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MENS Revue d’histoire intellectuelle de l’Amérique française Volume VIII, numéro 1 Automne 2007 © Revue Mens, 2007.

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MENSRevue d’histoire intellectuelle

de l’Amérique française

Volume VIII, numéro 1Automne 2007

© Revue Mens, 2007.

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TABLE DES MATIÈRES

5 Présentation

Articles7 De la rue de Rome au Canada français : influences

ou transferts ?Olivier Dard

67 Une réconciliation insaisissable : le mouvement dela bonne entente, 1916-1930Robert Talbot

Comptes rendus127 Antoine Compagnon, Les antimodernes

(Éric Bédard)

132 Ramsay Cook, Watching Quebec(Kevin J. Christiano)

136 Pascal Ory, L’histoire culturelle(Hubert Watelet)

139 Jean Morency et al., dir., Des cultures en contact(Marie LeBel)

144 Marie-Thérèse Lefebvre, Rodolphe Mathieu(Caroline Durand)

148 Michael D. Behiels, Canada’s Francophone MinorityCommunities(Yves Frenette)

152 Rony Blum, Ghost Brothers(Guillaume Teasdale)

COMITÉ DE DIRECTION

Yves Bégin, Collège Montmorency (secrétaire de rédaction)Damien-Claude Bélanger, Université Trent (comptes rendus)Harold Bérubé, INRS – Urbanisation, culture et société

Michel Bock, Université d’OttawaMichel Ducharme, University of British Columbia

Dominique Foisy-Geoffroy, Bibliothèque et Archives Canada (secrétaire-trésorier)Xavier Gélinas, Musée canadien des civilisations

Martine-Emmanuelle Lapointe, Université de MontréalÉ

COMITÉ CONSULTATIF

Gérard Bouchard (Université du Québec à Chicoutimi)Linda Cardinal (Université d’Ottawa)

Kevin J. Christiano (University of Notre Dame)Ramsay Cook (Dictionnaire biographique du Canada)

Sylvie Lacombe (Université Laval)Yvan Lamonde (Université McGill)

Guy Laperrière (Université de Sherbrooke)Jocelyn Létourneau (Université Laval)

Roberto Perin (York University)Allan Smith (University of British Columbia)

Joseph Yvon Thériault (Université d’Ottawa)Pierre Trépanier (Université de Montréal)

É

Mens : Revue d’histoire intellectuelle de l’Amérique française est une revue semestrielle dont lesnuméros paraissent les printemps et automne de chaque année. Les textes publiés

dans Mens n’engagent que leurs auteurs. Toutes les demandes de reproductiondoivent être acheminées à Copibec : (514) 288-1664 / 1-800-717-2022 /

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ISSN : 1492-8647

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PRÉSENTATION

Cette nouvelle livraison de la revue Mens, qui marquesa huitième année de publication, donnera au lecteur l’occa-sion d’élargir et d’approfondir sa connaissance de questions,de périodes et de personnages que l’on croise fréquemmentdans le champ de l’histoire intellectuelle du Canada français,mais qui n’ont pas révélé tous leurs secrets.

Tout d’abord, Olivier Dard revient sur l’épineuse ques-tion de l’influence de Charles Maurras et du maurrassisme auCanada français. Il contribue à enrichir et à renouveler ce dé-bat historiographique déjà vieux de plusieurs décennies enexplorant les racines françaises de l’homme, de sa pensée etde ses continuateurs, mais aussi en se penchant sur la diffu-sion des idées maurassiennes ailleurs qu’au Canada français.Dard réévalue à la lumière de ces informations le degré et lanature de la pénétration au Canada français de ces idées, no-tamment chez Lionel Groulx et dans les pages de La Nation.Enfin, il analyse comment les maurrassiens de l’Hexagoneperçoivent le Canada français. Au terme de son étude, Darddécrit ces rapports transatlantiques plus comme une rencon-tre, un échange parmi d’autres, que comme un transfert dura-ble d’idées et d’influences.

Robert Talbot, pour sa part, explore les relations entreles deux solitudes canadiennes durant les années troubles dela Première Guerre mondiale et celles qui suivirent le conflit.Si ces relations sont généralement décrites, avec raison,comme acrimonieuses, Talbot met à jour les activités et l’in-fluence du mouvement de « bonne entente » qui prit naissancedurant cette période et favorisa le rapprochement des deuxgrands groupes ethnolinguistiques canadiens ainsi que, plusgénéralement, l’unité nationale. L’historiographie décrit gé-néralement ce « bonne-ententisme » comme une simple fa-

Bibliographie157 Jacques et Raïssa Maritain au Québec et au

Canada français : une bibliographieYvan Lamonde et Cécile Facal

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ARTICLES

DE LA RUE DE ROMEAU CANADA FRANÇAIS :

INFLUENCES OU TRANSFERTS ?

Olivier DardUFR sciences humaines et arts

Université Paul Verlaine – Metz

RésuméCette contribution s’emploie d’abord à définir ce qu’il faut entendrepar maurrassisme en partant du cœur de son expression, la France.En second lieu, il s’agit, en remettant le Canada français en perspec-tive (à travers une comparaison avec la Belgique), de s’interroger surle degré de pénétration du maurrassisme comme sur sa nature en sedemandant si l’on est en présence d’influences ou de transferts cultu-rels et politiques. Enfin, nous montrerons que la vision du Canadafrançais de Charles Maurras et de quelques maurrassiens français estbien davantage conditionnée par leur vision de la France que par uneffort d’analyse sur le Canada français lui-même.

AbstractThis essay seeks firstly to define maurrassism within the context of Frenchpolitical ideology. Secondly, it examines the degree to which maurrassism penetratedFrench Canada’s intellectual culture. By comparing French Canada with Belgium,the author explores the extent to which one can speak of a genuine maurrassianinfluence in French Canada or rather of cultural and political transfers. Finally,the essay shows that the vision of French Canada held by Charles Maurras andhis disciples was primarily conditioned by their vision of France and was not,therefore, the result of a real effort to understand French Canada itself.Mens, vol. VIII, no 1 (automne 2007)

çade utilisée par des membres de l’élite canadienne-anglaisepour faire la promotion de l’effort de guerre et, plus particu-lièrement, de la conscription. Talbot démontre plutôt que lemouvement avait non seulement des assises et des ambitionsplus larges, rassemblant en son sein un certain nombre de fran-cophones et ayant pour ambition de retrouver l’esprit d’union(sacrée) associé au début du conflit mondial, mais qu’il pour-suivit ses activités dans les années qui suivirent la GrandeGuerre, participant par exemple au combat contre le Règle-ment XVII.

À ces articles s’ajoute une bibliographie préparée parYvan Lamonde et Cécile Facal sur les passages de Jacques etRaïssa Maritain au Canada français. Y sont répertoriés la cor-respondance, publiée ou non, du couple durant ces visites,les livres et articles qu’ils ont publiés à ces occasions et lesrecensions dont ils ont été l’objet, ainsi que les études consa-crées à l’influence de ce couple au Canada français. Cette bi-bliographie, et le texte qui l’introduit, constituent de précieuxguides pour qui veut explorer l’influence du couple de ce côté-ci de l’Atlantique durant les années 1920-1940.

Enfin, le comité de direction de la revue tient à remer-cier chaleureusement le Musée canadien des civilisations quia rendu possible la traduction de l’article de Robert Talbot.

Harold Bérubépour l’équipe de Mens

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revues (Vivre, La Nation) et de sources d’archives (la corres-pondance reçue par Charles Maurras du Canada français dé-posée au Centre d’accueil et de recherche des archives natio-nales (CARAN à Paris) s’emploiera à clarifier quelques ques-tions restées trop souvent en suspens7. La première concernece qu’il faut entendre par maurrassisme et ce, en partant ducœur de son expression, à savoir la France. Ce point de départest fondamental car il conditionne l’analyse qui peut être menéede ses réceptions hors de la France, et notamment au Canadafrançais. Si le cadre de cette contribution est bilatéral, la rela-tion franco-québécoise gagne beaucoup à être interrogée enprenant en compte d’autres foyers de réception dumaurrassisme, à l’instar de la Belgique, catholique et franco-phone. Il sera loisible alors de s’interroger, non seulement surle degré de pénétration du maurrassisme au Canada français,mais aussi sur la nature de cette dernière en se demandant sil’on est en présence d’influences ou de transferts culturels etpolitiques. Il s’agit d’essayer d’appliquer aux relations franco-canadiennes une démarche et des concepts utilisés depuis lesannées 1980 dans le cadre d’études sur les relations culturel-les franco-allemandes par des chercheurs comme Michel Es-pagne, Michael Werner8 ou Hans-Manfred Bock. Ce derniern’hésite pas à qualifier une approche par « l’influence » de « ca-tégorie naïve » et la rattache à une vision classique et selonlui datée des études des phénomènes de réception. Le fonde-ment d’une telle démarche reposait sur « l’idée que des pro-duits culturels, nés dans leur contexte culturel national, se-raient sortis de ce milieu pour être transvasés dans la cultureétrangère où ils auraient un effet véritable de catalyseurs9. »Hans-Manfred Bock lui oppose l’intérêt d’une approche parle « transfert » dont il résume ainsi les principaux traits : « Letransfert d’une production culturelle d’un pays à l’autre estinévitablement accompagné d’un processus de transforma-

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Bien au-delà d’une dispute universitaire, la question dumaurrassisme au Canada français est largement débattue. Eneffet, elle met en jeu la question du conservatisme et de latradition1. Elle concerne également une figure centrale de l’his-toire du Canada français au XXe siècle, l’abbé Lionel Groulxet son orientation idéologique dont il faut relever la« luxuriance des études » depuis quelques années2. Les sous-entendus politiques de cette querelle sont perceptibles : lemaurrassisme (rarement défini voire assimilé sans grand sensau fascisme) est brandi pour être amalgamé à la « grande noir-ceur » dont Lionel Groulx, épigone supposé de Maurras, se-rait le maître à penser.

La controverse historiographique est ancienne. Dès1956, Michael Oliver avait soutenu la thèse d’un ancragemaurrassien du groulxisme3. Cette vision s’est développée,enrichie au cours des décennies suivantes. Elle est reprise parYvan Lamonde selon qui « l’homonymie n’est pas que celledu titre des périodiques publiés de part et d’autre de l’Atlan-tique ; elle est plus globale et c’est celle de traditions intellec-tuelles partageables et partagées par ceux qui, au Canada fran-çais lisent L’Action française de Paris, Barrès, Maurras, Dau-det, Bainville et par ceux qui entretiennent des liens person-nels avec les gens de la rue de Rome4. » Cette vision d’uneAction française (AF) exportée au Canada français est relayéedans l’historiographie française par les travaux de CatherinePomeyrols pour qui l’empreinte du maurrassisme au Canadafrançais serait profonde5. D’autres études, conduites en parti-culier de façon très minutieuse par Pierre Trépanier, sans niercette imprégnation, la relativisent considérablement et refu-sent de voir le Québec assimilé de fait, par le biais de cettegreffe, à « une province culturelle de la France6 ».

La présente contribution, nourrie des travaux canadienset français mais également fondée sur le dépouillement de

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fondrement de l’Organisation armée secrète (OAS)12. Lemaurrassisme peut être appréhendé à partir de trois éléments.

D’abord, sous l’angle doctrinal. Les ouvrages de VictorN’Guyen, de Michael Sutton et plus récemment de BrunoGoyet, de Stéphane Giocanti et de Domenico Fischella ontanalysé les origines de la pensée maurrassienne qui se fixe autournant du XXe siècle13. D’inspiration réactionnaire et mar-quée par Auguste Comte, construite contre la philosophie desLumières et le romantisme, elle signifie d’abord un refus radi-cal de l’individualisme. Michael Sutton a justement relevé que« pour Maurras, le romantisme et les idées de 1789 n’étaientque deux aspects du même mal, un individualisme qui exa-gère l’importance du sujet au détriment de l’ordre social etpolitique dont l’individu n’est qu’un élément transitoire14 ».Maurras prône pour la France le rejet de la Troisième Répu-blique au profit d’une monarchie décentralisatrice et s’em-ploie au début du XXe siècle, dans le prolongement de l’af-faire Dreyfus et sur fond de séparation de l’Église et de l’État,à rechercher une alliance avec les catholiques comme AugusteComte l’avait en son temps entrepris à l’égard des Jésuites. Sila pensée maurrassienne nourrit l’Action française, l’homolo-gie entre ces deux entités a ses limites. Maurras est une sourceessentielle mais non exclusive de l’Action française, qui, àtravers son Institut, se pense comme une école. Dresser unétat des lieux doctrinal de l’Action française impose la priseen compte d’autres publicistes de cette dernière. Ainsi, c’estJacques Bainville qui forge sa doctrine en matière de politi-que extérieure et aussi en économie (en concurrence sur ceplan avec Georges Valois, présent à l’AF pendant vingt ans etqui s’est attaché, avant la rupture de 1925, à brosser les con-tours de « l’économie nouvelle »). Sur le plan religieux, fon-damental au moins jusqu’en 1926 et la condamnation del’AF par le Saint-Siège, outre Maurras, Henri Massis et, à un

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tion, car dans le pays d’accueil le produit importé est intégrédans un autre système de références et y gagne de nouvellessignifications ; ces importations culturelles correspondent leplus souvent chez les agents de la réception à des intérêts delégitimation ou de critique10. » Il s’agira donc de s’interroger,à partir de l’existence du maurrassisme, moins sur son influenceau Canada français que sur l’existence, ou non, d’un transfertculturel et politique. Enfin, nous analyserons le Canada deCharles Maurras et de quelques maurrassiens français pourmontrer qu’il est bien davantage conditionné par leur visionde la France que par un effort d’analyse sur le Canada fran-çais lui-même.

1. Jalons pour une définition du maurrassisme

Né au tournant du XXe siècle, le maurrassisme, mêmes’il a beaucoup perdu de son influence, existe encore dans laFrance de 2007. Les héritiers de celui qu’ils appellent encorele « maître de Martigues » ont joué un rôle non négligeabledans le combat souverainiste de droite contre le traité deMaastricht et la constitution européenne. Sur le plan de leursrelais, outre le mouvement la Restauration nationale et l’heb-domadaire Aspects de la France, ils disposent de différentsorganes récemment créés : Politique magazine, Les Épées et mêmela Nouvelle Revue universelle qui a commencé de reparaître en2005.

Le maurrassisme s’inscrit donc dans une double dyna-mique de permanence et de mutations puisque si la filiationest revendiquée, elle s’est accompagnée de débats à l’inté-rieur de la nébuleuse maurrassienne, qu’il s’agisse de la Jeunedroite durant l’entre-deux-guerres, de la Nation française duphilosophe Pierre Boutang auquel collabora notamment l’his-torien Philippe Ariès du premier au dernier numéro (1955-196611), ou du mensuel Jeune Révolution au lendemain de l’ef-

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catholiques pratiquants, ont suivi le pape16. En Bretagne, lacondamnation de l’AF est un véritable « coup de tonnerre »et s’apparente à une « crise politique majeure » du fait desappuis de l’AF dans les élites sociales bretonnes17. Par ailleurs,les organes de presse maurrassiens en province livrent unevision atténuée des débats doctrinaux et des dissidences quijalonnent cette histoire. Enfin, les différences sociologiquesentre les militants sont à prendre en compte : si les Camelotsdu roi18 sont la partie la plus active et donc la plus visible del’AF, et ce tant à Paris qu’en province, ils ne sont pas toutel’AF.

Un troisième enjeu concerne l’influence de l’AF. Il s’agitd’en préciser les vecteurs et la portée, de poser la questiondes réseaux maurrassiens hors de l’Action française ès quali-tés et donc de souligner l’importance des périphériesmaurrassiennes. Cette démarche est fondamentale pour ap-précier la pesée globale du maurrassisme dans la France duXXe siècle mais elle comporte un danger et impose une li-mite : où s’arrêter ? Pour s’en tenir aux intellectuels, AlbertThibaudet dans des articles19, Walter Benjamin dans sa cor-respondance à Gehrard Scholem20 ou Jules Romains dans lediscours qu’il prononce à l’Académie française à l’occasionde la mort de Maurras21 reprennent à leur compte certainesanalyses du penseur martégal ou lui rendent hommage. Detels documents permettent de souligner une influence dumaurrassisme. Ils ne font pas pour autant de ces hommes desmaurrassiens ni même des compagnons de route de l’AF. En-core une fois, la prise en compte du contexte est fondamen-tale. Le maurrassisme suscite adhésions (avec des degrés di-vers et des moments précis22) et rejets, parfois violents. Il estl’objet de débats alimentés par l’évolution générale du pays etles multiples affaires qui secouent la vie de l’AF, outre sa con-damnation par le Saint-Siège : assassinat de Marius Plateau,

De la rue de Rome au Canada français

degré moindre, Jacques Maritain, jouent un rôle essentiel. Ir-riguée par une kyrielle de penseurs, l’Action française, ne pré-sente pas sur l’ensemble des sujets une vision uniforme. Il enva de même en matière d’esthétique ou de littérature où lescontrastes sont saisissants entre un Charles Maurras, gardiensourcilleux du classicisme, et Léon Daudet, qui peut s’en écar-ter et défendre vigoureusement dans les colonnes de L’Actionfrançaise et à l’académie Goncourt Voyage au bout de la nuit deLouis-Ferdinand Céline.

Une étude du maurrassisme impose d’examiner ses ré-ceptions et donc de saisir, à travers l’étude de ses organisa-tions, qui sont les maurrassiens (ligueurs, camelots, jeunesfilles d’AF). Un triple problème se pose alors. Le premier con-cerne la mise en contexte et la chronologie : avant ou après lacondamnation de 1926, après 1939 (levée des sanctions),après 1945 et le procès Maurras, etc. À chacun de ces mo-ments, l’identité maurrassienne renvoie à des dimensions dif-férentes. Ainsi, l’alliance avec les catholiques, essentielle avant1926, ne l’est plus durant les années trente. En fait, la con-damnation de 1926, si elle discrimine et suscite des départs(1260 entre la mi-décembre 1926 et la mi-novembre 1927),amène dans le même temps de nouvelles recrues à la Ligue(7910 adhérents pour la même période)15.

Il importe également de prendre en compte la sociolo-gie des maurrassiens. À cet égard, les sources sont souventlacunaires pour dresser une sociologie précise des droites na-tionales en France même si on dispose de monographies ré-gionales. L’AF est implantée nationalement, quoique de fa-çon inégale, et être maurrassien ne signifie pas la même choseà Paris ou en province. Ainsi, les travaux menés sur la Lor-raine ont montré que la condamnation de 1926 a porté uncoup sérieux à l’AF. L’alliance entre les monarchistes et descatholiques y était profonde et les militants, majoritairement

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L’Action française et L’Action nationale ou dans des correspon-dances. Le second vecteur concerne les échanges personnelseux-mêmes. Ils se déclinent selon deux registres : voyages ef-fectués en France par des figures reconnues comme ÉdouardMontpetit et Lionel Groulx, ou moins en vue comme PaulPéladeau ; immigration de maurrassiens français au Canadadont les symboles sont Gérard de Catalogne et surtout Ro-bert Rumilly, arrivé en 1928.

À la lecture de ces travaux complétés par la lecture desources imprimées, quelques remarques peuvent être formu-lées. La première concerne la teneur même de l’imprégnationmaurrassienne et la question de sa définition : influence outransfert. À cet égard, certaines réflexions proposées par Mi-chel Espagne à partir de l’exemple franco-allemand peuventêtre reprises, notamment lorsqu’il souligne qu’ « un transfertculturel n’est pas déterminé principalement par un souci d’ex-portation » mais que « c’est la conjoncture du contexte d’ac-cueil qui définit largement ce qui peut être importé ou encorece qui, déjà présent dans une mémoire nationale latente, doitêtre réactivé pour servir dans les débats de l’heure30 ». Con-cernant le débat sur le maurrassisme au Canada français, onrelèvera l’importance de l’ancrage français du maurrassismepour Maurras et ses proches. Le sens et l’horizon de leur com-bat sont d’abord la France et le souci d’exportation n’existeguère chez eux. Du côté du Canada français, la démarche estcomparable chez Groulx, d’abord soucieux de la défense del’idée canadienne-française et des menaces qui pèsent, selonlui, sur son avenir. Interroger l’imprégnation maurrassiennede Groulx impose donc de mettre en relation la teneur de sesquestions et de mesurer ce que le maurrassisme peut lui ap-porter.

Ce qui séduit Lionel Groulx dans le maurrassisme despremières décennies du XXe siècle, c’est d’abord sa préten-

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mort de Philippe Daudet, agression contre Blum à l’occasiondes funérailles de Jacques Bainville et interdiction de la Li-gue, emprisonnement de Maurras, etc.

La question du rayonnement de l’AF déborde d’ailleursla France et touche bien des pays23 en Europe, notamment enterres francophones (Belgique24, Suisse25) mais aussi dans lapéninsule ibérique, tant du côté portugais (Integralismolusitano26) qu’espagnol27, sans oublier les Amériques, États-Uniscompris28. Durant les années trente, la relation ne fonctionnepas à sens unique. À cette époque, bien des jeunes maurrassiensfrançais, déçus par la maison mère, observent avec le plusgrand intérêt l’évolution de la situation à l’étranger, notam-ment en Belgique (Rex), en Roumanie (Garde de Fer) ou dansla péninsule ibérique29. Là encore, cette histoire doit êtrepériodisée en fonction d’éléments propres à l’AF (cas de lacondamnation et de ses incidences en Belgique, en rappelantle rôle du clergé belge dans la condamnation) ou propres auxhistoires intellectuelles nationales. Ainsi de l’Espagne, où lapensée de Maurras est principalement relayée à partir de laGrande Guerre, ou en Roumanie, où l’influence de la penséemaurrassienne est réelle dans les années vingt dans les mi-lieux intellectuels, mais diminue au profit de l’Allemagne du-rant les années trente.

2. Le maurrassisme des Canadiens français : influenceou transfert ?

Les limites d’une filiation idéologique

Les travaux sur le maurrassisme au Canada français ontsouligné la présence de l’imprégnation maurrassienne à partirde deux vecteurs. Le premier renvoie à une filiation par lestextes et les références telles qu’elles ont pu être véhiculéespar des articles, parus notamment dans la presse canadienne,

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vient en France en 1921-1922, rencontre ses principaux diri-geants et assiste au premier cours d’histoire de France à l’Ins-titut d’Action française32. Par ailleurs, beaucoup plus que sesMémoires, ses écrits contemporains33 et sa correspondance nousrenseignent sur son état d’esprit et illustrent le résultat dutravail de sape effectué par Maurras contre la démocratie li-bérale. Ainsi, dans un courrier bien connu adressé le 20 août1927 à Jean Bruchési, neveu de l’archevêque de Montréal PaulBruchési, Groulx souligne : « pour ma part, Maurras a contri-bué à me dégoûter de la démocratie34 ». Le refus du mondemoderne et de la Révolution française sont aussi un cimentprofond comme l’écrit l’abbé à l’universitaire français etmaurrassien Jean Houpert en 1927 : « Pour expliquer notremutuelle sympathie entre royalistes français et Canadiens, j’aidéjà dit à quelques-uns de vos catholiques républicains : “Entre un royaliste et nous, il n’y a que l’océan et cela se passe ;entre nous et un républicain il y a la mer de 89 et cela ne passepas35” ». Comme l’a souligné Pierre Trépanier, même si le pro-videntialisme irrigue la pensée de Groulx et non celle de Maur-ras dont on connaît le goût pour Auguste Comte et les célè-bres propos sur le « désespoir » considéré comme une « sot-tise absolue » en politique, il existe entre L’Action française deMontréal et celle de la rue de Rome un fond traditionalistecatholique commun nourri de Joseph de Maistre et de Frédé-ric Le Play. Il baigne l’univers groulxiste, disciple fervent dePie X, alors qu’il n’est qu’un des éléments de la synthèsemaurrassienne. Maurras est très clair sur ce point dans Le di-lemme de Marc Sangnier lorsqu’il identifie les fondements de lapensée monarchiste, « “chrétienne” avant tout » et donc fon-dée sur le droit divin ou fondée sur « la nature et l’histoire ».Pour Maurras, la chose est réputée de peu d’importance puis-que « divisés sur l’origine des choses » (« L’un dit – Voici la loide la nature… L’autre : Voici la loi de Celui qui a fait la nature »)

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tion à incarner un catholicisme de combat, ce qui renvoie àune étape particulière du maurrassisme, où il s’est attaché,comme l’a montré Michael Sutton, à forger une alliance avecles catholiques. La chronologie de cet épisode est clairementidentifiée pour la France : elle démarre avec le ministère Com-bes (1902-1905), prend son essor avec la fondation de la Li-gue en 1905 sur fond de séparation de l’Église et de l’État ets’achève en 1926. Si le catholicisme de combat est un desidentifiants des premières décennies d’existence de l’Actionfrançaise, il ne saurait se confondre avec elle ni s’y réduire : lerejet violent de la IIIe République, le monarchisme,l’antigermanisme, la lutte contre « l’Anti-France » entrent aussidans la définition du maurrassisme. Sur un certain nombre deces questions et en fonction de la conjoncture, l’AF peut seretrouver en phase avec des secteurs de l’opinion nonmaurrassiens mais sur lesquels ses analyses exercent une in-fluence, par exemple, au sujet de la politique à mener vis-à-vis de l’Allemagne. Les dirigeants de l’Action française ensont d’ailleurs parfaitement conscients et Maurras a forgé lanotion de « compromis national ».

Où situer Lionel Groulx ? On remarquera d’abord quecertains commentaires publiés au Canada avant le premierconflit mondial et favorables à Maurras sonnent assez juste etmettent l’accent sur l’ambiguïté de la relation de Maurras à lafoi catholique. Ainsi, l’abbé Élie-J. Auclair, commentant l’ar-ticle du penseur martégal paru dans L’Action française d’août1912, relève dans la Revue canadienne en janvier 1913 queMaurras « croit à la religion […] comme à une force moraleprécieuse ; il croit au catholicisme comme à la religion tradi-tionnelle de la France… Mais je doute s’il croit en Dieu. Ilfaut donc ne pas lire les yeux fermés31 ». Lionel Groulx saitdonc à quoi s’en tenir lorsque, 12 ans après son premier sé-jour (où il avait déjà assisté à un rassemblement d’AF), il re-

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ras », publiée en 1909, livre dans sa conclusion des élémentsessentiels : « Nous sommes amenés à conclure qu’entre le sys-tème de M. Maurras et la doctrine catholique, s’il y a uneopposition essentielle en matière de spéculation dogmatiqueet morale, il n’en est pas, à envisager les choses dans l’abs-trait, d’irréductible sur le terrain pratique. Que des obstaclessurgissent qui rendent illusoire l’accord avec lui dans l’action,il se peut : ces obstacles ne viendront pas de son système entant que tel40. » Effectivement, de multiples exemples attes-tent l’existence de cette alliance, des actions musclées desCamelots du roi lors des inventaires à la souscription lancéepar le quotidien monarchiste à l’occasion de l’élévation à l’épis-copat de Monseigneur Penon41. Certes, des organes ou desintellectuels catholiques français, comme Maurice Blondel etLucien Laberthonnière sont réservés voire hostiles à l’AF. Ilssont cependant minoritaires et pour certains en délicatesseavec la papauté (Laberthonnière est mis à l’Index en 1913).Cela n’empêche pas l’Action française d’être aussi mise sur lasellette à la veille du premier conflit mondial et la Congréga-tion de l’Index de conduire une instruction contre Maurras.Elle débouche le 26 janvier 1914 sur la condamnation de cinqouvrages de Maurras et de la revue L’Action française. Pie X nepromulgue cependant pas le décret de condamnation et l’AFconnaît un sursis42.

En Belgique, les soutiens à l’AF sont nombreux jus-qu’au début des années vingt. Présent outre-Quiévrain à laveille du premier conflit mondial par le truchement du travaileffectué par Dom Besse, L’Université catholique ou la « Confé-rence du Jeune Barreau », le maurrassisme se développe sur-tout pendant le conflit et en sort très renforcé. En effet, au-delà d’une imprégnation catholique et monarchiste suscepti-ble, notamment en Wallonie, de trouver des relais, l’AF pro-fite de la montée en puissance d’un sentiment nationaliste et

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ces hommes « adhèrent aux mêmes vérités historiques et po-litiques36 ». La différence est essentielle comme l’a montréMichael Sutton en soulignant les ambiguïtés et les limites desemprunts de Maurras au thomisme. Certes, le rapprochemententre le réalisme maurrassien et celui de saint Thomas ren-voie aux distinctions thomistes entre les vérités de la Révéla-tion et celles de la Raison et rencontre des points d’accrocheavec une des grandes figures de la scolastique après saintThomas, Francisco Suarez. Mais, comme l’a souligné MichaelSutton, une telle ressemblance est « superficielle », car poursaint Thomas « la loi naturelle ne peut se ramener à un en-semble de décrets qui ne se réfèrent au surnaturel que pourune justification extrinsèque37 ». Ces éléments n’ont sans doutepas échappé à Lionel Groulx qui a pu indiquer à Bruchési en1927 : « Mais je n’ai jamais complètement gobé le cher Maî-tre », ce « grand esprit avec un grand trou par en haut38 ». Lors-que la condamnation est tombée, Groulx l’a sans doute re-grettée, mais s’est soumis comme il l’a expliqué dans un cour-rier à Jean Houpert : « Nous avions pris l’habitude néanmoinsde considérer L’Action française comme un journal de défensereligieuse […] Le pape a jugé que la doctrine maurrassiennecontenait plus de périls que de promesses de vie. Nous noussommes inclinés, catholiques de traditions et de convictions39. »

Ces quelques citations de Groulx, si on les sort du con-texte canadien-français, invitent à s’interroger sur l’origina-lité de ce dernier. Elles font de Lionel Groulx un clerc pleine-ment de son temps qui pourrait, à bien des égards, être com-paré à nombre de ses homologues européens.

Jusqu’à la veille du premier conflit mondial, les clercsfrançais ont en majorité accepté ou toléré l’alliance proposéepar l’AF entre maurrassiens et catholiques, à l’image notam-ment des jésuites de la revue Études. Une célèbre analyse dePedro Descoqs intitulée « À travers l’œuvre de Charles Maur-

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le sillage de l’avocat bruxellois Fernand Passelecq et entre-prennent une guerre de tranchée contre l’AF, laquelle trouvedes relais en France à partir de la fin de l’année 1925. Un anplus tard, l’AF est condamnée et les catholiques sont sommésde choisir.

Pour l’essentiel, le choix passe par la soumission à Romeet, encore une fois, le Canada français n’échappe pas à la norme.Le débat sur la question de la condamnation de l’AF n’y a paseu le même écho qu’en France ou en Belgique. On ne rencon-tre pas au Québec de mouvement de « renaissance littérairecatholique » et Cécile Vanderpelen a montré que Lionel Groulxlui-même ne paraît nullement avoir été influencé par des auteurscomme Henri Massis, Robert Vallery-Radot ou PierreNothomb, qu’il n’a jamais rencontrés et avec lesquels il n’ajamais correspondu47. Si la condamnation de l’AF enflammele débat intellectuel en France et en Belgique, il n’existe pasd’équivalent au Canada français. Certains marquent une hési-tation et le romancier Harry Bernard, décrit par Yvan Lamondecomme « maurrassien jusque dans ses romans », évoque dansl’édition du 7 janvier 1927 du Courrier de Saint- Hyacinthe lecas de certains « hommes cultivés » qui « sont assez désorien-tés et ne savent pas trop quelle attitude prendre à l’endroit deceux qu’il considèrent, dans une certaine mesure, comme leursmaîtres48 ». Le Devoir d’Henri Bourrassa se contente de pu-blier les documents importants de la Crise émanant du Vati-can et des articles de La Croix ou d’Études49. L’Action françaisede Montréal n’a de son côté jamais analysé la pensée de Char-les Maurras50 et la seule mention de la condamnation de 1926s’effectue en janvier 1928 lorsque L’Action française de Mon-tréal change de nom : « On sait les malheureux événementsqui ont rendu suspect, par tout le monde catholique, le nomd’Action française. Nous n’avions rien en commun avec l’œuvreroyaliste de Paris. Nous lui avions emprunté son nom comme,

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germanophobe lié au traumatisme de l’invasion de 1914, auxfrustrations nées du traité de Versailles, sans oublier les in-quiétudes nées des succès du Parti ouvrier belge. À la diffé-rence de la relation qui préside entre la France et le Canadafrançais, la guerre a fait naître, entre la France et la Belgique,une « convergence de situation » déjà pointée par JacquesBainville dès novembre 191843 et soulignée par Éric Defoort44.Elle n’existait pas avant 1914. Dorénavant des thématiquescomme la germanophobie ou la mise en place d’une monar-chie nationale supplantant une monarchie parlementaire sontcommunément développées et trouvent un relais dans le plusgrand journal belge du temps, Le XXe siècle. Maurras estd’ailleurs d’autant plus mis en avant « qu’il n’y a pas de pen-seurs belges sur des sujets de cet ordre45 ». La fascination exer-cée par Maurras s’observe chez de nombreux intellectuelsbelges, aînés (Pierre Nothomb) comme cadets. Elle se retrouvechez de nombreux ecclésiastiques belges, de l’abbé anversoisRené-Gabriel Van den Hout, (homme de confiance du cardi-nal Mercier et fondateur de La Revue catholique des idées et desfaits) au père Valère Honnay (qui multiplie les articles favora-bles à Maurras dans La Revue latine et La Revue générale). Commeen France, on relève chez ces clercs une défiance à l’égard deMaurras sur le plan religieux, mais elle est compensée par lebénéfice politique escompté d’une telle alliance même si l’abbéVan den Hout continue de militer en faveur d’un parti catho-lique. L’influence maurrassienne est enfin très profonde dansla jeunesse catholique. C’est ainsi que l’enquête organisée parles Cahiers de la jeunesse catholique en mai 1925 et adresséeà « tous les jeunes intellectuels catholiques » sur les « maîtres »des 25 dernières années plébiscite Maurras, arrivé en tête (174voix sur 443 réponses) devant Paul Bourget (123) et MauriceBarrès (91)46. C’est un véritable électrochoc pour les catholi-ques libéraux et les abbés démocrates qui se mobilisent dans

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que Rome, dès le consul Marius et le divin Jules jusqu’à Théo-dose, ébaucha la première configuration de ma France. Je suisRomain parce que Rome, la Rome des prêtres et des papes, adonné la solidité éternelle du sentiment, des mœurs, de la lan-gue, du culte, à l’œuvre politique des généraux, des adminis-trateurs et des juges romains […] Et je n’éprouve jamais dedifficultés à me sentir ainsi Romain, les intérêts du Catholi-cisme romain et ceux de la France se confondant presque tou-jours, ne se contredisant nulle part […] Je suis Romain dans lamesure où je me sens homme : animal qui construit des villeset des États, non vague rongeur de racines […] cet animalqui, voyageur ou sédentaire excelle à capitaliser les acquisi-tions du passé et même à en déduire une loi rationnelle [...]54. »Il n’y a guère de fond commun entre les deux périodiqueshomonymes car sur le fond le clivage religieux est irréducti-ble, plus encore sans doute qu’avec les catholiques belges oufrançais alliés à l’AF au nom d’un intérêt politique bien com-pris de la défense religieuse. Quand le voile se déchire, leshiérarchies réapparaissent de fait. L’Action françaisemaurrassienne choisit bien entendu de privilégier son exis-tence et son objectif qui est d’abord politique et passe par unchangement de régime. Du côté montréalais, l’enracinementultramontain conduit les clercs comme les laïcs de L’Actionfrançaise à suivre le pape. On ajoutera que la condamnationde 1926 ne génère aucun phénomène de ralliement au célèbre« non possumus » de la rue de Rome et ne représente nulle-ment un déchirement comparable à ce qu’il a pu être pour descatholiques maurrassiens, français ou belges, qui ont choisiRome mais pour lesquels ce choix a été douloureux.

