AVIS LE DOSSIER PATIENT - Volksgezondheid · 2018. 11. 7. · de sa compétence, l'objectif étant...

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1 FOD VOLKSGEZONDHEID, VEILIGHEID VAN DE VOEDSELKETEN EN LEEFMILIEU SPF SANTE PUBLIQUE, SECURITE DE LA CHAINE ALIMENTAIRE ET ENVIRONNEMENT ---- Directoraat-generaal Organisatie gezondheidszorgvoorzieningen ---- ---- Direction générale de l’Organisation des Etablissements de Soins ---- Federale Commissie “ Rechten van de patiënt” ----- Commission fédérale « Droits du patient » ---- AVIS LE DOSSIER PATIENT Le 21 novembre 2017

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FOD VOLKSGEZONDHEID, VEILIGHEID VAN DE

VOEDSELKETEN EN LEEFMILIEU

SPF SANTE PUBLIQUE, SECURITE DE LA

CHAINE ALIMENTAIRE ET ENVIRONNEMENT

----

Directoraat-generaal Organisatie

gezondheidszorgvoorzieningen

----

----

Direction générale de l’Organisation des

Etablissements de Soins

----

Federale Commissie “ Rechten van de

patiënt”

-----

Commission fédérale « Droits du patient »

----

AVIS

LE DOSSIER PATIENT

Le 21 novembre 2017

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I. Introduction

La loi relative aux droits du patient, qui date déjà de 2002, est une bonne loi dont les lignes directrices, 15 ans plus tard, sont toujours d'actualité. Les prestataires de soins et les patients signalent régulièrement que plusieurs notions nécessitent d'être précisées et que certains aspects de la loi ne sont pas suffisamment spécifiés. L'e-Santé ajoute en outre une nouvelle dimension aux droits du patient. La Commission fédérale "Droits du patient" (dénommée ci-après "la Commission") attache beaucoup d'importance au plan e-Santé et considère le dossier patient comme étant un maillon on ne peut plus important pour parvenir à des soins intégrés. Les droits du patient sont indispensables dans le cadre de l'élaboration du plan d'action e-Santé. C'est la raison pour laquelle la Commission souhaite mettre son savoir-faire à disposition dans les limites de sa compétence, l'objectif étant de promouvoir la qualité de soins dans le respect des droits du patient. La Commission a e. a. pour mission d'évaluer l'application de la loi relative aux droits du patient et de formuler des recommandations. Elle conseille la ministre de sa propre initiative ou à la demande de cette dernière au sujet de l'application de la loi relative aux droits du patient. La Commission estime qu'un avis dans lequel sont précisés certains points relatifs au droit de disposer d'un dossier patient, peut venir renforcer la poursuite du développement du "Personal Health Record" (PHR) et le partage électronique de données dans le respect des droits du patient. Quelle que soit la forme du dossier, papier ou électronique, les droits du patient doivent toujours être respectés. Cet avis a pour objectif d'optimiser l'application permanente des droits du patient dans la pratique, où le dialogue entre le patient et le prestataire de soins continue d'occuper une place centrale. Le dossier patient joue un rôle de soutien important dans la communication entre les professionnels de la santé, mais aussi avec le patient et sa famille. De plus, le dossier patient constitue un instrument important dans le cadre de la « health literacy ». Au vu de l'importance de la synergie entre son avis d'une part, et les développements et travaux dans le cadre du plan e-Santé d'autre part, la Commission, lors de l'élaboration de cet avis, s'est également accordée avec le chef de projet du point d'action 10 "Accès aux données par le patient (PHR)".

II. Identification des problèmes et avis

1. Définition du "dossier patient"

1.1. Exposé du problème

La loi relative aux droits du patient ne donne aucune définition de la notion de "dossier patient".

À l'heure d'aujourd'hui, il existe différentes appellations pour les dossiers reprenant des données de santé, à savoir "dossier patient", "dossier médical général", "dossier infirmier", "dossier médical", "dossier de soins (multidisciplinaire)", ... Un très grand nombre de termes sont en outre utilisés dans le cadre de l'e-Santé, p. ex. "dossier médical informatisé" (DMI), "personal health record (PHR)", "dossier médical global" (DMG), "dossier pharmaceutique partagé (DPP)", "Summarized Electronic Health Record (sumehr)", schéma de médication, ...

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Il n'existe aucune obligation légale de tenir à jour le dossier patient sous une forme électronique.

Le plan d'action e-Santé stipule qu'à l'horizon 2019, chaque profession de soins devra disposer d'un dossier patient informatisé. Par ailleurs, une série de points d'action contraindront indirectement les prestataires de soins à passer à un dossier patient tenu à jour de manière totalement électronique. Prenez le point d'action 4 qui oblige les médecins à prescrire les médicaments de manière électronique à partir de 2018. Les prescriptions électroniques sont en principe consignées dans le dossier informatisé du patient. Le point d'action 9 du plan e-Santé stipule que l'enregistrement structuré et codé de certaines données ainsi que l'utilisation systématique de systèmes en vue de partager électroniquement les données du patient doivent faire intégralement partie des prestations ou trajets de soins, de sorte que leur remboursement aille intrinsèquement de pair avec l'utilisation pertinente des services eSanté. À côté de l’acte médical en tant que tel, la production d’information signifiante et utilisable dans le cadre du dossier santé électronique partagé, devient progressivement une condition du remboursement. La nomenclature sera modifiée progressivement à cette fin à partir de 20161. La ministre De Block déclare que l'utilisation du dossier médical informatisé sera obligatoire en 20202. Cependant nous ne savons pas encore comment il y sera procédé. L'article 17, §1er, du Décret du 25 avril 2014 relatif à l'organisation du réseau pour le partage de données entre acteurs des soins stipule que le Gouvernement flamand peut, après avis univoque de l'Agence, obliger l'acteur des soins, habilité à tenir le dossier individuel ou tout autre dossier imposé en vertu d'une loi, d'un décret ou d'une ordonnance, concernant un usager de soins individuel, à tenir un dossier électronique partageable3.

