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DÉPARTEMENT DE LINFORMATION ET DE LA COMMUNICATION rue de Valois Paris Cedex Culture www.culture.gouv.fr ISSN - DOSSIER : LA COMMANDE PUBLIQUE ET AUSSI : LA FOIRE INTERNATIONALE DART CONTEMPORAIN DE MADRID / LE RAPPORT DE JEAN-PIERRE MOHEN SUR LE SITE MÉGALITHIQUE DE CARNAC / UN JARDIN MÉDIÉVAL AU MUSÉE NATIONAL DU MOYEN AGE Vitrail conçu par Aurélie Nemours pour l’église de Notre-Dame de Salagon.© Laurent Lecat L LETTRE DINFORMATION MinistLre de la culture et de la communication bimensuel n° 42 : 3 fØvrier 1999

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DÉPARTEMENTDE L�INFORMATIONET DE LA COMMUNICATION

rue de Valois Paris Cedex

Culturewww.culture.gouv.fr

ISSN -

DOSSIER :

LA COMMANDEPUBLIQUEET AUSSI :LA FOIREINTERNATIONALED�ARTCONTEMPORAINDE MADRID / LE RAPPORT DE JEAN-PIERREMOHEN SUR LE SITEMÉGALITHIQUEDE CARNAC / UN JARDINMÉDIÉVAL AU MUSÉENATIONAL DUMOYEN AGE

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LLET TRED�INFORMATIONMinistère de la cultureet de la communication

bimensuel n° 42 : 3 février 1999

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sommaire

02/ACTUALITÉArco�99 : la foire internationaled�art contemporain de MadridLa France invitée d�honneur04/La mise en valeur des sites mégalithiques de CarnacLes propositions du rapport de Jean-Pierre Mohen05/Le Temps du MarocEntretiens avec Daniel Rondeauet Brahim Alaoui

07/DOSSIERLa commande publiqueEvolutions, orientations, procédures d�attribution

12/ACTUALITÉUn jardin médiéval autour dumusée national du moyen âgeEntretien avec Viviane Huchard,directrice du musée14/Les 40 ans du ministère de la culture1986. Les deux plateaux de Daniel Buren ou polémiqueautour d�une commandepublique

16/PORTRAITL�institut technologiqueeuropéen des métiers de la musiqueEntretien avec Vincent Niqueux,directeur de l�ITEMM

Directeur de la publication Marc Sadaoui. Rédacteur enchef Jean-Paul Ciret. Rédaction Paul-Henri Doro01.40.15.83.65. Sophie de Castelnau 01.40.15.82.95. Florent Thibout 01.40.15.81.41. Comité de rédactionJacques Bordet, Adeline Boulanger, Didier Cossé, RobertFohr, Alain Fougeray, Nicole Gasser, Marie-ChristineGérand, Brigitte Jais, Martine Lehmans, Laurent Maillaud,Christiane Menvielle, Catherine Merlhiot, Claire Pouly, Anne Racine, Jacques Vincent. Conception graphique :Jeanne Verdoux. Impression Maulde et Renou. N° de com-mission paritaire 1290 AD. nouvelle série. le numéro2 F. Tirage 34 000 ex. Pour recevoir la lettre d�informationadresser une demande écrite au DIC, ministère de la cul-ture et de la communication, 3 rue de Valois 75042 Pariscedex 01, télécopie : 01.40.15.87.05, minitel : 3615 Cul-ture, internet : http ://www. culture. gouv. fr

ARCO�99 : LA FOIRE INTERNATIONALE D�ARTCONTEMPORAIN DE MADRID La France invitée d�honneur

Créé en , la « Feriainternational de arte contem-poraneo » de Madrid, plus com-munément appelée ARCO, estdevenue le grand rendez-vousartistique espagnol de la créationcontemporaine. Elle propose unprogramme culturel de trèshaute qualité, complété par desrencontres entre professionnels.ARCO se positionne comme

Pour sa 19e édition, la foire d�art contemporain de Madrid, ARCO a choisi la France commeinvitée d�honneur. A cette occasion, Catherine Trautmann témoignera par sa présence le 10février 1999, de la volonté du ministère d�engager une politique internationale ambitieuseen faveur des arts plastiques. L�ensemble des manifestations, qui présente un panorama richeet pluriel de la création contemporaine en France, est coordonné par l�Association françaisepour l�action culturelle (AFAA) sous la tutelle du ministère des affaires étrangères, avec lesoutien financier de la délégation aux arts plastiques (DAP) et du département des affairesinternationales (DAI) - ministère de la culture et de la communication.

l’une des plus importante plate-forme intellectuelle de la vie cul-turelle en Espagne.

Pour sa e édition, ARCOmet la France à l’honneur. Laprésence des artistes français ysera particulièrement impor-tante. Elle permettra de rappelerles liens culturels qui ont tou-jours existé entre la France etl’Espagne. Elle proposera une

vision plurielle et cohérente dela création vivante en France.

La France invitée d�honneurTrente quatre galeries témoi-gneront de la vitalité de la scèneartistique en France. Le Pavillonfrançais présentera une vingtainede galeries sélectionnées parNicolas Bourriaud, commissaireinvité. Neuf d’entre elles ont

Œuvre de Morimura. Fonds national d ’art contemporain. Paris

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LA PRÉSENCE DE LA FRANCE À L�ARCO S�INSCRIT DANS LA DYNAMIQUE DE LA POLITIQUEINTERNATIONALE DU MINISTÈREDE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION

L’action internationale duministère de la culture et de lacommunication en faveur des artsplastiques s’articulent autour de trois axes principaux et se développent,non seulement en Europe,mais également en Amérique et en Asie.

>> Promotion et soutien de laprésence française à l’étrangerExpositions à l’étranger des col-lections du FNAC et des FRAC(par exemple : Métissages ouTransit), itinérances d’expositionsdes centres d’art, soutien à la pré-sence des galeries d’art françaisesaux foires internationales, éditiond’une collection bilingue demonographies d’artistes, etsoutien à la participation desartistes aux grandesmanifestations (ex : F. Hybert à laBiennale de Venise en , P.Sorin à la Biennale de Sao Pauloen , J.-P. Bertrand, HuangYong Ping à la prochaineBiennale de Venise).

>> Formation, échanges et lieuxde séjour pour artistesInternationalisation del’enseignement artistique au seindes écoles d’art françaises quiouvrent très largement leursportes aux artistes, étudiants, sta-giaires et professeurs étrangers,lieux particuliers pour les artistesfrançais à l’étranger (ex : ateliers à New York, Villa Médicis

à Rome), allocations attribuéespar le Fiacre à des artistes françaispour la réalisation de projetsartistiques dans les pays de leurchoix, et lieux de résidence enFrance pour les artistes étrangers.

>> Accueil et expertise auprès despartenaires internationaux Missions de conseils et d’études,participation à des commissariatsd’expositions d’artistes et à desjurys de sélection (ex : festival dela photographie à Beyrouth, bien-nale de la photographie àMoscou), sélection par la DAPd’œuvres d’art pour les saisonsétrangères (ex : saison du Maroc,saison géorgienne), invitations deconservateurs ou personnalitésétrangères à l’occasion decolloques, commissariats d’expo-sition, commissions d’achat duFNAC ou manifestations interna-tionales (ex : les Rencontres inter-nationales de la photographied’Arles, la rencontre sur legraphisme de Chaumont,la Biennale de Lyon), et enfin,programmes d’accueil et deformation - Courants - pour lesprofessionnels francophones au sein des établissements placéssous tutelle.

Le ministère de la culture et de lacommunication, à travers la DAPet le DAI, veut faire du dévelop-pement de l’action internationaleen faveur des arts plastiques unpoint essentiel de sa politiqueculturelle. Des groupes de travailréfléchissent actuellement aurenforcement des réseauxd’échanges et d’accueil.

donné « carte blanche » à unartiste de leur choix pour réaliserune œuvre ou une installationpersonnelle pour la section« project rooms ». Par ailleurs,quatorze galeries françaises par-ticiperont à l’événement.

Dans le cadre de la nouvelleédition des parcours photogra-phiques d’ARCO, deux artistes,Rebecca Bournigault et BrunoSerralongue, ont été sélec-tionnés pour réaliser un compte-rendu en images de la foire.Leurs travaux seront destinésaux fonds de la collection pho-tographique d’ARCO.