Une pâle imitation estudiantine

Le maurrassisme ne se définit pas seulement par uneempreinte intellectuelle mais par un mode de sociabilité, une

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chez nous, beaucoup d’organes de presse qui adoptèrent unnom déjà usité en Europe. Il suffit que ce nom sonne malaujourd’hui à des oreilles catholiques pour que nous en chan-gions. Par simple déférence envers les autorités romaines, sansaucune pression ni invitation de qui que ce soit, mais de leurpropre mouvement, les directeurs de notre Ligue ont décidéque la revue s’appellerait désormais L’Action canadienne-fran-çaise […] Nos amis et nos lecteurs auront compris, une fois deplus, nous l’espérons, que notre foi de catholiques est au-des-sus de tout51. »

Ce texte a fait l’objet de controverses quant à son inter-prétation : à ceux qui considéraient l’absence de débats surl’Action française comme « normale », Catherine Pomeyrolsoppose les « liens à cacher » qu’aurait l’Action française ainsique les « contorsions et contradictions » de l’avis. Ainsi, « “nosamis auront compris” signifierait que “l’ennemi rôde”52 ». Cettevision est appuyée par des citations emboîtées dont on re-tient cet extrait : « Conserver à Dieu un peuple […] nous pa-raît une œuvre qui l’emporte sur le rêve d’une grandeur politi-que et matérielle. Et voilà pourquoi nous ne nous arrêtonspas à cette entreprise de reconstruction française comme àune fin53. » Ce passage, loin de souligner la parenté entre lesdeux Action française, illustre selon nous la différence radi-cale d’inspiration entre l’AF maurrassienne et celle de sa sup-posée disciple montréalaise. Il ne s’est jamais agi pour Maur-ras d’accomplir le dessein de Dieu sur terre. La France pourlui n’est nullement le produit de la Providence mais celui d’unehistoire millénaire, qu’il réécrit à sa façon. On a beau jeu d’op-poser à la fin de l’extrait de la citation proposée par CatherinePomeyrols : « Nous croyons à la mission apostolique du peu-ple canadien-français » quelques phrases du célèbre « Je suisRomain » du penseur martégal auxquelles il paraît difficile deraccrocher la pensée de Lionel Groulx : « Je suis Romain parce

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melots du roi à la sauce canadienne. Sur le plan idéologique,un constat comparable peut être dressé à partir du dépouille-ment de la revue Vivre qui paraît en 1934-1935. Elle rappelleun peu le ton de la jeune droite hexagonale d’inspirationmaurrassienne de l’entre-deux-guerres57. La filiation avec lemaurrassisme est d’ailleurs appuyée par la mise en exergue,dès le premier numéro, d’une citation de Léon Daudet : « Vi-vre, c’est lutter, qui n’a pas lutté n’a pas vécu ». On retrouvedans cette revue bien des éléments repérables dans des publi-cation jeunes-droitières de l’Europe des années trente : cultede la jeunesse, vitalisme, affirmation de son identité etcroyance dans la « révolution58 ». Le ton est donné par cetteprofession de foi : « La jeunesse est fatiguée de perdre sontemps à écouter de vénérables fossiles lui nasiller qu’elle doitêtre docile et bien sage. Ce que nous voulons, c’est une desti-née, en liaison avec notre caractère ethnique. Nous voulonsrevenir aux sources méditerranéennes et latines d’où nos som-mes sortis […] Bref, nous voulons refranciser notre moelle etnos cerveaux. Telles sont nos “positions”. Réactionnairesdevant le saxonnisme et l’aplaventrisme, qui firent de nousune “race de porteurs d’eau et de scieurs de bois”, nous ten-dons les mains au soleil et à la vie. Si nous savons vouloir,demain, les hommes du pays de Québec seront des superbeset non des humbles59. » Les numéros de Vivre fourmillent depositions antidémocratiques et antiparlementaires : « Le par-lementarisme se meurt, les députés sont morts ». Le remèdepréconisé est exprimé avec clarté à défaut de l’être avec élé-gance : « Quand on est affligé de constipation, on se purge[…] Ce qu’il faut, c’est la réaction60. » Le rejet du systèmecanadien d’alors est abrupt et constant : « Quant à notre con-fédération, nous lui disons merde, parce que c’est elle qui nousa conduits où nous sommes61. » Si les rejets sont clairementidentifiés, qu’en est-il du projet ? Les maîtres à penser reven-

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forme d’organisation (Camelots du roi) qui ont assurémentmarqué certains des jeunes Canadiens venus étudier à Parisdurant les années vingt. Ils ont pu mesurer à quel point lesmilitants d’Action française, tout en pouvant se présenter(avant 1926) comme des catholiques, des hommes d’ordre (la« querelle de l’ordre » est une des thématiques phares des re-vues de la Jeune Droite française de l’entre-deux-guerres),pouvaient provoquer et incarner le désordre par des bagarresrégulières au quartier latin, agrémentées d’un abondant réper-toire de chansons (« La France bouge », « La Gueuse ») et decopieuses libations. La séduction a manifestement opéré. JeanBruchési, qui a fréquenté des Camelots du roi à l’École libredes sciences politiques et à la Sorbonne, a laissé à ce sujet en1929 un témoignage chaleureux : « Comment oublier que ceshommes ont imposé le cortège de Jeanne d’Arc, fessé Thalamasqui insultait la vierge de Domrémy, nettoyé le quartier latinen partie du moins, des mauvais éléments qui y travaillaientcontre la vraie France, arraché la jeunesse universitaire à larévolution, et, un peu partout à travers le pays, chaque foisque c’était nécessaire, fait écho à la conscience nationale ré-voltée ? Ils ne craignent ni les coups ni la prison. Qui peutnier leur bravoure55 ? » Il reste à savoir si un tel modèle a donnélieu à une transposition.

Deux exemples permettent d’en mesurer la portée etles limites. Le premier concerne les membres de Jeune-Ca-nada (ils sont une vingtaine) et leurs modes d’action. En 1933,le petit groupe d’André Laurendeau envisage d’attendre deuxministres à la sortie du train à Montréal et de leur administrerune fessée : le parallèle avec l’Action française parisienne estévident et l’hypothèse de l’imitation des Camelots du roi pro-bable. Or, c’est Lionel Groulx en personne qui dissuade lesjeunes gens de procéder ainsi et les invite à publier un mani-feste56. Les Jeune-Canada ne sont donc pas vraiment des Ca-

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à Vivre, nous ne voulons qu’une chose : que le peuple soitfidèle à ses curés, que les curés soient fidèles à leur race69. »

Rapportée à la France et aux projets des jeunesmaurrassiens des années trente, qu’ils aient ou non basculévers le fascisme, cette citation permet de prendre la mesuredu fossé existant alors entre les deux côtés de l’Atlantique. Ilest par ailleurs significatif de constater que la revue cana-dienne ne se réfère pas à ses homologues françaises. La seulecontribution hexagonale mise en avant est celle de RenéDommange, député de Paris proche des ligues et participantà la sanglante manifestation antiparlementaire du Six Février1934 qui, dans une lettre à Vivre, se cantonne à des générali-tés : « Les tendances, les espoirs des jeunes Français rejoi-gnent ceux de leurs frères canadiens. L’aîné que je suis secon-dera de toutes ses forces les uns et les autres, heureux s’ilpeut un jour, à défaut de ces continents que cherchaient nosancêtres, voir surgir de l’horizon les institutions qu’il rêve70. »Par la suite, le contact a été établi et relaté par Paul Péladeau.Il a rencontré les dirigeants de l’Action française, de CharlesMaurras à Pierre Gaxotte, dîné chez la veuve de JacquesBainville, mais aussi fréquenté les figures de proue des relè-ves maurrassiennes. Il a notamment livré un compte renduinstructif de ses entretiens avec Thierry Maulnier, le princi-pal doctrinaire de la Jeune Droite. Les deux hommes ont no-tamment discuté de Maurras et bu « avec émotion » une bou-teille de champagne « à la santé et à la longue vie de ce grandmaître de la pensée française ». Ensuite, après un long mono-logue de Maulnier sur sa tristesse devant l’état de la France,Péladeau l’a interrogé sur la question de « l’action », qui cris-tallise le basculement vers le fascisme de certainsmaurrassiens71. La réponse de Maulnier est significative deson engagement maurrassien retrempé à la fin des années trenteaprès les désillusions de L’Insurgé (1936-1937) : « “L’action,

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diqués par la revue sont variés. Des étrangers sont mis enavant, notamment Péguy et Maurras mais aussi le Duce etLénine puisque ces hommes se veulent les bolcheviques dunationalisme et affirment : « ici comme là-bas, la victoire ap-partiendra aux radicaux, aux partisans de la violence62 ». Ducôté canadien, les choses sont en apparence simples : « Nousavons un doctrinaire : Groulx. Nous avons un chef de file :Asselin. Nous avons un journal : L’Ordre63. » Quant à l’objec-tif, il se combine à travers une double perspective. D’abord,le refus, revendiqué, d’un programme précis (qui par ailleursn’existe guère) : « nous n’aurons jamais de programme ma-thématiquement et savamment défini en 12 points et 72 co-dicilles64. » La certitude réside dans la volonté de rupture etd’action. Jean-Louis Gagnon est catégorique : « La chute durégime est obligatoire […] Quand un régime tombe, l’usageveut que ce soit grâce à une révolution. Et c’est le mot de lafin ou plutôt d’un recommencement. Révolution65. »

La prose de Vivre qui procède d’une triple inspirationgroulxienne, maurrassienne et fascisante, le tout revisité parLénine, est délicate à qualifier sur le plan idéologique. Le pluscommode est d’y voir un avatar du fascisme, avatar dans le-quel il serait commode de ranger Groulx, dont ces jeunes gensse revendiquent et qu’il a appuyés en leur écrivant pour lesféliciter de leur refus d’être des « Français de conserve » etdes « catholiques de conserve66 ». En fait, la phraséologie deVivre signifie d’abord un activisme de plume, une volonté vio-lente de sortir d’un confinement (les collèges sont mis en ac-cusation) sans négliger une dose de provocation. Les critèresdu fascisme, tels qu’ils ont pu être définis notamment parEmilio Gentile67, sont difficiles à repérer dans une prose aussiconfuse68 où éclate, sous la plume de Philippe Vaillancourt, levéritable dessein de ces jeunes gens, bien éloignés des idéauxdes jeunes fascistes européens de l’entre-deux-guerres : « Ici,

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sonnée je les avais entendu exprimer par Robert Brasillach,Claude Roy, Charles Mauban72. »

La Nation, un épigone du maurrassisme ?

La Nation, « organe du séparatisme canadien-français »qui paraît du 15 février 1936 au 1er août 1939, professe « uneadmiration sans borne pour ne pas dire un véritable culte »pour Lionel Groulx voyant « dans son œuvre la justificationhistorique et conceptuelle de la thèse séparatiste qu’ils soute-naient73. » La Nation est peut-être aussi, durant les annéestrente, la publication qui peut être considérée, le plus sérieu-sement, comme un épigone de celle de la rue de Rome et deses dissidents tentés par le fascisme, l’équipe de Je suis partout.Les travaux sur l’hebdomadaire québécois montrent cepen-dant que les influences hexagonales sont diverses, de Gringoireà Candide, de L’Action française à Je suis partout. Ce dernier pointest important car l’hebdomadaire, fondé en novembre 1930et dont les rédacteurs les plus en vue sont de jeunesmaurrassiens (Robert Brasillach, Lucien Rebatet) regroupéssous la férule de Pierre Gaxotte, est à partir du milieu desannées trente attiré par le fascisme, fascisme entendu commeune révolution susceptible d’être propagée et acclimatée enEurope et hors d’Europe, en particulier au Canada français.Si pendant longtemps les quelques articles publiés sur le Ca-nada français l’ont été à la page consacrée à l’empire britanni-que, Je suis partout publie à partir de janvier 1938 une pagecanadienne trimestrielle confiée à Dostaler O’Leary74, issu desJeune-Canada et animateur en 1935 à Montréal avec son frèreWalter d’un mouvement, les Jeunesses patriotes75. O’Learydéveloppe dans Je suis partout les thèses séparatistes et profas-cistes qu’il défend aussi ponctuellement dans La Nation. Ana-lysant le contenu de cette dernière, André J. Bélanger a souli-gné le « mimétisme76 » qui tient tant à la forme qu’au fond et

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l’action” répéta-il lentement, “il y a trente ans que Maurrasfait de l’action. Si les jeunes n’avaient pas cet homme, ce trèsgrand chef de soixante treize ans, pour commander leurs auda-ces, combien d’erreurs ils auraient commises avec leur tem-pérament, leur sang bouillant… Tant qu’il sera à nos côtés,nous serons dans l’action, mais dans l’essence de l’action…Ainsi nous n’assimilons pas action et programme, action etstratégie politique. Nous savons que les circonstances, lesévénements brutaux qu’un cerveau humain ne peut ordonneravant leur échéance, nous fourniront d’eux-mêmes les indica-tions matérielles nécessaires au couronnement de nos idées.Une doctrine honnête, vraie et bien pensée est un principeassez puissant pour coordonner les faits à mesure qu’ils seproduisent et pour leur donner la signification qu’ils doiventavoir dans l’ensemble. La doctrine est notre véritable armepolitique” ». À Paul Péladeau qui lui demande si la jeunesseest « prête au combat » et s’il a été « décidé où et quand l’atta-que devra porter pour implanter vos idées et placer vos hom-mes », Maulnier lui répond : « Le devoir de la jeunesse fran-çaise, c’est surtout de perpétuer la tradition, c’est-à-dire deremettre la dignité dans la vie de la France en donnant auxvaleurs intellectuelles, morales, spirituelles, leur vraie place ;c’est de croire que les valeurs culturelles dominent les valeurspolitiques et économiques qui n’en sont que l’application, larésignation tangible ». Enfin, à une dernière question dePéladeau de savoir s’il croit à une « révolution » en France,Maulnier lui répond : « Si, si, mais pas à une révolution tapa-geuse, pas à une révolution destructive. Nous croyons, si vousvoulez me comprendre à la révolution de l’esprit […] la jeunesse[…] veut construire, solide, pour des siècles, comme l’a tou-jours fait la France. […] Chaque sacrifice sera une pierre dunouvel édifice de la nation française ». Et Péladeau de con-clure : « Ces mêmes idées de lucide énergie, de réaction rai-

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ce sera ailleurs que le public même de droite ira cher-cher des chefs, chez les Croix-de-Feu, les JeunessesPatriotes ou la Solidarité française. Quand, à la cham-bre des députés on parlera des « ligues fascistes », l’Ac-tion française ne sera même pas mentionnée. Que lesjeunes à leur tour entrent dans l’arène des luttes politi-ques, ceux-là même qui rêvent d’un retour aux tradi-tions nationales, iront fonder des groupes, des jour-naux nouveaux, Esprit, Réaction, l’Ordre nouveau, en de-hors et souvent contre l’Action française, symptômeplus net encore, lorsqu’un prétendant, ou du moins unfutur prétendant au trône, plus clairvoyant que ses pré-décesseurs, voudra rallier les derniers partisans de lamonarchie, ce sera autour du Courrier royal, et d’un pro-gramme où la corporation professionnelle aura reprissa place, qu’il tentera de le faire. L’Action française,donc, agonise. Elle ne représente plus, avec le conser-vatisme social le plus étroit, qu’une surenchère nationa-liste qui n’a eu sa raison d’être qu’en temps de guerre,et où elle s’est figée81.

On ne commentera pas longuement l’exagération de cetexte quant à l’état de délabrement de l’AF ou les confusionsopérées via des amalgames simplificateurs entre les différentsrameaux des relèves spiritualistes des années trente. L’essen-tiel est ailleurs et tient dans la volonté de l’universitaire dediscréditer l’AF comme modèle et comme référence auprèsdes lecteurs de La Nation :

Chose curieuse, elle garde peut-être plus de prestige àl’étranger, chez les peuples de langue et de culture fran-çaise – Belgique, Suisse, Amérique du Nord – qu’enFrance même […] Il faut une longue expérience deshommes et des choses de France pour se rendre comptequ’il faut chercher ailleurs un patriotisme moins exalté,mais plus profond, et un sens plus vivant des tradi-tions françaises. Prendre comme modèle le sectarisme

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qui renvoie à un phénomène d’importation de thématiqueseuropéennes de la seconde moitié des années trente au Ca-nada français (clivage communisme/fascisme, éloge du fas-cisme italien, promotion du corporatisme, stigmatisation desfronts populaires), thématiques qui ont du mal à s’insérer dansle débat public canadien d’alors77. Il faut y ajouter, en suivantles travaux de Michel Lacroix, l’empreinte de la latinité, tein-tée dorénavant d’une sympathie affichée pour le fascisme ita-lien et qui s’exprime à travers Front latin, une revue publiée àParis à partir de 1935 et dont la cheville ouvrière est CharlesLesca, également actionnaire principal de Je suis partout. AuCanada, même si la revue Les Idées d’Albert Pelletier rendcompte des activités de Front latin, c’est surtout La Nation quiest en première ligne78.

Le dépouillement intégral de La Nation permet de pré-ciser et de dater l’ancrage maurrassien de l’hebdomadaire. Àl’origine, même si le premier numéro s’ouvre sur un article deson rédacteur Pierre Chaloult consacré à Jacques Bainvillequi insiste sur ses qualités d’historien, le compare à Voltaireet voit en lui « le plus lucide des intellectuels français au mo-ment de sa mort79 », la moisson de références au maurrassismeest maigre. Au surplus, les articles consacrés à l’AF sont plu-tôt critiques. Dans une série de deux articles intitulée « Dé-clin de l’Action française80 », Jean-Marc Dufrenne, présentécomme professeur à l’Université Laval, livre de l’AF une his-toire informée (y compris de ses dissidences – Georges Valois– etc.) et il conclut par une analyse des plus pessimistes puis-que le mouvement y est présenté comme en chute libre :

Au 6 février, qui apparaîtra sans doute à l’historien del’avenir comme une date décisive dans la liquidationde la IIIe République, il y a encore beaucoup de gensd’Action française parmi les manifestants. Mais, qu’en-suite les forces politiques se regroupent et s’organisent,

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des autres : on écoute la musique, les grandes orgues,on néglige malgré soi les paroles du credo impitoya-ble. Rendons hommage, un libre hommage à CharlesMaurras, Prince du Sang, Noble de vingt quartiers dansl’aristocratie de l’intelligence.

À partir de juin 1937, le ton et le contenu changent,sous l’impulsion de Marcel Hamel, dorénavant rédacteur enchef de l’hebdomadaire. La fréquence des articles consacrésà Maurras augmente très significativement, notamment poursaluer sa sortie de prison à l’occasion de laquelle Paul Bouchardprend la plume pour lui rendre un hommage appuyé86. Sur-tout, la prose de Hamel atteste d’une volonté de repenser etde réadapter le maurrassisme à l’aune des enjeux du Canadafrançais. Le rédacteur en chef revendique, assume, discute etprolonge l’héritage maurrassien.

Marcel Hamel affiche expressément et publiquementson maurrassisme. Il raconte avec émotion sa découverte dumaître martégal et souligne le rôle d’éveilleur joué par PierreChaloult, décrit comme un « disciple forcené, quasi-anachro-nique ». Hamel veut faire partager « le plaisir ressenti au con-tact du dernier des Français, fumée d’or d’une prose athé-nienne dont je me suis grisé, tel un jeune satyre, sous les éra-bles de mon village » et sa réceptivité :

Libre de toute attache, Maurras n’eut pas de difficultéà me gagner à ses thèses : il le ferait de vous également.Sa logique est trop pareille au collet du braconnier : ilvous prend comme un lapin. Il est impossible de nepas partager ses idées sur la révolution de 1793, sourcedes malheurs actuels de notre mère-patrie. Son abat-tage de la démocratie et de son corollaire naturel, lelibéralisme, est quelque chose de formidable : c’est lajument de Gargantua dessouchant d’un coup de queuela forêt de Beauce. Joseph de Maistre, en regard de lui,

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intransigeant de Maurras vieillissant, ne pourrait con-duire qu’à perdre le contact avec les vivantes réalités, seraidir dans une attitude de défiance et de négation, ets’épuiser dans de stériles querelles de personnes82.

La Nation, de l’hiver 1936 à la fin du printemps 1937,soutient cependant Maurras, alors emprisonné, à travers quel-ques articles reproduits83. L’hommage le plus net émane deBerthelot Brunet, critique littéraire et collaborateur de L’Ac-tion nationale84qui prend le soin de distinguer l’intellectuel etl’écrivain du mécréant85. Après avoir rappelé qu’il est « un desgrands hommes de ce temps », il stigmatise ses idées religieu-ses pour mieux mettre en valeur ses mérites littéraires :

Les mésaventures religieuses de Charles Maurras nem’intéressent pas. J’ai toujours su que sa justice était dece monde […] Le Provençal ne saurait nous donnerdes leçons de catéchisme, ce n’est pas là son office. Lescongrégations, le Pontife ont banni justement cet infi-dèle hors du temple : je ne sache pas qu’il ait jamaisvoulu s’agenouiller, s’il s’était fait le mercenaire del’Église. Maurras n’est pas chrétien, il était opportunque l’Index le fît savoir aux têtes folles qui le tenaientpour un père de l’Église […] Plus que la politique, lesmuses président à la vie du grand homme. Il rimaitdevant que de philosopher.

Et Brunet de conclure avec un lyrisme teinté d’amertume :Je vois sourire Charles Maurras, je vois surtout la ridesourcilleuse du front. Son discours nous propose unordre trop souvent sans amour. Ce Romain se montratrop grand, sa logique, sa phrase, ses mots sont uneforte nourriture, délectable aussi ; nous rêvons à desfruits plus succulents et moins sains. Sommes nous tropfaibles, frappés à jamais de langueur ? ou lui trop dur ?Le châtiment de Maurras, qui poussa la logique à desexcès cousins du sophisme, c’est qu’il méritera le sort

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terons au publiciste royal cette méthode d’hygiène in-tellectuelle, rien que cela [ce qui est pourtant fonda-mental], qui lui a permis d’édifier une doctrine auxpremiers abords chimériques, en l’an du Seigneur 1900,aujourd’hui de plus en plus à la demande pour assurerle salut public de la France. Nous pourrions emprun-ter aussi les deux idées de la décentralisation et du Po-litique d’abord, mais comme elles sont d’évidencemême dans la thèse de nationalisme laurentien, je nevois pas l’utilité d’en gloser. Ainsi, nous aurons accom-pli un travail analogue à Maurras qui a expurgé AugusteComte à son profit personnel, comme Saint Thomasd’Aquin d’ailleurs, a dévalisé Aristote sur la routed’Athènes à Rome90.

Rapportée au Canada français, cette perspective, selonMarcel Hamel, se décline de différentes façons. Elle lui per-met d’abord de présenter Groulx comme un héritier de Maur-ras et plus généralement du nationalisme français. L’abbé auraitprocédé avec le penseur provençal comme ce dernier avecComte. Le parallèle est percutant même s’il comporte desapproximations, des raccourcis et des erreurs : « Groulx a étéà Maurras ce que celui-ci fut à Auguste Comte. Il l’a choisicomme son maître. Il a institué sa revue L’Action française enempruntant le nom du fougueux journal de la rue de Bocca-dor à Paris. Il a cité maintes fois Maurras au cours de ses nom-breux discours et écrits sur les thèmes de la patrie canadienne-française. Il a prononcé des conférences devant les Camelotsdu roi. Et lorsqu’en 1928 [sic], Rome a condamné le théori-cien de la monarchie, l’abbé Groulx pour calmer les fiévreuxa changé le titre de sa revue […] Notre historien national con-tinua le culte de la fidélité à Maurras – tout en compatissantsur ses erreurs et désirant qu’un jour ou l’autre, le philosopheathée se convertisse au catholicisme – car il lui devait beau-coup91. » Marcel Hamel ne se contente pas d’une filiation

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ressemble à un bambin qui voudrait anéantir une ar-mée avec un tire-pois87.

L’admiration professée par Hamel a un fondementprioritairement politique. Le rédacteur en chef de La Nationvalide en effet bien des analyses de Maurras et marque claire-ment sa différence avec les analyses de Jean-Marc Dufrennepubliées un an plus tôt. Marcel Hamel considère le diagnosticporté par Maurras sur la France de la Troisième Républiquetout à fait fondé et rejette l’idée d’un déclin de l’AF :

Ce n’est pas de réussir qui compte, quoique le succèssoit un gage de gloire, c’est d’avoir su raison garder, àl’instar des rois de France. Et Maurras, à qui est rede-vable dans sa plénitude le renouveau royaliste actuel88,trouve un change magnifique dans le spectacle de laFrance contemporaine, nation dégénérée où la semenced’Abraham a converti le sol de Jeanne d’Arc en Terrepromise, où la synagogue a suppléé la cathédrale, oùl’asiatisme barbare a remplacé les valeurs latines, oùdemain, par voie de conséquence aux immortels Prin-cipes, les eaux de la Seine se rougiront du sang desFrançais. Du fond de son cachot, Maurras n’a qu’àcoller son œil sur le trou de la serrure et il voit en pleinelumière la confirmation de sa critique89.

Certes, Marcel Hamel admet l’antichristianisme de Maurras,mais c’est pour mieux rebondir :

Quoi qu’il en soit, l’exégète de Comte et ardent disci-ple de Sainte-Beuve reste un logicien maudit, et commetel, notre foi catholique nous oblige à le renier solen-nellement. Rien ne nous empêche toutefois de choisirchez Maurras, après une purgation spirituelle de sesidées, ce qui relève de l’orthodoxie commune : car saphilosophie, inacceptable en bloc, quant à certainesparties, est riche, pour nous au Canada français, enpossibilités créatrices. […] En définitive, nous emprun-

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demain il meurt, et le roi appellera un nouveau pre-mier ministre : ce sera tout, peut-être mieux. En toutcas, à choisir entre la dictature et la démocratie, je nechoisis pas : je penche du côté de la dictature qui estencore une manifestation du bon sens sur la crapule etl’ineptie93.

L’attitude de Marcel Hamel n’est pas seulement défen-sive. Il entend interpréter et utiliser Maurras et manifeste ainsiune volonté explicite de transfert fondée sur une analogieméthodologique (on retrouve ici « l’empirisme organisateur »)et une vision historique globalisante :

Certes, son monarchisme est pour nous lettre morte ;mais la formule empirique dont il a usé pour amenerDieu et le Roi à la conclusion de sa géométrie contre-révolutionnaire est par une opération de l’esprit dé-montable de son cadre matériel et elle peut épouser unautre plan, la logique étant partout la logique. Ainsiappliquée à notre thèse, la méthode d’introspectionmaurrasisienne [sic], il surgit des rapports – théorèmedes triangles semblables – entre la Monarchie françaiseet notre Nouvelle France, entre la Révolution et la Con-quête, entre la République et la Confédération, entreun retour à la Monarchie et la création d’un État librefrançais en Amérique. Il ne s’agit pas dans les deux idéo-logies de simples coïncidences, mais de formidablescycles qui s’appellent les uns aux autres. Ainsi pour nousla conquête, comme la Révolution de 89 pour Maur-ras, est une vraie calamité. […] L’exemple de Maurrasest dans nos intelligences. De même, il continue d’as-seoir la tradition de son pays dans les quarante rois quien mille ans firent la France, non à partir de la coupuredes institutions de l’an VIII, ainsi, nous devons jeter lesponts entre notre époque et les jours dorés de la Nou-velle France au-dessus de l’abîme de 1760. C’est ceque prêche depuis trente ans notre maître Groulx. […]

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maurrassienne mais assure que Groulx a reçu une forte em-preinte barrésienne : « Maurice Barrès exerça une influenceformidable, non seulement sur la pensée de l’abbé Groulx,mais sur son vocabulaire, dans ses phrases. Et ceci est bien.De Maurras, il recevait le dépôt de la logique française, de laclarté française, de la rigueur française. Mais la sensibilité ?mais l’amour, mais la chaleur d’une mystique ? Mais le ly-risme du poète ? À Barrès revient l’honneur d’avoir déposésur les épaules du maître le manteau du barde92. »

Cette filiation est assumée. Marcel Hamel fait face àl’adversité et prend la plume contre Jean-Charles Harvey quimet en cause le maurrassisme de La Nation. Au début de 1938,Hamel, auquel Harvey a adressé son livre Art et combat, pro-fite de l’occasion pour ironiser sur la superficialité de la lec-ture qu’a pu faire Harvey de Maurras et réaffirmer tant sespositions sur l’impossibilité d’une mise en place de la monar-chie au Canada français que son rejet radical de la démocra-tie :

La discussion est amenée à propos de l’influence del’Action française sur la jeunesse canadienne-française.M. Harvey, qui ne m’a pas l’air d’avoir usé ses lunettessur l’Enquête sur la Monarchie, liquide ce régime en untour de main. Son argument n’est pas si mauvais : ilsoutient que chez nous c’est une utopie de discuterd’une couronne et d’un trône. En quoi il a bien raison,quoique l’Unité ait un jour formulé un rêve irréalisable.Enfin ! pour celui qui s’est trempé l’intelligence une foisdans la logique maurrassienne, il y a là un abîme dont ilmesure toute la profondeur. Il reste donc la dictature.Elle a ses inconvénients, elle a aussi ses avantages, toutdépend de l’homme et du peuple. Hitler représente letyran néfaste, et Mussolini le tyran transitoire et Salazarle tyran instable. Des trois, je préfère le duce parce qu’ilest avec lui une monarchie puissante et héréditaire ; que

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Pour Hamel, qui est ici dans la droite ligne de La Nation oùles régimes fasciste, hitlérien, salazariste sont encensés (sansoublier Franco), Maurras « manque de politique extérieure ».Ainsi, « Il voit le salut de la France dans l’écrasement de l’Al-lemagne. Erreur tragique ! Car une fois l’Allemagne écrasée,il ne restera plus que l’Italie seule contre un monde de barba-rie. Henri Béraud, de Gringoire, est plus visionnaire que l’auteurd’Antinhéa qui demande : « Faut-il réduire l’Angleterre en es-clavage ? » Là gît le nœud de vipères – Intelligence Service –qu’il faut piétiner, écraser, malaxer de boue et de sang96 » Lavision de Hamel fait songer à certaines analyses et aux amor-ces de dissidences repérées dans l’Hexagone au sein de la ré-daction de Je suis partout où Robert Brasillach et Lucien Rebatetprésentent leur fascisme comme le prolongement de leur na-tionalisme et cherchent à établir, selon leurs propres termes,une « ligne » fasciste et internationaliste97. L’attraction de Lescapour la latinité et qui réclame des textes à son ami Paul Du-mas se conjugue avec le philo-fascisme des collaborateurs deJe suis partout, intéressés de nouer des contacts avec des grou-pements étrangers réputés proches. C’est dans cette perspec-tive qu’il faut comprendre la place faite par le canal de Du-mas à O’Leary (contacté à la fin de 1937) même si elle n’estpas comparable à l’écho donné au rexisme, à la Phalange es-pagnole ou à la Garde de Fer.

La présentation et le contenu de La Nation évoquentdavantage Je suis partout que L’Action française. La collabora-tion de Dostaler O’Leary à Je suis partout, motivée bien davan-tage par le philo-fascisme que par la défense culturelle de lalatinité, est d’ailleurs saluée avec emphase par Roger Vézina :« À cette occasion, notre ami de Montréal mérite nos plussincères félicitations. Je considère en effet comme un insignehommage pour un journaliste du Canada français de pouvoirfaire avaler sa prose par un hebdomadaire parisien d’une te-

De la rue de Rome au Canada français

En France, seul le Roi sauvera son peuple de l’anarchierévolutionnaire ; au Canada seul l’établissement d’unÉtat libre français en plus d’assurer fortifiera la per-manence de nos positions dans le Québec. L’implaca-ble intelligence qui préside à la restauration de la Mo-narchie, préside de même à la création de l’État fran-çais, à moins qu’on ait perdu tout instinct de conserva-tion94.

L’allégeance proclamée à Groulx par les rédacteurs deLa Nation, l’affirmation bruyante du maurrassisme de ce der-nier et la proclamation de l’avènement d’un État français auCanada sous le signe de « l’intelligence » et de la raison nesuffisent pas à faire de Groulx un maurrassien et invitent plu-tôt à s’interroger sur les distances existant entre la pensée deGroulx et celle de ses jeunes et bruyants disciples. Comme l’arelevé avec justesse Julien Fabre, la question est posée del’utilisation d’une méthode qui marque ses distances avec leprovidentialisme de l’abbé Groulx : « La Nation fait de l’idéo-logie maurrassienne son “catéchisme politique” car au ser-vice de la doctrine on ne met plus la foi mais la raison. Ladistanciation avec Lionel Groulx est alors effective, le sépa-ratisme est réalisable, réaliste, une sorte de dernière révéla-tion95. »

L’affiliation maurrassienne de Hamel n’est pas une sim-ple allégeance car il prend certaines distances avec Maurras.En particulier, Hamel lui reproche ses positions vis-à-vis del’Allemagne, égratignant au passage le rejet que le patron del’AF éprouve à l’égard de Napoléon. L’empereur serait réputépour Hamel avoir compris que l’ennemi était d’abord « Al-bion » et non l’Allemagne ou l’Autriche. Rapportée aux en-jeux de 1937, la position de Maurras serait « illogique : il en-cense Mussolini et houspille Hitler dans le même article. L’AxeRome-Berlin fatigue ses yeux de latin : le pays de Goethe cons-titue dans les inimitiés royalistes l’ennemi extérieur no 1. »

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vos idées quoique comme catholique, j’ai été obligé, par lesmenottes de l’opinion publique, de “vous renier solennelle-ment” ».

Si cette position de son rédacteur en chef est un signefort de l’orientation de La Nation vis-à-vis de l’Action fran-çaise, un courrier de son secrétaire général adressé à la direc-tion du quotidien monarchiste le 10 juin 1937 montre que ladémarche de reconnaissance engagée est collective : « Mes-sieurs, Vous nous obligeriez infiniment si en retour de notrejournal que nous vous enverrons régulièrement chaque se-maine, vous nous faisiez parvenir le vôtre. Espérant que vousne tarderez guère à nous mettre sur votre liste d’échange, nousdemeurons Vos tout dévoués. La Nation. ». La réponse deL’Action française tient dans une apostille sur la missive deLanglois : « avis favorable » avec la signature de MauricePujo101. On n’en sait guère plus. Il ne semble pourtant pas quela moindre collaboration s’esquisse entre les deux publica-tions alors que les contacts existent entre La Nation et Je suispartout, dont certains des collaborateurs les plus éminents,comme Robert Brasillach ou Pierre-Antoine Cousteau, voientquelques-uns de leurs articles reproduits dans l’hebdomadairemontréalais102. À l’inverse, à partir du début de 1938, l’intérêtpour l’Action française, sans disparaître complètement dimi-nue très fortement. Marcel Hamel cesse d’écrire sur Maurrasà partir de l’été 1938103 et si l’élection de Maurras à l’Acadé-mie française est saluée dans La Nation, cette dernière repro-duit pour l’occasion l’article qu’a publié Brasillach dans Je suispartout104.

3. Le Canada français des maurrassiens de l’Hexagone

À la différence de la Ligue des Patriotes qui a tentéd’implanter, sans grand succès un comité au Canada françaisentre 1885 et 1888105, l’Action française n’a jamais cherché à

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nue aussi parfaite que Je suis partout. Je souhaite qu’à l’exem-ple de M. O’Leary d’autres journalistes canadiens soient ad-mis dans la phalange des collaborateurs bénévoles du miroirde la vie mondiale dans le monde journalistique98. » La suitedu propos est très révélatrice de l’état d’esprit du collabora-teur de La Nation : « Quand je dis miroir, ce n’est pas sansraison, depuis deux ans j’ai fait de Je suis partout mon journalde chevet. » Roger Vézina évoque ensuite sa découverte durexisme, de l’intégralisme et d’un fascisme international…toutes choses que l’on retrouve dans La Nation entre 1936 et1938.

Le maurrassisme de La Nation n’est pas seulement l’ex-pression d’une fascination à distance. Le dépouillement de lacorrespondance reçue par Maurras montre en effet qu’un con-tact a été pris entre l’hebdomadaire québécois et le quotidienmonarchiste. La minceur des sources interdit d’opérer desgénéralisations abusives, mais les données disponibles ne sontpas sans signification. C’est, logiquement, Marcel Hamel quiprend la plume en juin 193799. Celui qui se présente commeun « très jeune confrère québécois » s’exprime avec une émo-tion touchante et naïve : « Je vous aime comme Montaigneaimait la Béotie (sic). Vous êtes le dernier des Français et nous,de « la Nation », vos fils spirituels d’outre-Atlantique, grâce àvous, nous sommes au Canada les amants fidèles de la Francemalheureuse. Perdus dans un sanctuaire lointain, nous conti-nuons d’aviver la flamme dans les cœurs et dans les intelli-gences. L’impérialisme saxon, tant dans la culture et dans lapolitique, a depuis belle lurette conquis nos compatriotes, etla dégénérescence de notre vraie-mère patrie n’est pas pourencourager un retour, sentimental j’entends, aux dieux méditer-ranéens100. » Si Hamel se proclame catholique, il lève explicite-ment toute équivoque quant à la condamnation de 1926 etson attitude à son égard : « Je demeure un acharné disciple de

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des nuits de garde passées à l’imprimerie d’Action fran-çaise ». Fils d’officier – et d’une famille toute militaire -mon oncle Vayssière a commandé la garde républi-caine –, j’ai fait de belles études prometteuses, j’ai faitla guerre et j’en suis sorti avec des galons et, ma foi, debelles citations de fantassin (classe 17). Ayant perdumon père de bonne heure (commandant Rumilly, an-cien élève de choix de Foch, mort empoisonné auTonkin en 1910), j’aurais été tenté par l’anarchie intel-lectuelle à quoi l’on nous conviait (j’étais boursier del’État) si je n’avais adopté le maître Maurras et les doc-trines – les doctrines d’AF – auxquels je dois, aprèsmes parents, à peu près tout. J’ai vécu intensément, etvous savez ce que cela veut dire, toutes les heures del’Action française. Mais j’en ai eu assez d’aller toujoursaux enterrements des nôtres (et le dernier mon cama-rade Marcel Langlois tué depuis mon départ) et jamaisaux enterrements des adversaires. Trop de choses ettrop de gens m’ont dégoûté. Malgré vous, malgré vosconsignes, j’ai désespéré de jamais voir dans mon pays,dans ma classe sociale, le redressement pour lequel nousavons travaillé. Si j’avais prévu seulement le 6 février, jeserais resté. Mais j’ai fini par partir dégoûté de la vieilleFrance pour la nouvelle France. À quelque chose, mal-heur est bon. À mon rang, avec mes petits moyens, jeme suis livré ici à une œuvre française et je dois vousl’écrire, puisque je le crois, avec plus de confiance dansle succès final que je n’en avais en France même. C’estmoi qui ai conseillé au vaillant TRAVAILLEUR deWorcester109 d’entrer en relations avec vous. Je suis d’AF.Ne le cache jamais. J’en parle librement chez mes amisles Pères du Saint-Esprit, chez mes amis les pères oblats,chez mes amis les pères dominicains. J’ai donné desconférences sur vous à Montréal110.

Ce courrier de Rumilly est unique en son genre et nedébouche nullement chez Maurras sur une volonté de déve-

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s’établir au Québec. Force est même de constater le déséqui-libre entre la France et le Canada français auquel lesmaurrassiens, de Maurras à aujourd’hui, se réfèrent peu, mêmesi Aspects de la France a consacré un article à Lionel Groulx aumilieu des années soixante-dix106. Concernant les premièresdécennies du XXe siècle, on ne saurait donc accueillir sansbeaucoup de réserve ce propos de Lionel Groulx de 1922 misen avant par Catherine Pomeyrols : « celui qui tient la plumepeut affirmer que les intellectuels du no 14 de la rue de Romese préoccupent vivement de l’avenir du Canada français107. »Des données objectives sont ici éclairantes. La consultationdu Dictionnaire politique et critique de Maurras donne, en tout etpour tout, six articles sur le Canada français parus, le premieren 1908, le second en 1912 et les quatre autres entre 1934 et1937108. De son côté, Lionel Groulx ne fait l’objet d’aucunemention. Les archives de Charles Maurras, en particulier sacorrespondance, sont également significatives : le dossier « Ca-nada » réunit onze lettres, qui datent pour l’essentiel de 1937.On ne trouve pas de correspondant régulier de Maurras auCanada, y compris du côté français, ainsi que le montre l’uni-que lettre disponible de Robert Rumilly.

