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® 1 PAIN: CLINICAL UPDATES • DECEMBRE 2013 VOL XXI • N O 5 • DECEMBRE 2013 Nouveaux critères pour l’addiction : Des défis diagnostiques persistants pour le traitement de la douleur par les opioïdes Jane C. Ballantyne, MD, FRCA Department of Anesthesiology and Pain Medicine University of Washington 1959 NE Pacific Street Seattle, Wash. 98195-6540 USA Email: [email protected] Cathy Stannard, MD Pain Clinic, Macmillan Centre Frenchay Hospital Bristol BS16 1LE United Kingdom Email: [email protected] I l existe depuis longtemps une tendance à considérer la douleur et l’addiction comme des entités différentes, nécessitant des traite- ments radicalement différents. Cette tendance est due en partie à l’inconfort que ressentent les cliniciens (particu- lièrement les spécialistes) lorsqu’ils tentent de traiter l’un de ces problèmes hors des limites de leur propre expéri- ence et expertise. Pourtant, lorsque la douleur est traitée médicalement, ce sont les médicaments addictifs qui sont souvent choisis (notamment les opioïdes), principalement parce que ce sont des traitements à l’efficacité unique pour la douleur. Le plus ces médicaments seront utilisés, le plus les addictions se révéleront comme un accompagnement significatif de la dou- leur, surtout dans le cas de traitement prolongé de syndrome douloureux. Il est souvent dit que l’addiction est facile à reconnaitre, qu’elle appa- rait rarement au cours du traitement de la douleur avec des médicaments addictifs, et que les cas d’addiction au cours de traitements de la douleur peuvent être pris en charge de la même manière que les autres addictions, 1-4 mais de telles généralisations simpli- fient extrêmement la situation réelle. Les experts se sont battus des années pour comprendre l’addiction, pour décrire les mécanismes de base, et s’en approcher de façon à la décrire et de la définir. 5 Même actuellement, les caractéristiques de l’addiction selon de DSM (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders) sont repensées et ré-écrites, en partie parce que les définitions précédentes de l’addiction n’étaient pas satisfaisantes lorsqu’elles étaient appliquées aux patients doulou- reux traités par les opioïdes. La littérature cite un taux d’addiction au cours du traitement de la douleur par des opioïdes qui varie de moins de 1% à plus de 50%, soulignant notre véritable incerti- tude sur la fréquence d’apparition de l’addiction, ou sur ce qu’est actuelle- ment l’addiction. 6 Les comportements des patients peuvent être interprétés de façon variable comme une toxicophilie, et si oui ou non un diagnostic formel d’addiction aux opioïdes est fait, il existe encore plus d’incertitude sur la manière de traiter une douleur intense en présence de ce diagnostic associé. Le problème est qu’aucun consensus n’existe sur la manière de reconnaitre une addiction lorsqu’elle apparait au cours du traitement de la douleur avec des médicaments additifs - et encore moins d’accord sur comment la traiter. Ce numéro de Pain : Clinical Updates abordera la compréhen- sion actuelle des bases biologiques de l’addiction, l’évolution des définitions de l’addiction, et - étant donné que le traitement au long cours de la dou- leur chronique par des médicaments additifs peut être accompagné d’une addiction ou d’un état semblable à une addiction - réfléchira sur les défis diagnostiques et thérapeutiques qui doivent être surmontés si des patients affectés nécessitent d’être aidés de manière appropriée. La neurobiologie de l’addiction L’identification d’un « centre de la récompense » dans le cerveau a ouvert la voie à une meilleure compréhension de l’addiction. L’addiction était alors comprise essentiellement comme une exécution compulsive et pathologique dans la recherche d’une « récompense » naturelle. Anatomiquement, ce centre est le système méso-cortico-limbique, comprenant l’aire tegmentale ventrale, le noyau accumbens, l’amygdale, et l’hippocampe 7 (Fig. 1). Alors que les voies finales communes sont les voies

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-

VOL XXI • NO 1 • JUNE 2013

®

Editorial Board

Editor-in-Chief

JaneÊC.ÊBallantyne,ÊMD,ÊFRCAAnesthesiology,ÊPainÊMedicineUSA

AdvisoryÊBoard

MichaelÊJ.ÊCousins,ÊMD,ÊDSCPainÊMedicine,ÊPalliativeÊMedicineAustralia

PsychosocialÊAspectsÊofÊChronicÊPelvicÊPain

Vol.ÊXXI,ÊIssueÊ1Ê JuneÊ2013

Pain is unwanted, is unfortunately common, and remains essential for survival (i.e., evading danger) and facilitating medical diagnoses. This complex amalgamation of sensation, emotions, and thoughts manifests itself as pain behavior. Pain is a moti-vating factor for physician consultations1 and for emergency department visits and is