1.2. Discussion Il est important d'utiliser une notion et une définition qui sont univoques, de façon à

ce que tout un chacun, patients et prestataires de soins, comprenne la même chose quand il est question du dossier patient.

La loi luxembourgeoise relative aux droits du patient a inclus une définition. Ils définissent le "dossier patient" comme suit : "L’ensemble des documents contenant les données, les évaluations et les informations de toute nature concernant l’état de santé d’un patient et son évolution au cours du traitement, indépendamment de la nature de leur support". À l'heure actuelle, le contenu et la définition du dossier patient sont souvent utilisés l'un pour l'autre, ce qui contribue à la confusion. Une seule définition est possible, alors que le contenu d'un dossier patient sera différent en fonction du type de prestataire de soins.

Le site internet http://www.ar78.be/ annonce une adaptation de la loi relative aux droits du patient (art. 9, §1er), à savoir "Le patient a droit à un dossier de patient électronique soigneusement tenu à jour et conservé en lieu sûr.". La Commission fédérale approuve totalement le fait que nous devons évoluer à terme vers des dossiers tenus à jour de manière exclusivement électronique, mais se demande s'il est suffisant de simplement ajouter le terme "électronique" dans la loi relative aux droits du patient pour rendre la tenue à jour du dossier patient sous une forme électronique contraignante dans la pratique. En outre, les dossiers papier et électroniques continueront de coexister pendant une période transitoire.

1 E-Santé. Plan d'action e-Santé - Point d'action 9 : incitants à l'utilisation. Consulté via : http://www.plan-egezondheid.be/fr/points-daction/incitants-a-lutilisation/ 2 De Block, M. (2016, 23 juillet). Soins de santé : réalisations octobre 2014-juillet 2016 Consulté via : http://www.deblock.belgium.be/fr/gezondheidszorg-realisaties-oktober-2014-%E2%80%93-juli-2016. 3 Décret du 25 avril 2014 relatif à l'organisation du réseau pour le partage de données entre acteurs des soins, MB, 20 août 2014 (éd. 2)

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Dans le cadre du point d'action 10 du plan d'action e-Santé, un groupe de travail est en train de développer le PHR. Il s'agit là d'un nouveau concept qui existe parallèlement à la notion de "dossier patient". Le "PHR" n'est en effet pas la même chose que le "dossier patient", qui suscite encore pas mal de confusion à l'heure actuelle.

Il faut plutôt considérer le "personal health record" (PHR) ou "dossier santé" comme une application électronique utilisée par les patients pour tenir à jour, consulter, compléter leurs données de santé dans un environnement confidentiel et sécurisé et les partager avec leurs prestataires de soins. En d'autres termes, le PHR donne un aperçu complet des endroits où le patient peut retrouver un dossier patient à son nom et constitue l'unique porte d'accès pour le patient. Le patient devra en outre également avoir accès à terme, via son dossier santé, à des informations de santé fiables, à son dossier de la mutuelle, à des informations sur les associations de patients, sur l'utilisation de ses données à des fins de recherche scientifique, sur la possibilité d'enregistrer une personne de confiance et un représentant, des déclarations de volonté dans le cadre d'une planification préalable de soins, ...

1.3. Avis

Nécessité d'une définition univoque dans la loi relative aux droits du patient:

La Commission fédérale "Droits du patient" recommande d'intégrer une définition univoque pour la notion de "dossier patient" dans la loi relative aux droits du patient. Cette définition doit clairement indiquer qu'un dossier patient rassemble l'ensemble des documents et des données de quelque nature ou de quelque origine que ce soit relatifs à la santé, aux soins (préventifs, curatifs, palliatifs) du patient ou à leur évolution potentielle.

En outre, la Commission estime important d'ajouter à la définition dans la loi un paragraphe stipulant que les données présentes dans le dossier doivent être enregistrées de façon à être facilement accessibles/lisibles pour le patient et le prestataire de soins.

La Commission recommande d'inclure dans l'exposé des motifs, au niveau de cette définition, plusieurs exemples clairs des documents et données visés. En voici quelques-uns : données administratives et personnelles, évaluations, comptes rendus d'examens, protocoles, rapports, images médicales, …

Comme exemples de l'origine de ces données et documents, citons l'origine médicale, infirmière, paramédicale, les ajouts par le patient, …

Différence importante entre un dossier patient et le dossier de santé ou PHR : La Commission souligne qu'il existe une différence importante entre le dossier patient et

le dossier santé, qui est plus large. Comme indiqué dans son avis précédent (accès), la Commission reste d'avis qu'il faut que le patient dispose d'une porte d'accès simple et unique à toutes les données de santé et de bien-être pertinentes pour lui. Pour ce faire, comme indiqué dans le rapport annuel du service fédéral de médiation "Droits du patient" (2016)4, une concertation et une collaboration entre l'autorité fédérale et les Communautés s'avèrent nécessaires.