Abonné à L’Action française de Paris, ce dernier écrit au« Maître » qui a évoqué son livre Marguerite Bourgeoys. Les re-merciements d’usage effectués, Rumilly entreprend de se pré-senter à Maurras qui ne le connaît pas, rappelle son itinéraireet fait le point sur son action à Montréal :

Je suis Action française et maurrassien jusqu’à la moelledes os. Lycéen d’Action française à Buffon, avec moncher ami Marc Dejean de la Bâtie (tué à la guerre), puisà Louis le Grand (prix de philo à ce lycée, Malapertregnante), étudiant d’AF, ligueur du XVIe avec notre amiBaguenier-Désormeaux. Le trésor de ma bibliothè-que est un exemplaire de Romantisme et Révolution ainsidédicacé : « À monsieur Robert Rumilly, en souvenir

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rétablissaient foyers, langage, religion, disputaient comme ilsdisent “l’âme française” à ses “voleurs”, la rendaient à elle-même et fédéraient de plus en plus les belles agglomérationsqui se sont si bien développées en soixante-quinze ans, quede toutes parts, on y travaille à fonder, par comités et sous-comités, des délégations au Congrès de Québec114. » En fait,ce que Maurras voit surtout dans le Canada qu’il décrit etpropose à ses lecteurs, c’est l’image d’un pays qui a su préser-ver et développer la tradition et n’a pas été abîmé par la mo-dernité. Cela lui permet d’idéaliser un Canada opposé auxÉtats-Unis dans des termes lyriques : « Heureux pays ! Vousavez une foi, une langue, un esprit de famille, une paysanne-rie, des mœurs… Où n’irait une race humaine avec de telsatouts ? Comparez la stabilité, la fécondité de vos foyers àl’instabilité, à la stérilité du foyer américain. Votre moralité àla criminalité des autres. Votre fidélité, votre unité religieuse,à leur morcellement, au pullulement de leurs sectes et de leurstemples ! Votre puissance et courageuse continuité ethniqueet linguistique à cette mosaïque d’immigrants de tous lieux etde tous pays ! Comparez vos champs, même vos forêts, à l’in-dustrialisme dont vos voisins sont prisonniers, même la char-rue à main. Un seul élément paraît militer contre vous, c’estleur nombre. Mais l’armée du roi des rois comptait des cen-taines de milliers d’hommes, et les bataillons de Miltiade, deThémistocle et de Léonidas ne faisaient qu’une poignée : ilsl’ont emporté pour les siècles. Les mécanismes de l’histoiresont héroïques115. »

Pour autant que l’on puisse en juger, le discoursmaurrassien des années trente est assurément en décalage avecl’état d’esprit dominant des dirigeants de l’ex-Action françaisecanadienne, l’abbé Groulx en tête. Certes Maurras avait prisle soin de balayer les craintes des Canadiens français qu’il apu recevoir (aucun nom n’est cité mais Louis D. Durand, an-

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lopper des relations ou de faire diffuser ses thèses outre-At-lantique. La chose ne l’intéresse guère. Le contenu de la prosemaurrassienne sur le Canada n’en est pas moins chaleureux,riche d’intérêt quant aux représentations véhiculées sur cedernier et fort instructif quant aux implications politiques quipeuvent en être retirées. Lorsque Charles Maurras évoque leCanada français, il pense d’abord à la France, à « ce magnifi-que rameau de notre race et de notre langue qui, par delà laMer océane ne cesse de produire ses feuilles et ses fruits ». Ily voit « un des hauts lieux du nationalisme français […] troisfois fidèle à sa langue, à son sang, à sa foi » et « appelé auxinitiatives majeures de l’ordre intellectuel et moral111 ». L’ad-miration du penseur martégal pour le Canada français est pro-fonde. Elle s’attache d’abord à l’action entreprise pour la dé-fense et la perpétuation de la langue française. Il nourrit sonpropos d’exemples précis, en particulier celui du vocabulairesportif : « Nous avons dans les archives d’Action française, for-tement illustré par Lucien Dubech, un témoignage admirablede ce dévouement à la langue des pères : c’est la traductionmot à mot et complète de tout l’affreux vocabulaire des sports,universellement britannique, en beau et bon français, soitmédiéval, soit moderne, soit contemporain. Quand nos cou-reurs et nos athlètes comprendront-ils que le Canada leurdonne l’exemple de parler français112 ? » Cette admiration seretrouve trois ans plus tard lorsque Maurras évoque en marsle Deuxième Congrès de la langue française prévu à Québecau début de l’été 1937. Commentant le « cas privilégié etmagnifique de l’expansion du français au Canada », Maurrass’exclame : « Un seul sentiment est possible : l’admiration, cellequi est due à près de deux siècles d’une fière et féconde fidé-lité113. » Maurras qui relit à sa façon l’histoire canadienne rendégalement un hommage appuyé à l’action du clergé, aux « hom-mes noirs » : ils « fondaient des paroisses et des écoles, ils

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notre culte du langage de France une importance qui n’existepas sans le substrat des institutions politiques et économi-ques. Il est vrai que vous avez pour vous l’ignorance du mou-vement nationaliste québécois dont vous pouvez lire le mani-feste au bas de cette page : pour un État libre français enAmérique. » Du constat, Marcel Hamel passe aux recomman-dations :

Vous pourriez conseiller ces messieurs de l’Académieà l’occasion de leur visite dans nos murs. […] Prenez-les de nous rappeler nos responsabilités françaises enAmérique ; persuadez-les de ne pas se préoccuper duproblème louisianais – devenu depuis 1760 un pro-blème nègre – ; montrez-leur que la civilisation fran-çaise n’a pas de chances de survie au Canada ailleursque dans le jardin des Laurentides, pas dans les forêtsde la Nouvelle-Angleterre, pas dans les prairies de bi-sons et de totems, pas sur les terres hostiles de l’Onta-rio, mais dans le territoire du Québec […] Écrivez cetarticle, je vous prie et vous aurez à votre insu proclaméun séparatisme spirituel avant-coureur de l’autre : cesera sur le plan américain une adhérence nouvelle àvotre « Enquête sur la Monarchie ». Vous nous aurezalors procuré une immense et débordante joied’homme.

Cette lettre de Marcel Hamel, dont on ignore si elle asuscité une réponse de Maurras, appelle une double remar-que. On constate d’abord que Maurras est remis en cause aunom de ses propres principes et invité à se rétracter, ce quin’est guère dans sa nature. Mieux encore, il est prié d’interve-nir dans un débat extra-hexagonal. Hamel ignore que Maurrasa reçu quelques mois plus tôt de la part de Louis D. Durandun très long courrier dans lequel l’avocat, qui avait participéen mars 1922 à l’enquête de L’Action française de Montréal sur« l’avenir du Canada français121 », proposait une analyse diffé-

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cienne figure de L’Action française canadienne des annéesvingt116, lui a écrit117) : « Il arrive aux Canadiens français de sejuger avec sévérité et d’adresser à leurs organisations inté-rieures ces nobles reproches qui reviennent à dire que, si ladéfense ou la propagande nécessaires ont été faites, ellesauraient pu être poussées plus loin ou conduites avec plusd’énergie… Reproches de lutteurs ! Scrupules de héros !118 »Le lyrisme de Maurras en 1937 contraste avec ses craintes de1912 où il s’inquiétait du développement de relations franco-canadiennes sous l’égide de la République : « Ce n’est pas larace canadienne-française et catholique qui en profitera. LeGrand Orient de France a ses succursales au Québec. Lesidées révolutionnaires y possèdent leurs véhicules qui sonttout prêts : journaux, revues, librairies, théâtres, bibliothè-ques ; bientôt même on peut dire qu’un public est formé pouraccueillir ces laissés pour compte de l’Europe civilisée119. »

La satisfaction affichée par Maurras contraste avec leton de la brochure du jésuite Alexandre Dugré (Notre survi-vance française) et celui du discours prononcé par Groulx aucongrès de 1937 : « L’histoire gardienne des traditions vivan-tes », dans lequel il critique vivement le Québec et en parti-culier sa classe politique pour l’insuffisance de son action vis-à-vis des minorités120. L’article de Maurras suscite surtout uneréaction négative de Marcel Hamel qui marque son désac-cord et réclame à Maurras dans une « supplique » d’intervenirde nouveau et ce dans le sens de ses disciples autoproclamés :« Vous avez écrit un article sur le prochain congrès de languefrançaise et qui eut ici un extraordinaire retentissement. Cespanathénées, je voudrais vous le crier, n’auront rien de fran-çais et de latin. Il s’agit d’une démonstration sinistre où s’af-firmera au son des trompettes, un féal hommage à l’Angle-terre. Aussi je suis peiné de l’esprit de cet article. Je ne recon-nais pas l’auteur de « Politique d’abord ». Vous accordez à

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sauver la langue c’est de commencer par sauver toutes lesconditions matérielles qui pourraient en assurer le rayonne-ment : écoles, presse, musées, reliques, monuments, affiches,chansons, tout ce qui peut nous relier de façon vivante etpresque tangible à notre passé en nous rattachant à plus pro-fond, à plus lointain que nous-même et le temps présent. »

Ces deux correspondances, qui sont autant la marqued’allégeance que de dépendance intellectuelle, invitent à dif-férentes remarques. Leur faible nombre interdit de les consi-dérer comme représentatives, mais leur existence souligne larelation étroite et ancienne existant entre certains publicistescanadiens-français et Maurras. Tous deux s’illusionnent ce-pendant profondément sur ses intentions et ses supposéesréactions dans un tel débat. Maurras n’y est pas intervenupour deux raisons majeures. La première est une raison deprincipe : Maurras refuse depuis les années vingt d’être unesorte de chef d’une quelconque « internationale blanche124 »et se garde bien de prendre des positions concernant des dé-bats internes à l’intérieur de mouvements nationalistes autresque l’Action française de même qu’il n’entend prodiguer aucunconseil. Cette attitude, déjà observée pour la péninsule ibéri-que, se confirme ici. Elle se double ici d’un autre élémentpointé avec justesse par Charles Chicoine, qui a rencontré le« Maître de Martigues » en 1935 : « Charles Maurras avait uneconnaissance surprenante ou au moins des opinions très pré-cises sur le Canada français125 ». Si on songe à la psychologiedu personnage et à son mode de raisonnement intellectuel, ilapparaît peu probable que deux courriers de disciples chaleu-reux mais inconnus de lui soient de nature à le faire évolueren profondeur sur un tel objet. On constate d’ailleurs qu’au-delà de Maurras lui-même s’opère à la fin des années trentedans la nébuleuse maurrassienne française à l’égard du Ca-

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rente de la sienne, notamment pour ce qui concerne les mino-rités francophones hors Québec122. Louis D. Durand soulignaitla « formidable leçon qui nous vient de l’État de la Louisianeen immense majorité anglo-saxon et situé si loin, si loin dufoyer français de Québec […] Quel exemple et quelle leçonpour le seul gouvernement français et catholique d’Amériquedu Nord, celui de la vieille province de Québec, comme pourtous les gouvernements municipaux et scolaires de cette pro-vince française. » Surtout, comme Marcel Hamel, Louis D.Durand excipe d’une fidélité maurrassienne qu’il exprime avecchaleur : « Depuis longtemps je cherche un moyen de vousdire mon admiration, ma reconnaissance et mon affection.Vous êtes mon ami depuis mes jours de Belles-Lettres 1908-1909. C’est à M. Omer Héroux que je dois le bienfait de vousavoir connu. Frontières123 m’a permis de vous rendre publique-ment le témoignage de ce que je vous dois, par une simplesignature, hélas, mais donnée avec quelle joie, et ma lettrecomme ma demande de ce jour, puisqu’elle nous rendrait ser-vice, si elle était agréée, est peut-être encore une façon plusdirecte, plus personnelle, plus appuyée, de vous dire en quelleprofonde estime je tiens le prisonnier de la Santé parce que jele prie de nous aider à “ recomposer ” notre nationalité. » Cedernier point est fondamental, car Louis D. Durand, commeMarcel Hamel, réclame au « maître » son avis et son appui :« Vous êtes le gardien de l’espérance française dans le mondeà l’heure actuelle. Il est naturel que de partout nous nous tour-nions vers vous. C’est la rançon de votre vigilance et c’est maseule excuse, à venir vous relancer, jusqu’à la Santé, vous queje lis depuis vingt ans. Si l’on veut décider les Français à sesauver, il faut les résoudre à se penser ». Et Durand de suggé-rer comme Hamel des pistes de réponse à son interlocuteur :« M. Maurras, dites-nous que nous ne resterons Français quesi nous sauvons la langue, oui, mais que le meilleur moyen de

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qui nous travaillent, si nous ne leur portons pas remède avantqu’il ne soit trop tard128. »

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Importants avant la condamnation de 1926, brisés untemps par cette dernière, les échanges entre Canadiens fran-çais et Français de sensibilité nationaliste et catholique ontrepris à la veille de la guerre, facilités sans doute par la levéedes sanctions décidées par le Vatican129. La défaite de 1940,le ralliement de l’Action française au régime de Vichy et l’op-probre qui a suivi le procès de Maurras en 1945 ont brisé netle rapprochement esquissé par le reportage de Péladeau. Parla suite, comme l’a montré Pierre Trépanier, à quelques ex-ceptions près130, le silence domine et Maurras et l’Action fran-çaise sont pour leurs anciens sympathisants canadiens-fran-çais rangés parmi des souvenirs encombrants. Du côté fran-çais, le choc de l’épuration passé, le maurrassisme a refaitsurface sans jamais retrouver l’écho qu’il avait avant la guerre.Pourtant, que ce soit dans les sphères journalistiques, étu-diantes (renouveau des étudiants royalistes au début des an-nées cinquante), littéraires (avec la Table ronde, les Hussards),politiques voire activistes (OAS-Métropole) l’Action françaisea continué sa route. Elle n’a jamais recroisé celle du Canadafrançais, grand absent, pour autant que l’on puisse en juger,des contacts noués avec l’étranger. Ainsi, lors d’un numérospécial d’hommages des Cahiers Charles Maurras pour le dixièmeanniversaire de sa mort, on ne trouve aucune signature pro-venant du Canada français parmi les « hommages d’au-delàde nos frontières131 ».

Les liens entre le maurrassisme et le Canada françaissont donc l’affaire d’une rencontre, d’un moment, d’une in-fluence davantage que d’un transfert. La relation entre les deuxpôles est très déséquilibrée et sur chacune des rives de l’At-

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nada un raisonnement combinant décalage dans le temps etanalogie.

Paul Péladeau cite en particulier une lettre que RenéVincent, grand ami de Maulnier et directeur de Combat (unedes principales revues de la Jeune droite) lui a adressée de-puis les armées et qui l’a « profondément ému » : « J’ai tou-jours constaté combien étaient proches la vie de ces Françaisd’autrefois que sont les Canadiens d’aujourd’hui et celle desFrançais d’ici, non telle sans doute que la laissent imaginerparfois notre littérature et notre politique, mais telle qu’elleest demeurée dans les familles et dans les provinces. Je vou-drais, si je n’étais pas retenu dans les sous-sols de la ligneMaginot, vous faire retrouver ces correspondances profondesqui existent entre nous et que dissimulent souvent des agita-tions superficielles et bruyantes qui ne sont pas celles de lavraie France, mais qui finissent pas la corrompre126 ». En lan-gage maurrassien, le Canada serait bien le dépositaire à partentière d’un « pays réel » dont il existerait l’équivalent enFrance, malgré la « corruption » à l’œuvre. La leçon est bienreçue de l’autre côté de l’Atlantique à lire certains comptesrendus de l’ouvrage. Si celui publié par L’Action nationale estfavorable mais prudent127, Maurice d’Auteuil dans Le Devoirest beaucoup plus engagé et reprend à son compte les dia-gnostics proposés pour tirer des enseignements de la défaitede 1940 et des précautions à prendre pour le Canada fran-çais : « La France doit sa douloureuse éclipse à la désunion deses enfants devant les ennemis intérieurs et extérieurs […]Elle la doit aux germes toxiques que l’excès de la maladieparlementaire avaient injectés comme autant de principes demort jusque dans les parties les plus saines en apparence de laNation. Lire “On disait en France” […] c’est assister, par pro-curation, à l’aboutissement inévitable des diverses maladies

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nationale latine. L’horizon de Maurras est d’abord la Franceet la latinité dans laquelle il inclut le Canada français132. C’estd’ailleurs beaucoup plus ce dernier qui l’intéresse que l’Ac-tion française de Montréal et ce pour une raison évidente àses yeux : il s’agit du prolongement d’une France tradition-nelle destinée de ce fait à être défendue. Le « pays réel » idéalde Maurras, celui qui ressort de sa vision du passé jolimentqualifiée par Michael Sutton de « conte habilement déguiséen histoire », renvoie à un âge d’or représenté par le XVIIe

siècle français133. Il reste à savoir si cette vision du penseurmartégal correspond à celle de ses supposés disciples cana-diens où s’il n’existe pas un malentendu entre les deux rivesde l’Atlantique. Que des Canadiens français aient été influen-cés par Maurras et l’Action française de Paris relève de l’évi-dence. Cette imprégnation, sauf exception individuelle,comme le montre l’exemple de Marcel Hamel, n’est cepen-dant pas assimilable à un transfert culturel et politique.

NOTES

1 Éric Bédard, « Penser le conservatisme », Recherches sociographiques, vol. XLVI,no 3 (2005), p. 453-471 [numéro dirigé par Gilles Gagné et intitulé Le Canadafrançais, son temps, sa nature, son héritage].2 Voir à ce sujet la note de lecture engagée de Pierre Trépanier, « Le renard ayantla queue coupée ou La luxuriance des études groulxiennes (1999-2003 ) »,Mens, vol. IV, no 2 (printemps 2004), p. 273-307. Se reporter aussi à RobertBoily, dir., Un héritage controversé. Nouvelles lectures de Lionel Groulx, Montréal,VLB, 2005, 185 p.3 Voir son ouvrage The Passionate Debate. The Social and Political Ideas of QuebecNationalism, 1920-1945, Montréal, Véhicule Press, 1991, p. 82-89.4 Voir notamment le chapitre VIII « “L’Action française” de Montréal et deParis » de son ouvrage intitulé Histoire sociale des idées au Québec (1896-1929),Montréal, Fides, 2004, p. 189. La présence de Barrès dans ce chapitre consacréà l’Action française pose problème et est facteur de confusion. Si l’auteur du

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lantique, les attentes ne sont pas les mêmes. Si du côté cana-dien-français, l’Action française de la rue de Rome constitueun réservoir de références, de thématiques voire un exempleà suivre, éléments qui inviteraient à s’interroger sur l’existenced’un transfert, cette vision globale est tempérée par deux don-nées essentielles.

La première est que Groulx et ses amis ne puisent quedans une partie du corpus de l’Action française soit la com-posante traditionaliste catholique, la volonté de réagir pourreforger une identité jugée menacée. Qu’en est-il de cetteempreinte sur le fond ? Sur le premier thème, l’Action fran-çaise parisienne n’est pas particulièrement originale et l’Ac-tion française canadienne mobilise fort logiquement d’autresréférences issues du milieu catholique, en particulier le quoti-dien La Croix. Quant au second, il paraît difficile de considé-rer que Lionel Groulx ait de la nation et de la défense de sonidentité une conception analogue à celle de Maurras. Certes,les deux pensées ont en commun un certain nombre d’adver-saires mais cultiver des figures identiques de l’ennemi ne forgepas un projet positif. Il n’y a d’ailleurs pas chez Lionel Groulxni même véritablement par la suite chez les rédacteurs de LaNation, à l’exception notable de Marcel Hamel, de démarcheentreprise pour repenser et acclimater la doctrinemaurrassienne. Le phénomène est logique car des pans en-tiers et fondamentaux de cette dernière sont étrangers auxCanadiens français, bien éloignés de leurs préoccupations etde leurs horizons : monarchisme, questions internationalesliées à l’Allemagne et au traité de Versailles, lutte quotidiennecontre la Troisième République et son personnel. Il faut ajou-ter l’attitude de l’Action française de la rue de Rome et deMaurras lui-même qui tout en se félicitant de voir l’AF rayon-ner à l’étranger ne cherche nullement à être le chef d’une quel-conque internationale des nationalistes ni même d’une inter-

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12 Un débat mettant face à face notamment Jean Caunes et Hilaire de Crémiersorganisé à l’occasion du centenaire de la naissance de Maurras a été reproduitdans le no 11 de Jeune Révolution sous le titre « Actualité de Charles Maurras »(p. 14-17). Sur cette organisation clandestine née en 1961, dirigée par le généralSalan et qui s’est efforcée de lutter par tous les moyens (y compris le terro-risme) pour le maintien de l’Algérie française, nous nous permettons derenvoyer à Olivier Dard, Voyage au cœur de l’OAS, Paris, Perrin, 2005, 423 p.13 Victor Nguyen, Aux origines de l’Action française. Intelligence et politique à l’aubedu XXe siècle, préface de Pierre Chaunu, Paris, Fayard, 1991, 958 p. ; MichaelSutton, Charles Maurras et les catholiques français 1880-1914, Paris, Beauchesne,1994, 365 p. ; Bruno Goyet, Charles Maurras, Paris, Presses de Sciences Po,2000, 306 p. ; Stéphane Giocanti, Charles Maurras : le chaos et l’ordre, Paris,Flammarion, 2006, 575 p. et Domenico Fisichella, La democrazia contra la realtà.Il pensiero politico di Charles Maurras, Rome, Carocci editore, 2006, 192 p.14 Michael Sutton, Charles Maurras..., p. 7.15 Jacques Prévotat, Les catholiques et l’Action française. Histoire d’une condamna-tion, Paris, Fayard, 2001, p. 503. La ligue compte selon lui à l’automne 192730 000 membres.16 Jean-François Colas, Les droites nationales en Lorraine dans les années trente :acteurs, organisations, réseaux, thèse de doctorat d’histoire contemporaine,Université de Paris X-Nanterre, 2002, p. 27.17 David Bensoussan, Combats pour une Bretagne catholique et rurale. Les droitesbretonnes dans l’entre-deux-guerres, Paris, Fayard, 2006, p. 142 et plus largementson chapitre IV, « La condamnation de l’Action française », p. 103-142.18 Les Camelots du roi sont les troupes de choc de la ligue. Sur ces derniers,voir Xaxier Cheneseau, Camelots du roi. Les troupes de choc royalistes (1908-1936),Boulogne-Billancourt, Éditions Défi, 1997, 99 p.19 Voir sur ce point Michel Leymarie, Albert Thibaudet, « L’outsider du dedans »,Villeneuve d’Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 2006, notammentp. 213-224.20 Il lui explique le 13 juin 1924 qu’il vient de s’abonner à L’Action française,journal « remarquablement écrit » et qui lui procure une « puissante distrac-tion » (Walter Benjamin, Correspondance, tome I, 1910-1928, édition établie etannotée par Gershom Scholem et Theodore W. Adorno, traduit par GuyPetitdemange, Paris, Aubier-Montaigne, 1979, p. 320).

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Roman de l’énergie nationale est avec le penseur martégal un des deux grandsdoctrinaires du nationalisme français, leurs fondements intellectuels commeleurs perspectives sont sur bien des points opposés, quelles qu’aient été parailleurs leurs relations d’amitié et d’estime. L’édition de leur correspondance– Maurice Barrès et Charles Maurras, La République ou le Roi. Correspondanceinédite (1888-1923), réunie et classée par Hélène et Nicole Maurras, commentéepar Henri Massis. Introduction et notes de Guy Dupré, Paris, Plon, 1970 –ainsi que de nombreux passages des Cahiers de Barrès en rendent compte. Àlire Yvan Lamonde et à compter les occurrences de Barrès et de Maurras dansce chapitre, il semblerait que le premier ait exercé une influence supérieure ausecond. Or, si en France on a pu parler d’un maurrassisme après Maurras, iln’a pas existé de « barrèsisme » en dépit des influences multiples que le ro-mancier nationaliste a exercées.5 Voir en particulier de cette dernière, « Les intellectuels nationalistes québécoiset la condamnation de l’Action française », Vingtième siècle. Revue d’histoire, 73(janvier-mars 2002), p. 83-98.6 Pierre Trépanier, « Le maurrassisme au Canada français », Les Cahiers des Dix,no 53 (1999), p. 167-233.7 Elle a été ébauchée à l’occasion d’une conférence à l’Université d’Ottawa enmars 2006. Qu’il me soit permis de remercier mes collègues É.-Martin Meu-nier et Michel Bock de m’avoir invité à prononcer cette conférence ainsi qu’YvanLamonde avec lequel le débat a été fructueux.8 On songe notamment à leur programme de recherche développé dans Mi-chel Espagne, Michael Werner, « Transferts culturels franco-allemands », Re-vue de synthèse, 1988, no 2, p. 187-194.9 Hans-Manfred Bock, « Transaction, transfert et constitution de réseaux.Concepts pour une histoire sociale des relations culturelles transnationales »,dans Hans-Manfred Bock et Gilbert Krebs, Échanges culturels et relations di-plomatiques. Présences françaises à Berlin au temps de la République de Weimar, Paris,PIA, 2004, p. 11.10 Ibid., p. 13.11 Sur ce point, se reporter à Guillaume Gros, Philippe Ariès (1914-1984). Untraditionaliste non-conformiste : de l’Action française à l’École des hautes études ensciences sociales, thèse de doctorat d’histoire du vingtième siècle, IEP de Paris,2002, notamment la quatrième partie.

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32 Catherine Pomeyrols, « Les intellectuels… », p. 86-87.33 Pierre Trépanier s’est attaché à relever minutieusement non seulement lescitations de Maurras chez Groulx mais aussi ses emprunts non référencés,notamment à Quand les Français ne s’aimaient pas (« Le maurrassisme… », p.189-193).34 Ibid., p. 183.35 Ibid., p. 186-187.36 Charles Maurras, Le dilemme de Marc Sangnier [1906], dans La Démocratiereligieuse, Paris, Nouvelle librairie nationale, 1921, p. 34-35.37 Michael Sutton, Charles Maurras..., p. 95.38 Cité dans Catherine Pomeyrols, « Les intellectuels… », p. 89 (note 4).39 Cité dans Catherine Pomeyrols, « Les intellectuels… », p. 88-89. Rappelonsqu’en France, la condamnation de l’AF a entraîné la démission de trois ecclé-siastiques importants : le cardinal Billot, le père Le Floch, supérieur du sémi-naire français de Rome et le père Pègues, régent des études au couvent domi-nicain de Saint-Maximin (Jacques Prévotat, Les catholiques et l’Action fran-çaise…, p. 478-491).40 Études, 120 (1909), p. 620 (cité dans Michael Sutton, Charles Maurras..., p.128).41 Michael Sutton, Charles Maurras..., p. 227.42 Sur tous ces points, se reporter à la seconde partie de l’ouvrage précité deJacques Prévotat et intitulée « La condamnation de 1914. Les étapes », p. 109-194.43 Jacques Bainville, Journal, 1901-1918, Paris, Plon, 1948, p. 218 (17 novembre1918). Bainville y revient le 21 mai 1919 en considérant qu’ « il y a deuxpeuples avec qui nous n’avons que des intérêts communs et pas d’intérêtscontraires ». Et de citer la Belgique et la Roumanie (Journal 1919-1926, Paris,Plon, 1949, p. 14).44 Eric Defoort, « L’Action française dans le nationalisme belge 1914-1918 »,Revue belge d’histoire contemporaine, archives VII, (1-2, 1976), p. 148.45 Ibid., p. 149.46 Jacques Prévotat, Les catholiques et l’Action française..., p. 236 et suiv.

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21 Cet éloge funèbre est reproduit dans Les Cahiers Charles Maurras, no 8(1963), p. 18.22 Voir en particulier les débats « autour du parti de l’intelligence » que metbien en lumière Jacques Prévotat, dans Pierre Colin, dir., Intellectuels chrétiens etesprit des années 1920, Paris, Cerf, 1997, p. 169-193.23 Pour un panorama rapide, voir Catherine Pomeyrols et Claude Hauser, dir.,L’Action française et l’étranger. Usages, réseaux et représentations de la droite nationa-liste française, Paris, L’Harmattan, 2001.24 L’ouvrage fondamental est celui d’Eric Defoort, Charles Maurras en de Actionfrançaise in Belgie, Bruges, Uitgeverij Orion, 1978, 430 p. Ce travail n’a pas étépublié en français.25 Voir en particulier Alain Clavien, Les Helvétistes. Intellectuels et politique enSuisse romande au début du siècle, Société d’histoire de la Suisse romande &Éditions d’en bas, Lausanne, 1993, notamment p. 125-126, p. 149-155 et p.158-159, p. 192-193.26 António Costa Pinto, The Blue Shirts, Portugal Fascists and the New State,Social Science Monographs, Boulder, distributed by Columbia UniversityPress, 2000, p. 11.27 Voir à ce sujet Pedro González Cuevas, La tradición bloqueada. Tres ideaspolíticas en España : el primer Ramiro de Maetzu, Charles Maurras y Carl Schmitt,Madrid, Biblioteca Nueva, 2002, p. 77-177 et pour une remise en perspectiveà l’échelle des droites espagnoles, du même auteur, El pensamiento politico de laderecha española en el siglo XX. De la crisis de la Restauración al Estado de partidos(1898-2000), Madrid, Tecnos, 2005, p. 48-49, 79, 86-87, 104, p. 111. La récep-tion en Catalogne est étudiée en profondeur et parmi les figures marquées parMaurras sont évoqués notamment le carliste Victor Pradera, le ministre cor-poratiste Eduardo Aunós ou le publiciste d’ABC Eugenio d’Ors.28 C. Stewart Doty, « “ Monsieur Maurras est ici ” : French Fascism in Franco-American New England », Journal of Contemporary History, vol. 32, no 4 (octo-bre 1997), p. 527-538.29 Voir en particulier Pierre-Marie Dioudonnat, Je suis partout 1930-1944. Lesmaurrassiens devant la tentation fasciste, Paris, La Table ronde, 1973, 471 p.30 Michel Espagne, Les transferts culturels franco-allemands, Paris, PUF, 1999, p.23.31 Cité dans Pierre Trépanier, « Le maurrassisme au Canada français », p. 175.

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58 Nous nous permettons de renvoyer ici à Olivier Dard, « Existe-t-il uneJeune droite dans l’Europe des années trente ? », dans Olivier Dard, ÉtienneDeschamps, Les relèves en Europe d’un après-guerre à l’autre. Racines, réseaux etpostérités, Bruxelles, PIE Peter Lang, 2005, p. 21-52.59 Vivre, 2ème cahier, 1ère série (15 juin 1934).60 Jean-Louis Gagnon, « Les beautés du régime », Vivre, 2ème cahier, 1ère série(15 juin 1934).61 Vivre, novembre 1934, p. 4.62 Vivre, 2ème série, no 4 (26 avril 1935), p. 1.63 Vivre, février 1935, p. 5.64 Vivre, février 1935, p. 3.65 Jean-Louis Gagnon, « Économique », Vivre, 15 mai 1935, p. 2.66 Vivre, novembre 1934, p. 18-19.67 Voir en particulier Qu’est-ce que le fascisme ? Histoire et interprétation, Paris,Gallimard, 2004, chapitre 3.68 André J. Bélanger a fort bien relevé que « sa position en faveur du fascismeitalien est patente par le vide de son contenu » (L’apolitisme des idéologies québé-coises. Le grand tournant de 1934-1936, Québec, Presses de l’Université Laval,1974, p. 333).69 Philippe Vaillancourt, « Débâcles », Vivre, 2ème cahier, 1ère série (15 juin 1934).70 Cette lettre est parue dans le numéro de Vivre d’octobre 1934 (3ème cahier, 1ère

série), p. 24. L’origine de cette lettre semble venir d’une rencontre entre PierreChaloult et Dommange sur un bateau, Le Champlain.71 On songe en particulier au célèbre chapitre VI de Lucien Rebatet dans LesDécombres, pamphlet paru chez Denoël en 1942 : « Au sein de “l’inactionfrançaise” » (p. 111-130) auquel l’écrivain opposait un impératif personnel« Que vienne donc enfin le temps de l’action » (p. 14). Rebatet commentaitd’ailleurs à sa façon (p. 130) l’influence doctrinale de l’AF hors de France :« Certains de ses plus justes principes ont pu connaître une grande fortunedans le monde. La belle jambe que cela nous fait ! Jusqu’ici, ils sont restéslettre morte pour le gouvernement de la France qui seul nous importait. »72 Paul Péladeau, On disait en France, préface d’Édouard Montpetit, Montréal,Éditions Variétés, 1941, p. 213-218.

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47 Cécile Vanderpelen-Diagre, « À l’ombre des clochers. Le monde catholiqueet la littérature au Québec (1918-1939) », Revue d’histoire de l’Amérique française,volume 58, no 1 (été 2004), p. 8-9.48 Cité dans Susan Mann, Lionel Groulx et l’Action française. Le nationalismecanadien-français dans les années 1920, Montréal, VLB, 2005 [1975], p. 145.49 Catherine Pomeyrols, « Les échos de la condamnation de L’Action françaiseau Québec », dans Catherine Pomeyrols et Claude Hauser, dir., L’Action fran-çaise et l’étranger…, p. 79.50 Jean-Claude Dupuis, « La pensée politique de L’Action française de Mon-tréal (1917-1928) », Cahiers d’histoire du Québec du XXe siècle, no 9 (été 1994), p.39. Il relève que L’Action française de Montréal n’a traité qu’une fois d’uneœuvre de Maurras, une préface au livre de Marius André, Le déclin de l’empireespagnol. Sur ce Provençal qui fut consul en Espagne pendant dix ans et l’undes principaux hispanophile de L’Action française, voir Pedro González Cue-vas, La tradición bloqueada. Tres ideas políticas en España : el primer Ramiro deMaetzu, Charles Maurras y Carl Schmitt, p. 102-107.51 L’Action française, « Avis important », janvier 1928, cité in CatherinePomeyrols, « Les intellectuels nationalistes québécois… », p. 85.52 Catherine Pomeyrols, « Les intellectuels nationalistes québécois… », p. 86.53 Cité in Catherine Pomeyrols, « Les intellectuels nationalistes québécois… »,p. 86.54 Ce célèbre passage de l’introduction du Dilemme de Marc Sangnier [décembre1906] (L’œuvre de Charles Maurras, tome II, La démocratie religieuse, Nouvellelibrairie nationale, 1921, p. 26) a été reproduit des décennies plus tard pourouvrir, en 1963, le huitième numéro des Cahiers Charles Maurras, numérospécial d’hommage à Charles Maurras pour le dixième anniversaire de samort. Les italiques figurent dans le texte original.55 Jean Bruchési, Jours éteints, Montréal, Librairie d’action canadienne-fran-çaise, 1929, p. 198 (cité dans Pierre Trépanier, « Le maurrassisme … », p. 209).56 Denis Chouinard, « Des contestataires pragmatiques : Les Jeune-Canada1932-1938 », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol 40, no 1 (été 1986), p. 9.57 Sur cette dernière, voir Nicolas Kessler, Histoire politique de la Jeune Droite(1929-1942). Une Révolution conservatrice à la française, préface de Jean-LouisLoubet del Bayle, Paris, L’Harmattan, 2001.