1PAIN: CLINICAL UPDATES • DECEMBRE 2013

VOL XXI • NO 5 • DECEMBRE 2013

Nouveaux critères pour l’addiction : Des défis diagnostiques persistants pour le traitement de la douleur par les opioïdes

Jane C. Ballantyne, MD, FRCADepartment of Anesthesiologyand Pain MedicineUniversity of Washington1959 NE Pacific StreetSeattle, Wash. 98195-6540USAEmail: [email protected]

Cathy Stannard, MDPain Clinic, Macmillan CentreFrenchay HospitalBristol BS16 1LEUnited KingdomEmail: [email protected]

Il existe depuis longtemps une

tendance à considérer la douleur

et l’addiction comme des entités

différentes, nécessitant des traite-

ments radicalement différents. Cette

tendance est due en partie à l’inconfort

que ressentent les cliniciens (particu-

lièrement les spécialistes) lorsqu’ils

tentent de traiter l’un de ces problèmes

hors des limites de leur propre expéri-

ence et expertise. Pourtant, lorsque

la douleur est traitée médicalement,

ce sont les médicaments addictifs qui

sont souvent choisis (notamment les

opioïdes), principalement parce que

ce sont des traitements à l’efficacité

unique pour la douleur. Le plus ces

médicaments seront utilisés, le plus

les addictions se révéleront comme un

accompagnement significatif de la dou-

leur, surtout dans le cas de traitement

prolongé de syndrome douloureux.

Il est souvent dit que l’addiction

est facile à reconnaitre, qu’elle appa-

rait rarement au cours du traitement

de la douleur avec des médicaments

addictifs, et que les cas d’addiction au

cours de traitements de la douleur

peuvent être pris en charge de la même

manière que les autres addictions,1-4

mais de telles généralisations simpli-

fient extrêmement la situation réelle.

Les experts se sont battus des années

pour comprendre l’addiction, pour

décrire les mécanismes de base, et s’en

approcher de façon à la décrire et de

la définir.5 Même actuellement, les

caractéristiques de l’addiction selon de

DSM (Diagnostic and Statistical Manual

of Mental Disorders) sont repensées

et ré-écrites, en partie parce que les

définitions précédentes de l’addiction

n’étaient pas satisfaisantes lorsqu’elles

étaient appliquées aux patients doulou-

reux traités par les opioïdes.

La littérature cite un taux

d’addiction au cours du traitement

de la douleur par des opioïdes qui

varie de moins de 1% à plus de 50%,

soulignant notre véritable incerti-

tude sur la fréquence d’apparition de

l’addiction, ou sur ce qu’est actuelle-

ment l’addiction.6 Les comportements

des patients peuvent être interprétés de

façon variable comme une toxicophilie,

et si oui ou non un diagnostic formel

d’addiction aux opioïdes est fait, il

existe encore plus d’incertitude sur la

manière de traiter une douleur intense

en présence de ce diagnostic associé.

Le problème est qu’aucun consensus

n’existe sur la manière de reconnaitre

une addiction lorsqu’elle apparait au

cours du traitement de la douleur avec

des médicaments additifs - et encore

moins d’accord sur comment la traiter.

Ce numéro de Pain : Clinical

Updates abordera la compréhen-

sion actuelle des bases biologiques de

l’addiction, l’évolution des définitions

de l’addiction, et - étant donné que le

traitement au long cours de la dou-

leur chronique par des médicaments

additifs peut être accompagné d’une

addiction ou d’un état semblable à

une addiction - réfléchira sur les défis

diagnostiques et thérapeutiques qui

doivent être surmontés si des patients

affectés nécessitent d’être aidés de

manière appropriée.

La neurobiologie de l’addiction

L’identification d’un « centre de la

récompense » dans le cerveau a ouvert

la voie à une meilleure compréhension

de l’addiction. L’addiction était alors

comprise essentiellement comme une

exécution compulsive et pathologique

dans la recherche d’une « récompense »

naturelle. Anatomiquement, ce centre

est le système méso-cortico-limbique,

comprenant l’aire tegmentale ventrale,

le noyau accumbens, l’amygdale, et

l’hippocampe7 (Fig. 1). Alors que les

voies finales communes sont les voies

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PAIN: CLINICAL UPDATES • DECEMBRE 20132

dopaminergiques, ces centres sont aussi

traversés par des systèmes opioïder-

giques. L’hypothèse de la « récompense »

comme seule base pour l’addiction n’est

pas, toutefois, universellement accep-

tée. Quoiqu’il en soit, le système méso-

limbique peut être compris comme un

système présentant des avantages im-

portants dans l’évolution, puisque des

comportements clés pour la survie, tels

que les liens maternels, l’alimentation,

et l’activité sexuelle, sont tous rendus

possible par l’apprentissage du plaisir,

ou l’importance de l’incitation (« désir »

qui motive) produits dans ce centre.8

Quel est, exactement, le premier mé-

canisme de facilitation reste toujours

débattu ?