Le programme des tablesrondes accordera cette annéeune attention particulière aucontexte artistique français. Lapremière dressera un panoramade la jeune création; la deuxièmesera consacrée au « collection-nisme » en France, alors que latroisième s’interrogera sur lesproblèmes et les objectifs spéci-fiques de l’édition et de l’artcontemporain.

Dans la section « ARCOelectronico », la DAP présenterasur son stand une sélectiond’œuvres vidéo, d’œuvres sursupport cédérom ou disquettes,ainsi que des œuvres en ligne.Les œuvres choisies témoignentde l’action de la DAP pour l’in-citation à la création et à la dif-fusion, dans le cadre des aides àla création (bourses, allocationsde recherche, commandespubliques et achats du Fondsnational d’art contemporain).Cette sélection illustre lesrecherches et l ’imaginairedéployés dans le champ de l’artcontemporain confronté auxnouveaux supports de lacréation. Parmi les artistes pré-sentés et programmés en alter-nance : Pierre Huygue, AngeLeccia, Valérie Mréjen, Domi-nique Gonzalez-Foerster,Franck David, Rebecca Bourni-gault, Claude Closky, LaetitiaBenat, Eric Maillet.

D�autres événementsA ces événements spécifiques au

sein de la foire, viendronts’ajouter plusieurs expositions« françaises » à Madrid, Bar-celone, Bilbao et Séville. AMadrid, au museo nacional -Centro de arte Reina Sofia,seront présentés une premièreexposition monographique enEspagne d’Annette Messager,une performance de la choré-graphe Emanuelle Huynh-Than-Loan, une présentationdes vidéos de Pierrick Sorin (LosMirones) et de Robert Cahen,ainsi que de nombreux courts etlongs métrages d ’artistesfrançais contemporains. AuCanal Isabel II, Jeux et simulacresillustrera, à travers des œuvresdatant des vingt dernièresannées et appartenant au Fondsnational d’art contemporain(FNAC), ce pouvoir particulierde la photographie qui reflète,non pas le réel, mais l’imagi-naire, par des jeux de mise enscène ou de travestissement dumodèle. Une exposition auCirculo de bellas artes, France,une nouvelle génération, pré-sentera des œuvres significativesde jeunes artistes, issues de col-lections privées françaises.

De nombreuses autres mani-festations sont prévues : àMadrid, artists monthsNantes (Centro de arte joven),Pensionnaires de la Casa deVelazquez (Casa de Velazquez),Dominique Perrault (ministeriode foment), Little Democracy dePierre Joseph et ExpéditionLumière de Yann Kersalé (dansla ville de Madrid), Hervé Télé-maque, gravures (Institutfrançais), Anne Deleporte (galerieFucares) ; à Barcelone, un pro-gramme d’échanges de rési-dences d’artistes entre le HangarTallers Santa Isabel et le Centrede formation et de création dansles arts électroniques (Ecoled’art de Marseille), DominiqueGonzalez-Foerster (PabellonMies Van Der Rohe) ; à Séville,Eso es ayer (Centro andaluz dearte contemporaneo) ; à Bilbao,Jean-Michel Othoniel (SalaRekalde).

Attractions 1995. Courtesy Bernard Joisten

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04/ACTUALITÉ

LETTRE D�INFORMATIONMINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION février

Dans l’état actuel des recherches, les spécialistes s’accordent àreconnaitre dans les alignements de menhirs de Carnac un « templenéolithique » composé d’un espace sacré et d’un espace proces-sionnel. Cet ensemble est d’une importance exceptionnelle.Catherine Trautmann envisage, après concertation avec les élus,de proposer à l’Unesco d’inscrire ce site au titre du patrimoinemondial de l’humanité.

Un projet de protection et de mise en valeur des trois aligne-ments du Menec, de Kermario et de Kerlescan avait été lancé il ya huit ans. Confronté aux effets destructeurs d’une fréquentationaccrue de ce site, l’Etat avait dû en interdire l’accès afin de régénérerla végétation, protectrice de la couche archéologique et garante dela stabilité des menhirs. Cette mesure conservatoire a remis en causeune tradition ancestrale de libre circulation sur le site et a provoquél’incompréhension de ses familiers. Catherine Trautmann a alorsdécidé de confier à Jean-Pierre Mohen la mission d’étudier lesmodalités permettant d’assurer « le respect du monument et celui despersonnes qui le fréquentent et le visitent ».

Les principales propositions du rapport>> La surface du parking principal restera la même quel que soit lenombre de visteurs (environ d’après les dernières estima-tions). On peut envisager la création d’un jardin expliquant l’évo-lution du paysage depuis le néolithique jusqu’aux problèmes posésde nos jours.>> L’accès au site doit être protégé pour assurer la conservation desmenhirs. Une solution sera trouvée pour préserver le couvert végétalautrement que par un grillage, qui ne pouvait être qu’une solutiontemporaire. Il est aussi envisagé une ouverture du er octobre au mars, si l’état des sols le permet, afin que le public puisse s’y pro-mener librement en dehors de la période de grande influence.>> Un concours d’architecture sera lancé à partir d’un cahier descharges précis pour créer la zone du parking, le centre d’interpré-tation des « Alignements » avec une exposition pédagogique, unesalle de projection, un lieu de restauration, un comptoir de vente,une bibliothèque et le traitement paysager qui entoure le site.>> Une maison des légendes sera créée pour replacer dans un contextehistorique les mégalithes, objets de mythes, de contes et de chants.>> Un parcours d’observation archéologique doit être créé. Ponctuépar cinq stations, il permettra aux visiteurs de connaître les savoirset les interrogations des archéologues sur ce site.>> En relation avec le service de l’archéologie de la DRAC Bretagne,un programme de prospection de trois ans s’achève en . Cetterecherche est pilotée par un conseil scientifique. A partir de ,une recherche sur les alignements de Carnac pourra être programmée.>> L’accès au site, au centre d’interprétation et à la maison deslégendes est gratuit, de même que le dépliant de visite qui indiquele parcours et l’intérêt des différentes stations d’observations.>> Un groupe de réflexion sera mis en place avec la participationde la direction des musées de France pour rénover l’aspect muséo-graphique du musée de Carnac. Il conviendra de mieux articulerles relations entre le site des alignements, le musée de Carnac et letumulus Saint-Michel.

Pour mettre en œuvre le programme de mise en valeur du site,Catherine Trautmann a nommé Emmanuel Couet chargé demission à la direction de l’architecture et du patrimoine.

Le rapport de Jean-Pierre Mohen est disponible sur le site internet du ministère dela culture et de la communication : http://www.culture.gouv.fr

LA MISE EN VALEUR DES SITESMÉGALITHIQUES DE CARNACLes propositions du rapport de Jean-Pierre Mohen

Alignement de Kermario.© Jos Le Doaré

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05/ACTUALITÉ

LETTRE D�INFORMATIONMINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION février

« LE FAIT DE VIVRE AU MAROC NE DIMINUE EN RIEN LA PROFONDEUR DE SES MYSTÈRES »Entretien avec Daniel Rondeau

Lettre d�information : Quelle place tient le Maroc dans l’imaginaireoccidental ? Daniel Rondeau : Dans notre imaginaire, le Maroc fut longtemps unpays de barbarie. Fermé aux occidentaux, il se situait au-delà desconfins du monde chrétien. Jusqu’à la fin du XIXe siècle, il restaTerra Incognita, bien qu’il fût l’un des plus proches orients. Royaumedes corsaires barbaresques, il s’ouvrait comme une bouche d’ombreau croisement de la Méditerranée, de l’Atlantique et du désert. Autemps du colonialisme, certains crurent pouvoir dompter cet espace.Leurs récits firent connaître une civilisation extrêmement raffinée,emplie de spiritualité et de violence parfois fantasmée. Mais trèsvite, ils réalisèrent que le fait de vivre au Maroc ne diminuait enrien la profondeur de ses mystères. Après l’indépendance, des voya-geurs occidentaux comme Bowles renouvelèrent l’image du vieuxMaroc. Ils privilégièrent l’espace de liberté et de respiration, le car-refour d’influence libéré des pesanteurs de la civilisation occidentale.L I : De Loti à Paul Bowles, existe-t-il un dénominateur communà la fascination exercée par le Maroc sur les écrivains occidentaux ?D R : Les appels du Maroc sont multiples, et résonnent d’une œuvreà l’autre. Il y eut l’appel de la lumière, celui du désert et de la mys-tique, d’une vie accordée à la pureté des seuls éléments, l’appel despaysages, d’un exotisme qui était celui du plus proche orient, il yeut aussi l’appel des villes marocaines toutes singulières, il y eutenfin l’appel du peuple marocain, de son sens de l’hospitalité. Lesmodes jouèrent aussi un rôle. Cependant, tous furent dévorés parune véritable passion. Leur équipée fut une chasse amoureuse.L I : Quel a été le déclic qui vous a conduit à écrire sur ce pays ?D R : Je me suis rendu à Tanger pour rendre visite à Bowles en mai. Avant même d’être allé chez lui, en débarquant dans cetteville, j’ai décidé d’écrire sur cette cité marquée par l’Ange du bizarre,puis Tanger m’a ouvert à l’horizon du Maroc tout entier.