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ras que nous voulons parler. Tous les Français dignes de ce nom ont ressentil’outrage fait à la pensée française par l’arrestation d’un de ses plus noblesreprésentants, opérée avec une insigne muflerie, en exécution d’un jugementinique ».84 Lionel Groulx a laissé dans ses Mémoires, (tome 3 : 1926-1939, Montréal,Fides, p. 357-358) un portrait grinçant de Berthelot Brunet en évoquant laréception de Directives, recueil d’articles et de discours publié en 1937 : « Lelivre ne passe pas inaperçu. Parmi les éloges, relèverai-je, à côté d’appréciationsde jeunes, les plus inattendus ou les plus amusants ? Voici d’abord, dans LaLiberté de Winnipeg, 5 janvier 1938, un article de Berthelot Brunet, l’insignetapeur qui venait régulièrement me quêter une couple de piastres, sous leprétexte d’un voyage à Lachine qu’il ne faisait jamais, ou pour la publicationd’un livre qui n’était pas encore écrit. C’est ce même clochard des lettres qui,pour s’être vu fermer ma porte alors que, grippé, je devais garder la chambre,se retournerait bientôt contre son tapé de chaque quinzaine et lui servirait,dans Les Idées d’Albert Pelletier, un éreintement en règle. Donc, en janvier1938, ce cher Berthelot écrit entre autres choses : “Au fait, M. Lionel Groulxest écrivain plus nuancé qu’on ne le croit d’ordinaire. Nuancé, ainsi que fortintelligent… M. Lionel Groulx nous donne par sa vie laborieuse, sa vie géné-reuse, sa vie enthousiaste, sa vie dangereuse… il nous donne l’un des pluspurs exemples d’un homme, d’un homme véritable que je sache…Directivesnous est un présent d’honneur.” En 1934 ce cher Berthelot m’avait écrit debien autres éloges lors de la publication de mon Jacques Cartier. »85 « La cellule de Maurras », La Nation, 21 janvier 1937, p. 2. On trouve chezBerthelot Brunet (1901-1948) dans son Histoire de la littérature canadienne-française publiée aux Éditions de l’Arbre à Montréal en 1946, diverses référen-ces à l’Action française de Paris à laquelle il rend hommage. Ainsi, il rattachel’écho de L’Action française de Paris à celui du Devoir : « Toutes révérencesgardées, et bien qu’il ne comptât jamais de Maurras, de Daudet et bien que lesBainvilles [sic] lui fissent singulièrement défaut, le Devoir exerça une influenceanalogue à celle de L’Action française de Paris. Comme le quotidien de la rue deRome, il avait même ses succursales, dans l’espèce des revues et d’autrespériodiques » (p. 97). Par la suite, lorsqu’il évoque Robert Rumilly (p. 117), ilcommence par mentionner ses origines françaises et souligne que « ses ré-flexions ne cachent pas non plus que l’Action française exerça une vive in-fluence ; mais en cela Rumilly serait assez canadien. »86 Le numéro du 8 juillet 1937 est accompagné en manchette d’une citation deMaurras tirée de L’Étang de Berre et en première page d’un article de PaulBouchard intitulé « Charles Maurras sort de prison » où le directeur de La

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73 Michel Bock, Quand la nation débordait les frontières. Les minorités françaises dansla pensée de Lionel Groulx, Cahiers du Québec, Éditions Hurtubise HMH,2004, p. 332. Michel Bock (p. 333-337) remet d’ailleurs en perspective les liensentre les rédacteurs de La Nation et l’abbé Groulx : s’il n’a « jamais publique-ment répudié » la publication, sa correspondance avec eux le montre « incapa-ble d’adhérer pleinement à leur programme ».74 Pierre-Marie Dioudonnat, Je suis partout, 1930-1944. Les maurrassiens devant latentation fasciste, p. 243-244.75 Robert Comeau, « Lionel Groulx, les indépendantistes de la Nation et leséparatisme (1936-1938) », Revue d’histoire de l’Amérique française, juin 1972, p.85. Les Jeunesses patriotes ont publié un journal intitulé L’Indépendance, le-quel a cessé de paraître lorsque le groupe a fusionné avec l’équipe de La Nation(Louise Bienvenue, Quand la jeunesse entre en scène. L’Action catholique avant laRévolution tranquille, Montréal, Boréal, 2003, p. 38).76 André J. Bélanger, L’apolitisme..., p. 336.77 Sur les enjeux d’une tentation fasciste au Canada français, voir RobertComeau, « La tentation fasciste du nationalisme canadien-français avant laguerre, 1936-1939 », Bulletin d’histoire politique, 3, 3/4 (1995), et Robert Arcand,« Les catholiques du Québec et le fascisme italien », Cahiers d’histoire, 8 (prin-temps 1988), p. 5-37.78 Michel Lacroix, « Lien social, idéologie et cercles d’appartenance : le réseau“latin” des Québécois en France, 1923-1939 », Études littéraires, vol. 36, automne2004, p. 55-56.79 « Jacques Bainville », La Nation, 1er février 1936. L’hommage est appuyé etlyrique : « Comme un grand arbre tout plein de sève qui tombe sous la co-gnée, Bainville, cet écrivain débordant de promesses, vient de mourir, jeuneencore, à l’âge de 57 ans. » La seule réserve exprimée sur ce « présent des dieuxau journalisme français » est que « Bainville avait commis la faute impardon-nable de ne jamais venir au Canada : sa réputation en souffrira ».80 Jean-Marc Dufrenne, « Déclin de l’Action française », La Nation, 29 février1936, p. 4 et La Nation, 7 mars 1936, p. 3.81 Jean-Marc Dufrenne, « Déclin de l’Action française », La Nation, 7 mars1936, p. 3.82 Ibid.83 Ainsi La Nation, (17 décembre 1936), p. 2 reproduit un article de Frontières,« Une honte pour la France » : « C’est de l’emprisonnement de Charles Maur-

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90 Ibid., p. 2.91 Marcel Hamel, « Maurras et Barrès », La Nation, 2 septembre 1937, p. 3.92 Ibid., p. 3.93 Marcel Hamel, « Sur le dernier ouvrage de Jean-Charles Harvey : Art etcombat », La Nation, 3 février 1938, p. 2.94 Marcel Hamel, « Charles Maurras en nous », La Nation, 10 juin 1937, p. 2.95 Julien Fabre, « La Nation : les groulxiens devant la tentation fasciste 1936-1939 », Bulletin d’histoire politique, vol. 9, no 2 (printemps 2001), p. 42-43 (dos-sier thématique « Le Québec des années trente : une société à la recherche deson avenir »). Sur les relations de Lionel Groulx et La Nation, voir RobertComeau, « Lionel Groulx, les indépendantistes de La Nation et le sépara-tisme (1936-1938) », qui s’interroge sur les relations entre Groulx et ses « dis-ciples audacieux » p. 92-94 et Michel Bock, Quand la nation..., p. 332-337.96 Marcel Hamel, « Les deux Maurras », 29 juillet 1937, p. 397 Cette position n’est pas celle des maurrassiens de la Jeune Droite conduitspar Thierry Maulnier dont la tentation fasciste repérée dans les périodiquesCombat et L’Insurgé en 1936-1937 n’est ni durable ni facteur de rupture avec lemonarchisme d’AF. Sur cette question, voir Nicolas Kessler, Histoire politiquede la Jeune Droite (1929-1942). Une révolution conservatrice à la française, Paris,L’Harmattan, 2001, p. 388-400 et les analyses de Ludovic Morel, Thierry Maul-nier et l’Action française, master d’histoire contemporaine, Université de Fran-che-Comté, 2005, notamment le chapitre VII « Maulnier et la Jeune Droitevont-ils s’insurger contre Maurras ? », p. 183-231.98 « Je suis partout et M. Dostaler O’Leary », La Nation, 10 février 1938, p. 3. Cescompliments tressés, Roger Vézina regrette que le programme séparatiste nesoit pas présenté avec assez de pédagogie pour un public français.99 Cette lettre, unique en son genre, est conservée au CARAN, 576 AP carton62, chemise Canada. Si ne figure que la seule mention « juin 1937 », elle a étépostée le 9 juin et adressée à la prison de la Santé où Maurras est alors détenu.100 Souligné par nous. On mesure ici la différence profonde entre la pensée deMarcel Hamel et celle de Groulx.101 La lettre est conservée au CARAN, 576 AP carton 62, chemise Canada.102 Par comparaison, on ne trouve que deux articles de L’Actionfrançaise reproduits en 1938-1939 : le 24 février, une reproduction d’un article

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Nation voit en Maurras « le plus grand penseur politique de la France mo-derne et l’un de ses plus grands écrivains » et rend hommage à son « influenceuniverselle » : « N’est-il pas le penseur dont la doctrine a donné naissance àtant de mouvements de droite qui se sont dressés en face du bolchevismeasiatique ? N’est-il pas le défenseur attitré et militant en face du flot montantde la barbarie des normes éternelles de la civilisation gréco-latine ? Mussoliniet Salazar, deux remparts du monde latin, rénovateurs de leurs patries etcréateurs d’un nouveau type de civilisation, ne sont-ils pas deux disciples deMaurras ? Et l’Espagne de Franco elle-même ne se revendique-t-elle pas de luicomme l’attestait, il n’y a pas encore très longtemps, la revue Frontières ? Unfait historique indiscutable, c’est que Charles Maurras a exercé une influenceuniverselle qui le porte au rang des plus grands esprits qu’ait produits laFrance. » Nous n’épiloguerons pas sur l’influence supposée de Maurras surles dictateurs précités. Si on laisse de côté le cas de Salazar, dont certainsmaurrassiens français d’Henri Massis à Michel Déon ont laissé des portraitsélogieux et souligné la proximité avec le penseur martégal, il faut signaler,concernant Franco, que le nom de Maurras n’apparaît même pas à l’index deses principaux biographes (Paul Preston, Francisco Franco, Milano, Montadori,1995, André Bachoud, Franco ou la réussite d’un homme ordinaire, Paris, Fayard,1997 etc.). Par ailleurs, les travaux sur les origines et les cheminements de lapensée de Mussolini ne font pas de place à l’influence du théoricien monar-chiste (Didier Musiedlak, Mussolini, Presses de Sciences Po, 2005 – voir enparticulier le chapitre IV, « Le primat de la culture »). Didier Musiedlak nous apar ailleurs indiqué que Maurras est seulement cité trois fois dans les 36volumes des Opera Omnia, a cura di Eduardo e Diulio Susmel, Florence, LaFenice 1956, tome XVII [1922], p. 396 (à propos de la conférence de Cannes),tome XXVI [1933] p. 38 (à l’occasion d’un commentaire de Léon Daudet oùMussolini se félicite du tableau favorable qu’il dresse du fascisme italien, maisen profite pour en souligner les singularités et l’originalité) et enfin tomeXXVIII [1937], p. 215 (Maurras est cité parmi les grands polémistes français,avec Rochefort et Clemenceau).87 Marcel Hamel, « Les deux Maurras », La Nation, 29 juillet 1937, p. 3.88 Il faut souligner qu’Henri d’Orléans et le Courrier royal ne sont même pasmentionnés. Quelques mois plus tard, le 3 mars 1938, dans un texte intitulé« Le drame intérieur de Charles Maurras », Hamel évoque « L’évènement leplus pathétique jamais produit dans la politique européenne, c’est bien lereniement de l’Action française et de ses chefs par les princes. Il y a là quelquechose de lugubrement ingrat dans ce geste de réprobation ».89 Marcel Hamel, « Charles Maurras en nous », La Nation, 10 juin 1937, p. 2.

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117 Si, dans le texte de Maurras, aucun nom n’est cité, il faut souligner qu’il areçu un courrier de Louis D. Durand qui a adressé le 12 mars 1937 à son « Trèsvénéré Maître » un article d’Omer Héroux (du Devoir) et diverses coupures depresse en référence au Deuxième Congrès de la langue française venant duCanada et même de Louisiane (CARAN, 576 AP carton 62, chemise Canada).118 Dictionnaire politique et critique. Complément établi par les soins de JeanPélissier, non daté, fascicule no 3, Paris Cahiers Charles Maurras, p. 219, L’Ac-tion française, 29 mars 1937.119 Charles Maurras, Dictionnaire politique et critique, 1932.120 Sur tous ces points, voir Michel Bock, op. cit., p. 178 et suiv.121 Dans son article « La croisée des chemins », L’Action française, mars 1922, p.148, Louis D. Durand imaginait un État composé du Québec, des troisprovinces maritimes, d’une partie de l’Ontario et sans doute des régionsfrontalières où vivaient des Canadiens français (Michel Bock, op. cit., p. 306).122 Courrier précité du 12 mars 1937, (CARAN, 576 AP carton 62, chemiseCanada).123 Cette revue a absorbé en février 1933 La Revue d’Amérique latine publiéemensuellement à partir de janvier 1922 et où Charles Maurras avait proposé sadéfinition de la latinité, ce qui ne fait cependant pas de cette revue un organemaurrassien, même si son directeur, Charles Lesca, est d’AF. Si la RAL apublié 27 articles et comptes rendus de et sur des écrivains canadiens, le Ca-nada n’a plus « aucune place » dans Frontières (Michel Lacroix, « Lien social,idéologie... », p. 53-54).124 Voir « L’internationale des Rois : oui ; l’Internationale blanche non », CharlesMaurras, Dictionnaire politique et critique, établi par les soins de Pierre Chardon,tome deuxième, Paris, À la cité des livres, 1932, p. 325-326.125 Cité dans Pierre Trépanier, « Le maurrassisme… », p. 210.126 Cité dans Paul Péladeau, On disait en France, p. 212.127 Signé AC, il est paru en octobre 1941 (p. 165).128 Le Devoir, 22 mars 1941, cité dans Pierre Trépanier, « Le maurrassisme… »,p. 211.129 Il ne faudrait pas négliger l’importance de la guerre d’Espagne dont Cathe-rine Pomeyrols montre, à partir du dépouillement exhaustif du Devoir (« LeDevoir et la guerre d’Espagne. Les usages de la référence française », Revued’histoire de l’Amérique française, hiver 2005, p. 351-356) que la presse

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de Georges Claude sur l’Espagne et le 1er juin 1939 un texte non signé intitulé« Controverse sur le rexisme ».103Marcel Hamel, « De Charles Maurras à Jacques Maritain », La Nation, 25août 1938, p. 2. L’article porte sur la question juive et Hamel conclut sonpropos en empruntant aux deux auteurs dont les positions sont par ailleursbien différentes.104 La Nation, 23 juin 1939, p. 2.105 Sur cette création et son échec, Bertrand Joly, Dictionnaire biographique etgéographique du nationalisme français (1880-1900), Paris, Honoré Champion,1998, p. 669-670.106 Julien Thévet, « Un grand Canadien : le chanoine Groulx », Aspects de laFrance, 22 mai 1975, p. 8.107 Cité dans Catherine Pomeyrols, « Les intellectuels nationalistes québé-cois… », p. 86.108 De son côté, Susan Mann, Lionel Groulx..., p. 35, a retenu 600 citations ouallusions à l’Action française parisienne dans les publications nationalistesquébécoises contre 20 concernant le Canada dans le quotidien français.109 Il s’agit d’un journal franco-américain de Worcester (Massachussets). Voirsur ce point Yves Roby, Les Franco-Américains de la Nouvelle-Angleterre. Rêves etréalités, Sillery, Septentrion, 2000.110 Lettre de Robert Rumilly à Maurras, 14 juillet 1937, CARAN, 576 APcarton 62, chemise Canada.111 Dictionnaire politique et critique. Complément établi par les soins de JeanPélissier, non daté, fascicule no 3, Paris Cahiers Charles Maurras, p. 217, L’Ac-tion française, (27 juillet 1936).112 Ibid., p. 216-217, L’Action française, 30 août 1934.113 Ibid., p. 219, L’Action française, 29 mars 1937.114 Ibid., p. 220-221, L’Action française, 29 mars 1937.115 Ibid., p. 217, L’Action française, 30 août 1934.116 Sur ce dernier, voir Mason Wade, Les Canadiens français de 1760 à nos jours,tome II, cercle du livre de France, 1963, p. 305-306 et Michel Bock, Quand lanation..., p. 306.

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UNE RÉCONCILIATIONINSAISISSABLE :

LE MOUVEMENT DE LABONNE ENTENTE, 1916-19301

Robert TalbotDépartement d’histoire

Université d’Ottawa

RésuméLe mouvement de la « bonne entente » (1916 - années 1930), lancépar un petit groupe d’anglophones ontariens, avait pour objectif defavoriser le dialogue entre Canadiens français et Canadiens anglais,qui faisait cruellement défaut pendant la Première Guerre mondiale,par le rapprochement entre les élites des deux groupes linguistiques.Jusqu’ici, les historiens ont surtout vu dans ce mouvement une stra-tégie visant à faire accepter en douce la conscription aux Canadiensfrançais. Dans cet article, nous soutenons toutefois que la conscrip-tion n’était pas nécessairement la seule priorité, ni même la plus im-portante, dans l’esprit de nombreux membres anglophones. L’ob-jectif de la Ligue de la Bonne Entente (1916) était plutôt de retrou-ver l’esprit d’unité et de ferveur patriotique qui avait imprégné lasociété canadienne – française et anglaise – au moment du déclen-chement des hostilités. Après la guerre, la Ligue et les organisationsqui lui ont succédé ont exigé, en coulisse, l’abrogation du RèglementXVII par le gouvernement de l’Ontario. De la Première Guerremondiale à la crise, le mouvement de la bonne entente a prêchémodération et unité dans une société très divisée. Il a contribué àrétablir le processus de rapprochement des élites et a donné nais-sance à un nationalisme civique canadien.

Mens, vol. VIII, no 1 (automne 2007)

maurassienne est citée (Action française, Revue universelle, sans oublier Je suispartout où les maurrassiens sont nombreux).130 Pierre Trépanier, « Le maurrassisme… », p. 216 cite une série d’articlesparus dans le Quartier latin en février-mars 1945 à l’occasion du procès deCharles Maurras sous la plume de Jean-Baptiste Boulanger et qui sont unhommage au penseur martégal.131 Cahiers Charles Maurras, no 8, 1963.132 Cette vision est partagée par L’Action française de Montréal. Voir sur cepoint l’article d’Antonio Perrault, « Sur une préface de Charles Maurras »,L’Action française, vol 7, no 4, (avril 1922), p. 243. Soulignons que cette visionimprègne aussi la revue de Jacques Reynaud, Latinité : revue des pays d’Occident,parue entre 1929 et 1932. Son second numéro (1930) a d’ailleurs consacrésous la plume de J-M. Carrière un dossier aux lettres canadiennes (p. 245-252)qui évoque le congrès de 1912 et la naissance de la Ligue d’Action française en1913.133 Michael Sutton, Charles Maurras..., p. 61-63.

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de « consolider l’empire britannique par des moyens militai-res, économiques et constitutionnels ». Comme l’explique CarlBerger, « l’impérialisme était une forme de nationalisme ca-nadien ». Des hommes tels que George Munro Grant et lecolonel George Taylor Denison « croyaient que le Canada nepouvait obtenir le statut de nation qu’en maintenant ses liensavec l’Empire et en acquérant de l’influence au sein de sesconseils ». Il était donc essentiel que le Canada joue un rôlesignificatif dans les guerres impériales, et particulièrement laGrande Guerre. En outre, le « nouvel impérialisme » de la findu XIXe siècle avait une connotation davantage raciale et étaitbeaucoup moins tolérant que l’impérialisme mercantile quil’avait précédé. Les impérialistes canadiens anglophones lesplus intransigeants, comme l’orangiste D’Alton McCarthy,avaient utilisé le discours impérialiste pour promouvoir unprogramme d’assimilation et d’attaque contre les minoritésfrancophones hors du Québec. Sans surprise, les Canadiensfrançais en vinrent à considérer l’impérialisme canadien-an-glais « avec une très grande hostilité3 ». Contrairement à leurshomologues anglophones, ils n’étaient guère attachés senti-mentalement à l’Empire britannique. Des nationalistes telsque Henri Bourassa voyaient dans l’impérialisme britanniqueet les guerres étrangères une menace à l’unité nationale. Ilpréconisait un Canada plus autonome où la nature bilinguedu pays serait davantage appréciée4.

On a beaucoup glosé sur ce qui séparait les Canadiensd’origines britannique et française tout particulièrement aucours des années de la guerre, mais les tentatives de rappro-chement et de réconciliation ont nettement moins intéresséles historiens. En août 1916, par exemple, au milieu de lapériode de bouleversements que fut la Première Guerre mon-diale, un petit groupe de politiciens et d’hommes d’affairesontariens et québécois, libéraux et conservateurs, anglopho-

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

AbstractThe “bonne entente” movement (1916-1930s), initiated by a small group ofOntario anglophones, began as an exercise in elite accommodation with the purposeof fostering a friendly dialogue between English- and French-speaking Canadiansthat was sorely lacking during the Great War years. In attempting to explain“bonne entente” within the confines of the traditional narrative, previous authorshave described how the movement’s anglophone membership used it to soft-peddletheir francophone counterparts into accepting conscription. It is argued here,however, that recruitment and conscription were not necessarily the sole nor thefirst priority in the minds of many anglophone members. Instead, the creators ofthe Bonne Entente League (1916) were initially more intent on recapturing thespirit of unity and patriotic fervour that had permeated Canadian society –French and British – at the war’s outset. Indeed, the League and its successororganizations persisted into the post-war era to become a behind-the-scenes commonfront for the repeal of Ontario’s discriminatory Regulation XVII against French-language rights. From the Great War through to the Great Depression, thebonne entente movement provided a voice for moderation and unity in an otherwisedivided society. It helped restore the process of elite accommodation and gave riseto a civic Canadian nationalism.

La période de la Grande Guerre est souvent considéréecomme celle qui fut le plus source de division dans l’histoireintérieure du Canada. Selon les historiens, l’opposition cana-dienne-française à la conscription et, par moments, à la sim-ple participation à la guerre suscita la colère des Canadiensanglophones impérialistes, qui étaient plutôt intransigeants.« Au cours de la guerre mondiale de 1914-1918, a résumé unehistorienne, le “nationalisme” canadien-français s’est mué enhaine contre […] les demandes d’hommes et d’argent pourpouvoir poursuivre la guerre.2 »

Même avant la guerre, les relations entre les deux soli-tudes du Canada avaient été caractérisées par le conflit entrel’impérialisme canadien-anglais et le nationalisme canadien-français. L’objectif des impérialistes canadiens-anglais était

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l’Empire, et pour dénoncer des pratiques de recrutement mi-litaire malhonnêtes. Des orangistes tels que le député conser-vateur fédéral J. W. Edwards, à l’opposé, se servaient du mou-vement pour défendre des politiques linguistiques discrimi-natoires et appeler à l’assimilation des francophones. Ces di-visions se trouvaient compliquées par les intérêts profession-nels divers des participants. Le mouvement en vint à inclureun éventail de politiciens de tous les partis, et des trois ordresde gouvernement, ainsi que divers avocats, universitaires,médecins, ecclésiastiques, journalistes, hommes d’affaires,industriels, recruteurs des forces armées et militaires. Pourcertains politiciens, le mouvement constituait une plate-formeleur assurant une plus grande visibilité – un moyen de faire dela publicité pour leur propre personne et leur parti. Les hom-mes d’affaires et les industriels souhaitaient souvent davan-tage consolider leurs intérêts commerciaux dans une provinceou l’autre, plutôt que favoriser l’unité nationale. Les recru-teurs des forces armées espéraient qu’en améliorant les rela-tions entre francophones et anglophones, ils pourraient atté-nuer l’opposition à l’enrôlement au Québec et éviter ainsi laconscription. Quelques militaires, de leur côté, voulaient seservir de la bonne entente pour exiger une approbation sansdétour de la conscription. Quels que soient ces motifs paral-lèles, une bonne proportion des bonne-ententistes demeuraitmotivée par un désir sincère d’empêcher le pays de se désa-gréger.

On peut dire que le mouvement de la bonne ententeest passé par trois phases différentes au cours de son exis-tence, de 1916 aux années 1930. D’abord, la création et lespremières activités de la Ligue de la Bonne Entente origi-nelle, en 1916 et 1917. Cette phase débuta au beau milieudes débats houleux sur la conscription et du conflit sur lesdroits des francophones en Ontario. Elle fut marquée par un

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nes et francophones, se réunit à Montréal pour déclarer l’im-portance qu’il accordait à la grande cause de l’unité natio-nale.

Nous, Canadiens de langues française et anglaise, réu-nis pour la promotion de l’unité nationale, ayant établipar des échanges amicaux un respect mutuel et nousétant fermement convaincus de l’impartialité innée dela grande majorité des deux races, affirmons par laprésente croire inaltérablement qu’il n’y a pas mainte-nant, et qu’il n’y aura jamais, de problème entre lesdeux races du Canada qui ne puisse, et, de plein droit,ne doive être réglé à l’amiable et équitablement, et demanière à donner satisfaction à la grande majorité deceux qui sont concernés5.

C’est ainsi que naquit le mouvement de la bonne entente,dont le nom s’inspirait de l’« entente cordiale » du temps deguerre entre les deux mères patries d’outre-Atlantique. La Li-gue de la Bonne Entente voulait réunir des personnalités descommunautés anglophones et francophones désunies de l’On-tario et du Québec dans une atmosphère cordiale, contribuantà établir des relations amicales et une compréhension mu-tuelle. Les participants étaient surtout des professionnels etdes politiciens des classes moyennes ou supérieures, de l’On-tario ou du Québec, et, jusqu’aux dernières années du mou-vement, il s’agissait presque exclusivement d’hommes.

L’objectif officiel du mouvement de la bonne ententeétait toujours de favoriser l’unité nationale, mais le fait queses membres étaient d’origines diverses lui donnait des objec-tifs secondaires également divers. La séparation la plus évi-dente s’observait entre les Canadiens anglophones surtoutprotestants et les Canadiens français catholiques. Des politi-ciens nationalistes tels que le député libéral fédéral Paul-ÉmileLamarche se servirent de la « bonne entente » pour exprimerleur désapprobation du statut colonial du Canada au sein de

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« En 1917, expliquaient Robert Craig Brown et Ramsay Cook,historiens renommés, la Bonne Entente avait échoué, et sesparrains canadiens-anglais en étaient venus à préconiser ouver-tement la conscription et un gouvernement de coalition sousle nouveau nom de Win-the-War Movement. » Les auteursdécrivent les raisons de l’échec du mouvement :

[Un] mouvement dont les objectifs n’ont jamais étévraiment totalement partagés, voire peut-être compris,à la fois par les membres francophones et anglopho-nes pouvait difficilement connaître le succès de façonpermanente. Les Canadiens français semblent avoirespéré que la « bonne entente » contribue à une solu-tion satisfaisante de la question linguistique en Onta-rio ; les membres anglophones s’attendaient quant àeux à ce qu’elle incite leurs compatriotes francophonesà s’enthousiasmer davantage pour la guerre7.

Dans le même esprit, l’ouvrage récent d’Yvan Lamonde surl’histoire intellectuelle du Québec fait figurer les mouvementsde « Bonne Entente » parmi les campagnes de propagandevisant à convaincre les francophones d’accepter le serviceobligatoire. Son chapitre sur la guerre porte plutôt sur les thè-mes plus traditionnels de l’opposition des Canadiens françaisà la participation et de la crise de la conscription8.

L’article de Brian Cameron sur les deux premières an-nées de la Ligue de la Bonne Entente aborde le thème de laduplicité canadienne-anglaise. Il soutient lui aussi que les par-ticipants anglophones n’avaient à l’esprit que la conscriptionainsi que des intérêts commerciaux et politiques. Quand laLigue est devenue la Win-the-War Convention, explique-t-il,les membres francophones du mouvement se sont sentis trom-pés et trahis9. Les Canadiens anglais n’avaient rien appris deleurs rencontres directes avec l’élite de la société canadienne-française. Le gouvernement de coalition et la conscription étant

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optimisme initial, suivi d’une désillusion, le pays demeurantdivisé sur ces questions. À la fin de la guerre, la deuxièmephase du mouvement de la bonne entente6, de 1918 à 1927,fut marquée par le retour à un discours plus franc et le retraitdu Règlement XVII discriminatoire (qui limitait sérieusementl’enseignement en langue française dans les écolesontariennes), en 1927. Le mouvement fut revigoré par l’arri-vée de nouveaux membres, dont des universitaires et desFranco-Ontariens, ainsi que par la fondation de nouvelles or-ganisations, c’est-à-dire la Better Understanding Association(1918) et l’influente Unity League of Ontario (1921). La troi-sième et dernière phase du mouvement de la bonne ententefut marquée par la disparition de sa cause célèbre – l’abroga-tion du Règlement XVII – et par le début de la Crise. Dumilieu des années 1920 aux années 1930, le mouvement de labonne entente perdit graduellement de sa pertinence, et finitpar disparaître. De récents auteurs ont abordé ces différentesphases isolément les unes des autres, mais le présent texte seveut une analyse plus générale portant sur le mouvement dansson ensemble.

Le mouvement de la bonne entente n’a bien évidem-ment guère attiré l’attention des historiens – son existencemême se prête mal au récit historique traditionnel. Bien sûr,on en fait souvent mention en passant dans les manuels etdans les histoires générales portant sur ce que fut la GrandeGuerre pour le Canada. Les auteurs de ces textes tentent gé-néralement de l’intégrer au thème plus global de l’animositéentre Canada français et Canada anglais. Ce faisant, ils rédui-sent le mouvement à un outil déloyal en faveur de la cons-cription. Pour les anglophones, soutiennent-ils, l’unité natio-nale était une préoccupation secondaire, car ils tentaient dese servir de la « bonne entente » pour amadouer leurs homo-logues francophones et les amener à accepter la conscription.

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Anglo-Canadiens de ce genre – assez gentilshommes pour re-venir sur des préjugés – Belcourt a obtenu, à la Unity League,des conversions décisives », explique-t-il12.

Une étude plus nuancée et plus complète du mouve-ment de la bonne entente, de ses débuts en 1916 à ses activi-tés dans l’après-guerre, et à son déclin à la fin des années1920 et pendant les années 1930, révèle une complexité quel’on ne discerne pas dans les analyses récentes. Premièrement,pour bien comprendre l’inspiration originelle et les objectifsde ses créateurs, on doit placer la création du mouvementdans le contexte plus général de l’esprit d’unité qui prévalaitau sein de la société canadienne – anglophone et francophone– au début de la guerre. C’est cet esprit d’unité que les créa-teurs de la Ligue de la Bonne Entente recherchaient à l’ori-gine, et non une approbation tacite de la conscription. Deuxiè-mement, une analyse plus systématique des divers objectifset idées du mouvement par la suite nous rappelle que les par-ticipants francophones et anglophones du mouvement de labonne entente ne formaient pas un groupe monolithique. LaLigue de 1916-1917 n’avait pas le même sens pour tout lemonde, et pas forcément en fonction de la langue. Plus préci-sément, recrutement et conscription n’étaient pas nécessaire-ment la seule, ni même la priorité dans l’esprit de certainsmembres anglophones. Finalement, si l’on va au-delà des pre-mières années du mouvement, on constate que le mouvementde la bonne entente ne disparut pas simplement avec le mou-vement Win-the-War. Au contraire, il survécut dans la pé-riode d’après-guerre pour devenir un forum plus significatifde débat, et, par la suite, un front commun dans les coulissespour l’abrogation du Règlement XVII discriminatoire de l’On-tario. Au cours des dernières années, cependant, le mouve-ment de la bonne entente perdit de sa pertinence et fut finale-ment éclipsé par les difficultés plus urgentes des années 1930.

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

assurés, ils abandonnèrent carrément la « bonne entente ». Àl’instar de Cook, Brown et Lamonde, Cameron achève sonexamen du mouvement en 1917.

À l’opposé, des spécialistes franco-ontariens tels queRobert Choquette et Gaétan Gervais ont analysé les initiati-ves de l’après-guerre relatives à la « bonne entente ». Leursconclusions sont beaucoup plus favorables. Ils montrent com-ment les leaders franco-ontariens, sous la conduite du séna-teur Napoléon Belcourt, se sont adressés à des anglophonesbien disposés et influents du cœur orangiste de Toronto pourcréer la Unity League of Ontario. Ce mouvement de pres-sion, soutiennent-ils, servit à changer graduellement les atti-tudes au sein du gouvernement provincial et dans le public engénéral. Il rendit finalement possible l’abrogation du Règle-ment XVII10. Leur travail nous offre, ce qui est rare, un coupd’œil sur le mouvement de la bonne entente au cours des an-nées 1920, mais il ne le place pas dans le contexte global deses débuts en 1916-1917.

Le lecteur intéressé doit parcourir l’ouvrage monumen-tal de Robert Rumilly sur l’histoire du Québec, achevé il y aune cinquantaine d’années, pour trouver une présentation àplus long terme du mouvement de la bonne entente. L’opi-nion de Rumilly sur la Ligue de la Bonne Entente originelleest proche de celle d’historiens ultérieurs : « Le voyage de“Bonne Entente” atténua peut-être les préjugés de quelqueshommes d’affaires ontariens. Il n’eut pas d’autre résultat pra-tique. Il ne changea rien à la situation scolaire11. » Dans sonanalyse des initiatives bonne-ententistes de la période d’après-guerre, Rumilly demeure tout aussi critique des motivationsde plusieurs participants. Il reconnaît néanmoins que les ef-forts du sénateur Belcourt et de la Unity League of Ontarioont contribué à orienter l’opinion ontarienne en faveur del’abrogation du Règlement XVII. « Par le contact avec des

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La nouvelle officielle de la guerre entre l’Allemagne etla Grande-Bretagne a été reçue ici au milieu du plusgrand enthousiasme : Canadiens français, Anglais, etIrlandais ont paradé côte à côte dans un même élan deloyauté et de patriotisme. [...] [L]es Canadiens françaiscomprenaient tout le sérieux de la situation présentepour l’Empire et ils marcheraient épaule à épaule avecleurs concitoyens de races différentes15.

L’enthousiasme général du Canada français, écrit FrançoisCharbonneau, « s’explique par un désir de [...] prouver la va-leur des siens aux yeux [des] compatriote[s] de langue an-glaise16 ». Le désir de jouer un rôle important dans l’effort deguerre du Canada n’aurait pu être plus évident que lors d’une« réunion de recrutement monstre » en octobre 1914 au parcSohmer, à Montréal, pour la création du 22e Bataillon (cana-dien-français). Sir Wilfrid Laurier, le chef libéral de l’opposi-tion, le premier ministre provincial Lomer Gouin et même lechef de l’opposition provinciale se réunirent pour affirmer ledevoir du Canada de défendre ses mères patries en Europe17.

Toutefois, le sentiment général apparent d’unité natio-nale céda bientôt la place à une animosité raciale profondé-ment enracinée. La principale pomme de discorde entre Ca-nadiens francophones et anglophones était le Règlement XVII.Imposé en 1912, il restreignait de façon importante l’ensei-gnement en français dans les écoles ontariennes. L’historienJean Provencher écrit : « [d]urant les premiers mois de 1915,le Québec s’intéresse plus à la question du Règlement XVIIqu’à la guerre en Europe18. » Charbonneau explique la contra-diction logique que le Règlement XVII posait aux Canadiensfrançais relativement à l’enrôlement :

Le parallèle sera tracé rapidement entre les minoritéseuropéennes que l’Angleterre prétend défendre enEurope et l’oppression raciale subie par les franco-phones de la province la plus populeuse du pays. La

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

L’importance globale du mouvement aux yeux du public de-meure au mieux insaisissable. Mais tout au moins, il est restéimportant pour ceux qui ont défendu sa cause. Le présentarticle soutient que de la Grande Guerre à la crise, le mouve-ment de la bonne entente – sous ses diverses formes et comptetenu de son degré fluctuant d’influence – a continué de pré-coniser modération et unité dans une société autrement divi-sée. En outre, il a contribué à restaurer le processus de rap-prochement des élites et a donné naissance à un nationalismecivique canadien.

1. La Ligue de la Bonne Entente, 1916-1917

Un examen du contexte de la création de la Ligue de laBonne Entente permet de saisir l’inspiration et les objectifsinitiaux du mouvement. « Au cours de l’été 1916 », commencel’histoire officielle du mouvement,

plusieurs Ontariens ont réalisé que si l’on ne faisait rienpour combler le fossé séparant les deux principalesraces du Canada, et particulièrement les relations entreles deux plus grandes provinces, l’unité nationale dansle Dominion risque d’être mise en péril et les bonssentiments résultant du déclenchement de la guerrepourraient disparaître13.

Au début de la guerre, les Canadiens français avaient sembléaussi enthousiastes à l’égard de la guerre que leurs compatrio-tes anglophones, et pendant une brève période, les deux « peu-ples fondateurs » avaient semblé unis par cette cause. MêmeHenri Bourassa, nationaliste et plus tard symbole de l’opposi-tion à la participation canadienne au conflit, « croyait alorsque la guerre pourrait favoriser “l’union des races” anglaise etfrançaise au Canada14 ». Le Devoir, le quotidien de Bourassa,faisait état avec enthousiasme des foules qui avaient célébréà Québec les déclarations de guerre :

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juin 1916, Godfrey annonça son idée. Un autre recruteur, lecolonel Lorne Mulloy, ancien combattant aveugle de la guerredes Boers, un conservateur, exprima de façon plutôt amu-sante l’idée initiale du mouvement et sa logique simple et at-trayante :

Deux ou trois d’entre nous étions en train de déjeuner[…] à Toronto, et un homme a dit : « J’aimerais em-mener 50 Ontariens à Montréal, juste pour leur mon-trer que les Canadiens français n’ont pas de cornes. »Et quelqu’un a ajouté : « Oui, et si nous pouvions em-mener 50 Canadiens français ici pour leur montrer quenous ne nous levons pas la nuit pour aboyer, ce seraitune bonne chose.22 »

Comparant leur mouvement à la très célèbre « entente cor-diale » entre la France et la Grande-Bretagne, deux vieux en-nemis, ils baptisèrent leur mouvement la Ligue de la BonneEntente (LBE). Le premier objectif de la Ligue devait êtrealors de retrouver les « bons sentiments » observés pendantles premiers mois de la guerre. Elle n’avait nullement l’inten-tion de régler la question du recrutement. « Il était clairementadmis que l’Ontario n’avait pas à influencer de quelque ma-nière le recrutement ou quoi que ce soit relatif à la guerre auQuébec23. » La LBE avait des objectifs limités – ce devaitêtre la première étape sur la longue route menant à la réconci-liation et à l’unité nationale. Cette initiative, poursuit l’his-toire officielle, « n’avait pas pour but de régler des controver-ses, mais d’évaluer les chances de l’établissement de senti-ments plus amicaux, sans lesquels le règlement de controver-ses serait irréalisable24 ».

Godfrey avait tout de même d’autres raisons de vouloiraméliorer les relations. Il n’en croyait pas moins que ses in-tentions concernaient essentiellement l’unité nationale. Im-périaliste et méthodiste convaincu ayant la réputation d’être

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logique, toute simple, consistera à demander pourquoiles Canadiens français devraient se battre pour libérerles minorités d’Europe ou encore, comme la propa-gande militaire les y invitait, défendre la civilisation fran-çaise en défendant la France quand les droits de la mi-norité française du Canada sont ainsi bafoués19.

Le problème du recrutement devint une sérieuse pomme dediscorde pour de nombreux Canadiens anglophones. La loyautéà l’égard de l’Empire britannique était pour eux un moyen dedémontrer la valeur de la nation canadienne, et les intérêts duCanada étaient inséparables de ceux de la Grande-Bretagne.Pour ce courant de pensée impérialiste et nationaliste, le fai-ble recrutement manifesté au Québec était impardonnable.Des accusations virulentes de déloyauté dans la presse anglo-phone et le mauvais traitement des recrues de langue fran-çaise dans l’armée anglophone du Canada ne faisaient qu’em-pirer les choses. Quand les propositions de conscription fu-rent rejetées au Québec, la presse de langue anglaise vit deplus en plus dans le Canada français un ennemi intérieur. « Unvote pour Laurier, pouvait-on lire dans le Globe de Toronto,est un vote pour le Kaiser20. » Le premier ministre RobertBorden, dans un écrit privé, alla jusqu’à assimiler les « Fran-çais » aux « étrangers et (aux) fainéants » qu’il considéraitcomme déloyaux21.

Alarmé par le changement radical observé dans les re-lations entre Canadiens francophones et anglophones, et dé-sireux de retrouver l’esprit d’unité qui prévalait au début de laguerre, un petit groupe de politiciens et d’hommes d’affairesontariens entreprit de créer un mouvement de rapprochement.John Milton Godfrey, politicien libéral fédéral et principal re-cruteur pour le Corps expéditionnaire canadien dans la régionde Toronto-Hamilton, était le plus en vue d’entre eux. Lorsd’une réunion de la National Service League à Toronto le 16

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La liste des participants aux conférences de la LBE de1916 et 1917 était impressionnante. On y retrouvait un éven-tail de politiciens libéraux et conservateurs des trois ordresde gouvernement, des avocats réputés et des hommes d’affai-res prospères, des juges, des recruteurs et des membres desforces armées, des ecclésiastiques et mêmes quelques univer-sitaires. Parmi les participants francophones figuraient le dé-puté libéral fédéral nationaliste Paul-Émile Lamarche,Zéphirin Hébert, président de la Chambre de commerce deMontréal, le magnat de la publicité O. S. Perrault, de l’ImperialTobacco Company, également de Montréal, le maire de Qué-bec, H.-E. Lavigueur, le premier ministre du Québec, LomerGouin, et le sénateur libéral Raoul Dandurand. Parmi les par-ticipants anglophones, on peut mentionner le maire de To-ronto, T. L. Church, le premier ministre de l’Ontario, W. H.Hearst, le révérend Robert Alexander Falconer, président del’Université de Toronto, le colonel P. A. Guthrie, du Nou-veau-Brunswick, un impérialiste pur et dur, S. R. Parsons,vice-président de l’Association des manufacturiers canadiens,et même un fruiticulteur de Beamsville (Ontario), Francis C.Jones28.