Les opioïdes endogènes sont des

médiateurs importants de l’addiction

à une drogue, de même qu’à d’autres

addictions comme le jeu, et ainsi

les antagonistes opioïdes peuvent

occasionnellement être utiles pour

traiter un certain nombre d’addictions.

Les opioïdes exogènes produisent

une addiction directe par un effet sur

le récepteur opioïde dans le nucleus

accumbens, et indirectement en

diminuant l’inhibition GABAergique

de la dopamine. Les opioïdes exogènes

sont hautement addictifs, mais ils ne

produisent pas systématiquement

d’addiction, surtout si ils sont pris dans

des conditions attentivement con-

trôlées pour le traitement de douleur.

De même, d’autres substances ad-

dictives comme l’alcool peuvent être

ingérées sans produire d’addiction, con-

duisant à l’addiction seulement chez les

individus susceptibles.

Lorsqu’un médicament ad-

dictif est pris pour la première

fois, cela produit une euphorie par

l’intermédiaire d’une poussée de do-

pamine dans les voies mésolimbiques.

Les opioïdes sont capables de produire

un effet euphorique spectaculaire,

particulièrement lorsqu’ils sont injec-

tés. Plus le médicament est lipophile,

plus il atteint rapidement et traverse la

barrière hémato-encéphalique, plus la

poussée est forte. Les individus haute-

ment susceptibles peuvent succomber

immédiatement à l’addiction, particu-

lièrement lorsque l’effet euphorique

est intense. Les autres pas; certains

n’expérimentent même pas d’euphorie;

et d’autres encore n’aiment simplement

pas l’effet euphorisant. Il existe des

preuves pré-cliniques et des preuves

cliniques provenant de l’utilisation des

opioïdes pour la douleur cancéreuse

que dans ces conditions, l’effet eu-

phorisant des opioïdes est réellement

émoussé.9-11 L’effet euphorisant est

un effet de renforcement positif de la

conduite toxicophile.

Malgré le fait que l’effet de ren-

forcement positif des médicaments

additifs est important pour initier

l’addiction à un médicament, surtout au

cours de l’utilisation illicite, l’addiction

médicamenteuse n’est pas maintenue

par le renforcement positif, qui tend à

s’affaiblir, mais plus largement par un

renforcement négatif.12 Le renforce-

ment négatif est la conséquence du

manque, par lequel des symptômes

déplaisants, comme l’anhédonie,

l’hyperalgésie, et une constellation

d’effets noradrénergiques, commencent

à entrainer le toxicomane à la recher-

che d’un soulagement de ces symp-

tômes de manque.

La tolérance à un médicament (le

besoin de prendre plus de médicament

pour obtenir le même effet) est une

autre conséquence de la prise continue

de médicaments, et une tolérance qui ne

sera pas satisfaite par l’augmentation de

la dose se manifestera par un manque.

Puisque la tolérance possède des origi-

nes psychologiques (associatives) aussi

Figure 1

SC

CerDMT

C-P

VPNAc

Dopamine

Opioid peptide

LH

ARC

AMG

OT

VTASNr LC

PAG

HippocampusPFC

IC

Fig. 1. Circuits neuronaux clés de l’addiction. Adapté avec la permission de Nestler.7 Les lignes en pointillés indiquent les afférences limbiques vers le noyau accumbens (Nac). Les lignes bleus représentent les circuits efférents en provenance du Nac probablement impliqués dans le circuit de récompense vis-à-vis d’un médicament. Les lignes rouges indiquent les projections du système dopaminergique mésolimbique qui est probablement un substrat très important de la récompense en réponse à un médicament. Les neurones à dopamine proviennent de l’aire tegmentale ventrale (VTA) et se projettent sur le Nac et d’autres structures limbiques, incluant le tubercule olfactif (OT), la zone ventrale du noyau putamen - noyau caudé (C-P), l’amygdale (AMG), et le cortex préfrontal (PFC). Le vert indique les neurones contenant le peptide opioïde, qui sont impliqués dans la récom-pense pour les opioïdes, l’éthanol, et peut-être la nicotine. Ces systèmes opioïdergiques incluent les circuits locaux enképhalinergiques (circuits courts) et le circuit hypothalamique mésencéphalique béta-endorphinergique (circuit long). ARC, arcuate nucleus ou noyau arqué; Cer, cervelet; DMT, thalamus dorsomédial; IC, colliculus inférieur; LC, locus coeruleus; LH, hypothalamus latéral; PAG, substance grise périaqueducale; SC, colliculus supérieur; SNr, substance noire pars reticulata; VP, pallidum ventral. A partir de Ballantyne et LaForge.6