Coordination des définitions du dossier patient qui existent déjà Enfin, la Commission tient à souligner qu'une forme de définition du dossier patent existe déjà dans d'autres législations (p. ex. la loi sur les hôpitaux). Une coordination de ces différentes définitions est impérative pour aboutir à une notion dépourvue d'ambiguïté de ce qu'il faut entendre par "dossier patient".

4 Service fédéral de médiation "Droits du patient" (2017). Rapport annuel 2016. Consulté via : https://www.health.belgium.be/nl/de-federale-ombudsdienst-rechten-van-de-patient.

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Nécessité de règles claires, définies dans le temps et assorties de mesures transitoires, pour que la tenue à jour électronique du dossier patient soit effectivement contraignante à partir de 2020 La Commission fédérale souligne qu'il est dans l'intérêt du patient et des prestataires de soins qu'à un moment donné, les dossiers patients soient uniquement tenus à jour sous forme électronique. Il nous paraît insuffisant de seulement l'inscrire dans la loi relative aux droits du patient. Il convient toutefois de tenir compte du fait que pendant une période transitoire, les dossiers papier continueront d'exister à côté des dossiers électroniques. Ces dossiers papier aussi doivent rester soumis à l'application de la loi relative aux droits du patient afin de garantir les droits du patient même dans le cas d'un dossier patient "papier". La Commission fédérale recommande d'élaborer des règles claires, définies dans le temps et assorties de mesures transitoires, pour que la tenue à jour électronique du dossier patient soit effectivement, comme le prévoit la ministre De Block, contraignante et ce à partir d’un moment à préciser.

Prise en compte de la réalité des prestataires de soins et des patients dans la mise en œuvre du dossier électronique. La Commission fédérale souligne l'importance, dans la transition vers des dossiers patient électroniques, d'être attentif à la difficulté pour certains prestataires de soins de répondre à la totalité des possibilités suggérées de numérisation, de même qu'à la réalité du fossé numérique dans le chef de certains patients, dont les plus vulnérables.

Enfin, la commission veut que dans ce cadre l’on accorde une attention particulière pour les dossiers patients dans le cadre de la médecine de contrôle et d’expertise. Ces derniers ne sont pas concernés dans le plan e-Santé. De ce fait, l’échange de données via le support papier ne poursuivra encore plus longtemps. Il faut également que l’on veille à ce que ces dossiers continuent à tomber sous l’application de la loi relative aux droits du patient.

2. Contenu minimum du dossier patient - signification de la notion de "dossier patient soigneusement tenu à jour"

2.1. Exposé du problème Pour certains types de dossiers patients, l'on retrouve fragmentairement une définition limitée de leur contenu. Par exemple dans l'arrêté royal du 3 mai 1999 relatif au dossier médical général5 et dans l'arrêté royal du 3 mai 1999 déterminant les conditions générales minimales auxquelles le dossier médical doit répondre6, l'on retrouve une définition et/ou une description du contenu du dossier patient, mais cela reste insuffisamment clair et global. Il va de soi que la définition ne peut pas être limitative, mais elle doit en même temps englober suffisamment d'éléments. Il n'existe pas de dispositions légales en la matière pour tous les groupes professionnels. L'absence de toute autre concrétisation du contenu du dossier patient dans la loi relative aux droits du patient est à l'origine de pratiques et d'interprétations divergentes chez les prestataires de soins. Par conséquent, la signification de "soigneusement tenu à jour" n'est pas suffisamment claire. Le service fédéral de médiation "Droits du patient" signale déjà depuis son rapport annuel de 2007 qu'il a été confronté à plusieurs reprises à des plaintes de patients pour qui le dossier patient n'était pas soigneusement tenu à jour par le prestataire de soins ou le dossier ne contenait pas suffisamment de données qualitatives. Il a constaté que la réglementation actuelle est peu utile pour ce qui est de déterminer ce qui doit nécessairement se trouver

5 Arrêté royal du 3 mai 1999 relatif au dossier médical général, MB 17 juillet 1999, p. 27422 6 Arrêté royal du 3 mai 1999 déterminant les conditions générales minimales auxquelles le dossier médical, visé à l’article 15 de la loi sur les hôpitaux, coordonnée le 7 août 1987, doit répondre, MB 30 juillet 1999, p 28462

