Lyonnaise des eaux), TV 6 (Publi­cis, Gaumont, N.R.J.), Canal Plus Junior (Canal Plus), Capital T.V. (pro­jet de chaine parisienne assume par Frans:ois ·Bacon et Michel Jaubert), T.F.M. (U.G.C. et trois maisons de disques). La C.N.C.L. a procede a !'audition des candidats dont une partie s'est deroulee en public. Le 23 fevrier 1987, elle attribua la cinquieme chaine a la Societe d'exploi­tation de la cinquieme chaine (Hersant-Berlusconi-Seydoux) et la sixieme chaine a !'association C.L.T.-Lyonnaise des eaux. L'examen des alliances et desalliances des differents candidats aux reseaux prives pourrait a lui seul constituer I' objet d'une etude; mentionnons seulement le volte-face de Robert Hersant, qui s'etait toujours porte candidat a la reprise de TF 1 depuis l'annonce de sa privatisation. II semblerait que Matignon ne soit pas etranger a ce revirement de Robert Hersant qui pretendit quant a lui que la reprise de la premiere chaine exigeait un investissement trop lourd. Apres les evenements sociaux des derniers mois (manifestation des etudi­ants, greve des cheminots ... ), le gouvernement a prefere eviter le toile qu'aurait immanquablement souleve !'attribution de TF 1 a Robert Her­sant. En !'incitant a postuler pour la cinquieme chaine en association avec le tandem Berlusconi-Seydoux, il gagnait sur les deux tableaux: il eludait l'epineuse question du versement des indemnites aux anciens proprietaires de la chaine tout en donnant satisfaction a Robert Hersant.

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CONCLUSION.

"La Saga de Ia Cinq" abonde en coups de theatre et en rebondissements. Mais elle est revelatrice egalement d'un grand nombre d'erreurs juridiques qui sont le fait tant de Ia gauche que de Ia droite. Curieusement, les er­reurs, Ia precipitation d'avant mars 1986 pourtant denoncees violemment a l'epoque, se renouvelent avec autant de legerete sous Ia nouvelle majori­te. On ne peut que legitimement s'interroger sur cette accumulation d'inci­dents juridiques, de recours, de decisions des plus hautes juridictions fran­<_;:aises, Conseil d'Etat, Conseil constitutionnel. 11 nous paralt que cet im­broglio juridique est le reflet de cette fameuse fascination de Ia television sur les hommes politiques a laquelle nous avons fait allusion dans !'intro­duction. Ces derniers utilisent le droit, les lois, dispositions de nature generale et permanente pour habiller leur volonte politique du moment, particuliere et temporaire par definition. Cet amalgame peut se reveler reussi et par consequent hors d'atteinte lorsqu'il est pense, reflechi et analyse sous tous ses ·angles. Cependant, realise dans Ia precipitation et depourvu de reel fondement, il ne peut resister bien longtemps aux critiques. Les hommes politiques veulent a tout prix leur television. Ils sont prets pour ce faire a remanier sans cesse les regles juridiques regissant le paysage audiovisuel au risque de perdre toute credibilite. La loi du 30 septembre 1986 relative ala liberte de Ia communication n'est pas moins que Ia sixieme reforme d'ensemble du statut de l'audiovisuel depuis 1959! ( 6). 11 est interessant de noter que c'est pratiquement dans tous les cas une des premieres choses a laquelle se consacre Ia majorite nouvellement elue. (Exemple: Ies reformes de 1974, 1982, 1986). Cette "manie" de l'empressement traduit le souci quasi obsessionnel du monde politique de s'assurer le controle de Ia television avant tout au detriment de questions plus fondamentales pour le gouvernement du pays. La reforme de 1986 est a cet egard particulierement riche d'enseignement; !'ex-opposition quelque peu aigrie de ne pas avoir ete la premiere a libera­liser les ondes, mais surtout profondement vexee par !'episode de Ia Tour Eiffel se lance apres mars 1986, dans une serie de privatisations et refor­mes dont on n'aper<_;:oit guere les motivations d'interet general. Le paysage audiovisuel doit obligatoirement changer de visage ! On lui donne de nouveaux personnages dont les noms pompeux rivalisent entre eux tels que Ia Haute Autorite de Ia communication audiovisuelle, le Conseil national de l'audiovisuel et de Ia communication, puis on les rem­place par d'autres comme par exemple Ia Commission nationale de Ia

( 6) L'Actualite juridique- Droit administratif- 20 fevrier 1987, p. 59. "Le nouveau statut de la liberte de communication", J. Chevalier.