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PAIN: CLINICAL UPDATES • DECEMBRE 2013 3

bien que pharmacologiques (non-asso-

ciatives), le changement d’humeur ou

de situation peuvent produire un état

de manque (ou une surdose).13,14 Ce qui

est observé avec la prise continue de

médicament est que la tolérance et la

dépendance déterminent ensemble le

besoin en médicament et deviennent

des forces motrices importantes pour

les comportements de toxicomanie

(Fig. 2).15

Lorsque les opioïdes sont pris de

manière continue pour le traitement

d’une douleur chronique, les adapta-

tions qui apparaissent sont similaires à

celle décrites précédemment : tolérance

et dépendance sont attendues; elles

déterminent les besoins en médica-

ment; et elles peuvent devenir des

forces importantes sur le comporte-

ment de recherche de médicament. Il

existe, toutefois,

des différences

substantielles

entre l’utilisateur

de drogues illicites

et le patient dou-

loureux traité par

opioïdes. Le patient

douloureux traité

par opioïdes évite

généralement le

stade de renforce-

ment positif, et ils

ne se présentent

pas nécessaire-

ment avec un

profil de risque

d’addiction au

début de sa propre

utilisation (voir

Fig. 3).

Alors que les

mécanismes de

renforcement lié

au médicament

décrits ici sont as-

sez bien connus, ce

qui est beaucoup

moins évident est comment et pourquoi

la prise de médicament devient com-

pulsive et ainsi entre dans le royaume

de l’addiction au médicament, qui, à

l’inverse de la tolérance et de la dépen-

dance, est considérée comme irrévers-

ible car les individus affectés restent

vulnérables aux rechutes même après

l’arrêt du médicament. Dans la mesure

où la mémoire et l’apprentissage sont

des facteurs cruciaux, l’addiction à un

médicament semble être le résultat

d’un conditionnement, où le com-

portement de recherche répétée de

médicament est combiné à l’utilisation

de ce médicament.16 Les mécanismes

sous-tendant l’irréversibilité d’un tel

conditionnement pourraient être une

régulation de gène et un véritable

remodelage physique de synapses et

de circuits dans des centres supérieurs

comme l’amygdale, l’hippocampe, et le

cortex préfrontal.16 Le patient dou-

loureux traité par opioïde représente

une réelle difficulté pour ce qui est de

comprendre ou identifier une addic-

tion. Chez les patients douloureux, à

l’inverse des utilisateurs illicites de

drogues, la recherche d’opioïdes, même

lorsqu’elle semble compulsive, n’est pas

forcément un signe d’addiction. Il existe

de nombreuses raisons qui poussent

les patients à rechercher les opioïdes,

dont leur mémorisation d’une douleur

non-traitée, le soulagement de symp-

tômes de manque, et le soulagement

d’une détresse (adaptation chimique).

De manière importante, la dépen-

dance, qui accompagne inévitablement

l’utilisation continue d’opioïde, est

une force motrice pour le comporte-

ment de recherche d’opioïde, et un

tel comportement peut s’apparenter à

une addiction et même recouvrer les

critères du DSM pour l’addiction. Une

telle dépendance est souvent spécifiée

comme « physique », encore qu’il y ait

aussi des composants psychologiques

à la détresse produite par la dépen-

dance-manque, dont la déception et

l’anhédonie - et ces symptômes ne sont

pas purement physiologiques. Même

après une diminution réussie des

opioïdes, des symptômes de manque

comme l’anhédonie et l’hyperalgésie

peuvent persister pendant des mois. La

dépendance elle-même peut être tenace

et ressembler à une addiction. Lorsque

la prise d’opioïde semble problématique

chez les patients douloureux, savons-

nous réellement si c’est ou si ce n’est

pas une addiction ?15

Evolution des définitions de l’addiction et du DSM-V

Des définitions et des critères de mala-

die sont créées dans le but d’obtenir un

consensus sur ce qui constitue un état

Fig. 2. Interdépendance de l’humeur, de la tolérance/dépendance, et de la douleur. Même chez des individus normaux, la douleur et l’humeur sont interdépendants, en partie en raison de mécanismes endogènes opi-oïdes. Les individus prenant des opioïdes exogènes de façon chronique et continue s’adaptent en développant une tolérance et une dépendance. Des facteurs psychologiques comme le stress et la détresse peuvent altérer la tolérance et ainsi induire des symptômes de manque. Pour l’individu dépendant, le besoin de plus d’opioïdes devient la réaction prédominante au stress. Malgré le fait que la douleur soit vue comme la raison principale à l’escalade posologique, la douleur est souvent secon-daire à d’autres facteurs. A partir de Ballantyne et al.15