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dans le dossier patient7. Dans son rapport annuel 2016, il a formulé comme recommandation prioritaire qu'il fallait définir un contenu minimum pour le dossier patient8. En prolongement de celle-ci, la Commission tient à souligner que les notes personnelles font partie du dossier patient. Leur consultation est toutefois exclue à moins que la personne de confiance ne soit un praticien professionnel. Dans la pratique, beaucoup d'imprécisions s'avèrent encore entourer ce concept. Compte tenu de l'évolution d'une pratique monodisciplinaire vers une collaboration multidisciplinaire, la question se pose de savoir si la notion de notes personnelles, telle qu'elle est décrite dans l'exposé des motifs, est encore suffisamment actuelle. 2.2. Discussion Outre une définition univoque (cf. supra, point 1), il est nécessaire de mieux préciser le contenu minimum d'un dossier patient. Ce contenu peut varier en fonction du type de prestataires de soins (médecin, kinésithérapeute, dentiste, ...). Pour chaque type de prestataire de soins, il faut définir le contenu minimum du dossier patient, qui sera également clair et transparent pour tous les prestataires de soins et les patients. Le dossier patient exerce différentes fonctions importantes qui ne pourront être menées à bien qu'à condition que le contenu du dossier patient soit correct et complet. Le dossier patient est en premier lieu un outil de travail important pour le prestataire de soins. C'est un aide-mémoire, toutes les informations relatives au patient sont rassemblées dans un seul et même dossier. Il permet de garantir la continuité des soins : à l'aide notamment du dossier patient, le prestataire de soins peut suivre et évaluer l'état de santé du patient, convoquer le patient de manière préventive et faire le lien avec d'anciennes maladies ou affections. La continuité sera également assurée en cas de transfert du patient vers un autre prestataire de soins. Afin de pouvoir garantir la qualité et la continuité des soins, il est nécessaire que le prestataire de soins fasse un compte rendu minimal de chaque consultation (date, raison, examen/traitement). Chaque prestataire de soins devra noter ce compte rendu minutieusement. Dans ce cas-ci, le logiciel pourrait jouer un rôle de soutien en prévoyant des possibilités standard de remplissage. À l'heure actuelle, il existe trop de différences entre les logiciels. Le dossier patient est également un moyen de communication important aussi bien entre les différents prestataires de soins qui traitent le même patient, qu'entre le prestataire de soins, le patient et sa famille, et permet d'appuyer le dialogue entre le patient et le prestataire de soins, ce qui est - il va sans dire - l'élément prioritaire. Faire en sorte que le patient soit un partenaire actif dans son processus de soins, suppose qu'il peut disposer de toutes les informations nécessaires. Il va de soi que le patient doit également pouvoir retrouver ces informations dans son dossier patient. Ces informations concernent non seulement son état de santé actuel, mais également l'évolution probable de celui-ci, les différentes options de traitement, ... Le dossier patient soigneusement tenu à jour est un complément indispensable au dialogue entre le patient et le prestataire de soins. Dans le cadre du plan d'action e-Santé, certains points d'action (PA1, PA6) visent à définir le contenu du dossier patient par type de prestataire de soins. La Commission fédérale possède dans ce cadre une compétence d'avis importante lorsqu'il s'agit de l'application des droits du patient. Il est important de réunir l'expertise et la compétence des points d'action e-Santé et de la Commission fédérale "Droits du patient". Les choix effectués dans le cadre de l'e-Santé dans ce domaine, doivent en effet être en totale corrélation avec la loi relative aux droits du patient.

7 Service fédéral de médiation "Droits du patient" (2012) Rapport annuel 2011, p. 88 et suiv. Consulté via : https://www.health.belgium.be/fr/le-service-de-mediation-federal-droits-du-patient 8 Service fédéral de médiation "Droits du patient" (2017). Rapport annuel 2016, p. 38 et suiv. Consulté via : https://www.health.belgium.be/nl/de-federale-ombudsdienst-rechten-van-de-patient.

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Quant au sumehr, des accords ont déjà été conclus en ce qui concerne son contenu minimum. La Commission fédérale applaudit à ces accords et soutient l'encouragement de l'autorité à remplir et à télécharger le sumehr. Cependant aucun critère de qualité ni aucun contrôle n'y ont jusqu'à présent été associés. Il s'avère en outre essentiel que toutes les données soient enregistrées de manière lisible. Toutes les données médicales/thérapeutiques doivent si possible, outre une description lisible pour le patient, également mentionner chaque fois un code permettant aux prestataires de soins de parler la même langue. 2.3. Avis La Commission fédérale fait les recommandations suivantes pour ce qui est du contenu minimum et de la tenue à jour soigneuse du dossier patient :

L'évaluation systématique des résultats des travaux réalisés dans le cadre du plan d'action e-Santé dans ce domaine, par la Commission fédérale "Droits du patient", au niveau de leur conformité avec les droits du patient.

L'intégration d'un contenu minimum pour chaque dossier patient dans la future loi relative à la qualité de la pratique des soins de santé, ainsi qu'un contenu minimum pour chaque groupe professionnel. La loi luxembourgeoise en matière de droits du patient (section 3, article 15) est une source d'inspiration possible.9

L'organisation d'une formation à l'intention des prestataires de soins sur "la façon de formuler soigneusement les informations dans un dossier", avec une attention particulière pour la fonction du dossier patient en tant qu'outil de travail et moyen de communication entre les prestataires de soins entre eux et entre le prestataire de soins, le patient et sa famille.

Lors de l'enregistrement des données médicales/thérapeutiques, outre la description, qui est compréhensible pour le patient, l'obligation de mentionner chaque fois un code permettant aux prestataires de soins de parler la même langue (opérabilité sémantique).

La prévision de mécanismes de contrôle clairs, qui veilleront en permanence à la qualité du contenu des dossiers.