L�intégralité du programme du Temps du Maroc est disponible au ministère de la culture et de la communicationdépartement des affaires internationales, service communication12, rue de Louvois 75002 Paris. Téléphone : 01.40.15.80.00. Télécopie : 01.40.15.37.40

« LE PARADIS TERRESTRE DE MATISSE »Entretien avec Brahim Alaoui

Lettre d�information : Pourquoi une exposition Matisse à l’Institutdu monde arabe dans le cadre du Temps du Maroc ?Brahim Alaoui : Une des missions de l’Institut est de mettre en valeurles liens artistiques qui unissent les deux rives de la Méditerranée.Présenter l’œuvre de Matisse, d’une part à travers des toiles etdessins directement inspirés par des sujets marocains à la suite deses deux séjours à Tanger en et et, d’autre part, à traversles répercussions qu’ont eu sur son œuvre ultérieure les motifsobservés et les techniques appréhendées sur place, permet uneapproche sensible et originale du Maroc. C’est donner au visiteurla perception d’un pays que le peintre lui-même qualifia de « paradisterrestre » où l’intensité de la lumière souligne la couleur et donneà l’espace une plasticité particulière que d’autres peintres, devan-ciers ou contemporains de Matisse, ont vivement ressenti et traitéà leur manière.L I : Comment évoquer un certain art de vivre propre au Maroc ?B A : L’exposition Maroc, un art de vivre, s’inscrit en contrepoint del’exposition Matisse.Tout ce que le visiteur aura contemplé et admiréchez le peintre, il le retrouvera au détour d’une céramique de Fès,dans les volutes d’une épigraphie, les plis d’une ceinture drapée oule chant coloré des zelliges. L’exposition, conçue comme un che-minement qui mènera de l’espace public, extérieur, à l’espace privé,intérieur, de l’habitat marocain, sera ponctuée des bleus intenses,des verts sourds, des roses violines si chers au peintre.L I : Le Maroc a-t-il été une source d’inspiration pour d’autrescréateurs que les plasticiens ?B A : Les écrivains eux-aussi ont été impressionnés par la force dela culture et de la spiritualité du Maroc, mais aussi par ses paysageset ses villes. Français, Américains, Anglais, Espagnols, Allemands...,des auteurs comme Pierre Loti, Henri de Montherlant, PaulMorand, Paul Bowles, Bryon Gysin, Juan Goytisolo ou encoreJ.M.G. Le Clezio seront également présents dans l’expositionL’appel du Maroc . Celle-ci, bâtie autour de la reconstitution de cer-tains lieux d’écrivains, reliés entre eux par un chemin de manus-crits, photos, documents et éditions originales, témoignera de laplace du Maroc dans l’imaginaire et la littérature du XXe siècle.

Le Temps du Maroc à l�IMA a lieu du 18 octobre 1999 à la fin janvier 2000.

LA SAISON CULTURELLEFRANCE/MAROC

Le Temps du Maroc : cette année culturelle étrangère en France,coordonnée par l’AFAA avec le soutien du DAI, propose au coursde , des manifestations dans tous les domaines artistiques.Daniel Rondeau, écrivain et Brahim Alaoui, directeur du muséeet des expositions à l’Institut du monde arabe, confient à la Lettred’information leurs perceptions des liens multiséculaires qui nour-rissent la création artistique francaise et marocaine.

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06/ACTUALITÉ

LETTRE D�INFORMATIONMINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION février

L�EUROPE DES 2000 JEUNESCette opération préparée par lamission en France permet à jeunes de ans de voyagerà travers l’Europe en prélude àl’an . Le projet a valeur sym-bolique : ceux qui auront ansen l’an seront les premiersresponsables d’une Europe qu’ilsdevront conduire à maturité.Chacun des participants s’arrêteradans quatre capitales européenneset pourra ensuite, grâce au parrai-nage des médias relater tous cequi l’aura ému, surpris, marqué.

DISTRIBUTEUR DE BOISSONS« FOUNTAIN 1997 »une commande publique« in progress »Dans le cadre de la commandepublique , un distributeur de boissons, Fountain ,a été mis en service par SoussanLtd, dans le hall de la délégationaux arts plastiques.Le concept est unique : SylvainSoussan, artiste fournisseur desmusées par l’intermédiaire des lasociété prestataire de servicesSoussan Ltd, a choisi de transfor-mer un espace réservé habituelle-ment à l’imagerie décorative ou publicitaire en un support d’exposition.La façade amovible dudistributeur accueillera tous les six mois une nouvelle plaquecommandée spécialement à unartiste. La première œuvre,Très frais (), a été réalisée par Claude Closky, pour qui les images et les codes de production des biens de consommation représentent les matériaux de prédilection de son expression artistique.Philippe Mayaux puis Gilles Barbier réaliseront les prochainesœuvres de cette commande « in progress ».Ce type de commande originalepeut intéresser toutes les administrations qui souhaitentoffrir un nouveau lieu convivial

de détente et d’échange,au personnel des différentsservices et aux visiteurs,tout en les plaçant au contact de la création contemporaine.Renseignements : délégation aux arts plastiques27 avenue de l�Opéra, 75001 ParisBénédicte Godin, 01.40.15.74.60

LE TRIANGLE DU XIVE

De nouveaux habitants dans unvieux quartier de ParisLa mission du patrimoine ethno-logique a choisi de rééditer cetteétude effectuée dans les années par Sabine Chalvon-Demersay etconsacrée aux transformations duXIVe arrondissement de Paris. Ils’agit d’une œuvre pionnière pourla compréhension des modes devie urbains. Par le relevé desmenus détails de la viequotidienne, cet ouvrage faitapparaître les processus qui gou-vernent les transformations desquartiers et des villes, à travers laconfrontation de groupesd’origines différentes.180 pages, 100 F. Diffusion CID131 bld Saint-Michel, 75005 Paris. Tél : 01.43.54.47.15.

NOMINATIONS Francis Beck a été nomméprésident de l’Institut national del’audiovisuel (INA) par le conseildes ministres sur proposition deCatherine Trautmann. Il étaitdepuis mai le directeur géné-ral de l’Institut.Marc-Olivier Dupin est reconduitdans ses fonctions de directeur duConservatoire national supérieurde musique de Paris.Dominique Chavigny, conseillertechnique au cabinet de laministre, jusqu’à présent chargédu spectacle et de la démocratisa-tion, sera désormais chargé, ausein du cabinet, de l’action terri-toriale (déconcentration, contratsde plan, politique de la ville), dela démocratisation et despolitiques interministérielles.

Jean-François Marguerin, directeurrégional des affaires culturelles deHaute-Normandie, est nomméconseiller technique au cabinet deCatherine Trautmann, chargé duspectacle.

LA VILLE DE FONTENAY-LE-COMTE (VENDÉE)Publié par la DRAC des Pays-de-la-Loire, ce numéro de la collec-tion Images du patrimoine permetde découvrir une ville aupatrimoine riche mais encore tropméconnu. L’histoire architecturalede cette ancienne capitale du Bas-Poitou est complexe et diversifiée.De l’agglomération médiévaledéjà très étendue à la ville duXIXe siècle en plein essor, cetouvrage fait revivre lesévénements qui ont façonné leFontenay moderne.100 F. Renseignements : DRAC ,1 rue Stanis-las Baudry, BP 63518, 44035 Nantescedex 1. Téléphone : 02.40.14.23.00.

FASCINATION DE L�ANTIQUEMusée de la civilisation gallo-romaine (Lyon)Jusqu�au 14 mars 1999Parmi les transformations quiaffectent la culture européenne auXVIIIe siècle, le changement deregard sur le passé joue un rôledéterminant. L’abondance defouilles et de découvertes queconnaît Rome provoquel’effervescence des érudits et desartistes. A travers œuvres pro-venant de musées européens,cette exposition veut monter quec’est à partir de Rome que lascience a nourri le rêve et qu’estnée la fascination de l’antique.Renseignements : 04.72.38.81.90

MIDI-PYRÉNÉESGuide des expositions et desmanifestations temporairesdans les muséesCe petit guide est publié chaquesemestre à l’initiative de la DRACavec la collaboration des conser-vateurs des musées de Midi-Pyrénées. Il a pour ambition defaire connaître l’ensemble desmanifestations temporaires qui sedéroulent dans les musées decette région.Renseignements : DRAC, 56 rue du Taur,31080 Toulouse cedex 6. Téléphone : 05.62.30.31.00.