Euphorie Dysphorie

Anal

gésie

Hyperalgésie

Symptômes de manqueRecherche d’opioïdesEnvie irrésistible

StressDétresse

Récompense

Douleur

Tolérance

Dépendance

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PAIN: CLINICAL UPDATES • DECEMBRE 20134

pathologique particulier. De plus, la

terminologie et le codage du diagnostic

sont utilisés tous les deux à l’échelon

national et global pour déterminer

quels services et traitements sont

appropriés ou nécessaires et où. Des

définitions consensuelles deviennent

ainsi cruciales pour les prestations

des services. Les besoins des services

ont été une force motrice importante

pour l’évolution des définitions de

l’addiction, et ils seront de nouveau un

facteur important, spécialement aux

Etats Unis, où la prescription abusive

d’opioïde est en pleine expansion et

où un énorme besoin non satisfait de

service existe. Il existe peu de con-

sensus sur ce qui constitue la dépen-

dance ou l’addiction chez les patients

douloureux traités par opioïde. Il n’y a

pas de critères d’accord, et des efforts

Fig. 3. Influences sur les stades de l’addiction. Les traits de personnalité possèdent l’influence la plus forte sur le début de la phase d’utilisation de médicament. Les pressions sociales, la formulation du médicament, et la mise à disposition pharmacocinétique du médicament (celle-ci étant en grande partie déterminée par la génétique) contribuent significativement à la fois à l’initiation et l’utilisation précoce répétée. Des facteurs de personnalité contribuent probablement moins à l’addiction et à la rechute, longtemps après que l’utilisation chronique de médicament a induit des modifications dans le cerveau. Les facteurs de la personnalité, la pharmacocinétique du médicament, les co-morbidités et la réponse au stress, l’utilisation continue de mé-dicament, et des facteurs environnementaux interagissent en influençant la progression de l’utilisation initiale vers l’addiction. Les facteurs génétiques, interagissant aussi avec les facteurs environnementaux, contribuent à des degrés variables à chaque type d’influence biologique. A partir de Ballantyne et LaForge.6

Traits de personnalité

Prise de risqueContrôle des pulsions

Disponibilitédes médicaments

PharmacocinétiquePharmacodynamique

Psychopathologie

AnxiétéDépression

Troubles de la personnalité

Réponse au stress Modi�cations neuro-chimiques induites par

le médicament

Facteurs génétiques

Début de l’utilisation du médicament

Utilisation intermittente

à régulière

Addictionet

rechute

In�uence de l’entourageChômage

Abus dans l’enfanceFormulation, mode de

délivrance

Causes sociales de stress

Signaux liés aux médicaments

Grand Modéré FaibleTaille de l'e�et

ENVI

RON

NEM

ENTA

LBI

OLO

GIQ

UE

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PAIN: CLINICAL UPDATES • DECEMBRE 2013 5

pour modeler les critères du DSM pour

satisfaire à l’état de dépendance ou

l’addiction chez les patients douloureux

ont été largement inutiles et même

préjudiciables.

Avant les années 50, l’addiction

était considérée comme une faiblesse

de caractère ou de contrôle, pas

comme une pathologie médicale. A

cette époque, la compréhension de la

neurobiologie de l’addiction était rudi-

mentaire, et l’existence des systèmes

opioïdes endogènes était seulement

imaginée. Dans les années 50, les

critères pour l’addiction étaient recher-

chés dans le but de le médicaliser et

faciliter le traitement. Le premier DSM

(Diagnosis and Statistic Manual) de

l’Association Américaine de Psychiatrie

(APA - American Psychiatric Associa-

tion), publié en 1952, regroupait l’abus

d’alcool et de substances sous le terme

Perturbation de la Personnalité de type

Sociopathique et ne reconnaissait pas

le rôle clé de la tolérance et du manque

dans l’addiction médicamenteuse. Ce

n’est qu’à partir du DSM-III en 1980 que

la tolérance et le manque ont été inclus

comme critères en même temps que

des facteurs sociaux et culturels. Cette

édition était aussi la première à utiliser

formellement le terme de « dépen-

dance » pour indiquer l’addiction à un

médicament. La « dépendance » est

distinguée de l’ « abus », qui est une

utilisation maladaptée sans tolérance,

manque, ou schéma d’utilisation

compulsive. Le lecteur verra facile-

ment que la définition de ces termes

dans le DSM-III et le DSM-IV (reflé-

tant la Classification Internationale

des Maladies - CIM) n’est pas la même

que celle habituellement comprise en

anglais familier.17,18 Cette différence

en soi produit plus de confusion. Au

cours des années, plusieurs mots ont

trouvé leur voie dans et en dehors de la

nosologie de l’addiction, dont les termes

« habituation », « mésusage », « abus »,

« dépendance », et « addiction ». Le mot

« addiction » dans les définitions médi-

cales a été évité récemment en raison

de ces connotations associés. Ce qui est

particulièrement problématique dans

le choix du terme « dépendance à une

substance » pour décrire l’addiction à

un médicament est que cela produit de

la confusion lorsque cela survient pour

traiter la douleur avec des opioïdes,

parce que les patients douloureux trai-

tés en continu peuvent être considéré

comme étant dépendants (i.e., avoir des

difficultés à interrompre un traite-

ment) mais ne sont pas nécessairement

addicts (i.e., recherche compulsive de

médicament).