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communication et des libertes. Ces "nouveaux personnages" sont presentes comme les gardiens de l'independance de la television charges de la preser­ver contre toute influence politique. Or, on constate tres vite qu'en fait, ces gardiens sont aussi des instruments destines a canaliser ces influences. Les exemples sont nombreux; celui des nominations des presidents dire£­teurs generaux des societes nationales de television fran<;aise est tres reve­lateur que ce soit pour la Haute Autorite ou pour la C.N.C.L. D'ailleurs, on peut s'interroger egalement a propos du but apparemment paradoxa! qui poursuit le monde politique en voulant tout a Ia fois libera­liser la television et en conserver le controle. 11 semblerait que la liberalisa­tion, sujet a la mode dans Ia plupart des pays europeens, soit devenue le plus sur moyen de s'approprier une television. Pour se debarrasser d'un directeur de chaine nationale nomme par l'ex-majorite, il suffit dele limo­ger. Autre chose est de s'attaquer a une societe titulaire d'une autorisation d'exploitation d'une chaine privee ! Silvio Berlusconi en est Ia preuve vi­vante! Et le groupe Hersant ne tardera pas a en faire Ia brillante demon­stration ...

CHRONOLOGIE

4 janvier 1985

5 janvier 1985

14 janvier 1985

16 janvier 1985

20 mai 1985

31 juillet 1985

1er aout 1985

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: Le President de Ia Republique, Fran~ois Mitterrand, se declare favo­rable a l'ouverture de l'espace audiovisuel aux televisions privees.

: Le Premier Ministre, Laurent Fabius, annonce que les cahiers des charges des chaines privees seraient au mains aussi favorables au cinema et a l'industrie des programmes que ceux des chaines publi­ques.

:Le Premier Ministre, Laurent Fabius, charge J.D. Bredin de faire rapport sur Ia mise en place des chaines privees.

: Le President de Ia Republique, Fran~ois Mitterrand, confirme Ia creation prochaine de televisions privees. 11 est question de deux chaines nationales privees et de 70 a 80 televisions locales.

:J.D. Bredin remet son rapport. 11 estime qu'il y a place pour deux chaines nationales privees et quelques dizaines de stations locales.

:A !'issue du Conseil des Ministres, Georges Fillioud, Secretaire d'Etat charge des Techniques de Ia communication, annonce que le gouvernement offre "a qui voudra les exploiter les frequences dispo­nibles sur le territoire". Deux chaines seront creees, l'une musicale et !'autre generaliste pour le debut 1986 et 40 chaines locales.

: T.D.F. (etablissement public de diffusion) rend publique Ia liste des frequences disponibles pour les futures televisions privees dans les 62 agglomerations les plus importantes de France.

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2 octobre 1985

16 octobre 1985

25 octobre 1985

28 octobre 1985

31 octobre 1985

14 novembre 1985

15 novembre 1985

19 novembre 1985

20 novembre 1985

21 novembre 1985

22 novembre 1985

25 novembre 1985

27 novembre 1985

29 novembre 1985

: Le Conseil des Ministres adopte le projet de loi sur les telt~visions privees; la Haute Autorite delivrera les autorisations pour les televi­sions locales et T.D.F. conservera le monopole de diffusion.

: Le projet est adopte en premiere lecture a l'Assemblee Nationale.

:Jacques Rigaud, administrateur delegue de la C.L.T., candidat au reseau multiville, rappelle les accords d'octobre 1985; il craint que son reseau soit ecarte malgre !'accord d'octobre 1984 lui reservant deux des quatre canaux du satellite T.D.F. 1.