De gauche à droite, on reconnaîtnotamment Michel Pébereau, CatherineTrautmann, Jean-Jacques Aillagon etXavier Gouyou-Beauchamps. © F. Fleury

Hubert Robert, Les découvreursd’antiques, vers 1765.Valence, musée des beaux-arts

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LETTRE D�INFORMATIONbimensuel n° 42 : 3 février 1999

DOSSIERMinistère de la cultureet de la communication

LA COMMANDE PUBLIQUELa commande publique en arts plastiques correspondà une double nécessité : mettre à la disposition desartistes les moyens de réaliser des projets dont l’am-pleur, l’originalité, ou le caractère expérimental, néces-sitent un soutien de la part de la collectivité publique ;contribuer à l’amélioration de la qualité esthétique desespaces publics, et à l’émergence d’œuvres importantesreprésentatives de l’art de notre temps. Longtempslimitée aux monuments commémoratifs, la commandepublique connaît depuis le début des années uneréelle évolution et s’ouvre à d’autres lieux, à d’autresformes d’art. Le présent dossier fait le point sur son évo-lution, ses orientations et les procédures d’attribution.

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08/DOSSIER

LETTRE D�INFORMATIONMINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION février

LA COMMANDE PUBLIQUE Historique, évolution, diversification

La commande publique relèveen France d’une forte etancienne tradition.Très impor-tante sous l’Ancien Régime, unpeu abandonnée par la suite, puisreprise sous la Troisième Répu-blique, elle s’est maintenue, pen-dant la Quatrième République,sous forme du % avant deconnaître un nouvel essort audébut des années . Ellerépond au souci d’implanter desœuvres d’art dans l ’espacepublic, afin de contribuer à l’en-richissement du cadre de vie etau développement du patri-moine artistique contemporain.

Créés en octobre , ladéléfation aux arts plastiques etle centre national des arts plas-tiques disposent, dès , d’unfonds de la commande publique.Aujourd’hui, de nombreusesœuvres réparties sur l’ensembledu territoire témoignent del’ampleur des réalisations per-mises par une commandepublique, portée par la dyna-mique de la décentralisation, etpar l’implication, voire mêmel’émulation, qu’elle a induitechez les différents responsablesdes collectivités locales.

A Paris, quelques œuvresparticulièrement spectaculaires,

comme Les deux plateaux deDaniel Buren au Palais Royal(), La Tour aux Figures deJean Dubuffet dans l’Ile Saint-Germain () ou encore LaDéfonce de François Morelletinstallée sur la dalle de laDéfense, ont permis de démon-trer la capacité de la créationcontemporaine à enrichir defaçon absolument nouvelle lamémoire et les formes de la cité.

La commande publique a étéet reste actuellement le lieud’une réflexion sur les espacesde rencontre et d’échange, quece soient les jardins (le jardin desTuileries par exemple), les bâti-ments publics (commandepublique de Jean-Charles Blaispour l’antichambre du palaispréfectoral de Nice, ou encorecelle de Jean-Pierre Raynaud etAdalberto Mecarelli pour l’hô-pital européen Georges Pompi-dou), ou encore les zonesurbaines (gares, autoroutes,tramway de Montpellier, Stras-bourg, Orléans, ligne de métroMétéor, etc).Mais il faut également soulignerque depuis , la délégationaux arts plastiques et la direc-tion du patrimoine n’ont cesséde mener une politiqueconcertée de création d’œuvres

d’art contemporain au sein desmonuments historiques. Lesprojets réalisés concernent aussibien les monuments apparte-nant à l’Etat (châteaux, parcs etcathédrales) que ceux qui sontla propriété des collectivités ter-ritoriales (surtout les églises).Les programmes de vitraux ontété particulièrement nombreuxdans ce cadre, par exempleAurélie Nemours à Salagon,David Rabinowitch à Digne...

Diversité des lieux / ouverture àtoutes les disciplinesSi les lieux d’implantation desœuvres sont divers, les disci-plines sollicitées ne le sont pasmoins. Désormais, la com-mande publique s’adresse àtoutes les formes d’expression :design, graphisme, mobilierurbain ou d’intérieur (aména-gement du café musique dePatrice Carré à Beauvais), mode(photographies d’une robe deChristian Lacroix par ValérieBelin), etc. Elle permet aussi lacréation d’œuvres en prise avecla vie quotidienne: commandeauprès de vingt artistes d’œuvressur l’internet en , affichespour le bâtiment du ministèrede la culture rue des BonsEnfants, machine à café deClaude Closky....

Les œuvres d’art de com-mande publique sont presquetoujours des œuvres pérennes,mais s’y intègre de plus en plus

des œuvres qui relèvent dudomaine de l ’éphémère, del’événement ou du spectacle. Onse souvient de la collaborationd’Hans Peter Cloos et de Chris-tian Boltanski pour la créationdu Voyage d ’hiver de FranzSchubert à l’Opéra Comique enmars . Cette année, deuxprojets répondent particulière-ment à cette attente : le projetde Beat Streuli en Provence-Alpes-Côte d’Azur consiste enl ’installation-projection denombreux visages de jeunesdans un quartier de Marseille ;de même l ’interventionéphémère de Liam Gillick etPhilippe Parreno, à propos durécent procès de Pol Pot, auMagasin de Grenoble relèved’une logique comparable.

Métiers d�artLa commande publique parti-cipe enfin activement au déve-loppement des métiers d’artavec le Centre international derecherche sur le verre à Marseille(Cirva), le Centre de recherchesur les arts du feu et de la terre àLimoges (Craft), les Manufac-tures nationales, les ateliers privésde tapisserie d’Aubusson, les ate-liers de fonderie et les artisansmaîtres verriers. Citons l’impor-tante commande publique de fontes originales prévue pourjuin , dans la lignée de lacommande d’estampes réaliséeen (Heureux le visionnaire).

Œuvre de Knorr. Fonds national d ’art contemporain. Paris

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COMMANDE PUBLIQUEProcédureLa commande publiquecomprend les projets gérés parl’administration centrale sur lescrédits du Cnap (Centre nationaldes arts plastiques), et ceux géréspar les directions régionales desaffaires culturelles sur des créditsdéconcentrés (chapitre - -article du budget de l’Etat).Les commandes publiques géréespar le Cnap concernent des pro-jets thématiques (photographie,design, fonderies...) ou des projetsà vocation nationale (installationde sculptures modernes etcontemporaines aux Tuileries,œuvres sur l’internet, etc.).Ils sont entièrement financés par l’Etat.Pour les projets en région, lesconseillers arts plastiques font despropositions qui sont soumises augroupe de travail de la commandepublique pour obtention des cré-dits d’étude.La Commission nationale de lacommande publique, créée en, a un rôle d’évaluation et deconseil. Elle est présidée par ledélégué aux arts plastiques et secompose de membres de l’admi-nistration et de personnalitésqualifiées extérieures. Le projetest arrêté par le délégué aux artsplastiques.Parfois, un comité de pilotageregroupant l’ensemble des parte-

naires concernés par l’opération(ville, syndicat, région,département, Europe,Monuments historiques...) estmis en place afin d’assurer, dansla phase de réalisation, l’adéqua-tion des œuvres à un cahier descharges précis.

LE 1 %Le % est une mesure qui consisteà réserver obligatoirement, à l’oc-casion de la construction ou del’extension de certains bâtimentspublics, une somme pour l’affec-ter à la réalisation d’une ouplusieurs oeuvres d’art contempo-rain spécialement conçues pour ce lieu. Apparue dans des projetsde loi en , l’idée a été consa-crée dans un arrêté du mai instituant, pour les établissementd’enseignement scolaires et universitaires, ce qui estcommunément appelé le « un pour cent artistique ».