Lors du renouvellement du DMG ou du changement de médecin titulaire du DMG, le médecin parcourt le sumehr avec le patient de façon à ce que ce dernier puisse éventuellement apporter des ajouts et/ou corrections et améliorer ainsi sa qualité.

L'augmentation des standards minimums auxquels les logiciels devront satisfaire pour garantir la qualité et la continuité des soins. Actuellement, les différences entre les divers logiciels sont encore trop nombreuses, ce qui nuit à la qualité et à la continuité des soins. Les logiciels pourraient rendre certains champs obligatoires, de façon à ce que le prestataire de soins, après chaque contact avec un patient, intègre des notes minimales dans le dossier patient (p. ex. la demande d'aide, le suivi/les décisions) ; des standards qui prévoient des notifications automatiques lorsqu'un avis ou une prescription interfère avec des éléments de l'anamnèse ou avec une médication devraient également être un minimum.

La tenue avec soin d'un dossier patient électronique est une évolution qui doit être encouragée et soutenue. Il faut du temps pour la mettre en œuvre et les prestataires de soins doivent en avoir l'opportunité. Des mesures transitoires sont nécessaires. La Commission recommande toutefois de prévoir des sanctions en cas de non-respect permanent de l'obligation de tenir soigneusement un dossier à jour.

9 Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg. (2014). Droits et obligations du patient. Consulté via http://legilux.public.lu/eli/etat/leg/loi/2014/07/24/n2/jo.

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Comme rappelé dans l'exposé du problème, la Commission préconise de réexaminer la notion de "notes personnelles" et de la faire coïncider avec la pratique multidisciplinaire actuelle. La Commission est prête à participer à son élaboration.

3. Définition des données concernant des tiers

3.1. Exposé du problème La loi relative aux droits du patient ne prévoit actuellement aucune définition relative aux "données concernant des tiers". 3.2. discussion La notion de "données concernant des tiers" mène souvent dans la pratique à des ambiguïtés et à des discussions. La distinction entre les "données concernant des tiers" et les "données provenant de tiers" entraîne une confusion. Ce qui est également confirmé par le service

fédéral de médiation10. Par "données concernant des tiers", il faut entendre aussi bien les données "concernant des tiers confiées par le patient" que les données "relatives à un proche du patient, impliqué dans la thérapie familiale", ... La loi stipule que les données concernant des tiers n'entrent pas dans le cadre du droit de consultation. Ces données ne peuvent par conséquent pas être partagées. Comme déjà recommandé dans le rapport annuel 2016 du service fédéral de médiation, la loi du Grand-Duché du Luxembourg peut servir de source d'inspiration en ce qui concerne la notion de ces données et leurs modalités d'accès : “Les données fournies par des tiers peuvent ne pas être divulguées au patient, pour autant qu’elles n’intéressent ni les soins, ni la continuité des soins. Les données à caractère personnel concernant des tiers ne sont jamais révélées11 ”. Les notes sont en outre formulées différemment dans le dossier, ce qui pourrait les rendre susceptibles de poser problème. À titre d'exemple : "le fils signale que son père continue de boire" ou "l'entourage signale que Monsieur X continue de boire", les deux phrases veulent dire la même chose mais ne seront peut-être pas interprétées de la même manière. Pour terminer, il existe également d'autres situations encore plus difficiles et/ou sensibles, p. ex. dans le cadre de la thérapie familiale ou de l'analyse génétique, où le manque de directives entraîne une confusion supplémentaire. 3.3. Avis La Commission fédérale recommande d'intégrer une définition pour la notion de

"données concernant des tiers" dans la loi relative aux droits du patient, comme déjà proposé dans son avis du 9 septembre 2016 sur l'accès au dossier patient électronique partagé (Personal Health Record)12.

Les données concernant des tiers sont des données qui concernent d'autres personnes que le patient, qui ne concernent pas le patient. À propos de cette définition, il importe de préciser explicitement ceci :

Les données fournies par des tiers ne sont pas des données concernant des tiers au sens indiqué dans la définition et par conséquent, elles doivent également être disponibles pour le patient, à l'exception des données qui n'ont rien à voir avec les soins ou la continuité des soins au patient.

10 Service fédéral de médiation "Droits du patient" (2017). Rapport annuel 2016. Consulté via : https://www.health.belgium.be/nl/de-federale-ombudsdienst-rechten-van-de-patient. 11 Art. 17 (2) de la loi du Grand-Duché du Luxembourg 12 Commission fédérale "Droits du patient" (2016) Accès au dossier patient électronique partagé (Personal Health Record)Consulté via :http://organesdeconcertation.sante.belgique.be/fr/sites/default/files/documents/2016.09.26_advies_toegang_phr.pdf.

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Les données à caractère personnel concernant des tiers ne sont jamais communiquées au patient."

Trois éléments fondamentaux sont essentiels pour la notion de données concernant des tiers :

- Il doit s'agir de données qui concernent d'autres personnes que le patient. - Ces données ne concernent pas le patient lui-même. - Les données ne concernent pas les soins ou la continuité des soins au patient.

Il est en outre recommandé, selon la Commission, de mieux spécifier dans l'exposé des motifs les informations qu'il faut entendre par "données concernant des tiers", et cela à l'aide de quelques exemples, pour que ce soit plus clair.