Pendant quatre jours d’octobre 1916, une cinquantainede délégués ontariens effectuèrent, avec force repas bien ar-rosés, une tournée de bienveillance à travers le Québec. Enfait, leurs hôtes enthousiastes, au nombre de cent cinquante,firent en sorte qu’ils n’oublient pas leur visite, avec tout lecérémonial de missions diplomatiques de paix et d’amitié. Leshôtes montréalais fournirent pas moins de trente-cinq voitu-res – quinze de plus que ce qu’ils avaient demandé – aux dé-légués ontariens nerveux à leur descente du train. Le groupefut ensuite transporté dans toute la ville, où ils visitèrent tou-tes sortes d’institutions d’enseignement, d’entreprises et d’in-dustries. Ils conclurent la journée par un banquet au Club Saint-

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anticatholique et anti-français25, Godfrey était préoccupé parle faible taux d’enrôlement chez les Québécois francophones.Par ses contacts avec Arthur Hawkes, journaliste bilingueoriginaire d’Angleterre bien disposé envers les Canadiens fran-çais, Godfrey avait adouci ses vues dans une certaine mesure.Godfrey, Hawkes et Mulloy ne préconisèrent pas au départ laconscription. Ils espéraient plutôt qu’en améliorant les rela-tions personnelles parmi l’élite francophone et anglophone,les Canadiens anglais seraient moins susceptibles de faire af-front aux francophones, et les Canadiens français deviendraientmoins hostiles à l’effort de guerre. Un enrôlement volontaireaccru contribuerait à éviter la conscription, le dernier recourspotentiellement source de divisions26.

Godfrey se mit rapidement à établir les bases de la pre-mière conférence de la LBE. Il assuma personnellement latâche de susciter de l’intérêt dans la haute société ontarienne,tandis que Mulloy et Hawkes se concentraient sur le Québec.Sir Georges Garneau, président de la Commission des champsde bataille nationaux à Québec, lui-même recruteur en tempsde guerre, s’avéra une relation précieuse. Avec l’aide de Gar-neau, Hawkes obtint une invitation de la Chambre de com-merce de Sherbrooke pour la visite préliminaire d’une poi-gnée de délégués ontariens. Sherbrooke était considéré commeidéal, car c’était une ville « où les relations entre les deux ra-ces sont des plus amicales27 ». Les délégués furent reçus avecenthousiasme et la réunion s’avéra un succès. Godfrey, Haw-kes et Garneau créèrent sur-le-champ un comité mixte de re-présentants de l’Ontario et du Québec pour organiser des réu-nions plus importantes dans les deux provinces. À ces réu-nions participeraient un nombre encore plus grand d’anglo-phones et de francophones. Le mouvement était officielle-ment lancé.

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relations entre Canadiens anglais et français. À cette fin, ilsespéraient éviter, dans la mesure du possible, les questionssources de division, bilinguisme et conscription. Au début,écrit Godfrey, « nous croyions impossible d’aborder des su-jets controversés33 ». Bien qu’on en parlât en privé et dans lacorrespondance, la plupart des délégués tinrent compte dessouhaits de Godfrey et évitèrent de parler directement de laconscription et de la question générale de la participation auxforces armées. En lieu et place, la plupart des hommes secontentèrent de propos flatteurs et admiratifs et parlèrentd’égalité raciale. Le langage fleuri de Garneau à la conférencede Hamilton en janvier 1917 est tout à fait caractéristique :

Vous êtes venus à nous en octobre dernier croyant qu’ennouant des liens plus étroits avec nous, vous vous ren-driez compte que le sang qui coule dans nos veines estaussi riche et chaud que le vôtre, et que nous ne pou-vions que trouver les idéaux communs et les accordsque nous cherchions. Nous sommes venus à vous ayant,absolument et fermement, confiance dans l’authenti-que chaleur profonde, saine et large d’esprit de la po-pulation ontarienne. Avons-nous été déçus, messieurs ?Je n’ai qu’à poser cette question aux hommes de notredélégation de la province de Québec pour obtenir sansdélai une réponse. (des voix : Non34.)

Quand le sujet de la guerre venait sur le tapis, les hommesparlaient du courage des soldats au front, et du glorieux héri-tage militaire des peuples français et britannique. Comme onpouvait s’y attendre, cette rhétorique revenait dans les pro-pos des militaires, tant francophones qu’anglophones. En fait,on y avait particulièrement recours pour dissiper les doutesquant à la loyauté du Québec à l’égard de la cause alliée. Lesréférences ne manquaient pas à la bravoure du 22e Bataillon(canadien-français), qui venait de remporter une victoire àCourcelette, sur la Somme, en septembre 191635.

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

Denis, « où les discours des deux côtés couvrirent tout ce quiconcerne les relations interraciales dans un esprit de franchecordialité », lit-on dans l’histoire officielle.

Tous étaient d’avis que cette manifestation justifiait àelle seule le pèlerinage. Il s’avéra que la franchise, aulieu de mettre mal à l’aise, produisait immédiatementrespect mutuel et désir de connaître plus intimement lepoint de vue de l’autre. L’hospitalité de Montréal futsans borne, et la camaraderie des hôtes était un objetd’envie, bien qu’inaccessible au tempérament plus fleg-matique des Ontariens29.

Les bons sentiments continuèrent à couler comme le vin lorsde visites et de banquets semblables à Trois-Rivières, Qué-bec et Sherbrooke. Ils se bourrèrent la panse de mets succu-lents, soupe aux huîtres, saumon de Gaspésie et canard sau-vage grillé, et leurs oreilles s’emplirent de propos empreintsde bonhomie30.

La visite qu’effectuèrent en retour cinquante déléguésquébécois en Ontario au début de janvier 1917 s’avéra toutaussi cordiale. Les Ontariens offrirent leurs propres banquetsle soir à leurs invités québécois et leur firent visiter le jour desuniversités et des usines de munitions à Toronto et Hamilton.Pour clore le tout, la visite du site ontarien le plus touristique,les chutes du Niagara, s’imposait31. Ayant été si bien nourrisau Québec, les Ontariens relevèrent le défi culinaire des Qué-bécois en offrant poulet aux truffes, perche King Edward etpêches du Niagara, entre autres délices32. Il n’y a pas alors às’étonner que les discours soient généralement demeurés ami-caux et qu’il n’y ait pas eu d’échanges passionnés.

En fait, les organisateurs de la Ligue de la Bonne En-tente tentèrent de faire en sorte que les discussions demeu-rent amicales et exemptes de controverses. Pour eux, l’objec-tif premier restait qu’un semblant de courtoisie marque les

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industriels présents aux réunions de la Ligue de la BonneEntente, par exemple, s’intéressaient moins aux questionspolitiques et davantage aux problèmes économiques. Deshommes tels que Zéphirin Hébert ou S. R. Parsons, en arri-vant à la conférence, pouvaient sans l’ombre d’un doute êtremis au rang de ceux qui craignaient que l’animosité que laguerre avait engendrée entre Québécois et Ontariens encou-rage des boycotts interprovinciaux. En conséquence, les deuxpremiers ministres provinciaux et les différents maires pré-sents aux conférences parlèrent de la nécessité d’une solida-rité économique. La Ville de Trois-Rivières distribua mêmeune brochure, « To Our Guests From Ontario », qui les invi-tait ouvertement à investir dans cette partie du pays :

Vous êtes venus dans l’intérêt des grandes institutionsprofessionnelles, industrielles et commerciales pour les-quelles votre province honnête et industrieuse est célè-bre à juste titre, […] pour voir de vos yeux sensibles etpratiques les nombreux avantages que nous prétendonsoffrir, pour étudier d’un coup d’œil nos ressourcesnaturelles principales38 […]

Pour certains des bonne-ententistes les moins sincères, lemouvement était moins un exercice de rapprochement qu’uneopération commerciale.

Certains des recruteurs les plus militants tels que lescolonels P. A. Guthrie et R. W. Leonard, le président d’unesociété minière, s’étaient joints au mouvement simplementparce qu’ils espéraient que ce dernier « influencerait favora-blement l’opinion au Québec en faveur de l’enrôlement ou dela conscription39 ». Godfrey ne tarda pas à mettre en gardecontre une telle présomption. « Je ne préconise pas une cam-pagne dans la province d’Ontario dans le but d’obliger leQuébec à accepter l’enrôlement et la contrainte, dit-il à unrecruteur inquiet du Québec. Notre position en Ontario de-

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Chose intéressante, des responsables non militaires te-naient également de tels propos. « On trouve souvent desnoms du Québec sur les listes des pertes de la guerre, décla-rait le premier ministre du Québec, Lomer Gouin, ce qui mon-tre que la fidélité est la même, et aussi forte, chez les Cana-diens français d’aujourd’hui36. » Gouin cherchait peut-être ainsià réfuter discrètement l’argument en faveur de la conscrip-tion, affirmant que le Québec faisait déjà sa part, et plus. Lepremier ministre ontarien W. H. Hearst, pour sa part, profitade l’occasion pour dénoncer la politique partisane et expri-mer sa position sur la question de la guerre, se montrant indi-rectement en faveur de la conscription.

À ce moment de l’histoire du Canada, nous ne pou-vons penser qu’à la guerre […] rien d’autre dans lemonde ne compte […] Cela exige non seulement cequ’il y a de mieux dans un Canada uni, mais ce qu’il y ade mieux dans l’Empire uni, partout où flotte le dra-peau britannique dans le vaste monde. (applaudisse-ments37)

Pour Hearst, un front uni exigeait le soutien inconditionnelde tous les détenteurs du pouvoir, y compris pour la conscrip-tion si elle devait être décrétée. Il faut noter que, bien que lepremier ministre fût prêt à faire des allusions à la conscrip-tion, il évita toute mention des droits des francophones.

Donc, si on lit entre les lignes des discours cordiaux, lemouvement semble avoir eu des significations différentes pourles uns et les autres. Les participants étaient après tout fortdivers. Sans parler de la séparation entre Français et Britanni-ques, entre Québec et Ontario, la diversité des intérêts pro-fessionnels signifiait que les participants au mouvementavaient inévitablement des points de vue différents. Bref, cha-que homme apportait avec lui dans les salles de banquet sonpropre ordre du jour. Beaucoup des hommes d’affaires et des

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contentant de vagues engagements en faveur de la toléranceet de l’amitié.

Fait révélateur, quelques anglophones se montrèrentbien disposés envers le point de vue canadien-français.C’étaient généralement des personnes qui avaient vécu auQuébec, ou encore qui connaissaient bien la langue françaiseet l’histoire du Canada français. Par exemple, John Squair,professeur de français à l’Université de Toronto, se montratrès favorable aux principes de réconciliation et de compré-hension mutuelle :

On dit que vous avez déclaré ce matin que vous dési-riez des mesures de conciliation relativement aux affai-res du Bas-Canada. […] Vos paroles sont les plus sen-sées que j’ai entendues depuis longtemps. Je crois quenous serons confrontés à de graves difficultés si nousne pouvons vivre en paix avec nos concitoyens cana-diens-français46.

Squair, qui avait étudié « le dialecte franco-canadien », s’inté-ressa tout de suite au mouvement, prenant part « à presquetoutes ses activités ». Il avait travaillé avec l’OntarioEducation Association, et n’avait que des louanges pour lesystème d’éducation québécois, qui avait constamment faitl’objet de critiques de la part de ceux qui tentaient de légiti-mer la suppression par l’Ontario de l’enseignement en languefrançaise47. Un collègue de Squair à l’Université de Toronto,le révérend George McKinnon Wrong, un anglican, participaaussi à la Ligue de la Bonne Entente. Professeur d’histoire etd’ethnologie, Wrong encourageait l’étude de l’histoire du Ca-nada. L’histoire de la Nouvelle-France figurait parmi ses in-térêts relatifs au passé du Canada48. Pour ces hommes, le mou-vement de la bonne entente constituait une occasion d’in-fluencer favorablement l’opinion en Ontario.

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

vrait être que notre relation doit être amicale, et que ce n’estpas le moment pour cette province de forcer qui que ce soit àadopter une opinion40. » Hawkes donnait le même conseil :« Nous devons éviter de laisser entendre que nous essayonsd’imposer quelque chose au Québec41. » Au fond, Godfrey,Mulloy, Hawkes et Garneau espéraient effectivement que l’es-prit d’amitié engendré par le mouvement adoucisse indirecte-ment certaines prises de position contre l’enrôlement au Qué-bec. Mais c’était pour le moment une priorité secondaire –elle demeurait subordonnée à la nécessité de changer les atti-tudes en Ontario et de mettre un terme aux attaques insul-tantes contre la loyauté des Canadiens français42.

Sans cesse présents dans l’esprit des participants, lessujets de controverse ne pouvaient se cantonner aux remar-ques indirectes. Godfrey fit ainsi observer : « Cette volonté[d’éviter les sujets controversés] a été dissipée par la suite parle discours remarquablement franc et honnête prononcé parPaul Lamarche au banquet de Montréal43. » Lamarche, un na-tionaliste, exposa ses vues très clairement lors de la réunioninaugurale de Montréal, le 9 octobre 1916 : « Nous avons, ici,la conscription non de fait, mais de force, la conscription dupauvre forcé de s’enrégimenter par la main pesante du riche. »Sur les droits de la langue française : « la chose la plus péniblepour un Canadien, [est d’être] privé du privilège de parler fran-çais44. » À Hamilton en janvier 1917, le sénateur libéral RaoulDandurand profita également de l’occasion pour s’exprimerlonguement en faveur des droits des francophones et mit engarde en général contre « les préjugés qui existent à traversvotre province contre les Français45 ». Pour leur part, quel-ques anglophones en profitèrent pour défendre les politiqueslinguistiques plutôt intransigeantes de l’Ontario. La plupartdes anglophones et des francophones, toutefois, évitèrentsoigneusement le sujet des droits de la langue française, se

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2. L’après-guerre et l’évolution du mouvement de labonne entente

En février 1917, Godfrey, Mulloy et Hawkes firent por-ter leurs efforts sur la création de la convention Win-the-War« dans le but de suggérer et de promouvoir des mesures dyna-miques pour hâter l’issue positive de la guerre52 ». Les consé-quences de l’échec imprévu sur la Somme en 1916 nous tom-baient tout juste dessus – dont 24 029 pertes pour le Corpscanadien53 – et avaient confronté les recruteurs à une nou-velle réalité. Les recruteurs plus modérés avaient jusque-làespéré éviter la conscription, mais elle semblait maintenants’imposer. La convention bipartisane eut lieu en mai 1917,réunissant des délégués de tout le pays pour appuyer les deuxpolitiques, gouvernement de coalition et conscription. Dansce que l’historien Brian Cameron a appelé « un mauvais juge-ment sans pitié qui eut pour effet d’annuler en grande partie,sinon totalement, l’esprit de bienveillance qu’avait permis la[Ligue de la Bonne Entente] », les organisateurs de Win-the-War « trouvèrent l’idée d’obtenir l’appui des “bonne-ententistes” du Québec en décrivant la réunion comme une“convention de l’unité nationale […] pour discuter des pro-blèmes nationaux et économiques issus de la guerre”54 ».

Les bonne-ententistes canadiens-français participant àWin-the-War en partant du principe qu’il s’agirait d’une con-vention sur l’unité nationale furent cruellement déçus quandils découvrirent son véritable objectif. Trois jours avant laconvention, le premier ministre Robert Borden annonça sonprojet de conscription. La plupart des délégués à Win-the-War appuyaient ce projet, ainsi que le gouvernement de coa-lition. Les questions relatives à l’unité nationale passèrent ausecond plan55. « Nous avons été si cruellement trompés parl’Ontario, écrivit un bonne-ententiste canadien-français dé-sillusionné, que ceux d’entre nous qui avaient cru en la sincé-

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

Arthur Hawkes était également de cet avis. Bien que néen Angleterre, l’éloquent Hawkes, qui était bilingue, avait vécuplusieurs années tant au Québec qu’en Ontario, où il avaitécrit et donné des conférences49. Son espoir premier que lemouvement serve à restaurer l’unité nationale – d’abord etavant tout en modérant l’opinion en Ontario – est tout à faitévident dans une lettre qu’il écrivit à Laurier à la suite de laproposition initiale de Godfrey concernant la « bonne en-tente » :

J’ai assisté, un peu à contrecœur, à une réunion de laNational Service League qui m’a plutôt surpris. Unediscussion des relations entre le Québec et l’Ontario arévélé une volonté très agréable de coopération cor-diale entre les deux, par des conférences où l’on tien-drait à apprécier et à accepter le point de vue du Qué-bec. Ce qui a eu lieu a confirmé, de façon très agréa-ble, ce que je vous ai souvent affirmé, que le point devue de l’Ontario peut être modifié de manière positivesi l’on considère la situation de façon plus générale. Jene suis pas membre de la ligue, mais la réunion a té-moigné d’une volonté d’accueillir toute coopération.[…] cette suggestion me séduit énormément50.

John Boyd, conseiller bilingue à la Ville de Montréal, fut plusexplicite : aux conférences en Ontario, il demanda ouverte-ment pourquoi, compte tenu du traitement généreux de laminorité anglophone au Québec, les francophones de l’Onta-rio ne pouvaient être traités aussi justement. Un Godfreyembarrassé dut mettre un terme au discours de Boyd « fautede temps51 ». Finalement, la Ligue de la Bonne Entente de1916-1917 réussit dans l’ensemble à éviter les controverses,car les participants succombèrent plus ou moins à la bonho-mie générale que Godfrey avait espérée.

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que la position réelle des Canadiens français devraitêtre présentée clairement, équitablement et entièrementaux Canadiens anglophones à travers le Dominion, etc’est à ce travail que je consacre actuellement mon hum-ble énergie dans l’intérêt de la concorde raciale et del’unité nationale57.

Hawkes, qui avait depuis le début vu dans la LBE un moyend’influencer l’opinion publique en Ontario, avait pour sa partété cruellement déçu quand le mouvement avait été lié parerreur à Win-the-War58. Même Godfrey et Mulloy allaient re-prendre leurs activités en faveur de la « bonne entente » unefois la guerre terminée.

Loin d’être abandonné, le mouvement fut relancé offi-ciellement à l’été 1918. Il s’agissait cette fois de la « BetterUnderstanding Association » (BUA), qui fut surnommée dansla presse francophone la « Meilleure Entente59 ». On y trou-vait des membres nouveaux et anciens, et elle devait être uneassociation permanente ayant son siège à Ottawa. La nou-velle association avait comme fer de lance William CharlesMikel. Cet avocat prospère avait grandi à Belleville (Onta-rio), ville qu’il décrivait comme un carrefour entre sa pro-vince et le Québec60. Mikel était aussi le président de l’Asso-ciation fraternelle canadienne (AFC). Formée dans les années1890, l’AFC était une organisation chapeautant divers clubset organisations sociales tels que l’Ancient Order of UnitedWorkmen, l’Alliance nationale, la Loyal Orange Lodge etl’Union Saint-Joseph du Canada. Parmi les dirigeants del’AFC, on trouvait tant des francophones que des anglopho-nes. D’après Mikel, elle eut une influence non négligeable àtravers le pays, car les groupes qui lui étaient associés comp-taient quatre cent mille membres, francophones et anglopho-nes, protestants et catholiques61. Cela le mettait dans une po-sition unique pour avoir des contacts avec une liste diverse

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

rité et en l’honnêteté du mouvement de la bonne entente fu-rent humiliés par le fait qu’on nous avait eus comme une banded’écoliers56 ». Moins d’un an après, l’élection du gouverne-ment de coalition de Borden créa une scission parlementaireentre groupes linguistiques, et la conscription fut imposée, cequi indigna grandement les francophones du Québec. Le paysétait plus divisé que jamais, et pour le moment l’idéal de labonne entente semblait mort.

Il serait trompeur de laisser entendre, cependant, queWin-the-War était simplement une continuation du mouve-ment de la bonne entente. Certains des bonne-ententistes lesplus modérés, dont des anglophones, continuèrent de promou-voir la cause de la compréhension mutuelle. Pour sa part, JohnBoyd s’affairait à distribuer des publications à des journaux età des politiciens à travers le pays. Dans une lettre ouverte àLa Presse en février 1918, Boyd s’excusa au nom des Cana-diens anglophones :

Ce serait une grande erreur que les Canadiens françaiscroient que tous les Canadiens de langue anglaise leursont hostiles ; au contraire, beaucoup de Canadiensanglophones ont vigoureusement protesté contre lesattaques injustes à l’encontre des Canadiens français etont montré qu’ils sont en faveur d’une justice com-plète pour leurs compatriotes d’origine française. […]Les attaques contre les Canadiens français émanentd’une minorité relativement petite, et non de la massedes Canadiens anglophones, qui sont de bonnes per-sonnes ayant le souci de l’équité.

Le défi, poursuivait-il, était d’éduquer les Canadiens anglo-phones :

Le principal obstacle à surmonter est le manque deconnaissances chez un grand nombre de Canadiens delangue anglaise relativement à la situation réelle des Ca-nadiens français. Ce qui est donc le plus essentiel, c’est

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civils furent tués et dix soldats blessés au cours d’une émeuteà Québec. « Le moment présent est tout à fait favorable psy-chologiquement à cette réunion », déclara-t-il aux membresde l’AFC63. Les propos liminaires de Mikel à la réunion de laBUA allaient dans le même sens :

Une des difficultés de la situation est le fait que les gensde la province de Québec et du reste du Dominionont très peu de contacts les uns avec les autres et seconnaissent très peu. L’absence de relations entre lespopulations du Nord et du Sud est considérée commeune des causes principales de la guerre de Sécession.[…] Que les sociétés fraternelles, par leurs sections,procurent cette connaissance aux gens64.

Certains délégués qui venaient d’adhérer au mouvement de labonne entente affichaient un optimisme caractéristique. Lemaire Platt, de Belleville, parla d’une « réunion qui fera date65 ».Un autre délégué alla plus loin : « Je ne pense pas qu’en cemoment dans le Dominion du Canada il y ait de réunion plusimportante que celle-ci, ni de réunion pouvant produire desrésultats aussi importants.66 »

Certains des nouveaux venus partageaient l’enthou-siasme naïf de leurs prédécesseurs, mais ceux qui connais-saient bien la vieille LBE tenaient à ne pas répéter ses erreurs.En fait, le surnom de « meilleure entente » voulait peut-êtredistinguer la BUA de son prédécesseur. À cette fin, les réu-nions étaient à échelle beaucoup plus petite et l’apparat étaitmoindre que dans le cas de la ligue originelle. De plus, Mikelvoulait aller au-delà de ce qui intéressait simplement l’élitecommerciale et politique, et hors de l’Ontario et du Québec.Il voulait atteindre le grand public et toutes les classes engénéral, avec des programmes qui, par exemple, créeraientdes possibilités d’échange entre jeunes du Québec et des autresprovinces du Canada. En quelques années, prétendait-il, ces

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de participants. Mikel organisa la réunion initiale de deux joursen juillet 1918, avec vingt-huit notables et représentants desdiverses organisations affiliées à l’AFC du Québec et de l’On-tario. Elle devait être suivie d’autres réunions, en novembre1918 et en septembre 1920.

Dans l’ensemble, les participants à la BUA étaient despoliticiens, des professionnels et des pédagogues. Chez lesanglophones, notons E. O. Platt, le maire de Belleville, le Dr

J.W. Edwards, orangiste et député conservateur fédéral deCataraqui, le colonel William Nesbitt Ponton, avocat de Bel-leville des plus favorables aux préoccupations des Canadiensfrançais, et James B. McKillop, procureur de la Couronne deLondon (Ontario). Mulloy et Godfrey prirent également partaux nouvelles délibérations. Parmi les participants francopho-nes figuraient l’ancien maire de Montréal et membre de l’Al-liance nationale, L. A. Lavallée, J. A. A. Brodeur, un con-seiller municipal de Montréal, et Rodolphe Bédard, présidentde la Société des artisans canadiens-francais. Fait révélateur,l’Association comportait aussi une représentation franco-ontarienne, dont O. J. Rochon, membre de l’Union Saint-Jo-seph du Canada, Napoléon Champagne, conservateur mem-bre de la Société des artisans canadiens-français, et à l’épo-que maire par intérim d’Ottawa, et Aurélien Bélanger, quiavait été inspecteur d’école à Ottawa, farouche défenseur dela qualité de l’enseignement dans les écoles ontariennes delangue française62.

Les objectifs de la BUA étaient proches de ceux de sonprédécesseur. Mikel était mû par l’inquiétude sincère que, à lalumière de récents événements, le pays soit « déchiré » si une« meilleure compréhension entre Canadiens francophones etanglophones » ne se manifestait pas. Il avait présenté cetteidée devant l’AFC à la fin d’avril 1918. Au début du mois, lacrise de la conscription était devenue critique quand quatre

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justement opprimés : « Si vous réussissez à persuader un Ca-nadien français qu’il est persécuté, victime de prussianisation,il ne serait pas un homme s’il ne se battait pas pour protégerce qui lui appartient70. » Napoléon Champagne était d’aviscomme Mulloy que « l’ensemble des francophones et l’ensem-ble des anglophones ne peuvent être jugés par une poignée detêtes brûlées71 ».

Étant donné la franchise de ton de la conférence, laquestion des écoles de l’Ontario et des droits des Canadiensfrançais furent inévitablement au cœur des débats et donnè-rent lieu à de vives discussions. Le Dr J.W. Edwards se lançadans une défense assez longue du Règlement XVII. Le Ca-nada, déclarait-il, est un pays anglophone et doit le demeurers’il veut prospérer. En tant que tel, la langue française n’aaucune reconnaissance constitutionnelle en Ontario ni nullepart ailleurs au Canada – sauf, peut-être, au Québec. Le fran-çais ne doit pas non plus jouir d’une plus grande reconnais-sance constitutionnelle si on ne veut pas assister à la balkani-sation du pays. Il affirmait que dans certaines parties de l’On-tario les enfants anglophones protestants n’avaient guèred’autre choix que d’aller dans des écoles privées francopho-nes proches où le niveau d’instruction était apparemment in-férieur72. Ces allégations furent âprement contestées par lesdélégués franco-ontariens, Champagne et Aurélien Bélanger.

Chose intéressante, ce n’est pas d’un francophone, maisdu colonel Mulloy que vint l’opposition la plus forte et la ré-futation la plus éloquente. Fils d’orangiste et ancien combat-tant de la guerre des Boers, Mulloy demeura un impérialisteet un conservateur. Mais l’expérience de la LBE avait profon-dément modifié la façon de penser de Mulloy et d’autres. « Lerésultat , rappelait-il, fut de débarrasser pour toujours l’espritde ces cinquante hommes, d’une bonne partie, sinon de latotalité, des préjugés et de la méfiance qui étaient les leurs73. »

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manifestations « suffirai[en]t à modifier la mentalité ac-tuelle67 ». La tonalité des réunions du nouveau mouvementde la bonne entente fut différente de celle des années précé-dentes, car Mikel encourageait les participants à dire ce qu’ilspensaient – à s’exprimer franchement sur les sujets brûlants.Mikel distinguait entre le nouveau et l’ancien mouvement :

On a dit de la Ligue de la Bonne Entente qu’ils organi-saient de gros banquets et qu’ils se donnaient générale-ment du bon temps, mais l’opinion des gens était quele contenu des délibérations n’était pas sérieux. Consi-dérons cela comme une proposition sérieuse, et qu’ilne faut pas confondre les délibérations avec des fêtes,des divertissements et de bons moments ; faisons quel-que chose d’utile pour le pays68.

Nombre de participants étaient d’accord. « Nous ne pouvonspas nous contenter de nous réunir ici pour nous congratulerles uns les autres, porter des queues de pies et assister à desdîners chic et penser que nous allons transformer le mondeparce que nous sommes gavés d’huîtres, proclama l’un d’eux.Nous devons nous appuyer sur des faits solides et nous de-vons nous montrer résolus en tant que Canadiens69. » Ils al-laient créer une tribune constructive.

Le plus éminent des bonne-ententistes de la premièreheure présent à cette occasion était le colonel Mulloy. Ayantretenu les leçons de la première initiative de bonne entente, ilfaisait preuve d’un optimisme prudent : « Nous avons laisséles deux grandes races qui forment la souche de la nation dé-clencher une bagarre familiale extrêmement regrettable et in-convenante. » Il poursuivait en attaquant la presse et les poli-ticiens exaltés et opportunistes – osant une allusion risquéeaux extrémistes orangistes – qu’il accusait d’exagérer l’hosti-lité existante et de l’attiser. Il sympathisait ouvertement avecceux des Canadiens français qui étaient persuadés d’être in-

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Le débat prit rapidement un tour personnel lorsque Mulloymit en doute la valeur des politiciens de la Colline du Parle-ment et de Queen’s Park qui s’opposaient si farouchementaux droits des francophones. « Ils sont une bonne représenta-tion, tant moralement qu’intellectuellement, de la classe degens qui les a envoyés à Ottawa et à Toronto, rétorquaEdwards. C’est un fait, que ça vous fasse plaisir ou pas. »Mulloy répliqua vivement :

Mulloy : Je suis tout à fait d’accord avec vous pourdire que le pays a le gouvernement qu’il mérite.

Edwards : Je vais encore plus loin, il a un bien meilleurgouvernement que ce qu’il mérite.

Mulloy : Vous savez, pour pouvoir se percher haut, ilfaut pouvoir voler haut. Néanmoins, il ne faut pas volerau-delà du perchoir, mais nous voulons de meilleurespolitiques et une meilleure citoyenneté au Canada, etnous allons avoir les deux75.

Enhardi par la vigoureuse défense des droits de la lan-gue française par le colonel, Bélanger se lança dans la ba-taille. Les Canadiens français d’Ontario, affirma-t-il, « sont,si l’on peut dire, le chaînon manquant, dans l’évolution […]qui doit se produire si une nationalité canadienne digne de cenom doit un jour émerger. » Il ajouta que le traitement ré-servé à la minorité franco-ontarienne était considéré au Qué-bec comme « pratiquement un premier pas vers l’invasion dela province de Québec et l’utilisation des mêmes méthodesou de méthodes similaires pour l’angliciser totalement76 ». Ilévoqua lui aussi un nationalisme civique exigeant la partici-pation active des deux sociétés de l’État canadien : « Nousvoulons rivaliser avec vous pour faire du Canada le meilleurpays du monde, nous voulons, par notre patriotisme, faire, sipossible, encore plus que vous ne faites, non seulement pourle Canada dans son ensemble, mais en particulier pour l’On-

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

La défense énergique des droits du français de Mulloy mérited’être citée en entier, car elle montre à quel point sa vision duCanada avait évolué, et témoigne de son sens des responsabi-lités :

Certes, il est vrai que la langue française n’est pas re-connue par la loi en Ontario. Il est vrai que l’Acte deQuébec et que d’autres lois [...] ne mentionnaient pas lalangue française. Mais c’était sous-entendu. C’est pour-quoi on ne l’a pas mentionné. Et nous, les anglopho-nes du Canada, si nous voulons nous en tenir à l’aspectlégal de la chose, nous renoncerons à notre sécuritémorale. Je ne prends pas fait et cause pour le Canadafrançais. Je parle simplement en mon nom, en tant quecitoyen de ce jeune Dominion, et je donne mon senti-ment, le sentiment que nous ne devons pas renoncer ànotre sécurité morale et que nous ne le ferons pas. LeCanadien français […] est ici pour rester, et vous nepouvez pas légalement le chasser de l’Ontario ou duCanada, pas plus que vous ne pouvez bannir par la loila langue qu’il parle. Il est ici pour rester et nos relationsdoivent être régies par l’équité et la justice si nous vou-lons un jour devenir une nation.

Le colonel, allant plus loin, rejetait l’ancien nationalisme eth-nique des Canadiens anglais en faveur d’un nationalisme civi-que à la manière de George-Étienne Cartier :

J’appartiens à ce groupe de Canadiens qui ne sont pasmoins fiers, mais plus fiers de leur citoyenneté cana-dienne parce que le Canada est formé des valeureuxdescendants de l’ancienne et chevaleresque France. Vous,hommes du Canada français, possédez ce que nousn’avons pas ; nous avons ce que vous ne possédez paset nos cultures respectives, en interagissant entre elles,donneront naissance à une grande nation74.

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au cours de sa réunion annuelle de 1921 une résolution « de-mandant avec insistance aux membres de la profession juridi-que d’user de leur influence pour favoriser une meilleure en-tente entre les Canadiens de langues française et anglaise81 ».Les réunions et les activités du mouvement attiraient mainte-nant un « nombre d’éminents hommes d’État canadiens » deplus en plus élevé82. En 1921, Mikel reçut des lettres de sou-tien de tous les premiers ministres provinciaux ainsi que dupremier ministre fédéral Arthur Meighen et du chef de l’op-position officielle de l’époque, William Lyon MackenzieKing83.

D’autres sympathisants continuèrent d’exercer des pres-sions en faveur de l’idéal de la bonne entente jusque vers lafin des années 1920, avec l’intention de plus en plus affirméed’obtenir l’abrogation du Règlement XVII. Le plus éminentde cette nouvelle génération de bonne-ententistes était le sé-nateur libéral franco-ontarien Napoléon Belcourt. Avocat ré-puté et membre du corps enseignant de l’Université d’Ot-tawa84, Belcourt fut président de l’Association canadienne-française d’éducation d’Ontario (ACFÉO) de 1910 à 1912,et de nouveau de 1919 à 1932. Considéré par plusieurs commele leader des francophones de l’Ontario, Belcourt poursuivitinlassablement son action jusqu’à l’abolition officielle du Rè-glement en 1927. Il rédigea et diffusa des documents pédago-giques, écrivit des articles de journaux, correspondit avec desfigures politiques éminentes et prononça des discours, tantdevant des auditoires hostiles que des publics réceptifs85. En1924, le nationaliste ultramontain Lionel Groulx décerna àBelcourt le « Grand Prix d’Action française » en récompensede ses efforts.

Malgré son association avec Groulx, Belcourt était unhomme pragmatique86. Sous sa direction, l’ACFÉO, à partirde 1921, travailla principalement à tenter de convaincre « la

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

tario. » Il conclut son allocution en faisant appel, tout commeMulloy, à la conscience morale de ses collègues anglopho-nes : « Nous ne sommes nullement démoralisés, et nousn’avons aucunement l’intention d’user de représailles, parceque nous avons une confiance solide et constante dans le faitque c’est finalement le fair-play naturel des Anglais de cetteprovince qui prévaudra. (Bravo !)77. » Malgré ce plaidoyer, laconférence s’acheva sans que les participants en soient arri-vés à un consensus sur la question de la langue.

C’est ce manque de consensus même qui incitait leschefs de la BUA à organiser une conférence après l’autre. Ilsétaient fermement persuadés que le premier pas le plus judi-cieux à accomplir pour traiter les doléances tant des Cana-diens anglais que des Canadiens français était de les formulerclairement et avec franchise. Lors de la deuxième conférence,qui eut lieu au Château Laurier à Ottawa, le 28 novembre1918, John Godfrey décrivit les réussites et les échecs du pre-mier projet de bonne entente. Les participants s’entendirentpour mettre sur pied un sous-comité composé de Godfrey,Edwards, Mikel, Bélanger, Champagne et Rodolphe Bédard,président de la Société des artisans canadiens-français, « pourdresser une liste provisoire des différences entre les Françaiset les Anglais au Canada, dans le but d’essayer, si possible, deréconcilier leurs différences78 ». Parmi les « différences » énu-mérées, figurait, encore une fois, en tête de liste la questiondes droits des francophones en Ontario, de plus en plus con-sidérée par les bonne-ententistes des deux communautés lin-guistiques comme la source principale de toutes les rancœurs79.

Lors de la troisième réunion de la BUA, qui se tint en-core une fois au Château Laurier, en septembre 1920, les dé-légués s’entendirent pour créer une organisation permanente80.La BUA réussit à obtenir divers appuis importants. Grâce àl’influence de Mikel, l’Association du Barreau canadien adopta

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ententistes se fussent écartés depuis longtemps de l’esprit dumouvement, ce n’était manifestement pas le cas de ces hom-mes-là – les succès et les échecs des projets de bonne ententeantérieurs s’étant avérés formateurs. À Squair et Wrong s’ajou-taient un certain nombre d’autres éminents universitaires, dontC. B. Sissons et O. D. Skelton, également de l’Université deToronto. L’ULO œuvrait en collaboration constante avecl’ACFÉO. « [C]es amis de notre cause, pouvait-on lire dansun rapport interne de l’ACFÉO de 1923, sont en relationsconstantes avec nos représentants à Ottawa et ils ne pren-nent aucune initiative nouvelle sans l’avoir discutée avec[n]otre comité exécutif89. »

Tandis que l’ACFÉO et l’ULO travaillaient d’arrache-pied à l’abrogation du Règlement XVII, l’ancienne LBE n’étaitpas tout à fait disparue de la scène – le sénateur Belcourt enpersonne prit part à ses activités courantes. En 1923 et 1925,respectivement, la LBE organisa de grands banquets sembla-bles à ceux de 1916 et 1917, d’abord à Toronto, puis à Mon-tréal et à Québec. S’il faut en croire La Patrie, le banquet deMontréal, à lui seul, attira cinq cent participants. Il réunit despersonnes aussi influentes que Vincent Massey (un futur gou-verneur général du Canada et partisan du bilinguisme), lesmaires de Montréal et de Toronto, Charles Duquette et Tho-mas Foster, ainsi que les premiers ministres du Québec et del’Ontario, Alexandre Taschereau et Howard Ferguson90 Lesbanquets étaient ostensiblement présentés comme des mani-festations commerciales, ce qui incita L’Action catholique à lesqualifier de « fiascos91 ». Ils permirent néanmoins de faire en-tendre aux défenseurs du Règlement XVII, comme au conser-vateur pur et dur qu’était Ferguson, des arguments en faveurdes droits du français. Le lieutenant-gouverneur de l’Ontario,Henry Cockshutt, profita notamment de l’occasion pour sedéclarer en faveur des droits du français et affirmer la néces-

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majorité protestante de la province de la justice de nos reven-dications ». Pendant des années, le gouvernement fédérals’était abstenu d’intervenir sur la question des écoles etBelcourt savait que pour que les choses changent, il fallaitatteindre ceux qui détenaient le pouvoir au niveau provincial.Pour changer l’opinion publique, et, plus précisément, l’opi-nion du gouvernement de l’Ontario, la stratégie de Belcourtétait de s’allier avec des Anglo-Ontariens protestants influentsdu milieu politique et universitaire87.

Le résultat, en 1921, fut la création de la Unity Leagueof Ontario (ULO) – dont le but principal était l’abrogationdu Règlement XVII. En 1923, la ligue comptait quelque 150membres. Tous, sauf un, étaient des anglophones d’une con-fession autre que catholique. Elle était composée de profes-seurs d’université, de politiciens, d’avocats, de médecins, dejournalistes, d’hommes d’affaires et de « représentants de tou-tes les sectes religieuses et de tous les partis politiques, pro-gressistes, libéraux et conservateurs ». Selon les membres dela direction de l’ACFÉO, ces personnes avaient une influencepositive, tant dans les journaux que dans le public, ainsi qu’ausein du cabinet provincial.