Deux systèmes d�applicationcoexistentLe % d’Etat est réservé aux opérations financées directementou subventionnées par l’Etat,et est examiné suivant les procé-

dures définies par les différentsarrêtés ministériels : choix du programme de réalisation et de l’artiste par un comité de pilotage, soumis ensuite

à l’avis de différentes instancescompétentes, selon le montant du crédit et le ministèreconsidéré, décision préfectoraleou ministérielle pour l’agrémentdu projet, puis établissement du contrat par le maîtred’ouvrage.Le % décentralisé résulte du transfert de certaines compétences de l’Etat aux collectivités locales pour laconstruction des bâtimentsconcernés par l’article de la Loi du juillet .Les collectivités territoriales suivent alors des procédures qui leur sont propres.

47%

14%

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9%

4%3%

4% 3%

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1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999

(en millions de francs)

Budget de la commande publique Genre des �uvres réalisées

sculpture

photographie

vitraux et verre

estampes

peintures

affiches, livres,graphisme

mobilier

décor, rideaux de scènevidéo, films...

Une réforme en préparationLe nombre et la diversité desarrêtés et circulaires ont conduitle ministère de la culture et de lacommunication à une réflexionsur la redéfinition du %. Tous lesministères concernés ont été sai-sis. L’harmonisation desmodalités d’application devrait setraduire par une fusion des textesen un décret unique, afin d’assu-rer la cohérence d’une politiqueassociant les maîtres d ouvrage,les artistes et les architectes.

Jean-Charles Blais. Trois mots Trois couleuyrs, 1998. Antichambre du Palais préfectoral,Nice. Commande publique de l ’Etat. Photo : S. Demailly

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10/DOSSIER

LETTRE D�INFORMATIONMINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION février

Lettre d�information : Dans quels domaines en particulier souhaitez-vous orienter la commande publique ?Guy Amsellem : Il est important de travailler à une meilleure insertionde la commande publique dans son environnement urbain. Quandje parle de l’urbain, il ne s’agit pas seulement de la ville dans soncadre bâti, mais aussi de tous les espaces interstitiels, comme lesentrées et les sorties de ville (voies routières, entrées de gare, etc.).La commande publique a souvent été défendue comme un acte unpeu monumental, exclusivement artistique et assez peu tourné versson insertion dans l’environnement. Or il me semble que le travailsur l’urbain, sur la ville, est quelque chose d’essentiel. Et ceci pourplusieurs raisons : tout d’abord, force est de constater que les villestelles que nous avons eu la prétention ou l’idéal de les concevoir, ily a vingt ou trente ans, rencontrent aujourd’hui de réelles diffi-cultés. Il ne s’agit pas seulement, me semble-t-il, d’une questionde logement, de fonctions urbaines, ou de mixité sociale. Désormaisnous devons travailler avec l’existant, afin de produire davantagede lien social, davantage d’espace public. L’enjeu majeur se situedans la manière dont nous allons refaçonner la ville, dont nousallons la retisser. Il est essentiel que la création soit présente dansce débat. Par ailleurs, en ce qui concerne le champ du design urbain,je regrette que le mobilier de ville - bancs, tables, chaises -, ou le

mobilier de jardin ne soient pas plus souvent conçus, dessinés, pardes créateurs. Nous nous contentons trop souvent de leur aspectfonctionnel, alors qu’ensuite, parfois pendant plusieurs décennies,ces objets nourrissent le regard de tous. Enfin, je suis très intéressépar les paysages, la relation à la nature.L I : Envisagez-vous une collaboration plus étroite avec la directiondu patrimoine et de l’architecture ?G A : Les projets pour le château d’Oiron ou le jardin des Tuileriesmontrent que cette collaboration est déjà effective. Elle est appeléeà être renforcée. Nous en avons évoqué le principe avec FrançoisBarré, directeur de l’architecture et du patrimoine, - y compris dansd’autres domaines, notamment l’enseignement. Les cloisonsconstruites par les logiques administratives entre les disciplinesartistiques ont souvent tendance, lorsqu’il est question d’art contem-porain, à devenir de plus en plus poreuses. Notre devoir est alorsde savoir nous adapter au terrain dans lequel nous intervenons.L I : Souhaitez-vous une diversification des supports, en fonctiond’une nouvelle appréhension de la notion d’espace public ?G A : Les nouvelles technologies sont porteuses d’un profond renou-vellement du langage plastique. Elles permettent aussi, grâce auxcapacités des réseaux à haut débit, d’amplifier la diffusion desrecherches des créateurs. Elles contribuent enfin à reformuler lesfrontières de l’espace public. C’est dans cette perspective que s’inscritl’opération Entrée libre. Dans ce cadre, nous avons passé des com-mandes publiques sur l’internet auprès des vingt artistes, qui serontmises en ligne lors de la prochaine fête de l’internet, le mars. Ladélégation aux arts plastiques entend en effet contribuer à l’élabo-ration, au sein du ministère, d’un discours fort sur les contenus cul-turels et artistiques de ces outils technologiques.L I : Vous parliez de lien social. La commande publique a-t-elleselon vous un rôle particulier à jouer dans la société ?G A : Je suis très sensible au travail que la commande publique permetd’engager avec les partenaires locaux. C’est enrichissant pour le com-manditaire local et pour l’artiste. Un dialogue particulier s’engageentre les différents partenaires, une collaboration qui peut aussi seprolonger d’une autre manière, par l’organisation d’expositions parexemple. Ce travail constitue par ailleurs une manière très intéres-sante d’appréhender l’ensemble des institutions d’art contemporainqui forment notre réseau dans toute la France. Notre engagementà travers la commande publique demeure donc un volet importantde notre action de sensibilisation à l’art contemporain.

« LA COMMANDE PUBLIQUE DOITS�OUVRIR AU TRAVAIL SUR LA VILLE, SUR L�URBAIN »Entretien avec Guy Amsellem, délégué aux arts plastiques et président de la commission nationale de la commande publique

Œuvre de Faigenbaum. Fonds national d ’art contemporain.Paris

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11/ACTUALITÉ

LETTRE D�INFORMATIONMINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION février

Francis Poulenc ( - ) disait qu’il était un compositeur« de l’autre siècle ». En fait, il n’eut pas souvent à se réfugier derrièrece bon mot, car son attachement à l’avant-garde, comme mouvementintellectuel et esthétique, lui valu, sinon le soutien, du moins lerespect, de ses jeunes collègues « modernes ». Poulenc, aujourd’huiconsidéré comme un « classique » et dont presque toutes les œuvressont fermement arrimées dans le « grand » répertoire, fut d’abordun musicien d’avant-garde. Lorsqu’il fait entendre en , une Rhap-sodie nègre sur des poèmes africains imaginaires ou loufoques, le jeunehomme de ans se fait instantanément remarquer d’une intelli-gentsia parisienne qu’il ne cessera par la suite de fréquenter.

Avant-garde ou « classique » ?Francis Poulenc est l’un des musiciens qui incarnent le mieux« l’esprit parisien » : né à Paris, de mère parisienne, il n’aimaientrien tant que son Paris. Pour autant, il revendiquait à parité sesracines paternelles aveyronnaises, base de ses œuvres les plussérieuses et les plus profondes. Ainsi dans son catalogue peut-onvoir, inspirées par son ascendance parisienne, des pièces comme lesMouvements perpétuels, les Cocardes, le Bal masqué, le Concertchampêtre, le Concerto pour piano, les Mamelles de Tirésias ou l’Em-barquement pour Cythère. La source aveyronnaise irriguait davantageles Litanies à la vierge noire, le cycle de mélodies Tel jour telle nuit,la Messe, l’opéra Dialogues des carmélites… En indépendant, FrancisPoulenc développa un langage dont la particularité paradoxale estd’être immédiatement signé et reconnaissable, et pourtant composéd’inspiration confinant parfois au pillage. « On peut écrire de la bonnemusique avec les accords des autres » disait Poulenc. Ainsi prendra-t-il beaucoup chez Stravinsky et Prokofiev et chez… lui-même.

Un siècle après la naissance de Francis Poulenc, il est instructifde voir la musique de celui qui se demandait si elle « tiendrait lecoup », passer sans férir le cap de la fin du siècle. Ce sont la sincérité,et surtout, la qualité de facture de cette musique qui lui assurentsans doute une valeur pérenne et réconfortante.

Extraits du texte de Renaud Machart, musicologue et journaliste, àparaître mi-février dans la brochure Célébrations nationales .

Renseignements : direction des archives de France, délégation aux célébrationsnationales, 56 rue des Francs-Bourgeois, 75003 Paris. Téléphone : 01.40.27.60.00.