Voici un exemple permettant de mieux préciser cette notion : - Dans le cadre d'une thérapie relationnelle, la partenaire du patient, dans le cadre d'un accompagnement individuel, confie au psychiatre qu'elle s'est fait avorter par le passé et qu'elle ne l'a jamais dit à son partenaire. Cette information se retrouve dans le dossier du patient. Cette information est une donnée concernant des tiers ; le patient ne connaît pas cette information, qui n'est pas pertinente pour son état de santé. Cette donnée ne peut donc pas être consultée ou partagée. Cette information s'avère néanmoins pertinente dans le cadre de la thérapie relationnelle car le patient désire avoir un enfant contrairement à sa partenaire, justement en raison de son sentiment de culpabilité vis-à-vis de l'avortement. Cette information reste malgré tout une "donnée concernant des tiers". Il faut cependant encourager la partenaire à partager cette information. Si cela se fait, l'information reste une "donnée concernant des tiers", mais le patient connaît cette information, qui s'avère pertinente pour son état de santé. Cette information entre par conséquent dans le cadre du droit de consultation. Les prestataires de soins doivent veiller à ce qu'aucune information concernant des tiers

ne soit reprise dans le dossier du patient. Si néanmoins c'est le cas, la Commission recommande de scinder le dossier.

4. Définition de "conservé en lieu sûr" 4.1. Exposé du problème La loi relative aux droits du patient stipule que le patient a droit à un dossier conservé en lieu sûr. Cependant aucune spécification n'est donnée. Il n'existe pas de directive uniforme. 4.2. Discussion "Conservé en lieu sûr" dans la loi relative aux droits du patient signifie que le dossier doit être protégé soit contre les personnes non autorisées qui veulent consulter le dossier patient, en faire une copie, le dérober ou le saboter, soit contre les catastrophes telles qu'un incendie ou une inondation13. Il ressort de la revue de littérature de Vansweevelt & Callens (2011) que pour conserver un dossier papier, une armoire est considérée comme suffisamment sûre. Dans le cas d'une conservation électronique des dossiers, davantage de directives ont été fixées telles qu'un système d'identification pour se connecter, un programme antivirus performant, une sauvegarde, un "firewall", l'utilisation de "loggings"...

13 Vansweevelt, T. & Dewallens, F. (2011). Het patiëntendossier. Reeks Gezondheidsrecht 2. Antwerpen: Intersentia nv.

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Pour les hôpitaux, une série de règles claires en la matière ont été fixées par l'arrêté royal du 10 mai 201514 relatif à la force probante des données enregistrées, traitées, communiquées au moyen de techniques photographiques et optiques par les hôpitaux, ainsi qu'à leur reproduction sur papier ou sur tout autre support lisible pour l'application dans les soins de santé. Il est e. a. stipulé que :

L'intégrité, l'accessibilité et la lisibilité des données numérisées devront être

garanties pendant toute la durée de conservation (30 ans).

La donnée numérisée et son original non numérisé restent liés par un identificateur

unique jusqu'au moment de la destruction de l'original. Cependant il n'est

mentionné nulle part quand cet original peut être détruit ?

Les données numérisées doivent, à l'issue du délai de prescription utilisé par

l'institution concernée, qui est au moins équivalent au délai de prescription légal

(la loi sur les hôpitaux prévoit une durée de conservation de 30 ans), être détruites

à l'aide d'un processus documenté.

L'hôpital doit disposer d'une politique de sécurité de l'information. L'arrêté royal

énumère les différentes mesures que l'hôpital est au minimum tenu de prendre pour

sécuriser les données : disposer d'une politique de sauvegarde adéquate et

documentée ainsi que d'un plan de reprise en cas de sinistres, effectuer

suffisamment de sauvegardes périodiques, ...

Le règlement du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection

des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la

libre circulation de ces données prévoit comme obligation générale pour tout traitement que

« le responsable du traitement met en œuvre des mesures techniques et organisationnelles

appropriées pour s’assurer et être en mesure de démontrer que le traitement est effectué

conformément au présent règlement. Ces mesures sont réexaminées et actualisées si

nécessaire. Lorsque cela est proportionné au regard des activités de traitement, les mesures

comprennent la mise en œuvre de politiques appropriées en matière de protection des

données par le responsable du traitement15. »

Selon la Commission, il est nécessaire de déterminer également en dehors des

hôpitaux, dans des pratiques de groupe par exemple, une série de mesures claires et

appropriées en lien avec cette politique de protection des données.

4.3. Avis

Le patient a droit à un dossier patient conservé de manière électronique en lieu sûr. Ceci implique l'obligation de respecter les exigences minimales d'une conservation électronique sûre conformément aux recommandations de la plateforme eHealth et

14 Arrêté royal du 10 mai 2015 relatif à la force probante des données enregistrées, traitées,

communiquées au moyen de techniques photographiques et optiques par les hôpitaux, ainsi qu'à leur reproduction sur papier ou sur tout autre support lisible pour l'application dans les soins de

santé, MB 11/06/2015

15 Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données), publié le 4 mai 2016.

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du Règlement général sur la protection des données16 et la législation belge relative à la vie privée. La Commission fédérale se demande s'il ne faudrait pas prévoir des règles supplémentaires en matière de sécurité pour tous les prestataires de soins.