Les nouvelles définitions pour

l’addiction médicamenteuse ont été

publiées par l’APA en mai 2013 dans le

DSM-V.19 Deux changements signi-

ficatifs ont été réalisés, à l’égard des

problèmes vécus, pour conceptualiser

la dépendance et l’addiction lorsqu’ils

apparaissent chez des patients doulou-

reux traités par opioïdes. Le premier

changement a été d’abandonner le

terme « dépendance à une substance »,

qui a été utilisé à la fois dans le DSM-III

et le DSM-IV pour indiquer l’addiction

à un médicament.17 Dans le DSM-V, la

« dépendance à une substance » a été

remplacé par des termes comme « trou-

ble de l’utilisation d’une substance » et

« trouble de l’utilisation d’un opioïde ».

Tableau IUn modèle maladaptatif d’utilisation de substance conduisant à une détresse ou un handicap significatif, se manifestant par deux ou plus des critères suivants : Comportements suggérant l’abus de médicaments prescrits

• Échec à satisfaire à des obligations majeures lié à un rôle au travail, à l’école ou à la maison

• Utilisation poursuivie dans des situations dans lesquels cela est physiquement hasardeux (e.g., conduire)

• Problèmes interpersonnels ou sociaux récurrents ou persis-tants

• Substance prise en grande quantité ou plus longtemps que cela n’était prévu

• Envie persistante et effort infructueux pour s’arrêter• Énormément de temps passé dans des activités nécessaire

pour obtenir la substance, utiliser la substance, ou récupérer après l’utilisation de la substance

• Abandon et réduction d’activités de détente, professionnelles, ou sociales importantes

• Utilisation continue malgré la connaissance des dégâts• Envie irrésistible

• Prescripteurs multiples • Fréquentes consultations aux urgences • Intolérances à de multiples médicaments décrits comme « al-

lergie » et refus de poursuivre des traitements non-opioïdes• Escalade posologique fréquente et auto-escalade des doses • Cessation rapide fréquente de médicament• Fréquents appels aux cabinets de consultation• Focalisation principalement sur les avantages des médica-

ments opioïdes au cours des consultations• Perte répétée de prescription avec des excuses « classiques

» comme le chien a mangé mon ordonnance, la compagnie aérienne a perdu mes bagages, les médicaments ont été volés

Critères comportementaux utilisés pour les troubles de l’utilisation de substances, Manuel de Diagnostic et Statistique des Pathologies Men-tales, 5ème édition (DSM-V).9

Adapted from Wilsey and Fishman.24

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PAIN: CLINICAL UPDATES • DECEMBRE 20136

Le second changement important

était de préciser que deux éléments

sont nécessaires dans la liste de com-

portements suggérant une utilisation

compulsive (voir tableau I) dans le but

de remplir les critères des troubles

de l’utilisation d’une substance. La

tolérance et le manque ne sont pas pour

ceux qui prennent des médicaments

prescrits sous contrôle médical comme

des analgésiques, des antidépresseurs,

des médications anti-anxiété, ou des

bêtabloquants. Pour le DSM-IV, trois

éléments étaient nécessaires pour rem-

plir les critères de dépendance à une

substance, et il était possible d’inclure

la tolérance et le manque. Ainsi, pour

des patients traités sans interruption

qui manifesteront presque toujours une

certaine tolérance et un manque, seule-

ment un seul critère comportemental

était nécessaire. Cela était plus facile,

toutefois, pour les patients doulou-

reux traités par opioïde, de remplir les

critères de l’addiction sous le DSM-IV

que cela ne le sera avec le DSM-V.

Conceptualiser la dépendance et l’addiction

Avec l’histoire qui se déroule,

nous pouvons voir comment notre

compréhension de l’addiction a

radicalement changé sur la base

de l’exploration scientifique (neu-

robiologie), aussi bien que sur

l’intellectualisation de l’addiction com-

me une maladie digne d’être traitée que

comme un défaut (développement des

définitions et critères de l’addiction).

Pourtant, plusieurs incertitudes restent

sur ce qu’est exactement l’addiction et

quel est le meilleur moyen de la traiter.

Cette incertitude est particulièrement

problématique dans le cas d’addiction

iatrogène (addiction apparaissant com-

me une conséquence directe d’un trait-

ement médical avec un médicament

addictif), comme cela est reflété par les

efforts pour développer des définitions

pour la dépendance et et l’addiction

chez les patients douloureux, chez

qui persiste une insatisfaction. Alors

que chez les utilisateurs de drogues

Fig. 4. Echelle de dépendance et d’addiction. ER, salle d’urgence; PMP, programme de monitor-age des prescriptions (maintenant disponible dans plusieurs états des Etats Unis, en perpétuel développement); UDT, test médicamenteux urinaire. Le nomadisme médical existe aux Etats Unis car de nombreux patients ont plusieurs fournisseurs de soin, à l’inverse de pays avec des systèmes nationaux de soins, où les patients ont une « maison » médicale.