ACADÉMIE DE FRANCE À ROMELA VILLA MÉDICIS

BourseComme chaque année, la VillaMédicis accueille de jeunesartistes ou des chercheurs afin deleur permettre de réaliser un pro-jet dans un contexte culturelextrêmement enrichissant, pourune durée de , , ou mois.Le concours est ouvert au décembre à tout candidatâgé de plus de vingt ans et demoins de ans, déjà engagé dansla vie professionnelle.Les projets peuvent être présentésdans les disciplines suivantes :architecture, arts culinaires, artsplastiques, cinéma et télévision,design, histoire de l’art,littérature, musique,photographie, restauration desœuvres d’art et des monuments,et scénographie.Le dossier administratif qui faitacte de candidature doit êtreconstitué entre le lundi mars etle vendredi mars inclus.Le dossier artistique est à déposerentre le lundi et le vendredi avril .Renseignements : DAP, 27 av. de l�Opéra, 75001 Paris. Tél. : 01.40.15.74.48.

Jeunes artistes. Une conventionentre la Villa Médicis et la Villede ParisPour faciliter le retour des jeunesartistes ayant bénéficié de boursesà l’Académie de France à Rome(Villa Médicis), la Ville de Pariset la villa Médicis viennent designer une convention. Celle-ciprévoit notamment la mise enplace d’une procédure d’informa-tion réciproque et deconcertation. C’est ainsi que lesartistes plasticiens et lesphotographes qui désirents’installer à Paris verront leur dos-sier d’attribution d’atelier-logement bénéficier d’un intérêtspécifique. Pour les musiciens et

les plasticiens la Ville de Parisfacilitera leur candidature en qua-lité d’enseignants des ateliers desbeaux-arts et des conservatoiresd’arrondissement. Enfin, la VillaMédicis renforcera sa coopérationavec les diverses institutions cul-turelles de la mairie. Des projetscommuns pourront être étudiésavec notamment le Festival d’artsacré, l’Ensemble orchestral deParis ou la Maison de la poésie.Renseignements : DAP 01.40.15.74.60

UNE EXPOSITION TACTILEJeux de sculptures. De la Vénus de Lespugue au Penseur de RodinJusqu�au 21 février 1999Cette exposition présentée par le musée des beaux-arts de Valenciennes s’adresse à tousles publics voyants et non-voyantset offre un panorama de l’histoirede la statuaire à partir desculptures en résine à toucher et à reconstituer.En collaboration avec la DMF, laFondation Electricité de Franceet l’association « La croisade desaveugles ».Renseignements : musée des beaux-arts, boulevard Watteau, 59300 Valen-ciennes. Téléphone : 03.27.22.57.20

XXE SIÈCLE : UN SIÈCLELITTÉRAIRE EN MOUVEMENTJusqu�au 15 décembre 1999La bibliothèque nationale deFrance inaugure un cycle de dixsoirées thématiques autour de lalittérature du XXe siècle. Diversintervenants, écrivains oucritiques, s’efforceront de dresserune sorte de bilan littéraire dusiècle qui s’achève, de lamodernité de Proust àl’éclatement des genres, enpassant par les expérienceslimites, les engagements, lesguerres, la poésie, le langage…Une fois par mois, le mercredi à 18h30,site François Mitterrand, Quai FrançoisMauriac, 75013 Paris. Renseignements : 01.53.79.59.59

CélébrationFRANCIS POULENCun compositeur de l�autre siècle ?

Francis Poulenc par J.-E. Blanche.© Lauros-Giraudon

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12/ACTUALITÉ

LETTRE D�INFORMATIONMINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION février

Entretien avec Viviane Huchard, directrice du musée national du moyen âge - Thermes de Cluny

Lettre d�information : Comment l’idée de ce jardin est-elle née ?Viviane Huchard : C’est Elisabeth Antoine, conservateur au musée,qui a eu l’idée de créer ce jardin qui ne sera pas - il faut le souligner- un jardin médiéval, mais une création contemporaine sur le thèmedu jardin médiéval. L’un des objectifs poursuivis avec la créationde ce jardin est de donner à nos bâtiments, qui sont exceptionnels,un nouvel environnement plus flatteur… et de créer des liens entrele jardin et nos collections où la flore réelle et imaginaire est -comme vous le savez - très présente.L I : Comment votre projet a-t-il été reçu ?V H : Il a été immédiatement très bien reçu, aussi bien par ladirection des musées de France que par la Ville de Paris, qui estgestionnaire du square de Cluny et propriétaire du square PaulPainlevé. Outre la Ville de Paris, qui assurera, de surcroît, l’en-tretien du jardin, plusieurs mécènes ont bien voulu s’associer à sonfinancement : la mission pour la célébration de l’an , la Caissedes dépôts et consignations, le groupe Alcatel, le groupe immo-bilier Sophia… et M. David-Weill, qui a été parmi les premiers às’enthousiasmer pour notre projet.L I : Qui va réaliser le jardin ?V H : La commission, créée pour mener à bien le projet, a choisiEric Ossart et Arnaud Maurières, deux paysagistes qui ont déjàréalisé plusieurs jardins urbains et des jardins d’inspiration médié-vales comme celui de Gordes. Leurs propositions nous serontremises dans quelques mois. Ce qui permettra aux travaux de com-mencer à l’automne.L I : Quelle mission les deux architectes-paysagistes ont-ils exac-tement reçue ?V H : Ils ont reçu pour mission d’évoquer, à partir de documentsécrits et iconographiques, les différentes facettes du jardin médiéval :jardins vivriers, comme le potager et le jardin des simples, aux formesgéométriques délimitées par des plessis… mais aussi jardins sym-boliques, jardins de paradis, jardins d’amour, où se rejoignent, dansun espace de rêve, la quête du paradis perdu et celle de l’aimée.L I : Avez-vous beaucoup de documents sur les jardins médiévaux ?V H : Nous avons en effet beaucoup d’images des jardins de la findu moyen âge et notamment de leur flore. Et puis nous avonsaussi quelques documents. Ainsi, pour le jardin vivrier, allons-

UN JARDIN MÉDIÉVAL AUTOUR DU MUSÉE NATIONAL DU MOYEN ÂGE

Musée national du moyen âge - Thermes de Cluny6 place Paul Painlevé, 75005 Paris. Téléphone : 01.53.73.78.00Le musée national du moyen âge - Thermes de Cluny fait actuel-lement l’objet d’un plan de rénovation visant à mieux affirmerencore son identité et à développer sa mission. La création d’unjardin médiéval - englobant le square de Cluny ( m), le squarePaul Painlevé ( m), le jardin des Abbés ( m) et un dernierterrain de m donnant sur la rue de Cluny - constitue la pre-mière étape de cet ambitieux projet. Les travaux de création dujardin devraient commencer en novembre . Cela permettraaux premières fleurs du jardin… de s’épanouir au printemps del’an .

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13/ACTUALITÉ

LETTRE D�INFORMATIONMINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION février

nous nous fonder sur un manuscrit de la fin du XIVe siècle : Leménagier d ’un bourgeois de Paris. Dans cet ouvrage, écrit par unbourgeois parisien à l’intention de sa jeune épouse, se trouveconsigné tout ce qui est nécessaire pour faire pousser les légumesqui serviront à la nourriture de la maison… et les fleurs qui ser-viront à son agrément.L I : Pouvez-vous nous dire un mot du projet de rénovation dumusée dont la création de ce jardin ne constitue qu’un premiervolet ?V H : Le projet de rénovation que nous avons récemment soumis ànos autorités de tutelle est en parfaite harmonie avec le projet cul-turel du musée que nous avions présenté en . Il vise tout commelui, à affirmer mieux encore l’identité du musée et à développer samission, qui est de faire connaître le moyen âge dans ses produc-tions artistiques, culturelles et techniques. C’est dans ce but qu’ilest souhaitable d’améliorer l’accueil des visiteurs, de mieux leur pré-senter nos collections, de disposer de locaux nous permettant d’or-ganiser de grandes expositions. Le projet concerne - comme vouspouvez le voir - l’ensemble du musée et de ses activités et a pourobjectif de le rendre encore plus vivant, plus accueillant, plus« rayonnant ».L I : Traitez-vous, dans votre projet, de la nécessaire mise en valeurdes thermes de Cluny ?V H : Les thermes de Cluny sont les plus importants vestiges gallo-romains situés au nord de la Loire. Ils sont longés à longueur d’annéepar des millions de personnes… mais restent insuffisammentconnus. Il importe donc en effet de renforcer leur lisibilité, aussibien, d’ailleurs, que celle de l’hôtel de Cluny, premier hôtel parisienédifié entre cour et jardin, et qui n’est pas, lui non plus, reconnu àsa juste place dans le patrimoine parisien. La création d’un jardinmédiéval contribuera très fortement à mettre en valeur aussi bienles thermes que l’hôtel.L I : L’un des aspects les plus importants de votre projet prévoitune éventuelle extension des surfaces de l’établissements...V H : Nous étouffons en effet un peu dans nos murs. Ce qui nousinterdit tout à la fois de redéployer nos collections et d’accroître lafréquentation… Pour mieux accueillir nos publics, en accueillir denouveaux, et mieux leur présenter nos très riches collections, uneextension serait donc souhaitable. Elle est possible, ainsi que lemontre notre projet, en construisant en hauteur, à l’angle du bou-levard Saint-Michel et de la rue du Sommerard.