Il faut également définir des règles et modalités précises pour la conservation du

dossier patient en cas de décès ou de cessation d'activité d'un prestataire de soins. Le Code de déontologie des médecins prévoir en son article 47 : « Lorsque sa pratique cesse, le médecin transmet au médecin désigné par le patient tous les renseignements utiles et nécessaires pour garantir la continuité des soins. Si le conseil provincial concerné est informé du fait que ce médecin n'est plus en mesure de satisfaire à cette obligation, il prend les dispositions nécessaires pour :

- la conservation adéquate des dossiers médicaux afin de permettre d'assurer la continuité des soins,

- la préservation du secret professionnel ». Actuellement, ces situations ne sont pas réglées de façon suffisamment claire pour garantir la conservation en toute sécurité du dossier patient dans ces cas-là. La Commission fédérale est prête à participer à une réflexion à ce sujet.

5. Durée de conservation (le dossier lui-même + disponibilité sur le réseau d'échange)

5.1. Exposé du problème La loi relative aux droits du patient ne stipule aucune durée de conservation uniforme. La durée de conservation d'un dossier n'est pas claire aussi bien pour le patient que pour certains types de prestataires de soins. 5.2. Discussion Le délai de prescription d'une action en responsabilité17 est en principe identique pour tous les prestataires de soins. Il est dès lors difficile de comprendre pourquoi la durée de conservation des dossiers patients diffèrerait selon le type de prestataire de soins. Un dossier médical doit être conservé pendant 30 ans18, un dossier infirmier à l'hôpital pendant 20 ans, un dossier pharmaceutique pendant 10 ans, ... Au jour d'aujourd'hui, il est en outre quasiment impossible pour les patients de savoir combien de temps chaque prestataire de soins doit conserver son dossier patient. Selon la Commission, aucune raison ne justifie le fait qu'un médecin p. ex. doive conserver le dossier patient plus ou moins longtemps qu'un pharmacien. Le dossier patient exerce plusieurs fonctions. La conservation du dossier patient n'est pas seulement - et non pas en premier lieu - nécessaire pour des raisons de responsabilité. La qualité et la continuité des soins, la fonction du dossier patient en tant que moyen de communication et également sa fonction en tant que base pour la recherche scientifique justifient une durée de conservation suffisamment longue.

16 Parlement européen et Conseil de l'Union européenne (2016). Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif au règlement général sur la protection des données. Consulté via : http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A32016R0679. 17 Articles 2262 et suivants du Code civil 18 Article 46 du code de déontologie des Médecins, arrêté royal du 3 mai 1999 déterminant les conditions

générales minimales auxquelles le dossier médical, visé à l'article 15 de la loi sur les hôpitaux, coordonnée le 7 août 1987, doit répondre. (NOTE : Consultation des versions antérieures à partir du 30-07-1999 et mise à jour au 25-06-2002.) « Les dossiers médicaux doivent être conservés pendant trente ans après le dernier contact avec le patient, en lieu sûr et en tenant compte du respect du secret professionnel ». Après ce délai, la destruction des dossiers peut être effectuée avec le même respect.

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A l’avenir il y aura de plus en plus de dossiers électroniques complets; le problème du stockage sera alors moins prégnant.

À l'heure actuelle, il n'existe aucune sanction dans le cas où un dossier n'a pas été conservé pendant la durée légalement prévue. 5.3. Avis

La Commission fédérale recommande d'intégrer une durée de conservation uniforme dans la loi relative aux droits du patient. Puisque la conservation du dossier patient est importante avant tout pour la continuité et la qualité des soins, la Commission recommande d'adopter un délai de conservation de 30 ans, à compter du dernier contact avec le patient et en dépit du décès éventuel de ce dernier. Les données du patient peuvent être partagées pendant cette même période de 30 ans, pourvu que les conditions relatives au partage électronique de données, comme le consentement éclairé du patient, soient remplies. La possibilité de partager les données de manière électronique prend immédiatement fin au décès du patient.

Il est entendu que cette période de 30 ans constitue une durée minimale. En effet, rien n’interdit de conserver les données sur des périodes plus longues

La Commission recommande de prévoir une sanction en cas de non-respect de cette durée de conservation.

Ici aussi, la remarque relative à la nécessité de prévoir des règles claires pour les situations d'arrêt de la pratique par un prestataire de soins ou de décès de celui-ci, est d'application (cf. ci-dessus, point 4 : Définition de "conservé en lieu sûr".

6. Accès du patient à son dossier patient

6.1. Exposé du problème Il n'existe à l'heure actuelle aucune directive claire sur l'accès direct et la durée

d'accès. L'avis de la Commission fédérale "Droits du patient" relatif à l'accès au dossier patient électronique partagé19 stipule clairement que le patient a le droit d'avoir un accès direct en ligne à son dossier patient, sans demande préalable à un praticien professionnel des soins de santé (sauf exceptions légales). Sur le terrain, des règles diverses régissent l'accès immédiat ou différé.

En raison d'un manque de précisions sur le terrain, les objectifs visés d'un patient qui gère davantage sa santé, d'empowerment du patient et de prise de décision partagée ("shared decision making") entre le prestataire de soins et le patient - ne sont pas (encore) toujours atteints.