: Le tandem Silvio Berlusconi-Jerome Seydoux depose sa candidature a !'exploitation de la chaine privee generaliste au Secretaire d'Etat charge des Techniques de la communication.

: Le projet de television Seydoux-Berlusconi est rendu public.

:La C.L.T. propose a Europe 1 un projet de television commun.

:Georges Fillioud depose, lors du passage en seconde lecture a l'As­semblee Nationale du projet de loi sur les televisions privees, un amendement permettant a T.D.F. de "requisitionner" les hautes constructions (on vise Ia Tour Eiffel) pour y installer des emetteurs (ceux de la future cinquieme chaine).

:Georges Fillioud, Silvio Berlusconi et Jerome Seydoux signent un accord attribuant Ia cinquieme chaine a ces derniers.

:Georges Fillioud annonce officiellement les termes de ]'accord avec le groupe Berlusconi ainsi que !'attribution de canaux du satellite T.D.F. 1. Jacques Chirac declare qu'une des premieres mesures que prendra !'opposition si elle remporte les elections de mars 1986 sera l'annulation de la concession de la Cinq accordee au groupe Berlus­coni.

: Frans:ois Mitterrand tient une conference de presse. 11 annonce ]'at­tribution de la concession de la Cinq a !'association Berlusconi-Sey­doux.

:Jerome Seydoux, P.D.G. de Ia Cinq tient une premiere conference de presse. 11 invite le monde de la presse ecrite a prendre des partici­pations dans le capital de Ia Cinq.

:Jacques Rigaud, administrateur delegue de la C.L.T., annonce le depot d'un recours au Conseil d'Etat contre ]'attribution de la con­cession de Ia cinquieme chaine au groupe Berlusconi-Seydoux.

:La Haute Autorite de la communication audiovisuelle formule di­verses critiques a propos de !'attribution de Ia cinquieme chaine et revendique un droit de regard sur !'attribution des chaines nationa­les privees.

: L'Assemblee Nationale adopte en troisieme lecture le projet de loi sur les televisions privees. Les senateurs de !'opposition (Charles Pasqua en tete) saisissent le Conseil constitutionnel.

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2 decembre 1985

13 decembre 1985

23 decembre 1985

24 decembre 1985

27 decembre 1985

30 decembre 1985

31 decembre 1985

7 janvier 1986

13 janvier 1986

15 janvier 1986

16 janvier 1986

17 janvier 1986

18 janvier 1986

20 janvier 1986

21 janvier 1986

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: Le contrat de concession et le cahier des charges de la Cinq sont rendus publics.

:Promulgation de la loi sur les televisions privees. Le Conseil consti­tutionnel declare non conforme a la Constitution l'amendement Tour Eiffel.

:Promulgation de la loi instituant une servitude d'utilite publique suite a l'arret du Conseil constitutionnel.

: Decret pris en application de la loi du 23 decembre 1985.

: Le B.L.I.C. et les Societes d'auteurs deposent des recours au Conseil d'Etat contre !'attribution de Ia cinquieme chaine a !'association Sey­doux-Berlusconi.

: Le gouvernement annonce sa volonte de modifier les documents de la concession de la cinquieme chaine (contrat de concession et ca­hier des charges).

:F. Scroeller, P.D.G. de T.D.F. est convoque a la Haute Autorite a fin de s'expliquer a propos du pro jet de contrat de la Cinq.

: Decret no 86-20 pris en application de l'article 79 de la loi sur la communication audiovisuelle du 29 juillet 1982.

: Le Conseil d'administration de T.D.F. approuve le projet de con­vention de diffusion entre T.D.F. et la cinquieme chaine.

: Decret 86-72 portant modification du code de l'urbanisme. La Hau­te Autorite de Ia communication audiovisuelle rend un avis a propos du nouveau cahier des charges de Ia Cinq.

: T.D.F. et les responsables de la Cinq signent Ia convention de diffu­sion.