UNE EXPOSITION Trésors médiévaux de laRépublique de Macédoine11 février >> 3 mai 1999Le musée national du moyen-âgeprésente exceptionnellement,dans la salle du frigidarium des thermes de Cluny, les chefsd’œuvre d’art médiévalappartenant aux collections du musée national de laRépublique de Macédoine,à Skopje.Une quarantaine d’œuvre,essentiellement des icônes,venues d’églises, de monastères et de musées, donnent un largepanorama des richesses artistiquesde la République de Macédoineet permettent d’admirer desœuvres peu connues et d’une profonde spiritualité.Renseignements et réservations pourles concerts, conférences et visites-conférences organisés à l�occasion de l�exposition : 01.53.73.78.16

UN SPECTACLE Rêves de pierreCe spectacle présenté par laComédie des Anges (mise en scène :Céline Bellanger ; chorégraphieet interprétation : CatherineLenne ; scénographie : MichelLaunay), a été inspiré par dessculptures de Notre-Dame deParis conservées au musée etnotamment par la Tête d’hommebarbu qui est venu récemmentenrichir cet ensemble (donationNatexis Banque).C’est à un véritable théâtre degestes et de fantaisie que le publicse trouve convié dans la salleNotre-Dame où sont rassemblésles fragments sculptés provenantde la cathédrale parisienne. Desgestes, des sons, mais peu deparoles… Ce qui prédestine toutnaturellement ce spectacle à êtrepartagé avec les malentendants.Renseignements : 01.53.73.78.16

Détail de la tenture de la Dame à la Licorne. Musée national du moyen âge. RMN

Tête d ’homme barbu. Musée national dumoyen âge. © RMN Gilles Beruzz

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Une passion françaiseEn , le ministre de la culture de l’époque, Jack Lang, annoncequ’une commande publique vient d’être passée à Daniel Buren pourla réalisation d’une œuvre monumentale qui doit prendre place dansla cour d’honneur du Palais-Royal, jusqu’alors transformée enparking. Dès cette annonce, un véritable déferlement polémiqueva se développer : campagnes de presse, dépêches d’agence, trai-tement radio et télé, manifestations des comités de soutien desdifférents protagonistes, questions parlementaires... et, plus encore,une effervescence étonnante de paroles, de courrier des lecteurs etde graffitis in situ.

La question n’était pas nouvelle... et s’est d’ailleurs reposéedepuis. Elle s’est cristallisée autour d’un lieu, le Palais-Royal, emblé-matique du pouvoir et d’un homme, Daniel Buren, artiste minima-liste, représentant l’opposition à toute forme de pouvoir. L’enjeuétait d’importance : peut-on installer une œuvre contemporainedans un site historique classé ?

De nombreuses péripétiesTout d’abord, premier accroc, celui de la commission supérieuredes monuments historiques, dont l’avis, consultatif, est sollicité parJack Lang : cette commission vote à l’unanimité de ses membrescontre le projet. Celui-ci est en effet considéré comme « trop moderneet hautement intellectuel » (dépêche AFP de janvier ). Jack Langdécide de ne pas en tenir compte. Dans la foulée un comité de rive-rains déclare que ces travaux « dénaturent un site exceptionnel »(dépêche AFP de janvier ).

Deuxième étape de la polémique : l’imbroglio juridique et judi-ciaire. Les plaintes tous azimuts vont se multiplier : procès-verbal

dressé par la mairie de Paris, plaintes devant le tribunal adminis-tratif puis devant le Conseil d’Etat, qui prononce la validité del’arrêt des travaux. La raison juridique allait-elle l’emporter sur laraison esthétique ?

Le changement de majorité politiqueAvec l’arrivée de François Léotard à la Rue de Valois, les oppo-sants aux colonnes de Buren se prennent à espérer un arrêt défi-nitif des travaux ou un déplacement de l’œuvre. Nous assistons alorsà la troisième et dernière étape de l’affaire Buren : celle des tergi-versations. Il repousse la décision finale en organisant de largesconsultations avant de prendre la décision de maintenir l’œuvredans le site.

Le juillet , une dépêche AFP tombe : « le chapitre incan-descant des colonnes de Buren s’est clos mercredi à h, avec l ’ouvertureau public de l ’espace conçu par Daniel Buren ».

Pour autant, avec les palissades, c’est tout un pan d’expressionlibre qui tombe : des Français ont parlé aux Français. Les graffitisn’ont épargné ni Jack Lang, ni François Léotard. On accuse lepremier du « crime de M. Lang » en référence au célèbre film deRenoir ou d’être un « Jack l ’Eventreur » avant de s’écrier « Lang-ouste » tandis que le second est traité de « Léotard-trouillard ». Lechroniqueur Louis Pauwels va, dans l’organe de presse le plus engagédans la croisade anti-Buren, Le Figaro Magazine, jusqu’à singer les« parce queue » ministériels à propos de l’occupation du péristyle dela Cour d’honneur.

Après le temps de la polémique...Après le temps de la polémique, vient celui des appréciations esthé-tiques. Lesquelles sont contrastées et parfois à front renversé, commeil se doit. On ne sera donc pas étonné de lire dans le Nouvel obser-vateur du août , journal de gauche favorable aux Colonnes :« Hé oui, c’est con-con (...). La chose est trop anodine pour dénaturerquoi que ce soit. » tandis que dans le Figaro du mai , sous laplume de Roger Peyrefitte, on découvre qu’il s’est « converti à Buren »et qu’il reconnaît dans les colonnes « le premier exemple de cohabitionculturelle ».

Quelle leçon tirer de cette « moderne bataille d’Hernani » (Figaro, mai ) ? Regardons le succès auprès du public de la pyramidedu Louvre, regardons le succès des colonnes de Buren : n’est-ce pasle succès de l’audace auprès du grand public ?

1986. POLEMIQUE AUTOUR D�UNE COMMANDE PUBLIQUE : LES COLONNES DE BUREN

Qui a dit que les Françaisne s’intéressaient pas à l ’artcontemporain ? Force est deconstater, avec ce qu’on a appeléla polémique des « colonnes deBuren », qu’une commande del ’Etat à un artiste contem-porain, peut encore, en ,susciter ce qu’il faut bien appelerune passion française.

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15/ACTUALITÉ

LETTRE D�INFORMATIONMINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION février

ACTION CULTURELLEDEUX CONVENTIONSEXEMPLAIRES EN RHÔNE-ALPESDans le cadre de la circulaire L’éducation artistique de la mater-nelle à l ’université établie par lesministères de la culture et de l’é-ducation nationale, la DRACRhône-Alpes vient de signer deuxconventions, l’une avec l’univer-sité Lyon , l’autre avec l’IUFMde l’académie de Lyon.Au termes de cette convention, laDRAC et l’IUFM élaboreront encommun une politique d’actionculturelle auprès des enseignantsen formation initiale et continue.Avec l’université Lyon , lacoopération concernera trois sec-teurs : l’action culturelle au seinde l’université en partenariat avecdes équipes de création et desstructures culturelles ; les filièresculturelles et artistiques ; larecherche.

9E SÉMINAIRE INTERNATIONALD�ART MURALSaint-Savin. 10 >> 12 mars 1999Les discussions porteront sur lesenquêtes régionales concernant lapeinture murale de la fin duMoyen-Age. Elles ont permis dedécouvrir des foyers de création etde diffusion à l’importancesouvent ignorée qui dessinent unenouvelle géographie artistique.Renseignements : Centre internationald�art mural, abbaye de Saint-SavinTéléphone : 05.49.48.66.22.