Au moyen de leur influence, de leurs écrits mis au ser-vice de notre cause, ces hommes ont créé dans l’Onta-rio en faveur du français, un mouvement qui se grossitde jour en jour. Depuis deux ans, quelques-uns d’entreeux font littéralement le siège de l’opinion publiqueanglaise de la province pour lui montrer sous un vraijour notre cause scolaire et s’efforcent d’obtenir dugouvernement des modifications opportunes88.

Fait révélateur, l’ULO comptait parmi ses membres uncertain nombre de personnes qui avaient œuvré au sein de laBUA et de la LBE, notamment les professeurs John Squair etE. W. Wrong. Bien que les moins sincères des bonne-

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de bonne foi. » Le temps était venu, affirmait-il, d’éliminercette loi exécrée : « Si on leur en donne les moyens nécessai-res, les Canadiens français de l’Ontario sont tout à fait d’ac-cord pour que leurs enfants apprennent l’anglais. Cela étant,pourquoi ne devraient-ils pas disposer de tous les moyenspossibles pour se perfectionner dans leur propre langue96 ? »Godfrey joignit un exemplaire de The Status of the FrenchLanguage in Canada de Belcourt à son message à Meighen, ainsiqu’une invitation à assister à la « 3rd Historical Lecture » de laLigue de la Bonne Entente au Château Laurier – dont l’hôten’était autre qu’Arthur Hawkes97. Hawkes avait fait le siègedu Premier ministre Mackenzie King, lequel avait fini par êtred’opinion que c’était un homme ayant « des idées très jus-tes98 ». Pour sa part, Meighen refusa de s’engager. Mais dansdes discours ultérieurs il se montra de plus en plus disposé àce que soit réglée la difficile situation des Franco-Ontariens,et dans sa correspondance avec Ferguson il donnait l’impres-sion d’encourager le premier ministre à prendre une décisionfavorable à leur endroit99. Entre-temps, Godfrey avait com-mencé à écrire directement à Ferguson. Avec Belcourt, il éla-bora un plan pour jouer sur l’intérêt de Ferguson pour la pé-dagogie en insistant sur le fait que les enfants unilingues fran-cophones pouvaient difficilement apprendre l’anglais si la lan-gue dans laquelle ils étaient instruits n’était pas le français100.En 1927, le gouvernement Ferguson s’inclina finalement etabolit le Règlement XVII.

3. Eugénie Lorans, la crise de 1929 et le déclin dumouvement de la bonne entente

Son objectif premier ayant été atteint au milieu desannées 1920 par l’abrogation du Règlement, le mouvementde la bonne entente connut une autre transformation. L’an-cienne LBE prit une nouvelle forme sous la direction d’Eugé-

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sité pour les francophones et les anglophones de se réconci-lier92.

Fait intéressant, un des principaux alliés de Belcourt ausein du groupe de pression en faveur de l’abolition du Règle-ment XVII était le fondateur même de la LBE, John Godfrey.L’historien Brian Cameron a prétendu que « manifestement,la “bonne entente” n’avait pas amélioré la compréhension deGodfrey93 ». Mais un examen plus approfondi des activitésbonne-ententistes de Godfrey après la guerre au sein de l’ULOdément cette affirmation. Godfrey était devenu membre del’ULO dès 1922. « Ceux d’entre nous qui ont eu des liensavec la « bonne entente » originelle, écrivait-il en 1924, ensont venus à la conclusion qu’il est impossible d’instaurer unebonne entente permanente à moins que quelque chose ne soitfait pour porter remède aux motifs de doléance que les fran-cophones sont convaincus d’avoir à cause du RèglementXVII94. » Reconnaissant qu’à la racine du problème se trou-vaient certaines mentalités prévalant en Ontario, Godfreys’était joint à l’ULO « pour éduquer l’opinion publique et, enmême temps, pour empêcher que le problème ne devienne unproblème politique… Si l’incendie des préjugés raciaux de-vait jamais se rallumer, il serait impossible d’en arriver à uneentente équitable95 ». De plus, il n’était que trop conscientque les crises intérieures provoquées par la Grande Guerreavaient failli détruire le pays. L’ULO offrait une possibilitéde corriger les erreurs du passé.

Godfrey s’efforçait principalement de convaincre sirArthur Meighen, alors chef de l’opposition à la Chambre desCommunes et ami intime du premier ministre de l’OntarioHoward Ferguson. « Il est certain que les francophones consi-dèrent le Règlement comme une insulte à leur nationalité »,écrivait-il à Meighen en 1924. « Le règlement est devenu uneobsession nationale et ils exigent sa disparition en témoignage

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ontarienne (contrairement à la LBE, qui était implantée enOntario et au Québec et avait une vision interprovinciale), sesoit chargée de faire pression sur les politiciens ontariens. Deplus, le Règlement fut abrogé à peu près au moment où Loransfut nommée à la présidence. Sans cette cause célèbre, il étaitnormal que le mouvement perde de sa pertinence. De plus, iln’était plus nécessaire de faire pression sur le gouvernementpour qu’il favorise le rapprochement des élites. Les libérauxportés au pouvoir en 1921, principalement grâce au soutiendont ils jouissaient au Québec, se montrèrent beaucoup plusréceptifs aux préoccupations de cette province. Alors queBorden avait dirigé un « gouvernement de coalition » prati-quement sans apport du Canada français, Mackenzie Kingprit soin de consulter son lieutenant au Québec, ErnestLapointe, sur tous les sujets concernant sa province. Finale-ment, le déclin des pressions politiques en coulisses peut êtrepartiellement attribué au fait que Lorans avait moins de pos-sibilités que ses prédécesseurs masculins d’exercer ce genrede pressions. En s’efforçant de limiter les activités de la LBEet d’en faire des tribunes sociales d’une échelle plus réduite,Lorans et son conseil exécutif à prédominance féminine fai-saient de leur mieux avec les outils dont ils disposaient à l’épo-que.

Malgré son édulcoration – ou peut-être à cause d’elle –le mouvement conserva parmi ses membres un vaste éventailde figures politiques, notamment des gouverneurs généraux,des premiers ministres provinciaux et fédéraux passés et pré-sents, des chefs de l’opposition, des ministres fédéraux et pro-vinciaux, des députés fédéraux, des députés provinciaux etdes sénateurs tant conservateurs que libéraux104. Il semble àtout le moins raisonnable de conjecturer que la Ligue a con-tribué à favoriser une atmosphère plus conciliante parmi lescercles très influents d’Ottawa. Mais, en 1930, elle était net-

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

nie Lorans, d’Ottawa, sa nouvelle présidente à partir de la finde 1925. C’était la première fois que les activités du mouve-ment allaient être orientées par des femmes. Le premier co-mité de direction de Lorans, composé d’anglophones et defrancophones, comportait cinq autres femmes mariées, ainsiqu’une fonctionnaire et une enseignante. Il y avait égalementquatre hommes – deux fonctionnaires et deux avocats. L’en-semble des membres du comité de direction étaient originai-res d’Ottawa. La plupart, sinon tous, n’avaient jamais faitpartie de l’ancienne Ligue. Ils avaient néanmoins été inspiréspar son objectif de « réaliser l’union des races francophone etanglophone au Canada » et de « promouvoir un esprit de pa-triotisme et d’équité101 ».

Sous la direction de Lorans, la Ligue s’éloigna de saforme originelle de mouvement interprovincial et de groupede pression, pour devenir un important club social municipal.Elle continua à produire des documents pédagogiques desti-nés à « planter la graine de l’unité au sein des masses102 ». Maisun examen plus approfondi des activités de la Ligue à la finde la décennie donne à penser qu’elle s’était écartée des ques-tions concrètes et litigieuses auxquelles elle s’était attaquéependant les années de la BUA et de l’ULO. La ligue se trans-forma plutôt en club de loisirs – elle devint une tribune pourdes conférences agréables sur l’histoire et la culture, ponc-tuées de concerts ou de présentations sur la littérature. Tou-tes ces activités avaient pour but de mettre en lumière la pré-cieuse contribution à l’histoire et à la culture du pays des deuxsolitudes du Canada103.

Les changements apportés aux activités et aux champsd’intérêt de la Ligue sont compréhensibles eu égard au con-texte. Le problème du Règlement XVII était essentiellementun conflit entre Ontariens – c’était un problème qui concer-nait la province. Il n’était que naturel que l’ULO, qui était

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lations avec d’autres intérêts commerciaux et financiers108 »,par exemple, s’avéra particulièrement mémorable :

Perrault a passé la soirée dans ma chambre hier jus-qu’au petit matin. Je n’avais encore jamais rencontré unhomme qui pouvait ingurgiter autant de scotch et enressentir si peu d’effets discernables. À propos, nousavons appris à bien nous connaître et, étant donné toutesles personnes qu’il connaît dans le milieu journalistique– sa compagnie dépense des milliers de dollars en pu-blicité chaque année – je crois qu’il sera très utile109.

Néanmoins, Mulloy ne se limita pas à courtiser des alliés. Ils’aventura également en « territoire ennemi » lorsqu’il renditvisite au nationaliste Henri Bourassa, rédacteur en chef dujournal Le Devoir, en août 1916. Il semble que Hawkes avaittenté de persuader Bourassa de devenir membre, mais sansgrand succès. Au premier abord, cela peut étonner, étant donnéla similitude apparente entre l’égalité des droits des anglo-phones et des francophones au Canada défendue par Bou-rassa d’un côté, et de l’autre l’idéal de la bonne entente. MaisBourassa considérait avec scepticisme une entreprise dont lesinitiateurs étaient impliqués dans la National ServiceLeague110. Néanmoins, l’ancien impérialiste Mulloy a été sur-pris d’avoir passé un aussi bon moment avec son soi-disantadversaire. « Je dois avouer que ce furent sans doute les deuxheures les plus agréables de mon voyage auQuébec….Bourassa, courtois, franc et cordial, alluma sa pipeet nous avons commencé. L’atmosphère fut du début à la finempreinte de cordialité et de camaraderie. » Il semble queMulloy ait fait une tout aussi bonne impression sur Bourassa :« Il m’est toujours plus facile de m’entendre avec un véritableimpérialiste qu’avec un faux patriote », déclara-t-il à son in-vité. Les deux hommes eurent une longue conversation surun vaste éventail de sujets, ainsi que sur la guerre et sur laparticipation du Canada en particulier111.

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

tement devenue partisane. Dans la correspondance échangéeentre Lorans et le chef de l’opposition de l’époque, Macken-zie King, elle se lamente sur les déboires électoraux des libé-raux. Lorans va jusqu’à offrir que la Ligue serve à l’avenird’outil de propagande pour le Parti libéral105. Alors que la crisede 1929 s’éternisait, la Ligue connut d’autres transformationset commença à se consacrer à l’aide aux chômeurs106. On nepouvait guère demander à la plupart des Canadiens des an-nées de famine de l’époque de s’intéresser à la cause altruistede l’unité nationale. Ayant perdu de sa pertinence, la Liguefut lentement éclipsée par des préoccupations plus pressan-tes107.

4. Estimation de l’importance globale du mouvementde la bonne entente

Lancé en grande pompe, à un moment où l’unité natio-nale était la question intérieure la plus urgente à régler, lemouvement de la bonne entente, lorsqu’il se termina, n’étaitplus que l’ombre de lui-même. Il est difficile de mesurer sonimportance globale de 1916 jusque dans les années 1930. Enfait, cela exigerait une analyse systématique approfondie quiva bien au-delà des moyens et des objectifs du présent article.La question est toutefois importante et mérite d’être au moinsabordée ici.

À ses débuts en 1916, le mouvement semble avoir eudroit à une abondante et optimiste couverture médiatique,tant dans la presse anglophone que francophone. Godfrey,Mulloy et Hawkes y avaient veillé grâce à leurs visites de re-lations publiques auprès d’importants propriétaires et rédac-teurs en chef de journaux de l’époque. La rencontre de Mulloyavec l’influent O. S. Perrault, « l’administrateur et le directeurde l’Imperial Tobacco Company, qui entretenait d’étroites re-

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paraient jusqu’ici. On a aboli pour la circonstance toutedistinction de langue et de religion pour ne voir quedes Canadiens animés des mêmes sentiments quand ils’agit de la conservation, de l’agrandissement et del’exaltation de la patrie canadienne114.

Au départ, on sent un véritable espoir que le mouvement vacréer au moins un semblant de rapprochement, fera disparaî-tre les propos les plus agressifs et, peut-être même, résoudrale problème du recrutement et des droits linguistiques de laminorité. Ce dernier point fut davantage traité dans les jour-naux francophones et le premier dans la presse anglophone.

À la fin de la guerre, cependant, de nombreux franco-phones exprimèrent un scepticisme reflétant celui des bonne-ententistes désillusionnés. Un éditorial du journal Le Droit,intitulé « La Question du Québec », accueillait d’un ton criti-que compréhensible la création de la BUA :

Nous rencontrons, écoutons, lisons assez souvent des‘bonnes ententistes’ de langue anglaise, apparemmentanimés des meilleures dispositions à notre égard [....]Ils nous parlent avec de grands gestes et des souriresengageants des bonnes relations qui devraient existerentre les deux grandes provinces-sœurs, entre les deuxgrandes races qui habitent ce dominion ; mais ils nemettent jamais le doigt sur la place115.

Ce scepticisme se manifestait également dans des lettres en-voyées par le public à Mikel « L’Association de Bonne En-tente, écrivait J. Edmond Cloutier, secrétaire de l’Associationd’Éducation d’Ontario, a tenu de beaux discours sur l’ententeet l’union des races ; de résultats pratiques, de sympathie vé-ritable de la part du peuple, elle n’en a obtenue aucuns (sic).Au contraire, celui-ci l’a décriée116. »

Suite aux désillusions provoquées par la conscriptionet le gouvernement de coalition, on ne pouvait guère attendre

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

Les appréhensions de Bourassa l’empêchèrent finale-ment d’adhérer au mouvement. Toutefois, il chargea un deses rédacteurs du journal Le Devoir, Ernest Bilodeau, d’assis-ter aux débats des conférences d’octobre 1916 et 1917 et d’enfaire le compte rendu. Le journal publia de nombreux articlessur les réunions, mais leur ton était détaché. Bilodeau attiral’attention sur l’extravagance et la somptuosité des banquetset s’amusa du fait que les participants anglophones et franco-phones ne se mélangeaient guère. Il s’intéressa particulière-ment aux discours nationalistes de Lamarche et de Dandurand,soulignant que le Canada était plus important pour les fran-cophones que l’Empire112. Les discours des recruteurs, commeGuthrie, ou de ceux qui s’étendaient en long et en large sur ledevoir envers l’Empire, comme Hearst, étaient encore large-ment entachés de suspicion. Bilodeau était néanmoins im-pressionné par la sincérité manifeste d’un certain nombre departicipants anglophones, tout particulièrement de Mulloy quine mâchait pas ses mots. L’hospitalité dont on fit preuve en-vers les Québécois au cours de leur séjour en Ontario fit éga-lement bonne impression sur l’ancien sceptique qu’étaitBilodeau : « Les Ontariens de la Bonne-Entente ont faitpreuve d’une indiscutable sincérité dans leur désir de mettrefin à la désunion qui sépare les deux grandes races canadien-nes, nous n’avons point de doute là-dessus. Et leur sincérités’est manifestée en une admirable hospitalité. On ne peut queleur souhaiter la pleine réussite de leurs désirs113. »

Au début, les articles du journal davantage grand pu-blic qu’était La Presse étaient d’un optimisme absolu, commeen témoigne le reportage sur l’ouverture de la convention àMontréal, le 10 octobre 1916 :

Il est certain [...] que les deux grandes races [...] ont faitun grand pas dans la voie de la conciliation et dans lerèglement pacifique des questions épineuses qui les sé-

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font partie intégrante de l’histoire du pays. « La véritable forcede désintégration dans notre dominion est la promotion per-sistante de préjugés concernant la race et les croyances pardes politiciens sans envergure et des journaux irresponsables. »Le journal admonestait les Ontariens qui « parlaient de fairerentrer de force l’anglais dans la gorge des habitants du Qué-bec123 ». Dans la même veine, le Border Cities Star de Windsoret l’Evening Examiner de Peterborough réagirent au congrès dela LBE de janvier 1925 en demandant l’abrogation du Règle-ment XVII comme preuve de la sincérité de l’Ontario. Lesjournaux francophones tant de l’Ontario que du Québec leremarquèrent. « Ceux qui ont suivi de près la presse ontariennedepuis douze ans savent très bien que les opinions émisesdans cette presse n’ont pas l’habitude de ressembler à cellesque nous venons de lire », déclarait avec optimisme L’Actioncatholique124.

L’historien Patrice A. Dutil a suggéré que les bonne-ententistes les plus sincères ont « doucement injecté la collequi a finalement cimenté le pays125 ». Le mouvement avait dumoins permis d’instaurer des rapports positifs entre les lea-ders des deux provinces, ce qui n’était pas le cas auparavant.Même Cameron admettait que « la bonne entente offre auxOntariens une rare occasion de côtoyer des Canadiens fran-çais, ce qui ne peut qu’avoir eu une incidence positive sur lespréjugés existants126 ». On pouvait en dire tout autant des ré-percussions de la couverture médiatique bienveillante à la-quelle le mouvement eut droit à ses débuts, et occasionnelle-ment par la suite. En fait, l’importance des personnalités po-litiques directement impliquées dans le mouvement, ou qui, àtout le moins, en embrassaient les idées, lui garantissait unecertaine attention favorable dans les journaux. Cette couver-ture médiatique ainsi que les diverses activités pédagogiqueset de propagande organisées par le mouvement durant toute

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d’organes nationalistes comme Le Devoir de Bourassa, et L’ac-tion française de Lionel Groulx, qu’ils aient confiance dans lesefforts de Mikel pour ressusciter le mouvement de la bonneentente. Seule la réunion de la BUA de septembre 1920 eutdroit à une mention dans Le Devoir. Ce bref article n’étaitguère enthousiaste en comparaison du commentaire deBilodeau de janvier 1917117. Pour sa part, L’Action française,lancée en janvier 1917, ne fit pratiquement aucune mentionde l’ancienne LBE, ni de la BUA qui lui succéda118. Au lieu dediscuter de la nécessité de trouver un moyen de permettre àl’Ontario et au Québec de coexister, le journal tenait plutôt àprotéger les Canadiens français contre « le poison colonialanglo-saxon119 ». À peu près au moment ou la BUA tint sapremière réunion, au milieu de 1918, Groulx s’insurgeait con-tre l’idée que « la Confédération canadienne était une chosenécessairement éternelle120 ». Alors que même Le Devoir fitune place dans ses pages à la troisième réunion de la « MeilleureEntente », les rédacteurs de L’Action française souhaitaient da-vantage promouvoir l’idée de créer un État séparé où les fran-cophones pourraient une bonne fois pour toutes fuir « le fa-natisme qui caractérise nos voisins d’Ontario121 ». Le journalqualifia les initiatives ultérieures de bonne entente d’hypocri-tes et d’inutiles122.

Pour leur part, les journaux anglophones d’Ontariomanifestèrent une tendance à la modération de ton suite auxinitiatives ultérieures de bonne entente. Le premier congrèsde la BUA de Mikel, en juillet 1918, eut droit à une couver-ture positive dans l’Intelligencer de Belleville, et le Daily Onta-rio. Un éditorial du Daily Ontario, par exemple, reprenait unephrase de l’ancien maire de Montréal, Louis-Arsène Lavallée,lorsqu’il demanda si la Suisse était « moins unie parce qu’elletolère et reconnaît officiellement trois langues à l’intérieur deses frontières ». Les deux langues du Canada, poursuivait-il,

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Messieurs, je ne peux me retenir de vous dire que vousavez écrit une page d’histoire à Hamilton aujourd’hui…Vous, juge Pelletier, avez parlé d’un livre d’or dans le-quel vous voudriez voir écrit les noms de ces hommesqui ont été les pères de ce mouvement et que ne de-vraient jamais oublier leurs concitoyens reconnaissants.Le premier nom à inscrire dans ce livre sera le vôtre,Godfrey. (Applaudissements) C’est à vous, par votreamour pour votre pays, votre patriotisme, vos idéauxélevés, le courage et l’inébranlable détermination aveclesquels vous avez poursuivi les idéaux qui étaient lesvôtres, le tact et le bon sens dont vous avez fait preuveen toute circonstance, que le mouvement doit son suc-cès. (Applaudissements130)

Certains des premiers participants au mouvement se voyaientcomme des sortes de pères de la Confédération – les créa-teurs d’un mouvement audacieux qui apporterait au Canadala nationalité et l’unité qu’il méritait. Ce n’était nullement unecoïncidence si les premières conférences de la LBE avaientété entourées de toute la pompe et de toute la solennité d’unimmense exercice de construction de la nation. Il suffit d’unregard aux programmes élaborés, aux menus des dîners, auxcoupures de presse conservées, aux histoires officielles et à lacorrespondance et aux discours transcrits pour se rendrecompte des ambitions des membres des cinq premières an-nées. Le fait même que Godfrey et Mikel ont préservé avectant de soin les registres du mouvement montre bien l’impor-tance historique qu’ils espéraient qu’il acquerrait avec le temps.

Lors de son dixième anniversaire, à Ottawa, le 14 mars1928, la LBE remit à Eugénie Lorans un certificat de mem-bre à vie. Le document est superbement peint et plein de sym-bolisme. Au centre s’élève un gros arbre aux profondes raci-nes, avec sur ses branches droites et gauches deux grandesfeuilles d’érable. Une de ces feuilles est ornée de la fleur de

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son existence ont rejoint une partie du public, soit directe-ment, soit par le bouche à oreille127. Godfrey se rappelait com-ment l’équipe de la bonne entente avait réussi à récolter 800000 $ pour des fonds patriotiques en temps de guerre auprèsde quelque 106 000 « travailleurs » montréalais, la plupart fran-cophones128. Il est impossible de dire combien des quatre centmille membres de l’Association fraternelle canadienne adhé-raient à ses politiques officielles de rapprochement129. De plus,l’aval de l’Association du barreau canadien aura été impor-tant, particulièrement dans un pays dont l’élite et les classespolitiques étaient principalement constituées d’avocats. Le dis-cours sur la bonne entente a pu aussi servir à modérer lespolitiques et les discours des personnalités publiques qui nefaisaient même pas partie du mouvement. Après tout, c’estpar ces voies que le Règlement XVII fut finalement abrogé.

Il demeure toutefois impossible de savoir avec certi-tude quelles sont les activités de bonne entente qui ont in-fluencé l’opinion publique et l’atmosphère politique en géné-ral, ni si les divisions auraient été, ou non, exacerbées sansl’influence modératrice du mouvement. En fin de compte, lepays se divisa en fonction des groupes linguistiques lors desélections de 1917, le gouvernement d’« union » imposa par lasuite la conscription, les animosités persistèrent et les Cana-diens français de l’Ontario durent attendre quinze longuesannées pour voir disparaître le Règlement honni. Sans le mou-vement de la bonne entente, les choses auraient peut-être étépires. Mais on était loin de la société unie à laquelle les fonda-teurs de la première Ligue de la Bonne Entente avaient rêvé.

Le mouvement eut, à tout le moins, une importancesymbolique pour ses créateurs. À cet égard, l’optimisme quel-que peu naïf dont fit preuve Georges Garneau durant les pre-mières années de la bonne entente est typique :

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n’est que de façon limitée, à mettre en contact les anglopho-nes et les francophones.

L’influence globale du mouvement de la bonne ententeest, au mieux, difficile à déterminer. La question demeuredonc : Où se situe ce mouvement au sein de l’histoire en gé-néral, particulièrement lorsqu’il semble avoir été à contre-cou-rant de bien des tendances de son époque ? L’existence mêmedu mouvement démontre aux historiens que le Canada anglo-phone et francophone n’était pas aussi monolithique qu’on lecroit parfois. Bien que les voix les plus fortes dans la presse eten politique semblent avoir été celles de la division et de l’ani-mosité, la bonne entente nous rappelle qu’il existait au moinsun certain désir de rapprochement et de réconciliation. Leséchecs du mouvement donnent à penser que c’était effective-ment une exception à la règle. Mais ses succès en font égale-ment une force dont il vaut la peine de tenir compte dansl’histoire du Canada. De plus, la société canadienne de la pre-mière moitié du XXe siècle, et les relations entre francopho-nes et anglophones en général, peuvent avoir été plus com-plexes que nous ne sommes souvent portés à le croire.

Dans un contexte plus général, les initiatives de bonneentente apparaissent comme des tentatives pour restaurer lerapprochement des élites qui avait caractérisé les gouverne-ments de Baldwin et Lafontaine, de Macdonald et Cartier, etde Laurier. Ce rapprochement des élites s’effondra sous legouvernement Borden à cause des relations entre le Canadaet l’Empire, et du nationalisme intolérant et raciste des Cana-diens anglais, ce qui culmina dans la crise de la conscriptionainsi que dans la discrimination continuelle envers les mino-rités francophones, particulièrement en Ontario. Le rappro-chement des élites redevint possible lorsque le nationalismeanglo-canadien fut marginalisé en faveur d’un nationalismecivique canadien dans les années 1920 – nationalisme qui fut

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

lys française et l’autre de la rose, du chardon et du trèfle desîles Britanniques. De chaque côté de la peinture est inscrit, enfrançais et en anglais, la devise : « Se comprendre et s’aimerpour s’entr’aider » – « To Love to Help and to Understandeach Other131. » Pas un mot de la cérémonie dans les journauxd’Ottawa. Les éditorialistes écrivaient plutôt sur l’extrémismedes orangistes et sur l’animosité que soulevait encore la ba-taille pour les droits des francophones en Ontario132.

* * *

De sa création à sa disparition, le mouvement de labonne entente fit entendre, du moins jusqu’à un certain point,la voix de la modération et de l’unité au sein d’une société parailleurs divisée. Quelles qu’aient été les lacunes du mouve-ment dans ses premières années, l’appel au rapprochement età la réconciliation offrit au moins une solution de rechange àla rhétorique préjudiciable de l’animosité, particulièrement enOntario. C’est cette animosité qui pendant la Grande Guerrepoussa des hommes plus modérés à l’action. Le mouvementn’a peut-être pas empêché les divisions linguistiques de s’exa-cerber au pays, mais il a au moins posé les fondations desefforts de réconciliation de l’après-guerre. En fait, nombre deses premiers fondateurs – et notamment des impérialistescomme John Godfrey et Lorne Mulloy – avaient été tellementtouchés par leurs premières expériences qu’ils participèrent àla résurrection du mouvement à la fin de la guerre. C’est cedeuxième effort pendant l’après-guerre qui fit connaître auxpoliticiens les doléances des Canadiens français et, en fin decompte, aboutit à l’abolition du Règlement XVII en Ontario.À une époque où le pays était profondément divisé, l’idéal dela bonne entente favorisa l’émergence d’une conscience mo-rale. Même si, dans les dernières années de son existence, lemouvement perdit de sa pertinence, il continua, même si ce

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6 Ici, je distingue la Ligue de la Bonne Entente du « mouvement de la bonneentente ». La première est une organisation, le second fait plus généralementréférence à l’idéal de rapprochement entre Canadiens francophones et anglo-phones. Le terme « mouvement de la bonne entente » inclut toutes les initia-tives et toutes les organisations créées en ayant en tête l’idéal de la « bonneentente », et ce de 1916 aux années 1930, dont la Ligue de la Bonne Entente(1916), la Better Understanding Association (1918) et la Unity League ofOntario (1921).7 Robert Craig Brown et Ramsay Cook, Canada, 1896-1921: A NationTransformed, Toronto, McClelland and Stewart, Ltd., 1981, p. 265.8 Yvan Lamonde, Histoire sociale des idées au Québec, 1896-1929, vol. II, Mon-tréal, Éditions Fides, 2004, p. 37-43. Honnêtement, compte tenu de la com-plexité de la période couverte par Lamonde, le lecteur ne devrait pas s’attendreà beaucoup plus d’un paragraphe sur le mouvement de la bonne entente.9 Brian Cameron, « The Bonne Entente Movement, 1916-1917: FromCooperation to Conscription », Journal of Canadian Studies, vol.13, no 2 (été1978), p. 53.10 Voir Robert Choquette, Language and Religion. A History of English-FrenchConflict in Ontario, Ottawa, Les Presses de l’Université d’Ottawa, 1975, p. 229-236 ; Gaétan Gervais, « Le Règlement XVII (1912-1927) », Revue du NouvelOntario, no 18 (1996), p. 175-186 ; Pierre Savard, « Relations avec Québec »,dans Cornelius J. Jaenen, dir., Les Franco-Ontariens, Ottawa, Les Presses del’Université d’Ottawa, 1993, p. 239-240.11 Robert Rumilly, Histoire de la province de Québec, vol. XXI, Montréal, Mon-tréal-Éditions, 1940, p. 185.12 Robert Rumilly, Histoire de la province de Québec, vol. XXVI Montréal, LesÉditions Chantecler, Ltée, 1940, p. 260.13 The Bonne Entente, p. 1-2.14 François Charbonneau, La crise de la conscription pendant la Seconde Guerremondiale et l’identité canadienne-française, Thèse de maîtrise (science politique),Université d’Ottawa, 2000, p. 36, 38.15Le Devoir, 5 août 1914, p. 2.16 Charbonneau, La crise de la conscription, p. 36, 38.

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

embrassé par le Parti libéral de Mackenzie King et son gou-vernement. Cela fit beaucoup pour apaiser les nationalistes etles politiciens canadiens-français modérés comme ErnestLapointe133. Une part du mérite d’avoir restauré le rapproche-ment des élites ainsi qu’un nationalisme civique canadien peutêtre attribué aux membres du mouvement de la bonne en-tente.

Traduction : Christian Bérubé

NOTES

1 J’aimerais remercier le Conseil de recherches en sciences humaines et le Ré-gime de bourses d’études supérieures de l’Ontario pour avoir assuré le finan-cement qui a rendu cette étude possible. J’aimerais également remercier MichaelD. Behiels et Peter Rider de leurs conseils et de leur encouragement au coursde la rédaction de cet article. Bien entendu, toutes les éventuelles erreurs ouinexactitudes de ce texte ne peuvent être attribuables qu’à son auteur.2 Elizabeth H. Armstrong, The Crisis of Quebec, 1914-1918, New York, Co-lumbia University Press, 1937, p. vii. Dans cet article, pour faciliter la lecture,toutes les citations anglaises sont traduites en français.3 Carl Berger, dir., Imperialism and Nationalism, 1884-1914: A Conflict in CanadianThought, Toronto, Copp Clark Publishing, 1969, p. 1 ; Carl Berger, The Senseof Power: Studies in the Ideas of Canadian Imperialism, 1867-1914, Toronto, Uni-versity of Toronto Press, 1970, p. 259.4 Pour une comparaison plus complète entre Bourassa et les impérialistescanadiens les plus en vue, voir Sylvie Lacombe, La rencontre de deux peuples élus.Comparaison des ambitions nationale et impériale au Canada entre 1896 et 1920,Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2002, 291 p. Voir également lestextes de Bourassa dans Yvan Lamonde et Claude Corbo, dir., Le rouge et lebleu. Une anthologie de la pensée politique au Québec de la Conquête à la Révolutiontranquille, Montréal, Les Presses de l’Université de Montréal, 1999, p. 301, 315.5 The Bonne Entente: How It Began, What It Has Done, and Its Immediate Pro-gramme, Toronto, Office of the Bonne Entente, 1917, p. 2.

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33 Godfrey, « History of the Bonne Entente », p. 15, BAC, FG, MG30-C11,vol. 2.34 Georges Garneau, discours dans le procès-verbal de la deuxième réunion dela Ligue de la Bonne Entente, 8-10 janvier 1917, p. 110, 140, BAC, FG, MG30-C11, vol. 2.35 Voir, par exemple, les discours prononcés par les colonels McCullough, deHamilton, et Girouard, de Québec, dans le procès-verbal de la deuxièmeréunion de la Ligue de la Bonne Entente, 8-10 janvier 1917, p. 101, 231, BAC,FG, MG30-C11, vol. 2.36 Lomer Gouin, discours dans le procès-verbal de la deuxième réunion de laLigue de la Bonne Entente, 8-10 janvier 1917, p. 60, BAC, FG, MG30-C11,vol. 2.37 W. H. Hearst, discours dans le procès-verbal de la deuxième réunion de laLigue de la Bonne Entente, 8-10 janvier 1917, p. 82, BAC, FG, MG30-C11,vol. 2.38 United we stand, divided we fall: address to our guests from Ontario by the Citizens ofThree Rivers, 10 octobre 1916, p. 1, BAC, FG, MG30-C11, vol. 2.39 R. W. Leonard à Godfrey, 21 juillet 1916, BAC, FG, MG30-C11, vol. 1.40 Godfrey à Van Felson, 3 juillet 1916, BAC, FG, MG30-C11, vol. 1.41 Hawkes à Godfrey, 13 juillet 1916, BAC, FG, MG30-C11, vol. 1.42 « Je crois qu’avec sagesse et tact nous pouvons accomplir de grandes choses.La principale difficulté, selon moi, est actuellement l’attitude de la province del’Ontario. » Godfrey à Van Felson, 15 juillet 1916, BAC, FG, MG30-C11, vol.1.43 Godfrey, « History of the Bonne Entente », p. 15, BAC, FG, MG30-C11,vol. 2.44 Dans La Presse, 10 octobre 1916, p. 12.45 Raoul Dandurand, discours dans le procès-verbal de la deuxième réunionde la Ligue de la Bonne Entente, 8-10 janvier 1917, p. 225, BAC, FG, MG30-C11, vol. 2.46 Squair à Godfrey, 23 juin 1916, BAC, FG, MG30-C11, vol. 1.47 Voir Henry James Morgan, dir., The Canadian Men and Women of the Time: AHand-book of Canadian Biography of Living Characters, deuxième édition, To-

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

17 Armstrong, The Crisis of Quebec, p. 85. Voir également Jean-Pierre Gagnon,Le 22e bataillon (canadien-français) 1914-1919. Étude socio-militaire, Ottawa, LesPresses de l’Université Laval, 1986, p. 27-32.18 Jean Provencher, Québec sous la loi des mesures de guerre, 1918, Montréal,Éditions du Boréal Express, 1971, p. 23.19 Charbonneau, La crise de la conscription, p. 36-37.20 Dans Robert Lahaise, La fin d’un Québec traditionnel, 1914-1939, Montréal,Hexagone, 1994, p. 47.21 Dans J. L. Granatstein et J. M. Hitsman, Broken Promises: a History ofConscription in Canada, Toronto, Oxford University Press, 1977, p. 67.22 Procès-verbal de la première réunion de la Better Understanding Associa-tion, 25 juillet 1918, p. 6-7, Bibliothèque et Archives Canada (BAC), fonds dela Canadian Fraternal Association (ci-après FCFA), MG28-I3.23 The Bonne Entente, p. 1-2.24 Ibid., p. 2.25 Rumilly, Histoire de la province de Québec, vol. XXI, p. 181.26 Voir John M. Godfrey, « History of the Bonne Entente Including a Narra-tive of the Evidence Leading up thereto », 1917, p. 7-11, BAC, Fonds JohnMilton Godfrey (ci-après FG), MG30-C11 vol. 2 ; et Godfrey à LordShaughnessy, 20 juin 1916, BAC, FG, MG30-C11 vol. 1.27 The Bonne Entente, p. 3.28 Cette information était tirée de The Bonne Entente, p. 1-8 ; Godfrey, « Historyof the Bonne Entente », p. 1-22, BAC, FG, MG30-C11, vol. 2 ; La Presse, 10octobre 1916, coupures de journaux, dans BAC, FG, MG30-C11, vol. 2 ; et leprocès-verbal de la deuxième réunion de la Ligue de la Bonne Entente, 8-10janvier 1917, p. 6-7, BAC, FG, MG30-C11, vol. 2.29 The Bonne Entente, p. 4-5.30 Voir, par exemple, le menu de la conférence de Sherbrooke, 11 octobre1916, dans BAC, FG, MG30-C11, vol. 2.31 The Bonne Entente, p. 8.32 Voir, par exemple, le menu de la conférence de Niagara, 10 janvier 1917,dans BAC, FG, MG30-C11, vol. 2.

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60 Mikel aux membres de l’AFC, 19 juin 1918, BAC, FCFA, MG28-I3.61 Mikel aux membres de l’AFC, 18 juillet 1918, BAC, FCFA, MG28-I3.62 Information tirée du procès-verbal de la première réunion de la BetterUnderstanding Association, 25 juillet 1918, BAC, FCFA, MG28-I3, et Mor-gan, The Canadian Men and Women of the Time.63 Mikel aux membres de l’AFC, 19 juin 1918, BAC, FCFA, MG28-I3.64 Mikel, discours dans le procès-verbal de la première réunion de la BetterUnderstanding Association, 25 juillet 1918, p. 17, BAC, FCFA, MG28-I3.65 Platt, dans Ibid, p. 17.66 J. Foy, Ibid, p. 31.67 Voir Le Droit, 2 septembre 1920, coupure de presse, BAC, FCFA, MG28-I3.68 Mikel dans le procès-verbal de la première réunion de la Better UnderstandingAssociation, 25 juillet 1918, p. 120, BAC, FCFA, MG28-I3.69 E.T. Essery, Ibid, p. 8.70 Mulloy , Ibid, p. 5, 9.71 Champagne, Ibid, p. 20.72 Edwards, Ibid, p. 43.73 Mulloy, Ibid, p. 8.74 Ibid, p. 87.75 Ibid, p. 95-96.76 Bélanger, Ibid, p. 100.77 Ibid, p. 102, 117.78 « Minutes of the “Better Understanding” meeting held at Ottawa », 28novembre 1918, p. 1-2, BAC, FCFA , MG28-I3.79 « Statement of the Case, as prepared by the Committee », p. 33-35, BAC,FCFA, MG28-I3.80 « Call for the Third Meeting », s.d., p. 19, BAC, FCFA, MG28-I3.81 Meighen à Mikel, le 18 août 1921, p. 37, BAC, FCFA, MG28-I3.82 « Call for the Third Meeting », s.d., p. 19, BAC, FCFA, MG28-I3.