ZONE GRISE

ADDICTIONRemplit les critères du DSM pour l’addiction

PAS D’ADDICTIONPas de perte de prescription

Pas de consultation aux urgences

Pas de requêtes répétées ou non sanctionnées pour augmenter les posologies

Pas d’UDT aberrant

Pas de nomadisme médical (PMP)

Comité de rédaction

Rédacteur en chef

Jane C. Ballantyne, MD, FRCAAnesthésiologie, Médecine de la Douleur

USA

Comité consultatif

Michael J. Cousins, MD, DSCMédicine de la Doleur, Médecine Palliative

Australie

Maria Adele Giamberardino, MDMédecine Interne, Physiologie

Italie

Robert N. Jamison, PhDPsychologie, Prise en charge de la Douleur

USA

Patricia A. McGrath, PhDPsychologie, Douleur de l’enfant

Canada

M.R. Rajagopal, MDMédicine de la Doleur, Médecine Palliative

Inde

Maree T. Smith, PhDPharmacologie

Australie

Claudia Sommer, MDNeurologieAllemagne

Harriët M. Wittink, PhD, PTMédecine Physique

Pays bas

EditionDaniel J. Levin, Directeur de publications

Elizabeth Endres, Conseiller en édition

Les sujets opportuns en recherche sur la dou-leur et son traitement ont été sélectionné pour publication, mais les informations fournies et les opinions exprimées n’ont pas impliqué de vérification des découvertes, conclusions, et opinions par l’IASP. Ainsi, les opinions expri-mées dans Douleur: Mises au point cliniques ne reflètent pas forcément celles de l’IASP ou de ses dirigeants et conseillers. Aucune re-sponsabilité n’est engagée par l’IASP concer-nant toute lésion ou dommage aux personnes ou propriétés en matière de responsabilité, négligence, ou par suite à toute utilisation de toutes méthodes, produits, instructions, ou idées contenues dans le présent matériel.

En raison des avancées rapides des sci-ences médicales, l’éditeur recommande une vérification indépendante des diagnostics et des posologie des médicaments.

© Copyright 2014 Association Internationale pour l’Etude de la Douleur. Tous droits réservés.

Pour toute permission pour ré-imprimer ou traduire cet article, contacter :

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Washington, D.C. 20005-1020, USATel: +1-202-524-5300Fax: +1-202-524-5301

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PAIN: CLINICAL UPDATES • DECEMBRE 2013 7

illicites, une voie vers l’addiction (des

débuts risqués vers l’habituation, Fig.

3)6,20 peut être relativement facile-

ment théorisée, le patient douloureux

présente une trajectoire bien moins

certaine vers l’addiction. De plus, à

l’inverse de l’utilisateur de drogues

illicites qui persiste dans l’utilisation,

le patient douloureux qui persiste dans

l’usage du médicament peut ne pas être

dépendant.

Deux distinctions majeures

entre addiction iatrogène et non-iat-

rogène sont dignes d’être mention-

nées: les différences de présentation

et les différences dans la progression

de la maladie.

Différences de présentation

Si quelqu’un regarde les comporte-

ments listés dans le DSM-V (colonne de

gauche du tableau I, qui sont similaires

aux comportements listés dans le

DSM-IV), il est facile de voir que malgré

le fait qu’un patient douloureux traité

par opioïde peut remplir ces critères,

le pourcentage qui est diagnostiqué

comme une addiction est ouvert à

l’interprétation. Tous les comporte-

ments sont assez communs chez les

patients douloureux traités par opioïde,

mais ils sont habituellement attribués

à la douleur plutôt qu’à l’addiction ?

Les signes d’utilisation compulsive

dans le milieu de la douleur peuvent

être différents, et un plan suggéré est

représenté dans la colonne de droite du

Tableau I. Même en acceptant qu’il y a

des signes d’utilisation compulsive, de

tels comportements sont aussi souvent

attribués à une douleur incontrôlée et

pas à une addiction, et les présenta-

tions peuvent varier en fonction de

certains facteurs culturels et contex-

tuels. Il n’y a réellement pas d’accord

actuel sur le moment où les comporte-

ments compulsifs observés chez des

patients douloureux traités par opioïde

pourraient être considérés comme des

signes d’addiction.