:Arrete de derogation au decret-loi du 12 novembre 1938 concernant la nationalite des concessionnaires de service public. Arrete autori­

. sant T.D.F. a mettre en oeuvre sur Ia Tour Eiffella servitude prevue a !'article 34-1 de la loi sur Ia communication audiovisuelle du 29 juillet 1982 (Loi du 23 decembre 1985).

: Decret approuvant les nouveaux documents de Ia concession de ser­vice public accorde a la Cinq (contrat de concession et cahier des charges).

:- Jour "]" du lancement de Ia campagne publicitaire de Ia Cinq. - Le Prefet de Paris prend un arrete permettant a T.D.F. d'installer

a sa convenance les emetteurs au sommet de la Tour Eiffel.

Intervention des forces de l'ordre pour permettre a T.D.F. de commencer les travaux.

- La societe d'exploitation de la Tour Eiffel depose un recours au tribunal administratif.

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22 janvier 1986

23 janvier 1986

24 janvier 1986

29 janvier 1986

8 fevrier 1986

14 fevrier 1986

18 fevrier 1986

19 fevrier 1986

20 fevrier 1986

21 fevrier 1986

11 mars 1986

14 mars 1986

16 mars 1986

4 avril 1986

11 avril 1986

16 avril 1986

- La C.L.T. depose un recours au Conseil d'Etat contre les nou­veaux documents de la concession de Ia Cinq.

: Diverses societes de producteurs deposent un recours au Conseil d'Etat contre les nouveaux documents de la concession de la Cinq.

: Les societes d'auteurs deposent un recours au Conseil d'Etat.

:Canal 5 et J. Bessis font de meme.

: Annonce de !'attribution de la sixieme chaine au groupe Gaumo~t, Publicis, N.R.J.

:Signature de Ia nouvelle convention entre T.D.F. et France 5.

: Le capital de la societe France 5, titulaire de Ia concession de Ia Cinq, est constitue.

Decret approuvant un avenant au cahier des charges de la Cinq (nouvel article 4 ).

- Arrete approuvant la nouvelle convention entre T.D.F. et France 5.

:La Haute Autorite rend un avis a propos du cahier des charges de T.V. 6.

:La Cinq commence a diffuser ses programmes.

:Signature du contrat de concession de T.V. 6.

: Le gouvernement boucle le dossier T.D.F. 1 - deux canaux sont attribues au Consortium europeen. - un a la Cinq . - un a la Sept.

: Decret relatif aux services locaux de televisions privees par voie hertzienne. Decret fixant les cahiers des charges des televisions locales par voie hertzienne.

: Les elections legislatives sont remportees par la droite.

:La nouvelle majorite annonce Ia preparation d'un projet de loi sur l'audiovisuel: remise en cause des chaines creees par le gouverne­ment precedent; resiliation des contrats relatifs au satellite T.D.F. 1.

: Les conclusions du commissaire du gouvernement concernant les recours au Conseil d'Etat contre les divers documents de la conces­sion de service public de Ia Cinq sont rendues publiques.

: Le Conseil d'Etat rend un arret a propos de ces recours contre Ia concession de la Cinq. II annule !'article 4 du cahier des charges concernant Ia diffusion de films: la Cinq est privee de films!

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15 mai 1986

11 juin 1986

24 juillet 1986

30 juillet 1986

13 aout 1986

16 aout 1986

18 aout 1986

18 septembre 1986

24 septembre 1986

26 septembre 1986

29 septembre 1986

30 septembre 1986

1er octobre 1986

24 octobre 1986

27 novembre 1986

15 janvier 1987

26 janvier 1987

200

Jerome Seydoux reclame une entrevue avec Frans:ois Leotard, Mi­nistre de la Culture, pour renegocier le cahier des charges de la concession de Ia Cinq.

: Annonce de la decision de privatiser TF 1.

: Le Conseil des Ministres adopte un projet de loi sur l'audiovisuel. La suppression du regime de concession et la resiliation des conces­sions de la Cinq et de T.V. 6 sont prevues.

: Le pro jet est adopte au Senat apres de tres longs de bats ...