LA GALERIEUn nouveau centre d�artcontemporain à Noisy-le-secOuverture le 20 mars 1999Ce centre, financé en partenariatavec le ministère de la culture(DRAC Ile-de-France) et le

conseil général de la Seine-Saint-Denis, présentera quatre à cinqexpositions par saison et desactions culturelles annexes(soirées, tables rondes,projections). La programmationcomprendra des artistes françaiset étrangers, reconnus oudébutants, travaillant sur toussupports (vidéo, photographie,installation, sculpture…). Un ser-vice éducatif proposera des docu-ments pédagogiques, des visites etdes ateliers pour le public scolaire.Renseignements : 01.49.42.67.17.

FORMATION PROFESSIONNELLEEmplois jeunes cultureL’ Agence de gestion desentreprises culturelles (AGEC)propose un plan de formationconçu pour les jeunes salariés,qui commencent dans la vie pro-fessionnelle, à travers le dispositifdes emplois jeunes, sur des nou-veaux services ou des nouveauxmétiers du secteur culturel. Cedispositif est composé de troismodules : entrer dans le mondeculturel, devenir un professionnel,maîtriser son projet.Renseignements : AGECIF, 22 rue dePicardie, 75003 Paris, 01.48.87.58.24.

PUBLICATION : L�art du métalAvec la parution de L’art dumétal, l’histoire des techniquesrejoint l’histoire de l’art. Cetouvrage magnifiquement illustré,premier vocabulaire de l’art dumétal, propose aussi de fixer lelangage des techniques du métalappliquées aux objets d’art, et auxéléments d’architecture.Catherine Arminjon et Michèle Bilimoff,L�art du métal, éd. du patrimoine etImprimerie nationale, 690 F

expositionsDAVID HOCKNEY OU LA SECONDE GENERATION POPLe Centre Georges Pompidou, le musée Picasso et la Maisoneuropéenne de la photographie organisent trois expositions consa-crées à David Hockney, l’un des artistes actuels les plus populaires.

« J’aime peindre le monde autour de moi ». Cette profession defoi, en apparence évidente pour un peintre, est le fil conducteur àl’exposition du Centre Pompidou : Espace/Paysage présente en effetune cinquantaine d’œuvres du maître axées sur ses recherches surle paysage, sur l’espace, et, partant, sur l’extériorité.

David Hockney, figure emblématique des « swinging sixties »,est le créateur d’un monde à la fois intime, domestique et universel.Ses recherches l’ont aussi conduit à réfléchir sur la notion d’espace :après les premiers paysages américains issus directement du PopArt, il expérimentera diverses solutions plastiques - dialogue iro-nique avec l’hyperréalisme, recours à la profondeur de champ desconstructions perspectivistes, système de la « perspective inverse »qui l’amènent à concevoir ses tableaux comme autant de piègesoptiques enfermant les spectateurs, et enfin les peintures abstraites.

Le musée Picasso, pour sa part, présente David Hockney - Dia-logue avec Picasso. Cette exposition met en lumière les rapportsqu’entretient l’art d’Hockney avec celui de Picasso. Il retrace l’his-toire d’une relation, celle d’un maître dont la présence est sensibledans ses recherches et dont l’œuvre est sans cesse interrogée.

Au cours des années, David Hockney a accumulé quelque photograhies... Les Photographies - exposées à la Maisoneuropéenne de la photographie sont une réflexion sur le regard etla perception.

Canal Plus, enfin, rendra un hommage à David Hockney endiffusant le février à h David Hockney en perspective réalisépar Monique Lafannade.

David Hockney Espace/Paysage, Centre Georges Pompidou : jusqu�au 26 avril.David Hockney - Dialogue avec Picasso, Musée Picasso : 10 février - 3 mai David Hockney - Photographies 1969 - 1997, Maison européenne de la photographie : 10 février - 15 mars

David Hockney. Pacific coast highway at Santa Monica, 1990 © David Hackney

Page 16: LETTRE - Culture · Than-Loan,une présentation des vidéos de P ierrick Sorin (Los Mirones) et de Robert Cahen, ainsi que de no mbreux cour ts et longs métrages d’artistes français

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LETTRE D�INFORMATIONMINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION février

VINCENT NIQUEUX« Un institut européen destiné à promouvoir les métiers de la facture instrumentale »

Lettre d�information : Dans quelcontexte l’ITEMM est-il né etquelles sont ses missions ?Vincent Niqueux : L’ITEMM estun centre de formation qui a vule jour en . C’est à la fois uncentre national de formationd’apprentis, un centre de for-mation professionnelle conti-nue, et enfin une école tech-nique privée. Il dispense desformations dans trois domaines :la maintenance, réparation, fac-ture d’instruments - c’est lenoyau historique de son acti-vité -, mais aussi actions com-merciales et techniques du son.On y prépare des diplômes(CAP, BTS, bac professionnel)

et les professionnels peuvent ysuivre des stages courts. Le toutavec une approche évidemmentmusicale, ce qui fait son origi-nalité et lui donne une forteattractivité. Il draine un largepublic, qui va de l’apprenti de ans au professionnel confirméen passant par des étudiantsqualifiés. Il est l’aboutissementd’une double initiative : d’unepart des actions de formation àla facture de piano menées auMans. D’autre part, en , unedécision du Parlement européen,entérinait la création d’un ins-titut à vocation européenne,destiné à promouvoir notam-ment les métiers de la factureinstrumentale. C’est ainsi qu’aété construit un vaste bâtiment.Je vous rappelle que le contextegénéral dans lequel a été créél’Institut était celui d’un relatifcloisonnement et d’une disper-sion, à l’échelon européen, desactivités de formation.L I : Justement, parlez-nous decette spécificité européenne...V N : L’ITEMM est le seul éta-blissement de formation enEurope a avoir été créé sur unedécision du Parlement européen.Nous sommes égalementuniques par notre ultra-spécia-lisation et par la diversité deschamps actuellement couverts.Il existe d’autres écoles euro-péennes avec qui des contactsont été pris à l’origine et que jesouhaiterais développer à terme

sous forme d’échanges d’ap-prentis et de formateurs. Je suisconvaincu que l’échange dessavoir-faire au niveau européensera un plus considérable.L I : Comment s’organise lefinancement de l’Institut ?V N : L’ITEMM est aujourd’huiessentiellement subventionnépar divers financements publicsdont ceux des ministères de laculture, du commerce ainsi quedes financements européens. Ilreçoit, en outre, des aides enfonction des formations orga-nisées notamment du ministèrede l’éducation nationale (pourle centre d’apprentissage), de larégion, et sur certains projets,du département et de la com-munauté urbaine qui est pro-priétaire des locaux.L I : Quels étaient vos objectifslorsque vous avez pris la direc-tion de l’établissement ? V N : Personnellement, je diraisque ce choix de l’ITEMM est àla fois un choix du cœur et de laraison... Choix de la raison parceque je m’intéresse depuis long-temps à la relation entremusique et champ économique.Nous connaissons bien lesmétiers artistiques de musicienset d’enseignants, nous maîtri-sons peut être moins les métiersconnexes : ceux de la mainte-nance, facture, réparation, maisaussi métiers technico-com-

merciaux, métiers de transmis-sion de savoir-faire, métiersd’innovation... qui suscitent untrès fort intérêt du public. Choixdu coeur aussi : la motivationpour un « métier de la musique »attire aussi bien des étudiantsqualifiés que des élèves engrande difficulté scolaire. C’esttout le pari de l’ITEMM que derépondre à ces attentes.L I : Avez-vous parfois l’occa-sion de présenter vos travaux,d’être en contact avec le public,d’organiser des manifestations ?V N : L’ITEMM n’est guèreconnu que des professionnelscar nous sommes dans unchamp d’action atypique. Il estsouhaitable que notre institu-tion puisse développer un véri-table projet culturel. Outre desactions comme la journée« portes ouvertes », nous parti-cipons également à la semainede la science. Etant donné l’ori-ginalité de l’établissement, jesouhaite développer des acti-vités d’expositions, certainspetits concerts, des relationssuivies en direction des publicsscolaires et lycéens, l’accueil degroupes et la formation desamateurs à la connaissance deleur instrument. La visite de sesateliers est déjà un momentcaptivant. Tout un public estintéressé par cette dimensionartisanale, manuelle, ainsi quepar l’aspect commercial ou lesmétiers du son.

Elève de l ’ITEMM

Vincent Niqueux

Vincent Niqueux est le direc-teur de l'Institut technologiqueeuropéen des métiers de lamusique. Qu'est-ce qui se cachederrière ce nom un peu mysté-rieux ? une structure en prisedirecte avec les réalités profes-sionnelles du monde musical.Portrait.