Différences en terme d’évolution de la maladie

Il est généralement accepté que les

patients traités continuellement avec

des opioïdes sont susceptibles de dével-

opper une tolérance (nécessite une

escalade périodique de posologie) et une

dépendance physique (expérimente un

manque en cas de dose inadéquate). Il

peut exister des exceptions, mais des

neuro-adaptations similaires à celles

qui apparaissent au cours de l’usage

illicite d’opioïde peut être rencontré au

cours du traitement de la douleur avec

des opioïdes. La principale différence

est que les comportements qui se

développent et deviennent fixés dans

les mémoires sont différents (Tableau

I). La dépendance est importante car,

comme cela a déjà été discuté, que ce

soit ou non une des raisons du trouble

de l’utilisation d’un médicament, c’est

un moteur puissant du comportement

de recherche/demande d’opioïde. Chez

un patient douloureux, la raison pour

laquelle les opioïdes sont recherchés

n’est jamais parfaitement clair. Ce qui

est clair, toutefois, est que la dépen-

dance joue un rôle important dans la

poursuite continuelle d’un traitement

malgré un effet pauvre et peut con-

tribuer à observer des comportements

de recherche d’opioïde. Il n’existe pas de

démarcation claire entre dépendance et

addiction chez les patients douloureux,

même bien qu’il puisse exister des avis

clairs aux deux extrémités du spectre

(Fig. 4.).

Ces différences en présentation

et évolution de la maladie pointe un

besoin urgent à la fois de poursuivre la

réévaluation et l’amélioration des défi-

nitions de l’addiction pour ce groupe de

patients et d’aller à la rencontre du défi

clinique actuel de comment prendre en

charge et aider les nombreux patients

qui tombent entre les deux extrémités

de l’échelle douleur-addiction.

Conclusion

Aux Etats Unis, la popularisation du

traitement chronique par opioïde a

produit une augmentation par trois de

la prescription d’opioïde pour la douleur

chronique, une augmentation paral-

lèle des cas connus d’abus d’opioïde, et

des milliers de patients qui ont dével-

oppé une dépendance complexe aux

opioïdes.15,21 D’autres pays développés

ont témoigné d’une tendance similaire,

encore que moins marquée. Lorsque

la dépendance aux opioïdes devient

complexe et difficile à renverser, cela

ressemble à une addiction. Elle part-

age suffisamment de similitudes avec

l’addiction qu’elle requiert un traite-

ment similaire, rendue encore plus

stimulante par la coexistence d’une

douleur.

Il n’existe pas de formule facile qui

convienne à tous les patients. Même la

décision de base d’essayer de diminuer

ou d’interrompre l’opioïde est complexe:

le maintien fonctionnera-t-il mieux

pour le patient et pour la douleur que

l’abstinence ? La posologie devient-elle

élevée de manière inacceptable ? Com-

ment la diminution devrait-elle être

envisagée si cette stratégie est décidée

? Par exemple, devrions-nous diminuer

lentement, réaliser une réduction

rapide avec buprénorphine, une rota-

tion des opioïdes, ou un réduction avec

relai par méthadone ?

Pourtant une nouvelle couche

essentielle d’aide à la décision, pour

les traitements qui se compliquent,

est comment encourager et moti-

ver le patient à travers le processus

d’optimisation du traitement. Des ser-

vices appropriés et des soignants cor-

rectement formés existent en quantité

très limitée aux Etats Unis alors qu’ils

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PAIN: CLINICAL UPDATES • DECEMBRE 20138

Editor-in-Chief

sont particulièrement surchargés à

cause de l’utilisation prolifique des opi-

oïdes. De façon similaire, au Royaume

Uni, bien qu’il existe un but public

avoué pour que les services d’addiction

puissent aider les patients indépendam-

ment de leur parcours dans la dépen-

dance, ces services n’ont ni les res-

sources ni l’expertise pour prendre

en charge une douleur qui émerge ou

qui s’aggrave lorsque les opioïdes sont

réduits. La disponibilité de soins bio-

psycho-sociaux multidisciplinaires avec

une composante importante d’auto-ges-

tion, généralement acceptée comme un

gold-standard du soin dans la douleur

chronique, ont disparu aux Etats Unis,

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bien que nous puissions entrevoir un

réveil de ces approches dans le contexte

de apparition concomitante de la dou-

leur et de l’addiction.22 La conséquence

malheureuse est la poursuite d’une

approche fragmentée, polarisée qui

se termine souvent par la négligence

de la dépendance, la négligence de la

douleur, ou même la perte d’espoir que

la médecine peut apporter une aide.

Le résultat catastrophique est souvent

le recours à des sources illicites de

médication pour la douleur. Lorsqu’une

douleur chronique intense réfractaire

et une dépendance aux opioïdes ap-

paraissent ensemble, la combinaison

représente un défi énorme pour les

cliniciens, qui ont besoin qu’on leur

fournisse les bonnes constructions,

formations, ressources et les bons

outils pour un travail collaboratif, qui

sont tous nécessaires pour prendre en

charge cette pathologie.

Les nouveaux critères de

l’addiction peuvent avoir ôté quelques

unes des confusions associées au mot

« dépendance », les nouveaux critères

laissent une encore plus grande ques-

tion qui est comment pouvons-nous at-

teindre un consensus pour le diagnostic

d’addiction aux opioïdes au cours du

traitement de la douleur par opioÏdes

de façon à ce qu’on puisse la reconnaî-

tre et la traiter.23

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