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

ronto, William Briggs, 1912, p. 1053 ; Godfrey, « History of the Bonne En-tente », p. 13, BAC, FG, MG30-C11, vol. 2 ; et Le Devoir, 10 octobre 1916, p. 2.48 Voir Godfrey, « History of the Bonne Entente », p. 17, BAC, FG, MG30-C11, vol. 2 ; et Morgan, The Canadian Men and Women of the Time, p. 1189-1190.49 Voir Cameron, « The Bonne Entente Movement », p. 42.50 Hawkes à Laurier, 17 juin 1916, BAC, fonds Sir Wilfrid Laurier (ci-aprèsFL), MG26-G, vol.699.51 John Boyd, discours dans le procès-verbal de la deuxième réunion de laLigue de la Bonne Entente, 8-10 janvier 1917, p. 175, BAC, FG, MG30-C11,vol. 2.52 Dans Cameron, « The Bonne Entente Movement », p. 52.53 Voir Desmond Morton, A Military History of Canada, quatrième édition,Toronto, McClelland & Stewart, 1999 [1985], p. 143.54 Cameron, « The Bonne Entente Movement », p. 52-53.55 Voir R. Matthew Bray, « A Conflict of Nationalisms: The Win the War andNational Unity Convention, 1917 », Journal of Canadian Studies, vol. 15, no 4(hiver 1980-1981), p. 18-30, pour un résumé plus complet de la Win-the-Warand National Unity Convention. D’après Bray, « L’article de Cameron se mé-prend sur l’origine de l’idée de la bonne entente, et en conséquence sa descrip-tion de la relation entre les mouvements de la bonne entente et Win-the-Warrepose sur des bases fausses. » Voir la note en bas de page 2, p. 28. Je seraisd’avis comme Bray que Win-the-War et le mouvement de la bonne ententen’étaient pas « une seule et même chose ». Cameron a raison de faire observerqu’un certain nombre de membres anglophones sont partis en faveur deWin-the-War, mais il est exagéré de parler d’exode massif. La plupart desparticipants à Win-the-War n’avaient jamais participé au mouvement de labonne entente, et plus du tiers n’étaient ni ontariens ni québécois.56 Dans Cameron, « The Bonne Entente Movement », p. 53.57 Dans What Quebec Wants: Reply of La Presse to a Question from Ontario for theEnglish Speaking People of the Dominion, With a Foreword by John Boyd, Montréal,Librairie Beauchemin, 1918. Les commentaires de Boyd figurent égalementdans La Presse, 27 février 1918.58 Voir Cameron, « The Bonne Entente Movement », p. 52.59 Voir Le Droit, 2 septembre 1920, coupure de presse, BAC, FCFA, MG28-I3.

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96 Godfrey à Meighen,12 janvier 1924, BAC, FM, MG26-I, vol.100. « Je vousécris ceci parce que je sais que vous avez une grande influence sur l’honorableHoward Ferguson, entre les mains duquel repose la solution de cette ques-tion extrêmement épineuse. »97 Godfrey à Meighen, s.d.. Réponse à une lettre de Meighen du 24 janvier1924, BAC, FM, MG26-I, vol.100. Hawkes continua à prononcer des dis-cours, rédiger des textes éducatifs et de propagande ainsi que des éditoriauxfavorables au point de vue canadien-français.98 Note du 20 novembre 1925, BAC, Journaux de William Lyon MackenzieKing, consultés en ligne à http://king.collectionscanada.ca (28 juillet 2007).99 En fait, Meighen semble avoir reçu beaucoup de courrier de la part d’autresbonne-ententistes, notamment des sénateurs Beaubien et Belcourt. Cettecorrespondance révèle qu’il était très inquiet du fait que le problème avaitdivisé le pays selon une fracture partisane, et ce, très au détriment de sespropres conservateurs au Québec. Voir, par exemple, Meighen à Godfrey, 24janvier1924, BAC, FM, MG26-I, vol.100.100 Godfrey à Belcourt, 22 novembre 1923, CRCCF, FACFO, C2/97/10.101 Protocole d’entente de la Ligue de la Bonne Entente, 26 novembre 1925,p. 1, BAC, Fonds de la direction des corporations (ci-après FDC), RG95,vol.1172. Voir également la demande d’incorporation du 26 novembre 1925dans le même dossier.102 Lorans à Meighen, 1er février 1933, BAC, FM, MG26-I, vol. 178.103 Voir Lorans à Mackenzie King, 19 décembre 1930, BAC, Fonds MackenzieKing (ci-après FMK), MG26-J1, vol. 176.104 Ibid. Mackenzie King, Arthur Meighen, Rodolphe Lemieux, Éric Lapointe,Raoul Dandurand et les premiers ministres Taschereau et Ferguson, pourn’en nommer que quelques-uns.105 Ibid.106 BAC, MG26-I, Fonds Meighen, vol.178, bobine C3568, p. 111204. Loransà Meighen, 1er février 1933.107 Fait référence à diverses dates, 1927-1947, BAC, CBF , RG95, vol.1172. Laligue poursuivit modestement ses activités dans les années 1930 et au débutdes années 1940, mais lorsque Lorans, l’âme de l’organisation, mourut en1942, elle cessa ses activités au bout de quelques années.108 Cameron, « The Bonne Entente Movement », p. 47.

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

83 Dates diverses, p. 37-43, BAC, FCFA, MG28-I3.84 Morgan, The Canadian Men and Women of the Time, p. 84.85 Voir Patrice A. Dutil, « Against Isolationism: Napoléon Belcourt, FrenchCanada, and “La grande guerre” », dans David Mackenzie, dir., Canada and theFirst World War: Essays in Honour of Robert Craig Brown, Toronto, Universityof Toronto Press, 2005, p. 96-137.86 Même le Globe le qualifiait ainsi. Voir Morgan, The Canadian Men and Womenof the Time, p. 84.87 « Rapport des activités du comité exécutif, 12 et 13 avril 1923 », Centre derecherche en civilisation canadienne-française, Université d’Ottawa (ci-aprèsCRCCF), Fonds de l’Association canadienne-française de l’Ontario (ci-aprèsFACFO), C2/21/6.88 Ibid, p. 35-36. Comme l’explique Choquette, « Les hommes responsablesdu retour à la normalité des relations entre francophones et anglophonesentre 1918 et 1927 furent le sénateur libéral Napoléon Belcourt et les mem-bres de la Unity League of Ontario. […] Cette ligue fut l’instrument principaldu changement de l’opinion publique en Ontario pendant les années 1920. »Dans Robert Choquette, « Linguistic and Ethnic Factors in the French-IrishCatholic Relations in Ontario », dans Canadian Catholic Historical AssociationStudy Sessions, 39 (1972), p. 35-43.89 « Rapport des activités du comité exécutif, 12 et 13 avril 1923 », p. 35-36,CRCCF, FACFO, C2/21/6. Voir également « Rapport du comite exécutif, 9mai 1922 », p. 4-6, CRCCF, FACFO, C2/21/5.90 La Patrie, 31 janvier 1925, coupure de presse, CRCCF, FACFO, C2/257/8.91 L’Action catholique, 26 février 1925, coupure de presse, CRCCF, FACFO,C2/257/8.92 L’Action catholique, 6 février 1925, coupure de presse, CRCCF, FACFO, C2/257/8.93 Cameron, « The Bonne Entente Movement », p. 53.94 Godfrey à Meighen, 12 janvier 1924, BAC, Fonds Meighen (ci-après FM),MG26-I, vol.100.95 Godfrey à Meighen, s.d. Réponse à une lettre de Meighen du 24 janvier1924, BAC, FM, MG26-I, vol.100.

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130 Garneau, discours dans la transcription des délibérations de la deuxièmeréunion de la Ligue de la Bonne Entente, 8-10 janvier 1917, p. 110, 140, BAC,FG, MG30-C11, Vol. 2.131 « Certificat de membre de la Ligue “Bonne Entente du Canada” (Inc.) », 14mars 1928, BAC, MG28-I339.132 Voir Le Droit, 14 mars 1928, et l’Ottawa Citizen, 14 mars 1928.133 L’auteur tient à remercier Michael D. Behiels pour cette analyse.

Le mouvement de la bonne entente, 1916-1930

109 Mulloy à Godfrey, 11 août 1916, BAC, FG, MG30-C11, vol. 1.110 « Rien à faire avec Bourass[a]. » Hawkes à Godfrey, l7 juillet 1916, BAC,FG, MG30-C11, vol. 1. Voir également Mulloy à Godfrey, 2 août 1916, mêmevolume.111 Mulloy à Godfrey, 11 août 1916, BAC, FG, MG30-C11, vol. 1.112 Le Devoir, 10 octobre 1916, p. 1-2.113 Le Devoir, 15 janvier, p. 2.114 La Presse, 10 octobre 1916, p. 1.115 Le Droit, 16 mars 1918, p. 1.116 Cloutier à Mikel, 28 août 1920, p. 29, BAC, FCFA, MG28-I3.117 Le Devoir, 2 septembre 1920, p. 2.118 La Bonne Entente est mentionnée en passant dans L’Action française, vol.1, no 2, février 1917, p. 64.119 Ibid, p. 49.120 L’Action française, vol. 2, no 8, août 1918, p. 347.121 L’Action française, vol. 4, no 9, septembre 1920, p. 405.122 Voir Rumilly, Histoire de la province de Québec, vol. XXVI, p. 258-259.123 Transcription du Daily Ontario, s.d., p. 12, BAC, FCFA, MG28-I3. Recou-pement avec l’Intelligencer, 26 juillet 1918, coupure de presse, p. 10, BAC,FCFA, MG28-I3.124 Voir Le Nouvel Ontario, 7 février 1925 et L’Action catholique, 26 février 1925,coupures de presse dans CRCCF, FACFO, C2/257/8.125 Dutil, « Against Isolationism », p. 128.126 Cameron, « The Bonne Entente Movement », p. 50.127 Voir, par exemple, « This bi-racial country », transcription d’une émissionradiophonique de la chaîne anglaise de Radio-Canada par Jean I. Hunter, s.d.,datant probablement du milieu des années 1930, CRCCF, FACFO, C2/257/8.128 Godfrey, « History of the Bonne Entente », 1917, p. 21-22, BAC, FG,MG30-C11, vol. 2.129 Mikel aux membres de la FAF, 18 juillet 1918, dans BAC, FCFA, MG28-I3.

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COMPTES RENDUS

Antoine Compagnon. Les antimodernes, de Josephde Maistre à Roland Barthes. Paris, Gallimard,2005. 464 p.

Les historiens intéressés par les idées, attentifs aux con-cepts, à l’affût d’explications nouvelles qui rendraient le passémoins opaque, ont tout à gagner à lire certains collègues litté-raires. C’est qu’on ne lit pas seulement François Ricard ouPierre Nepveu pour en apprendre plus sur la littérature d’iciet d’ailleurs – même si leurs écrits sont très instructifs – maisbien davantage parce que, à chaque fois, on a le sentiment decroiser des esprits libres, de véritables humanistes qui trans-cendent, par l’essai, ce qu’on appelle pompeusement les« sciences de l’homme ». On les lit aussi pour l’élégance dustyle, la souplesse de la démonstration en même temps quepour leurs intuitions fortes sur notre temps. J’espérais retrou-ver ce plaisir de lecture en me plongeant dans le livre du ré-puté Antoine Compagnon, auteur de Les antimodernes, de Jo-seph de Maistre à Roland Barthes. Je souhaitais que cet ouvrage,découvert un peu par hasard, me fasse envisager autrementune tradition de pensée plus que discréditée par la modernitérugissante. Je n’ai pas été déçu.

Dans ce livre à la fois dense et généreux, cet historiende la littérature française, spécialiste reconnu de la troisièmerépublique des lettres, nous présente une tradition de penséeque l’on assimile généralement à la pure Réaction mais qui,de son point de vue, n’est autre chose que la modernité enaction. D’entrée de jeu, Compagnon distingue lesantimodernes des traditionalistes, des réactionnaires, voiremême des conservateurs qui ont proposé et qui proposenttoujours, dans l’ordre politique, de stopper la marche du temps

Mens, vol. VIII, no 1 (automne 2007)

Le Département d’histoirede l’Université Laval...

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manière des modernes. L’antimoderne ne parle pas au nomd’une caste aristocratique ou d’un parti, c’est au contraire unindividualiste qui use du droit de parole que lui confère lamodernité pour exprimer contre elle toute sa hargne. Exilésmalheureux, puis, souvent, « émigrés de l’intérieur », lesantimodernes se nourrissent de leur expérience personnelledu temps, de leur vie intérieure de sujets modernes, pourécrire des œuvres fortes et sans concessions. Paradoxalement,les antimodernes, ce sont donc ceux qui, avec force et véhé-mence, profitent les premiers de cette liberté de parole chère-ment acquise avec la modernité ; ce sont ceux qui ne crai-gnent pas d’être anticonformistes, qui agissent, souvent, ensolitaires face à la foule optimiste qui rejette ou comprendmal leur posture critique. C’est par ce paradoxe apparent queCompagnon en vient à qualifier l’antimodernisme de « mo-dernisme véritable » (p. 12) et les antimodernes, de « moder-nes en liberté » (p. 14).

Pour nous convaincre de cette thèse pour le moins auda-cieuse, Compagnon divise son ouvrage en deux parties biendistinctes et d’inégales longueurs. La première partie, la pluscourte, probablement la plus intéressante pour ceux qui nesont pas des spécialistes de l’histoire littéraire française, traitedes « idées ». En six chapitres, Compagnon tente de caracté-riser cette posture des antimodernes. À la fois historique – ilsprônent la contre-révolution –, philosophique – ils sont d’ar-dents critiques des Lumières –, morale – ils affichent un pes-simisme face à ce que l’avenir réserve –, religieuse – ils croientau péché originel –, esthétique – ils sont fascinés par le su-blime – et stylistique – ils pratiquent mieux que quiconque lavitupération –, la posture des antimodernes, tente de montrerCompagnon, aurait ses propres canons. La seconde partie del’ouvrage est, quant à elle, consacrée aux « hommes » qui,depuis la Révolution française, auraient le mieux incarné la

Comptes rendus

ou qui prônent le retour aux valeurs anciennes, sinon à l’An-cien régime. Les antimodernes que nous présente ce profes-seur de l’Université Columbia sont bel et bien des modernes,mais des « modernes en délicatesse avec les Temps moder-nes » (p.7), des « Reluctant Moderns » (p. 216), c’est-à-dire desmodernes qui doutent, des modernes déchirés, des modernesambivalents qui refusent de souscrire aveuglément aux dog-mes qu’on associe généralement à la modernité : progrès, ra-tionalisme, déterminisme mécaniste, matérialisme. En mêmetemps, ces antimodernes savent qu’on ne pourra jamais reve-nir en arrière, qu’on ne pourra jamais « défaire, selon la for-mule célèbre de Paul Bourget, l’œuvre meurtrière de la Révo-lution française ». Ces antimodernes sont conscients que lamodernité a triomphé, ils ne considèrent pas cette victoirecomme un simple accident de l’histoire. Ils craignent cepen-dant que ce triomphe ait un goût amer. Cette crainte sourde,ce « fatalisme libéré du ressentiment » (p. 444), les amène à sebattre, avec l’énergie du désespoir, pour ne pas que cettemodernité ne fasse taire, pour toujours, les voix du passé, pourne pas qu’elle balaie du revers de la main les héritages accu-mulés au fil des siècles. En d’autres termes, si l’antimoderneest pris par le mouvement de l’histoire, il semble « incapablede faire son deuil du passé » (p. 13). Une optique que résumemagnifiquement Roland Barthes qui se présenta, à la fin de savie, comme le parfait représentant de « l’arrière-garde del’avant-garde » : « être d’avant-garde, précisa-t-il un jour, c’estsavoir ce qui est mort ; être d’arrière-garde, c’est l’aimer en-core ». (Cité dans p. 13.)

L’antimoderne est aussi un moderne parce que sa nos-talgie de l’Ancien régime, sa mélancolie face à ce qui dispa-raît de façon irrémédiable, sa vision idyllique des formes or-ganiques de la vie sociale d’autrefois, d’un mot sa postureombrageuse devant l’optimisme progressiste, s’exprime à la

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ment moderne de l’enrégimentement, est tout à fait dans l’or-dre des choses, selon Compagnon, car les antimodernistes sontde véritables écrivains pour qui l’impossibilité à réformer con-crètement le monde moderne est « la condition de possibilitéde la poursuite indéfinie de l’entreprise littéraire » (p. 445).Cela explique pourquoi Compagnon n’inclut pas dans sa tra-dition antimoderniste des écrivains comme Maurras ou DrieuLa Rochelle qui, dans les deux cas, vont prendre clairementparti qui pour la restauration monarchique, qui pour le fas-cisme.

Ce confinement de l’antimodernisme au champ litté-raire constitue l’une des limites de l’étude d’Antoine Compa-gnon. On aurait souhaité qu’il creuse davantage, dans la pre-mière partie de l’ouvrage, cette distinction tranchée entrel’antimodernisme et le conservatisme. De même, le conceptde « modernité » aurait mérité une vraie définition. Compa-gnon semble tenir pour acquis que celle-ci débute avec laRévolution française. Or, à tout le moins sur le plan de lachronologie historique, on a longtemps fait débuter la « mo-dernité » avec la renaissance. Cela dit, pour qui cherche à res-saisir la pensée occidentale des deux derniers siècles autre-ment qu’à travers les éternels couples Progrès/Réaction, Gau-che/Droite, Modernité/Ancien régime, le livre d’AntoineCompagnon est à la fois pertinent et stimulant. Il fera décou-vrir, ou redécouvrir, des essais pénétrants d’auteurs françaisqui, sans le jargon et l’enflure des postmodernistes, propo-sent des critiques pertinentes de la modernité.

Éric BédardTélé-Université

Université du Québec à Montréal

Comptes rendus

tradition antimoderne. On ne s’étonnera guère de retrouverdes auteurs comme de Maistre, Chateaubriand ou Péguy.D’autres noms, cependant, surprennent ou seront moins spon-tanément associés au camp des « antimodernes » ; qu’on penseau critique et historien Albert Thibaudet et, surtout, à RolandBarthes, généralement associé à l’avant-garde telquelienne.Cette seconde partie du livre de Compagnon a moins d’unitéque la première. Ses sept chapitres sont d’inégales longueurset la volonté de démontrer l’antimodernisme des auteurs n’estpas toujours évidente. Plusieurs des portraits offerts sont fas-cinants – ceux de Péguy, de Thibaudet et de Barthes m’ontsemblé les plus riches – mais, d’un chapitre à l’autre, certai-nes digressions érudites, pas toujours pertinentes à premièrevue, nous éloignent du thème du livre.

Pour apprécier l’ouvrage d’Antoine Compagnon et com-prendre pourquoi il tient tant à distinguer l’antimodernismedu traditionalisme ou du conservatisme, il faut garder à l’es-prit qu’il s’intéresse d’abord et avant tout à une tradition lit-téraire, non pas politique. Une autre sous-thèse du livre estque cette tradition antimoderniste semble mieux résister autemps que la littérature engagée qu’incarnent des auteurscomme Lamartine, Zola ou Aragon. Comme le soutient Com-pagnon, qui reprend ici une hypothèse de Thibaudet, tout sepasse comme si les véritables opposants à l’air du temps etaux valeurs dominantes de l’époque s’étaient réfugiés, commeau XVIIIe siècle, dans le monde des lettres. Ce refuge dans lemonde des lettres découle également d’un rapport particulierau politique. Selon Compagnon, les véritables antimodernessont ceux qui vont toujours refuser d’être embrigadés par unecause ou un parti. Face à la politique, les antimodernes fontsouvent figure de dandys hautains ou de « francs-tireurs », leur« apolitisme » aurait même quelque chose « d’esthétique » (p.446). Ce refus du politique, qui est aussi une peur typique-

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Comme c’était le cas dans les recueils précédents,comme The Maple Leaf Forever (1971), l’écriture de Cook estmarquée par un souci d’exactitude historique et de précisionpolitique. Plus encore, sa prose est libre de cette pseudo-so-phistication qui sert davantage le nombrilisme de l’auteur quel’intérêt du lecteur. Les essais de cette collection sont à la foissolides scientifiquement et accessibles. La perspective choi-sie, large et ouverte, ne cache toutefois pas le point de vue del’auteur. Cook jumelle différents styles, allant de la narrationdétaillée d’événements historiques à des réflexions person-nelles sur les personnages contemporains et les controversesqui ont marqué leur carrière. Le résultat démontre plusieurséclairs de clairevoyance dont la force narrative est soutenuepar une voix douce et une grande clarté.

Durant sa jeunesse passée dans les Prairies, les con-tacts de Cook avec les francophones étaient, de son aveumême, largement limités aux patinoires, aux terrains debaseball et à quelques cours de langue sans grande méthode.Ce n’est que plus tard qu’il s’est intéressé au Québec. Il par-tage ainsi l’évolution de sa relation avec le Québec et ce quiest québécois. Cette dernière a commencé à distance dans lecadre d’un séminaire donné à l’université Queen’s portant surce qu’on appelait à l’époque « le Canada français ». Ce sémi-naire, se rappelle-t-il avec plaisir, « opened a whole new worldto me » (p. x). Dans un autre essai, Cook se remémore avecnostalgie comment son apprentissage des questions québé-coises s’est poursuivi en Ontario alors que Arthur R. M. Lower(un de ses professeurs et lui-même un historien célèbre) avaitrecommandé à ses étudiants de lire un journal de langue fran-çaise au moins une fois par semaine.

Ainsi débuta la relation d’amour-haine que Cook a en-tretenue avec l’influent quotidien Le Devoir, qu’il appelle« Quebec’s Third Party » (p. 133). Concernant l’expérience

Comptes rendus

Ramsay Cook. Watching Quebec: Selected Essays.Montréal et Kingston, McGill-Queen’s UniversityPress, 2005. 225 p.

L’éminent historien Ramsay Cook, directeur général duDictionnaire biographique du Canada, est aussi membre du Co-mité consultatif de la revue Mens. Par souci de transparence,je dois avouer que j’en suis également. Par un heureux effetde l’ordre alphabétique, mon nom précède d’ailleurs le siensur la page technique de la revue. Là toutefois commence ets’arrête ma prétention à la supériorité. Cook a non seulementaccompli un travail important dans le monde de l’édition sa-vante et fait de la traduction pour le Canadian Forum à uncertain moment, mais il est plus encore un historien intellec-tuel accompli (à preuve son ouvrage primé intitulé TheRegenerators [1985]) et un citoyen engagé (pensons à l’intro-duction qu’il a rédigée pour Approaches to Politics (1970), laversion anglaise de l’ouvrage de Pierre Elliott Trudeau inti-tulé Les cheminements de la politique). De l’avis de presque toutle monde, il est un des intellectuels publics canadiens les plusconnus.

Pour les anglophones, Ramsay Cook est un des inter-prètes les plus réputés de l’histoire, de la politique et de laculture du Québec. Il a acquis une expertise en la matière ettravaille à renseigner les Canadiens au sujet du Québec, deson passé et de son présent, par des textes relativement suc-cincts, accessibles et vivants. Les essais contenus dans ce re-cueil sont à la hauteur de la réputation de leur auteur. S’ilscouvrent l’histoire du Québec en général, la très grande majo-rité porte plus spécifiquement sur la période mouvementéede la Révolution tranquille, de sa genèse jusqu’à l’échec del’Accord du Lac Meech quelque quatre décennies plus tard.

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too little [...] its unity is strongest when its various nationalismsremain muted. » (p. 15)

Ces essais ne manquent ni du sérieux caractéristique dutravail universitaire ni d’intuitions passagères. Néanmoins, ilsmettent aussi en lumière l’admiration que Cook a pour le cou-rage intellectuel de Pierre Trudeau, à qui il donne le créditd’avoir rédigé l’introduction du recueil La grève de l’amiante(1956), « the finest piece of political thought and ideologicalanalysis written by a Canadian » (p. xii), ainsi que son affec-tion pour « the gentle accent, penetrating analysis, and uni-que style » d’André Laurendeau (p. 117). Comme penseurs,ces hommes ont professé une forme particulière de loyautéenvers le Québec. Toutefois, insiste Cook, ni l’un ni l’autrene pouvait s’allier aux promoteurs de la séparation du Qué-bec puisque ce projet reposait « on a totalitarianism enforcedon them by their commitment to nationalist absolutes » (p.11).

La plupart des essais de ce livre ont déjà été publiés.Dans ce volume, il n’y a que l’introduction et un chapitreportant sur la Commission royale d’enquête sur le bilinguismeet le biculturalisme qui sont nouveaux. Une part importantedu matériel date ainsi du milieu des années 1960. Hormisquelques clarifications ponctuelles, Cook n’a pas revu la ma-jorité de ses articles. Il n’a pas vu la nécessité de leur apporterdes changements fondamentaux puisque ses positions sur laplupart des enjeux importants pour la compréhension du Qué-bec n’ont pas véritablement changé. Il demeure admirable-ment constant, sans être désagréablement insistant.

Ces essais, dont quelques-uns ont plus de quarante ans,se tiennent encore suffisamment pour être réunis, publiés etrelus. Ils constituent un hommage à l’érudition historique deCook sur le sujet, à sa grande capacité d’observation politi-que, à son talent pour les analyses judicieuses et au soin qu’il

Comptes rendus

« puzzling but exhilarating » de dévorer les opinions émisespar les différents éditorialistes, pensons entre autres à GérardFilion, André Laurendeau et Claude Ryan, Cook écrit :

Being from Winnipeg, where freight rates, grain futu-res, and the threat of Saskatchewan socialismdominated the pages of the local newspapers, I wasimmediately carried away by the endless discussionsof Catholicism, corruption, centralization, and ClarenceCampbell. (Naturally, Le Devoir’s perspective wasnationalist, not athletic.) Soon I discovered that even ahotel named the Queen Elizabeth could excite FrenchCanadians to a degree that the queen had never excitedme. (p.134)

En fait, son aversion bien sentie du nationalisme et desexcès politiques se retrouve dans plusieurs chapitres. Cookretrace l’origine de cette façon de penser dans ses lecturesintensives concernant la politique internationaliste et les théo-ries de la liberté, partant de celle de lord Acton (p. x) jusqu’àcelle de George Orwell (p. xii-xiii), lectures qu’il a faites bienavant de s’intéresser sérieusement à l’étude du Québec.

Selon Cook, le Canada est le produit de la conciliationet du compromis, la réussite quotidienne des gens modérés(voir p. 184-185). Une approche « highly empirical » du fédé-ralisme lui apparaît être la seule alternative réaliste pour dé-fendre l’unité nationale (p. 13). Cette prise de position néces-site, en retour, la reconnaissance de la différence du Québecainsi qu’une préférence pour les réformes pratiques plutôt quepour les débats constitutionnels (p. 15). En ce sens, pour Cook,« watching Québec », afin de comprendre ses motivations pro-fondes, n’est rien de moins qu’une forme d’expression du pa-triotisme canadien. Il considère que « Contrary to the generalbelief, Canada’s problem is one of too much nationalism, not

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Contrastant avec les histoires de l’art, des lettres ou dessciences, qui s’attachent aux grandes œuvres et à leurs auteurs,cette approche s’intéresse aux perceptions de la chanson oude la bande dessinée comme à celles de réalisations universi-taires ou artistiques, à celles d’épreuves sportives, etc. (p. 10).Car ce qu’elle cherche à retenir de ces activités n’est pas fonc-tion de jugements de valeur de leurs historiens éventuels maisdes attitudes du public, de l’évolution de la réception dans lesgroupes concernés (p. 13-14, également Pascal Ory, L’entre-deux-Mai. Histoire culturelle de la France. Mai 1968-Mai 1981,1983, p. 9-10). Sans négliger les espaces de création incluantréseaux, hiérarchies, etc., l’accent porte sur les milieux d’ac-cueil, depuis l’éducation et l’information jusqu’à la réceptionproprement dite (p. 84-88).

Après avoir rappelé le passage de l’histoire des mentali-tés à l’histoire culturelle (p. 36-37) tout en gardant pour celle-ci la formule de la première que « tout est source » (p. 45-47),Ory évoque les questionnements culturels en insistant sur lesmesures, les échantillons qu’ils supposent dans le cas de ladiffusion et de la réception plus particulièrement (p. 52-53,88).

Aux yeux de l’auteur cette démarche correspond au« projet culturaliste » ou à la spécialité « du culturaliste » (pas-sim), dont la « délimitation » est « de plus en plus nette » (p.38).Comme si Braudel, pour ne citer que lui, n’avait pas reconnudepuis longtemps « l’immense extension » que prenait le sensanthropologique du mot culture (Écrits sur l’histoire II, 1990, p.270). En fin de parcours, Ory indique toutefois qu’au contactde l’anthropologie, l’histoire culturelle s’intéresse aussi auxusages ou aux apparences dans l’habitat, le vêtement, l’ali-mentation ; ou aux représentations des genres, des corps, desmaladies (p. 90-100).

Comptes rendus

met à faire des pronostiques. Ces conclusions sont encore àpropos aujourd’hui puisqu’elles ont passé l’épreuve du temps.

Kevin J. ChristianoDépartement de sociologie

University of Notre Dame

Traduction : Michel Ducharme

Pascal Ory. L’histoire culturelle. Paris, PressesUniversitaires de France, 2004. 127 p. (Coll. « Quesais-je ? », no 3713).

On ne saurait s’attendre à ce que le vingtiémiste qu’estOry nous offre dans ce Que sais-je ? une esquisse d’histoire descultures ou des cultures de l’Hexagone. Il nous présente plu-tôt sa conception de la recherche en histoire culturelle de laFrance du dernier siècle. Ses lecteurs la connaissent bien. Elleprivilégie les représentations des productions « ordinaires » (p.13-14, 78) incluant les milieux dont elles émanent (l’offre) entenant grand compte de la réception de l’ensemble des activi-tés (l’accueil). Ory la qualifie d’histoire sociale des représen-tations, un peu comme Robert Mandrou parlait naguère d’his-toire sociale des mentalités, quoique le social intervienne icipour préciser des « effets de réel », des formes symboliques etnon comme éclairage explicatif (p. 10 et 13). Il reste que cedéplacement du « regard » vers les modes d’expression est dif-ficilement dissociable des pratiques (p. 78, également RogerChartier, dans Annales E.S.C., novembre-décembre 1989, p.1510-1513) et parfois ne l’est absolument pas(Christophe Prochasson, dans Annales H.S.S., juillet-août2003, p. 885).

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le mental au grenier d’une construction d’ensemble. Il s’estexpliqué sur ce point dans Idéologies et mentalités (2e éd., 1992,p. 23-25).

Hubert WateletUniversité d’Ottawa

Jean Morency, Hélène Destrempes, Denise Merkleet Martin Pâquet, dir. Des cultures en contact.Visions de l’Amérique du Nord francophone.Québec, Nota Bene, 2005. 552 p.

Quatre directeurs, plus d’une trentaine d’auteurs, sixparties et 552 pages, voilà ce que l’on note d’abord de cetimposant collectif. On découvre ensuite que l’ouvrage est lefruit du travail d’un réseau de chercheurs disséminés à l’échellede la planète et dont les problématiques se rencontrent à uncarrefour de la recherche sur la francophonie américaine : laChaire de recherche du Canada en analyse littéraireinterculturelle de l’Université de Moncton. Qu’ils soient lefait de linguistes, d’historiens ou de littéraires, les textes sontautant de regards croisés sur l’Amérique française traversée,rêvée, rencontrée, dite et écrite. Au fil des pages, il n’y a pasune Amérique française mais les francophonies d’Amérique,toutes porteuses des rencontres avec l’Autre.

Les relations tissées par les francophones du continentet les héritages métissés nés dans le temps et dans l’espaceaméricain, voilà ce dont l’équipe de chercheurs gravitantautour de Jean Morency rendent compte. À certains égards,les récits et les analyses rapportés font penser aux journauxde bord des ethnologues qui notent l’artefact, un souvenir deterrain, un instantané, un chant, un poème, une image, une

Comptes rendus

Ce faisant, Ory minimise une ambivalence du mot cul-ture fort significative dans l’Hexagone des dernières décen-nies. D’une part, les milieux politiques et une partie de l’élitecontinuent d’associer le terme aux idées d’enrichissement del’esprit et d’accessibilité du patrimoine si brillamment incar-nées par Malraux. D’autre part, lors de la décolonisation despeuples du Sud en particulier, Claude Lévi-Strauss et d’autresanthropologues proposèrent de penser la culture tout autre-ment. C’est ainsi que celle-ci devint à l’UNESCO un ensem-ble de valeurs et de connaissances propres à une communauté,indépendamment de tout enseignement (Hubert Watelet,« Réflexions sur le choc des cultures », dans Espace et culture,dirigé par Serge Courville et Normand Séguin, 1995, ou danswww.planetagora.org). Or le silence qui entoure cette dualitécontribue à l’incompréhension de certaines crises socialescomme celle de novembre 2005 (Yann Moulier Boutang, Larévolte des banlieues, Éd. Amsterdam, 2006).

Cette introduction omet aussi de dire qu’aux États-Uniset aussi en France, d’excellents chercheurs restent insatisfaitsd’une conception de la culture trop assimilable aux représen-tations. Celles-ci restent liées au social à moins de les imagi-ner « sur coussin d’air », selon une expression bien connue deMichel Vovelle. Il s’agit donc de repenser l’histoire culturelleen évitant les déterminations socio-économiques d’autrefois(Beyond the Cultural Turn, dirigé par Victoria E. Bonnel et LynnAvery Hunt, 1999, également Antoine Prost et Alain Croix,dans Pour une histoire culturelle, dirigé par Jean-Pierre Rioux etJean-François Sirinelli, 1997, p. 69-71 et 143-146).

Plutôt que d’évoquer en terminant l’abus de parony-mes dans ce livre, voici deux exemples indiquant qu’il est parfoisécrit rapidement : p. 22, ce n’est pas Paul Mantoux, mais Ar-nold Toynbee qui « inventa » l’expression « The IndustrialRevolution » (en 1880-1881) et p. 35, Vovelle n’a pas relégué

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phones, réduisant sans états d’âme ces derniers au statut decommunautés linguistiques perdues dans le grand tout…Métissées hier, assimilées demain. Morituri te salutant !

D’un point de vue plus formel, certains lecteurs tire-ront profit du côté normatif et théorique de plusieurs textesqui proposent une recension exhaustive et à jour des ouvra-ges clés sur les approches conceptuelles empruntées, notam-ment, de l’interculturalisme, de la reconnaissance, de l’alté-rité.

Afin de découvrir les perles que recèle l’ouvrage, il fautse placer en état de réceptivité et aller au-delà des titres, quisont souvent répétitifs et ampoulés. Ainsi, parmi les contri-butions particulièrement remarquables, soulignons celle deHans-Jurgen Lüsebrink qui, à partir de L’almanach du peuple,montre comment cet incontournable des maisons canadien-nes-françaises pendant plus de la moitié du XXe siècle consti-tuait une fenêtre sur le monde et comment, par conséquent, ilposait l’amorce d’une rencontre avec l’Autre. On voit, parexemple, l’évolution de la figure du voisin états-unien à tra-vers des blagues, des caricatures ou des conseils pratiques.C’est en outre une source extrêmement riche qui apparaît làpour les chercheurs en histoire culturelle.

Martin Pâquet offre des pages érudites dans lesquellesil suggère, selon une approche à la fois anthropologique etstructuraliste, que l’aspect ludique du parlementarisme bri-tannique a sans doute facilité le processus d’intégration de laculture politique britannique au Québec. Presque sans dou-leur, les citoyens du XIXe siècle auraient intériorisé la méta-phore du jeu et ils auraient accepté, dès lors, leur position etleur rôle dans le jeu. Resituée dans la globalité du collectif, laproposition de Pâquet est que l’intégration des codes de l’autrepeut être relativement harmonieuse.

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tirade… L’oralité, mode d’expression souvent privilégié parla majorité des francophones du continent, est abordée par lethéâtre, le cinéma, les contes et les chansons. Quant aux dis-cours plus intellectuels, historiens et littéraires s’en sont char-gés.

Les champs exploratoires ouverts par ce réseau de cher-cheurs apparaissent alors nombreux et vastes. Les probléma-tiques abordées font en effet émerger des objets d’analyse in-nombrables. Les sujets d’étude, pour leur part, ne sont passans nous inquiéter un peu, car si l’on convient, comme lamajorité des collaborateurs, que le discours essentialiste etculturaliste – longtemps garant de la survivance des commu-nautés francophones – n’a plus le pouvoir d’assurer la cohé-sion des francophones, les arguments des auteurs ne nousconvainquent quand même pas que le discours interculturelalternatif soit une avenue porteuse.

Le refus d’une essence francophone à laquelle seraientréductibles les identités est, à notre avis, l’axe autour duquels’organise le travail des auteurs. Ainsi, la langue qui sert sou-vent d’élément de définition identitaire est, dans la plupartdes textes du recueil, « désancrée ». L’on comprend de cetteexpression qu’une mise à l’arrière-plan de la perspective lin-guistique est la stratégie pour s’attarder davantage aux rela-tions et aux contacts qui s’établissent, avec ou sans elle, entreles cultures. Désancrer la langue permettrait donc l’émergenced’une identité métissée ouverte à l’Autre, consciente de sonaméricanité. L’expérience américaine, en ce sens, est centraleet révélatrice – au sens presque mystique de révélation.

Le choix idéologique de contourner l’essentialisme dela langue pour aborder plutôt l’américanité et « éviter les tra-quenards de la logique identitaire » (p. 22) se justifie. Parado-xalement, cette option, en principe louable, entraîne une ap-proche purement formelle des réalités vécues par les franco-

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comme un dérapage, contrôlé certes, mais pour combien detemps ? Combien de temps à Lafayette ou à Timmins tien-dront des « identités [devenues] stratégiques » (p. 374) ? Ences lieux d’Amérique, l’épreuve de l’altérité constitue une stra-tégie de survie.

On goûte dans l’ensemble les rencontres auxquelles nousconvient les textes. Sur les traces des francophones du conti-nent, on entend les dialogues établis avec l’Autre : l’Amérin-dien, le traducteur anglais, l’immigrant, le créole de la Loui-siane. On sent le regard de l’Autre sur soi : le regard du bossde la facterie ou celui des notables des « Petits Canadas ». Autantde regards qui stigmatisent et forcent une réponse ou un geste.En réalité, il serait injuste de ne pas insister sur cette qualitéde l’ouvrage de montrer, sous des angles très concrets,multidisciplinaires, généralement originaux le dialogue cons-tant entre Soi et l’Autre. Le créneau de l’interculturel peutnous apparaître agaçant, mais la réflexion qu’il oblige sur leva-et-vient des regards de Soi sur l’Autre ; du regard de l’Autresur Soi et des traces laissées dans les textes, dans les imageset dans les représentations du monde est stimulante et néces-saire.