Un accès facile par le patient à ses données implique également une transmission plus facile des données. À l'heure d'aujourd'hui, les patients ne sont pas toujours suffisamment conscients des dangers potentiels de la transmission de données confidentielles à des tiers. Nous pensons non seulement aux médecins d'assurance ou aux médecins-conseils, mais également à l’époux (se) ou à l'échange de données dans le cadre d'un divorce (difficile) ou d'une tutelle.

6.2. Discussion

L'élément le plus important dans une relation entre patient et prestataire de soins est une bonne communication. Une communication ouverte et honnête entraîne un sentiment de confiance, moins d'anxiété, davantage d'observance thérapeutique, un

19 Commission fédérale "Droits du patient" (2016) Accès au dossier patient électronique partagé (Personal Health Record)Consulté via: http://organesdeconcertation.sante.belgique.be/fr/sites/default/files/documents/2016.09.26_advies_toegang_phr.pdf.

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respect mutuel, ... Un accès direct par le patient à ses données peut venir appuyer et renforcer cela et mener ainsi à une prise de décision partagée.

Au début de l'année 2017, la "Vlaams Patiëntenplatform" (VPP) a mené une enquête relative aux droits du patient et à l'accès aux données de santé. Cette enquête a révélé qu'un accès électronique est très fortement demandé20. Quant à la question de savoir comment les patients souhaitaient être tenus informés des nouvelles informations diagnostiques (potentiellement graves) les concernant, les résultats obtenus sont divergents. Certains patients souhaitent connaître les résultats à l'avance, de façon à pouvoir préparer leur entretien avec le prestataire de soins et poser des questions ciblées. Une autre partie souhaite d'abord être informée par le biais du praticien professionnel de façon à ne faire aucune interprétation erronée et à ne pas se faire du souci inutilement. ¾ des participants ont opté, en premier ou en deuxième choix (parmi cinq alternatives différentes), pour une information différée, étant entendu qu'ils ont pu eux-mêmes opter au préalable pour cette information différée. Dans le cas d'une information différée, le patient peut suivre quels résultats sont déjà disponibles sans pouvoir en voir le contenu ; le médecin ouvrira ces données après avoir discuté des résultats avec le patient. Près de la moitié des participants a sélectionné comme premier ou deuxième choix, vouloir recevoir les résultats d'examen en même temps que le médecin (information immédiatement disponible). Avec l'introduction d'une information différée, le patient peut, en concertation avec le prestataire de soins, choisir l'approche qui correspond le mieux à ce qu'il désire. La "patiëntenfederatie Nederland" en est également arrivée à des constatations semblables21. L'enquête réalisée aux Pays-Bas a également révélé très clairement de nombreuses divergences parmi les patients quant à la mise à disposition ou non des résultats (de laboratoire) au sein du portail, dès le moment où ils sont disponibles. Un groupe de patients souhaite avoir les résultats directement dans son dossier, d'autres souhaitent d'abord un entretien avec leur médecin ou leur spécialiste, au cours duquel ils recevront des explications. Ce qui est également compréhensible, car chaque personne, situation, examen est différent. Les souhaits des patients peuvent être très différents selon qu'il s'agit du résultat d'un diagnostic d'une maladie mortellement grave ou de résultats d'un examen de routine. En laissant le choix au patient, tout un chacun peut prendre cette décision, justement parce que les avis sur la question sont partagés. Chaque patient est différent, l'impact des résultats peut être différent d'une personne à l'autre, le système d'accès doit dès lors être adapté à cette constatation.

À l'heure actuelle, la loi stipule déjà très clairement que le patient a le droit de ne pas savoir. Cela signifie que le patient décide lui-même s'il ne souhaite pas connaître certaines informations.

6.3. Avis

L'autorité doit clarifier la réglementation relative à "l'accès par le patient" en vue de faire disparaître les différences dans la pratique et de faire la clarté pour le patient et les prestataires de soins.

L'individualité et l'autonomie du patient sont des principes importants. Le patient-type (unique) n'existe pas. Il appartient à chaque patient de décider comment il souhaite avoir accès à ses données. Si le patient souhaite un accès immédiat et que le praticien professionnel estime qu'un accès différé est plus souhaitable, ce point devra être discuté au cours d'un dialogue. La décision finale d'un accès direct ou différé appartient au patient. Si le praticien professionnel estime que l'accès direct

20 Vlaams Patiëntenplatform (2017). 1 op 5 weet na 15 jaar nog niet dat er patiëntenrechten bestaan. Consulté via: www.vlaamspatientenplatform.be. 21 Patiëntenfederatie Nederland (2017). Rapport meldactie “Patiëntportalen van ziekenhuizen” Consulté via : https://www.patientenfederatie.nl/images/Actueel/Rapport-meldactie-Patientportalen.pdf.

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risque de porter gravement préjudice à la santé du patient, il peut appliquer, comme déjà prévu dans la loi, l'exception thérapeutique. Les loggins sont accessibles pour le patient et les prestataires de soins avec une relation thérapeutique.

Il est par ailleurs nécessaire de prévoir des mesures de sensibilisation et des campagnes de communication à l'intention des patients concernant les règles à respecter par les utilisateurs dans l'intérêt d'un bon fonctionnement du système. Les informations personnelles et confidentielles sont directement accessibles, mais on ne les partage pas avec n'importe qui.