: Le gouvernement prend deux decrets portant resiliation des conces­sio~s de la Cinq et de T.V. 6.

:Adoption de la nouvelle loi sur l'audiovisuel.

: Premieres informations sur Ia Cinq.

: Les deputes socialistes saisissent le Conseil constitutionnel a propos de la nouvelle loi sur l'audiovisuel.

: Le Conseil constitutionnel rend sa decision. 11 declare non conforme a la Constitution certaines dispositions pour non respect du principe du pluralisme.

:La Cinq modifie sa grille de programme.

:France 5 introduit un recours au Conseil d'Etat contre le decret du 30 juillet 1986 portant resiliation de la concession de la Cinq.

:Arrete portant cessation de fonction de la Haute Autorite de la communication audiovisuelle.

:Promulgation de la loi relative a la liberte de communication.

: le Conseil des Ministres adopte le projet de loi anti-concentration.

: Le gouvernement approuve !'accord de France 5 et du B.L.I.C. en ce qui concerne le regime de diffusion de films sur Ia Cinq.

:Promulgation de la loi anti-concentration.

Decision n° 87-2 de la C.N.C.L. concernant les obligations parti­culieres applicables aux services de televisions privees a vocation nationale diffuses en clair par voie hertzienne terrestre.

- Decision 87-1 fixant les regles generales applicables aux services de televisions privees a vocation nationale diffuses en clair par voie hertzienne terrestre.

: Decret pris par application des articles 27-1 et 70 de la loi du 30 septembre 1986 relative a la liberte de communication et fixant pour certains services de television le regime des oeuvres cinemato­graphiques et audiovisuelles.

Page 31: La saga de Ia Cinq (suite et fin)...serait chargee d'attribuer les frequences, !'abrogation du regime des con cessions, Ia resiliation des contrats de Ia Cinq, de T.V. 6 et des contrats

26 janvier 1987

2 fevrier 1987

3 fevrier 1987

10 fevrier 1987

16, 17, 18 et 19 fevrier 1987

23 fevrier 1987

25 fevrier 1987

26 fevrier 1987

4 avril 1987

: Decret pris pour application de !'article 27-1 de Ia loi relative a Ia liberte de communication et fixant pour certains services de televi­sion le regime applicable a Ia publicite et au parrainage. - Decision n° 87-3 de Ia C.N.C.L. definissant les conditions techni­

ques d'usage des frequences pour Ia diffusion par Ia voie hertzien­ne terrestre des services de television.

- Decision n° 87-4 relative a un appel aux candidatures (cinquieme chaine).

- Decision no 87-5 relative a un appel aux candidatures (sixieme chaine).

- Le Conseil d'Etat annule le decret portant resiliation de Ia conces­sion de T.V. 6.

- Le gouvernement apres avoir retire le decret du 30 juillet 1986 portant resiliation de Ia concession de Ia Cinq prend deux nou­veaux decrets annul ant les concessions de Ia Cinq et de T.V. 6.

:Decisions no 87-6 et 87-7 relatives a un appel aux candidatures pour }'exploitation d'un service de television a vocation nationale diffuse en clair par voie hertzienne terrestre.

: Depot des candidatures pour les nouvelles chaines de television.

:La C.N.C.L. procede a l'audition des candidats.

:La C.N.C.L. attribue Ia cinquieme chaine a Ia Societe d'exploitation de Ia cinquieme chaine (Hersant, Berlusconi, Seydoux ... ) et Ia sixie­me chaine a Metropole TV (C.L.T., Lyonnaise des eaux).

:Decision de Ia C.N.C.L. autorisant }'exploitation d'un service de television a vocation nationale diffuse en clair par voie hertzienne (cinquieme chaine).

:Decision de Ia C.N.C.L. autorisant }'exploitation d'un service de television diffuse en dair par voie hertiienne terrestre (sixierne chai­ne).

:Decision de Ia C.N.C.L. designant le groupe cessionnaire de 50% du capital de Ia Societe nationale de programme television frans;aise 1 et portant autorisation d'utilisation de frequences a Ia Societe tele­vision frans;aise 1.

201