Marie LeBelDépartement d’histoire

Collège universitaire de Hearst

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Dans un texte synthétique qui puise à l’histoire et à lalittérature, Jean Morency, un des initiateurs du projet, montrel’affirmation de l’américanité dans l’œuvre d’écrivains trans-formés par leur expérience états-unienne. Or, si l’épiphanieaméricaine des figures médiatrices identifiées par l’auteur nouslaisse dubitatif, le texte de Morency a le mérite de suggérerl’idée-force qui lie la plupart des collaborations à l’ouvrage :l’américanité est la nouvelle essence des francophones ducontinent.

Paola Puccini de l’Université de Bologne signe une ana-lyse magnifiquement documentée du film La Sarrasine deBruno Ramirez et de Paul Tana. L’auteur, suivant la tendancedu recueil, substitue dans son analyse la dimension culturelleà la dimension linguistique – trop ethnocentrique –, mais ellesouligne bien comment, dans certains contextes, la substitu-tion se légitime ou non. Puccini admet que le dialogismeinterculturel, idéalement souhaité, ne fonctionne pas imman-quablement. Son approche ethnologique évoque les rituelsd’entrée dans la culture de l’autre, elle ménage intelligemmentles sensibilités en nuançant les procédés de relationsinterculturelles. Citant Camilleri, l’auteur fait alors del’interculturel un « savoir-être », – nous dirions même, un sa-voir-vivre –, « à partir duquel on découvre la bonne manièred’utiliser le “savoir” et l’on invente, au gré des situations, lesavoir-faire adéquat » (p. 344).

Il y a, enfin, dans ce recueil des constats qui ne man-quent pas d’être douloureux. Nous pensons à ce que révèlentles travaux des linguistes du collectif – et surtout le textepercutant d’Anne Malena (p. 373 à 390) – qui ont identifié dedangereuses stratégies de survie adoptées par les minoritai-res. Le « code switching », entre autres, qui implique que lesfrancophones (dé)jouent l’Autre en contrôlant – pour un temps– les emprunts linguistiques à la langue de ce dernier. Il y a là

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d’intellectuels, Rodolphe Mathieu aurait été victime de sonavant-gardisme et déçu du milieu intellectuel et artistique.Les autres explications concernent le manque de moyens dediffusion, les trop grandes exigences commerciales, l’hostilitéde la critique, et enfin, l’absence de reconnaissance officielledu statut de compositeur par la société et les institutions del’époque.

La thèse et les arguments de l’auteure rendent l’ouvragepertinent pour un lectorat plus large que les seuls spécialistesde l’histoire de la musique. Cependant, il souffre de quelquesdéfauts de structure : certaines parties sont centrées sur lepersonnage de Mathieu, sa pensée, ses réseaux de sociabilitéet sa carrière, alors qu’à d’autres moments, le lecteur a l’im-pression que Mathieu sert de prétexte à une minutieuse des-cription de l’univers musical et culturel montréalais de la pre-mière moitié du XXe siècle. Si le mélange peut être justifié parla richesse de la contextualisation, il est parfois maladroit, etle lecteur s’interroge sur la pertinence de certains détails. Parexemple, dans le chapitre « Les années de formation », Lefeb-vre parle de l’enfance et de la famille de Rodolphe Mathieu,ainsi que du monde musical montréalais au début du XXe siè-cle. Plusieurs informations permettent de mieux cerner lepersonnage : sa formation musicale, sa pensée libérale et athée,sa participation aux débats entre les modernistes et les te-nants du folklore, etc. Cependant, nul besoin de connaître lesalaire annuel de l’institutrice de l’école de rang qu’il a fré-quentée pour s’imaginer les conditions dans lesquelles il a reçuson instruction primaire. De même, Marie-Thérèse Lefebvredonne souvent des détails d’une lecture fastidieuse au sujetdes relations unissant des musiciens canadiens-français eteuropéens, comme des listes de gens présents à certaines soi-rées ou fréquentant un lieu en particulier, des programmes deconcerts, la liste des occupations professionnelles d’un criti-

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Marie-Thérèse Lefebvre. Rodolphe Mathieu.L’émergence du statut professionnel decompositeur au Québec, 1890-1962. Sillery,Septentrion, 2004. 278 p.

Rodolphe Mathieu. L’émergence du statut de compositeur auQuébec, 1890-1962 a été récompensé par le Conseil québécoisde la musique, qui lui a décerné le prix Opus en 2005 en tantque livre de l’année. La pertinence de cet ouvrage ne fait aucundoute dans le domaine de l’histoire musicale et il contribueutilement au débat sur la modernité culturelle du Québec.L’auteure, Marie-Thérèse Lefebvre, musicologue à l’Univer-sité de Montréal, s’est donnée plusieurs objectifs. À traversl’analyse de la carrière d’un musicien et compositeur original,autodidacte et libre-penseur, elle cherche à comprendre com-ment le statut de compositeur a acquis son autonomie profes-sionnelle. Lefebvre n’hésite pas à placer Rodolphe Mathieuparmi les précurseurs de la modernité en raison de sa philoso-phie individualiste de la création musicale et de l’importancequ’il accordait à sa fonction de compositeur. Ses idées allaientà l’encontre des tendances clérico-nationalistes qui préconi-saient l’inspiration folklorique et visaient l’émergence d’unevéritable musique canadienne. Plusieurs intellectuels influentsde l’époque, dont Édouard Montpetit, soutenaient aussi uneconception utilitariste de la musique et valorisaient peu lacomposition, préférant soutenir l’interprétation. Marie-Thé-rèse Lefebvre cherche aussi à expliquer pourquoi Mathieu n’apas persévéré dans la composition et pourquoi son œuvre futécartée et oubliée. Ses réponses reposent principalement surla domination de la pensée nationaliste et sur le poids de lareligion catholique, des courants idéologiques peu ouverts àl’individualisme moderne auquel adhérait Mathieu. Réagis-sant contre les tendances nationalistes et folklorisantes etn’étant appuyé que par un petit cercle d’amis, d’artistes et

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pertinente de l’ouvrage car les positions artistiques et idéolo-giques de Mathieu sont au cœur du raisonnement qui en faitun moderne et un marginal. Lefebvre situe Rodolphe Mathieupar rapport au régionalisme, au folklore et au nationalisme.En refusant de se fondre dans ces courants idéologiques etesthétiques, Mathieu est progressivement ostracisé par sonmilieu. Lefebvre montre ainsi l’existence de relations impor-tantes entre idéologies dominantes, esthétiques valorisées etphilosophies de la création légitimées par le milieu intellec-tuel et artistique. Il y a là une piste prometteuse concernant laconstruction sociale et intellectuelle d’une culture dite natio-nale, évoquée à plusieurs reprises dans l’ouvrage. Cependant,ce propos n’est pas soutenu par une analyse très étoffée desidéologies. Il est difficile d’en tenir rigueur à l’auteure, quin’est pas une spécialiste de l’histoire des idées. Mais il esttout aussi difficile de passer sous silence les faiblesses del’ouvrage découlant de ce fait. Par exemple, on remarque l’im-précision du vocabulaire désignant la société où évoluait Ro-dolphe Mathieu : les termes québécois, canadien-français,canadien et montréalais sont tous employés pour désigner lemême milieu musical et social, sans que l’on sache si celavient de l’utilisation simultanée de ce vocabulaire par les ac-teurs de l’époque. Quant au clérico-nationalisme si fréquem-ment évoqué, il ne fait pas l’objet d’une description substan-tielle et d’une contextualisation appropriée. Une imprécisionsemblable entoure l’usage du mot modernité. Si on apprendque le modernisme de Rodolphe Mathieu était le fruit de sonindividualisme, de son athéisme et de son libéralisme, cescaractéristiques philosophiques ne sont pas définies avec pré-cision et on se demande si elles étaient propres à tous ceuxqui se réclamaient de la modernité au début du XXe siècle.Les caractéristiques esthétiques des styles musicaux moderneet traditionnel ne sont pas plus claires. La thèse avancée par

Comptes rendus

que influent, la description des relations entre le pianiste Al-fred Laliberté et le musicien russe Scriabine et entre Rodol-phe Mathieu et les membres de la famille Laurendeau, etc.Elle relate aussi quelques débats ayant entouré la création duConservatoire de musique et de la Société des concerts sym-phoniques de Montréal. Ces récits insérés dans la biographieet ces listes ne sont pas dénués d’intérêt, surtout pour les spé-cialistes de l’histoire musicale, qui apprécieront la descrip-tion de réseaux complexes et l’évocation de longs débats ayantentouré la mise en place d’institutions aujourd’hui considé-rées comme essentielles à la vie musicale au Québec.

Toutefois, le lecteur ne saisit pas toujours en quoi cesdétails contribuent à répondre aux questions soulevées sur lestatut de compositeur ou la modernité de Rodolphe Mathieu.Ainsi, le chapitre 4, « Les “retours de Paris” dans le milieumontréalais », comporte quelques-unes des pages les plus in-téressantes du livre, où est décrit le rôle de Rodolphe Ma-thieu en tant qu’animateur culturel et participant aux débatsintellectuels et esthétiques. Cependant, cette partie est précé-dée d’une mise en contexte sur les années 1920 et de détailssur l’émergence d’une société de musique contemporaine. Elleest suivie d’une assez longue section sur André Laurendeau,évoquant ses études musicales (il fut l’élève de RodolpheMathieu) et son désir de faire carrière dans la musique. Cemême chapitre vise aussi à expliquer pourquoi Mathieu a cesséde composer. C’est beaucoup pour un seul chapitre, et l’infor-mation aurait pu gagner en clarté si elle avait été organiséeautrement : par exemple, plusieurs éléments contextuelsauraient pu être regroupés dans un seul chapitre.

La partie qui nous semble la plus importante s’intitule« Mathieu : un animateur culturel au centre des débats ». Pourceux qui s’intéressent à la vie intellectuelle et culturelle duQuébec du début du XXe siècle, il s’agit de la portion la plus

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terrain du passé très récent et il faut savoir gré à Behiels del’avoir fait. Son livre sera très utile, non seulement aux spé-cialistes des communautés de langue officielle, mais aussi àquiconque s’intéresse à l’évolution constitutionnelle du Ca-nada.

Dans ses travaux antérieurs, Behiels nous a habitués àune écriture engagée en faveur d’une conception fédéralistede l’histoire canadienne et son dernier livre ne déçoit pas àcet égard, comme en témoigne le choix de son préfacier, lesénateur Serge Joyal. La recherche ayant mené à la rédactiondu livre est exhaustive et la narration descriptive de Behielscolle aux sources ; l’auteur ne peut toutefois s’empêcher d’in-sérer de brefs commentaires qui témoignent de ses partis pris.Contrairement à ce qu’on pourrait penser, ses héros ne sontpas les hommes politiques libéraux, Pierre Elliott Trudeau entête, mais plutôt les chefs de file franco-ontariens, franco-albertains et franco-manitobains, qui, contre vents et marées,contre les intérêts des divers gouvernements provinciaux, ycompris bien sûr celui du Québec, luttent pour obtenir desécoles et des conseils scolaires contrôlés par les francopho-nes. Ce faisant, ils se transforment en défenseurs acharnésd’une conception bilingue et biculturelle du Canada, et ils sontau premier plan de la démocratisation de la politique consti-tutionnelle canadienne. Behiels montre également beaucoupde sympathie pour les intellectuels qui fournissent des muni-tions aux combattants minoritaires, en particulier le juristeMichel Bastarache.

La narration descriptive de Behiels est toute en nuan-ces. La complexité du processus constitutionnel, l’impact dela conjoncture politique, tant nationale que provinciale, lesenjeux divers, les divisions entre les minorités et au sein dechaque minorité, constituent autant d’éléments qui influen-cent le débat.

Comptes rendus

l’auteur pour expliquer l’ostracisme qui a frappé RodolpheMathieu et son œuvre étant en grande partie fondée sur l’af-frontement entre le clérico-nationalisme et le modernisme,l’argument est fragilisé par ce manque de précision et de pro-fondeur dans l’analyse des idées et des esthétiques musicales.

Ajoutons finalement que le livre aurait été enrichi parl’ajout d’un disque comprenant quelques pièces de RodolpheMathieu et de compositeurs contemporains ayant adopté unstyle différent du sien. Si les spécialistes de la musique con-naissent sans doute les œuvres de Mathieu et des autres com-positeurs de son époque, il n’en va pas de même pour tous. Ilserait plus aisé pour les néophytes de comprendre en quoiconsistait l’originalité et la modernité de la musique de Ro-dolphe Mathieu en écoutant quelques-unes de ses composi-tions et en les comparant avec des œuvres d’inspiration plustraditionnelle.

Caroline DurandDépartement d’histoire

Université McGill

Michael D. Behiels. Canada’s FrancophoneMinority Communities. Constitutional Renewal andthe Winning of School Governance. Montréal etKingston, McGill-Queen’s University Press, 2004.438 p.

Dans cette monographie, Michael Behiels raconte l’his-toire de la conquête de la gouvernance scolaire par les mino-rités francophones du Canada dans les deux dernières décen-nies du XXe siècle en faisant une lecture serrée des sourcesdisponibles. Il est rare que les historiens s’aventurent sur le

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Albertains. Ici, les gains des minorités francophones sontmodestes, en raison de la combination de forces externes né-gatives : « The future of Canada’s official language minoritieswas sacrificed on the altar of Québécois nationalism, expan-sive provincial rights, and Ottawa’s perceived need to headoff a clash with Canada’s highly nationalistic and politicizedaboriginal communities (p. 323). », commente Behiels.

Il ressort de tout cela que les leaders francophones sontdevenus politiquement matures très rapidement et que, con-trairement à des représentations qui persistent, ils n’ont nul-lement été les marionnettes du gouvernement fédéral. C’estpar l’adoption de stratégies multiformes que ces hommes etces femmes ont réussi à tirer leur épingle du jeu. Leur visionet leur stratégie n’étaient pas monolithiques parce qu’ils pro-venaient de communautés elles-mêmes diversifiées, sinon frag-mentées géographiquement, socialement, culturellement,linguistiquement et politiquement.

En terminant, déplorons le fait que la recherche exhaus-tive de Behiels nuit à sa stratégie discursive. Il reprend cha-que document en détail, même si cela entraîne des reditesfastidieuses. En conséquence, le lecteur perd souvent le fil deson argument, en dépit des conclusions de fin de chapitre. Etque dire des nombreuses erreurs typographiques dans les ci-tations en français ? Leur présence est ironique dans unouvrage qui prône les bienfaits du bilinguisme.

Yves FrenetteCentre de recherche en civilisation canadienne-française

Université d’Ottawa

Comptes rendus

Avant d’aborder l’étude de la conquête de lagouvernance scolaire proprement dite, Behiels se penche dansun premier chapitre sur la renaissance des minorités franco-phones pendant les décennies 1960 et 1970, renaissance quiprend place grâce à l’arrivée au pouvoir d’une nouvelle géné-ration de leaders résolument « modernes » et grâce à la Loisur les langues officielles (1969). Avec l’encouragement d’Ot-tawa, ces chefs de file fondent la Fédération des francopho-nes hors Québec en 1975 et développent leur propre visionconstitutionnelle. S’appuyant sur les travaux disponibles, l’ana-lyse de Behiels est compétente, mais elle met beaucoup tropl’accent sur l’effet catalyseur de la Révolution tranquille auxdépens des facteurs endogènes de changement au sein desminorités depuis le tournant du XXe siècle. Le chapitre 2 portesur le rôle des associations provinciales dans le processus derévision de la constitution suite à la victoire du « Non » lorsdu référendum sur la souveraineté du Québec en 1980. Ap-puyés par le gouvernement Trudeau, les représentants desminorités réussissent à inscrire leurs préoccupations dans laCharte des droits et libertés de 1982. Pour utiliser l’expres-sion de l’auteur, les chefs de file apprennent rapidement àmaîtriser les règles du jeu de la « politique méga-constitution-nelle ». Les chapitres 3 à 5 constituent le cœur de l’ouvrage.Behiels s’y penche sur les cas des francophones de l’Ontario,de l’Alberta et du Manitoba ; ceux-ci font des pressions poli-tiques et judiciaires pour obtenir la gouvernance scolaire faceà des gouvernements provinciaux hostiles et très habiles àexploiter les divisions de toutes sortes au sein des commu-nautés. Dans les deux chapitres suivants, l’auteur étudie laposition des francophones hors-Québec dans les débats en-tourant les accords du Lac Meech et de Charlottetown entre1987 et 1992, ainsi que les hésitations et déchirures au seindu leadership, notamment entre les Acadiens et les Franco-

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mer, et 4) la bataille de Long-Sault en 1661. Alors que lesHurons et les différents peuples algonquiens de la valléelaurentienne étaient déjà affaiblis en raison de nombreux etdévastateurs raids iroquois, les colons français ont néanmoinsgrandement eu besoin d’eux pour assurer leur subsistance.Dans plusieurs cas, cela signifia ni plus ni moins vivre parmices groupes et adopter leur mode de vie. Dans le second cha-pitre, l’auteure illustre de quelle façon les colons français ap-préciaient au quotidien leur liberté d’action et trouvaient beau-coup d’avantages au mode de vie amérindien. Au XVIIe siè-cle, l’effort missionnaire en Nouvelle-France ne rapportait quede maigres résultats et il semble que la soi-disant stratégievisant à concentrer les efforts sur les enfants amérindiens futloin d’être gratifiante : « Yet while very few Native childrenbecame Frenchified, all the immigrant children acquiredvarious degrees of Nativization » (p. 71). Par la suite, dans letroisième chapitre, l’auteure compare les périodes pré- et post-1663 pour démontrer en quoi il serait abusif de parler d’ac-commodation mutuelle durant les premières décennies decolonisation. Alors que l’historien américain Richard Whitedécrivait dans son livre The Middle Ground (Cambridge, 1991)les relations franco-amérindiennes dans les Grands Lacs en-tre 1650 et 1820 comme un processus perpétuel d’accommo-dation, Blum est pour sa part catégorique concernant la val-lée du Saint-Laurent avant 1663 : les Français s’assimilaientvolontairement. Une fois sa perception des débuts de la Nou-velle-France explicitée, Blum s’emploie dans les chapitressubséquents à soutenir davantage sa thèse par l’analyse decas témoignant d’une transformation prononcée des mœurset coutumes des colons.

Les effets dévastateurs de l’alcool chez les Amérindienssont souvent évoqués, et cela dès les premières décenniesd’échanges interculturels. Blum rappelle cependant qu’il ne

Comptes rendus

Rony Blum. Ghost Brothers. Adoption of a FrenchTribe by Bereaved Native America. Montréal etKingston, McGill-Queen’s University Press, 2005.464 p.

Avec Ghost Brothers, l’historienne Rony Blum présenteune version revue et augmentée de sa thèse de doctorat sou-tenue à l’Université hébraïque de Jérusalem en 2000. Commele sous-titre du livre le laisse entendre, l’auteure suggère uneapproche « inversée » de l’établissement de colons françaisen Amérique du Nord durant l’époque coloniale, plus préci-sément dans la vallée laurentienne entre 1608 et 1663. Eneffet, Blum propose de voir le peuplement de la Nouvelle-France à « l’époque glorieuse » non pas comme un mouve-ment de francisation des Amérindiens mais de nativisationdes Français. Ce processus aurait été si important qu’il seraitplus approprié de parler d’assimilation des Français au mondeamérindien que d’accommodation mutuelle entre premierspeuples et nouveaux venus. Par surcroît, la nativisation pro-noncée des premiers colons en Nouvelle-France est peut-êtrece qui a sauvé cette fragile entreprise coloniale et permis àcelle-ci de perdurer jusqu’en 1663, moment de la réelle priseen charge par la Couronne française de la destinée de sa colo-nie nord-américaine. Présentant donc sous un angle essen-tiellement culturel l’étude de la présence précoce de Françaisdans la vallée du Saint-Laurent, Blum répartit son ouvrage enhuit chapitres.

Dans le chapitre premier, Blum démontre la faiblesseet l’instabilité de la jeune colonie en s’attardant sur quatreévénements importants survenus avant 1663 : 1) la prise deQuébec par les frères Kirke en 1629, 2) la destruction de lapuissante confédération huronne en 1648, 3) la Fronde à Pa-ris au cours de cette même année, révolte qui allait bien sûrjeter encore plus d’ombrage sur les efforts coloniaux d’outre-

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multivalence within the individual » (p. 235). Et pour plu-sieurs cette quête de sens se traduisit par leur nativisation,transformation qui devint même une source de fierté.

Blum porte un regard quelque peu novateur sur les re-lations entre Français et Amérindiens dans la vallée du Saint-Laurent au XVIIe siècle. De toute évidence, elle n’est pas in-disposée par l’idée de toucher de plein fouet certaines sensi-bilités historiques, notamment « l’indianisation » des habitantsde la Nouvelle-France. En s’accordant cette liberté intellec-tuelle, Blum relativise du coup les succès du projet de « fran-cisation » des premiers peuples. La « canadianisation » ou la« nativisation » des colons français dans la vallée laurentiennedébuta très tôt et, hormis les missionnaires et quelques mem-bres de l’élite, aucun n’y voyait problème. Dans les circons-tances, il serait simpliste de se limiter aux emprunts matérielspour comprendre les changements culturels des Français dela vallée du Saint-Laurent au XVIIe siècle, et Blum est à cetégard fort convaincante.

L’approche « inversée » préconisée par l’historienne nousoblige également à voir l’installation de colons français dansla vallée du Saint-Laurent entre 1608 et 1663 comme l’immi-gration de Blancs chez les Amérindiens. En effet, tout au longde son ouvrage, Blum ramène en avant-plan la facette migra-toire de cette expérience coloniale. D’ordinaire, une migra-tion entraîne de nombreux changements culturels chez lesmigrants, pour ne pas parler de chocs culturels. En général,les nouveaux arrivants s’adaptent à leur société d’accueil beau-coup plus qu’ils ne l’influencent, surtout lorsqu’ils ne sontqu’une poignée d’individus, célibataires et majoritairement desexe masculin. Certes, les colons ont construit des habita-tions regroupées en villages, mais leur proximité avec lesAmérindiens ne faisait aucun doute et Blum le démontre sanséquivoque ; ces Français ont été acceptés au sein du monde

Comptes rendus

faudrait pas passer sous silence le fait que nombre de colonsdéveloppèrent quant à eux une dépendance au tabac. Selonles missionnaires de l’époque – et à leur grand désarroi ! – ils’agissait d’un exemple concret de la nativisation des colons :« While alcohol undermined the traditional life of Aboriginalnations, the French Canadian clergy saw French smoking as asign of Nativization [...] » (p. 98). En effet, cette nouvellepratique favorisait l’intégration des nouveaux arrivants aumonde amérindien car fumer encourageait la fraternisation.Par ailleurs, la fréquentation quotidienne d’Amérindiens a eupour impact la redéfinition de la masculinité chez les colons :« Yet there were many more new types in the New World,which indicated a new kind of masculinity. Both habitantsand coureurs de bois were new male models and shared anew-found pride » (p. 104). Coupés de leurs points de réfé-rence d’outre-mer et encerclés de peuples amérindiens, lescolons étaient désormais exposés à de nouvelles influences.Dans la même foulée, le faible nombre de femmes françaisesprésentes dans la colonie avant 1663 a favorisé un métissageentre Français et Amérindiennes qui allait bien au-delà de l’as-pect physiologique. L’univers culturel tout entier de ces Fran-çais fut bouleversé. Par exemple, ils durent apprendre en quoile rôle des femmes dans les sociétés amérindiennes était dif-férent, apprentissage qu’ils firent tout en reconsidérant cequ’était pour eux la masculinité. Le fait d’entretenir une rela-tion intime avec une Amérindienne signifiait aussi une plusgrande intégration au monde amérindien. Bref, dans un con-texte où la plupart des nouveaux arrivants vivaient une pé-riode de grande instabilité, chacun dut redéfinir sa personneet son environnement social : « The perception of a nebulousand developing inside and outside of society, resulting froman inclusive, yet evolving, socio-cultural porosity andinterdependence, was being engaged by an internal

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BIBLIOGRAPHIE

JACQUES ET RAÏSSA MARITAINAU QUÉBEC

ET AU CANADA FRANÇAIS :UNE BIBLIOGRAPHIE

Yvan LamondeDépartement de langue et littérature françaises

Université McGill

Cécile FacalDépartement de langue et littérature françaises

Université McGill

Il n’y a pas lieu de faire ici l’histoire un tant soit peucomplète de la présence et de l’influence des Maritain auQuébec et au Canada français. Cependant, la bibliographieque nous proposons offre déjà les trames principales de lasignification des passages de Jacques Maritain à Québec, àMontréal et à Ottawa et de la réception de ses travaux durantla première moitié du XXe siècle. L’influence du philosopheest importante en particulier pour les générations qui reçoi-vent leur formation durant cette période, comme en témoi-gne une enquête menée en 1962 auprès d’une centaine d’in-tellectuels québécois : Maritain arrive alors au 5e rang parmiles auteurs les plus cités par ces intellectuels interrogés surleurs influences1.

Mens, vol. VIII, no 1 (automne 2007)

amérindien. Les études migratoires (Migration Studies) repré-sentent un champ historique qui demeure peu exploité – etcela est d’autant plus vrai en ce qui concerne la période colo-niale – alors, en ce sens, la contribution de Blum est notable.

La réflexion de l’historienne, qui accorde une place im-portante à la multidisciplinarité, est soutenue par l’utilisationd’une quantité impressionnante de sources primaires, fran-çaises et anglaises. Notons à cet effet qu’à la différence deplusieurs chercheurs anglophones s’intéressant à l’histoire del’Amérique française, Blum n’est aucunement limitée par cer-taines subtilités de la langue française. Ghost Brothers consti-tue donc un ouvrage fort intéressant qui, espérons-le, ne res-tera pas sans écho chez les historiens francophones.

Guillaume TeasdaleDépartement d’histoire

Université York

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troublés les récentes décisions du Saint-Siège, trouveront àrassurer leur esprit et leur foi dans les hautes spéculations duphilosophe catholique2 », évocation de la mise à l’Index dujournal dirigé par Charles Maurras.

C’est au médiéviste Étienne Gilson qu’on doit le pre-mier séjour de Maritain au Canada français, même si, dès 1922,le dominicain Marcolin-Antonio Lamarche avait publiquementlancé une invitation au philosophe catholique. C’est à To-ronto, et non à Montréal ou à Québec, que le déjà réputémédiéviste français entreprend sa carrière nord-américaine enparticipant activement et durablement à la fondation en 1925du Pontifical Institute of Medieval Studies avec les pèresbasiliens. Gilson y invite Maritain dès 1931, mais ce n’est qu’en1933 que celui-ci peut faire la traversée pour la première fois.Ce premier séjour torontois a de rapides échos à Montréal etil n’est pas impossible que ce soit grâce à Gilson, chevilleouvrière de l’Institut scientifique franco-canadien, que Mari-tain séjourne à Québec, à Montréal et à Ottawa en octobre1934, au moment où celui-ci amorce aussi sa carrière états-unienne.

Maritain est alors lu par certains professeurs et étudiantsdans certains collèges : des témoignages en rendent compte.Mais ses conférences sur « l’idéal historique d’une nouvellechrétienté », thème qu’il développe après l’avoir abordé à San-tander en Espagne et à Poznan en Pologne en août 1934 etqui prendra forme en 1936 dans le grand ouvrage de Mari-tain, Humanisme intégral, constituent le moment fort de la mar-que intellectuelle de l’essayiste catholique. Les thèmes de laprimauté du spirituel et d’un humanisme intégral traverserontles revues des jeunes comme La Relève, Vivre ou Gants du ciel.La distinction maritainienne de « l’agir en chrétien » et de« l’agir en tant que chrétien » sera au centre de réflexions surle nationalisme ; qu’on pense à l’usage qu’en fait André

Bibliographie

Deux repères chronologiques aident à comprendre Ma-ritain au Québec : d’une part, la période précédant et entou-rant la condamnation de L’Action française de Paris (1926)éclaire son rôle dans le règlement de cette crise, qui a certesdes échos au Québec dans les milieux nationalistes ; d’autrepart, la connaissance des idées du philosophe fait un bondlors de sa première visite en octobre 1934, qui sera suiviedurant la guerre de deux autres séjours marquants, en 1940 eten 1943.

Le premier Maritain connu au Québec est le philoso-phe néo-thomiste, à la fois celui des Éléments de philosophie(1920) et des essais comme Art et scolastique (1920), Antimoderne(1922) ou Trois Réformateurs (1925). Le milieu thomiste descollèges classiques et des facultés de théologie émet d’ailleursquelques réserves sur la pédagogie de Maritain et sur l’organi-sation de son cours de philosophie où, nouveauté intrigante,la psychologie précède l’ontologie et où perce une dynamiqueinductive peu fréquente dans la scolastique thomiste portéesur la déduction. On admire par ailleurs la curiosité du philo-sophe catholique qui fait honneur à l’Église : son attention àla science et à l’art annonce une ouverture bienvenue en cer-tains milieux.

On suit attentivement à L’Action française de Montréal(1917-1928) les péripéties de la condamnation pontificale deL’Action française de Paris. Et pour ceux qui, au Canada fran-çais, seraient ébranlés par cette condamnation et s’interroge-raient sur l’applicabilité des arguments romains à la revuemontréalaise, des recensions de Pourquoi Rome a parlé (1927)ou Clairvoyance de Rome (1929), par exemple, suggèrent queles positions de Maritain devraient rassurer par l’énoncé desprincipes qu’on y trouve. L’abbé Groulx, le directeur de L’Ac-tion française de Montréal, présente ainsi Primauté du spirituel(1927) : « Ceux de chez nous néanmoins qu’auront émus ou

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nement ou Le Droit. Nous souhaitons que la présente biblio-graphie suscite des travaux complémentaires et sur les Mari-tain et sur le sens de leurs formes variées de présence au Qué-bec.

À propos de la bibliographie

Nos travaux sur la modernité au Québec (1930-1960)et sur La Relève requéraient une connaissance exacte de laprésence des Maritain au Québec, en particulier jusqu’à la finde la Deuxième Guerre mondiale, au moment où Maritain estnommé ambassadeur de France auprès du Vatican. Nous nesommes pas les premiers à s’intéresser aux Maritain et il con-vient de reconnaître les travaux bibliographiques et analyti-ques pionniers de Roland Houde et d’Yvan Cloutier, ainsi quela précieuse synthèse de Florian Michel, cités à la section 4 dela bibliographie. La bibliographie complète des œuvres deMaritain, publiée en supplément aux Cahiers Jacques Maritain3,nous a aidés à compléter le relevé des publications des Mari-tain au Québec en plus de fournir des renseignements sur lapublication antérieure ou subséquente de ces textes.

Ces sources ont servi de matériau de base à l’établisse-ment de la partie bibliographique de ce document. Nous yrenvoyons uniquement lorsque les références et informationsétaient inconnues de nous ; les renvois sont indiqués entrecrochets, selon la convention MLA4, lorsque l’étude figure àla section 4 de ce document. Dans le cas contraire, nous don-nons la référence complète en note.

Bibliographie

Laurendeau dans son tract des Jeune-Canada, Notre nationa-lisme (octobre 1935). Mais l’accueil fait à certaines idées deMaritain est loin d’être unanime ; le milieu des jeunes natio-nalistes reçoit plutôt froidement le conseil de celui qui avaitréfléchi au nationalisme en 1926 : « Contentez-vous d’exis-ter ». Les plus réceptifs trouveront un moyen de « dépasser »cette réserve en y conjuguant un autre conseil de Maritain(« être soi-même ») et en concevant une façon de se penser etcomme individu ou personne et comme collectivité. L’unani-mité est aussi à ce point relative que Maritain préfère ne pasvenir au Québec au moment de ses prises de position sur laguerre d’Espagne ; il estime que sa présence viendrait jeter del’huile sur le feu.

Avec la déclaration de la guerre, Maritain, qui reste enAmérique, sera une des figures de la France libre – sa corres-pondance avec Élisabeth de Miribel en témoigne – dans unQuébec qui penchera pour de Gaulle après 1942. C’est alorsqu’il devient le mentor et l’un des auteurs des Éditions del’Arbre que fondent deux membres de La Relève, ClaudeHurtubise et Robert Charbonneau. Enfin, on ne peut s’empê-cher de voir des difficultés faites à Maritain dans les polémi-ques (au sujet du professeur Hadamard, avec dom Jamet, avecCharles de Koninck) auxquelles il est confronté pendant laguerre.

Quant à Raïssa Maritain, on fait bon accueil à partir de1940 à son œuvre poétique, en publiant des extraits de sesrecueils dans divers journaux et revues. Elle contribue certai-nement, à travers une correspondance soutenue, à forger lavision poétique du critique Guy Sylvestre.

On le voit, la trame maritainienne est loin d’être rectili-gne au Québec, même si ses conférences sont fort suivies dansla presse quotidienne comme l’indiquent les entrées dans LeDevoir, Le Canada, La Presse, Le Jour, L’Action catholique, L’Évé-

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LISTE DE SIGLES

SCJM : Bibliographie publiée en suppléments aux Ca-hiers Jacques Maritain, Kolbsheim (France). Référencescomplètes en note 3.Kolbsheim : Dépôt d’archives du Cercle d’études Jac-ques et Raïssa Maritain, Kolbsheim (France).ECF : Écrits du Canada français, Montréal.BAC : Bibliothèque et Archives Canada, Ottawa.CHQ : Cahiers d’histoire du Québec au XXe siècle, Mon-tréal.CRLG : Centre de recherche Lionel-Groulx, Montréal.DAUL : Division des archives de l’Université Laval,Québec.

Bibliographie

SOMMAIRE

1. La correspondance québécoise et canadienne-française des Maritain (1922-1945)

1.1. Correspondance manuscrite1.2. Correspondance publiée

2. Livres et articles de Jacques et Raïssa Maritainpubliés au Québec et au Canada français

2.1. Livres et articles de Jacques Maritain (1922-1950)2.2. Livre et articles de Raïssa Maritain (1940-1945)

3. Recensions des œuvres de Jacques et RaïssaMaritain dans les revues et journaux québécois etcanadiens-français

3.1. Annonces et recensions de conférences3.2. Recensions d’ouvrages de Jacques Maritain3.3. Recensions d’ouvrages de Raïssa Maritain

4. Études sur Jacques et Raïssa Maritain au Québec(1920-1950)

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vent ont été publiées dans les Écrits du Canada français (ECF)de 1983. La richesse de Bibliothèque et Archives Canada(BAC) tient au fonds Claude Hurtubise. La correspondancequi se trouve au Jacques Maritain Center de la University ofNotre Dame, à South Bend, Indiana, comprend des lettres deQuébécois (Jean-Marie Gauvreau, Mgr Georges Cabana), maistoutes liées à un fonds sur l’art liturgique et sacré et sans rap-port avec Maritain (www.nd.edu/~maritain). Les lettres deMaritain au père Louis-Marie Régis, dominicain, sont les seu-les conservées aux archives dominicaines de la province Saint-Dominique du Canada (monastère Saint-Albert-le-Grand,Montréal) ; elles ont été publiées dans les Cahiers d’histoire duQuébec au XXe siècle (CHQ no 6, automne 1996). Les fondsForest, Gaudreault, Lamarche, Voyer ne contiennent pas decorrespondance avec Maritain, bien que l’on connaisse unelettre publiée de Maritain au père Marcolin-Antonio Lamarche.Les archives de la University of St. Michael’s College, à To-ronto (voir le site www.utoronto.ca/stmikes/), ont conservéla photocopie de deux lettres aux dames Thibodeau (24 octo-bre 1934 et 11 novembre 1936) dont les originaux ne sontpas localisés7, ainsi que plusieurs lettres de Jacques Maritain àGuy Sylvestre8. Quelques cartes postales échangées entreMaritain et André Laurendeau, alors étudiant auprès du phi-losophe à l’Institut catholique de Paris, se trouvent au Centrede recherche Lionel-Groulx (CRLG). On a identifié, à la Di-vision des archives de l’Université Laval, deux lettres échan-gées entre Maritain et Charles de Koninck ; à la suite des tra-vaux de Florian Michel, et même si l’essentiel du débat entrele thomiste de Québec et celui de New York s’est tenu parpublications interposées, nous savons pour les avoir mention-nées sans référence à une cote que d’autres lettres pourraientse trouver dans ce fonds, monumental par sa correspondance.

Bibliographie

1. La correspondance québécoise et canadienne-française des Maritain (1922-1945)

Notre apport sera particulièrement évident à propos dela correspondance des Maritain avec des Québécois. Nousavons dû opérer un découpage en fonction de nos objetsd’étude. Les correspondants retenus des Maritain sont origi-naires du Québec et participent d’une culture marquée d’unecertaine façon par les Maritain et d’une culture qui éclaire enretour l’aventure nord-américaine des Maritain. Tout en laconnaissant, nous n’avons pas retenu la correspondance desMaritain avec des compatriotes comme les pères Delos ouCouturier ou avec Jacques de Monléon, Élisabeth de Miribelou Janvier-Louis Dalbis de l’Institut scientifique franco-ca-nadien, par exemple. La correspondance publiée entre Mari-tain et Étienne Gilson et entre Maritain et Mounier est certesd’intérêt pour l’évaluation de la place de Maritain au Québec,mais elle relève d’une autre perspective. De même, l’analysedes rapports entre Maritain et des Canadiens de langue an-glaise (par exemple, Norah et Roland Michener) ou de la pré-sence de Maritain au Pontifical Institute of Medieval Studiesde Toronto vaudrait bien une recherche spécifique.

Nous avons localisé à ce jour un total de 261 lettresdont 89 de Jacques Maritain et 40 de Raïssa Maritain à descorrespondants québécois. Claude Hurtubise se révèle le prin-cipal correspondant de Maritain en raison de la place qu’iloccupe dans la production de La Relève et, surtout, dans l’ad-ministration des Éditions de l’Arbre qu’il fonde avec RobertCharbonneau en 19405.

Le dépôt d’archives qui s’est révélé le plus riche estcelui du Cercle d’études Jacques et Raïssa Maritain àKolbsheim, en Alsace, dirigé et animé par René Mougel, qui aaccueilli Yvan Lamonde avec son sens bien connu de l’hospi-talité6. Quelques lettres de Maritain ou à Maritain qui s’y trou-

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16.2.35 Madeleine Thibaudeau à Maritain, Meudon(Kolbsheim)

9.8.35 Éva et Madeleine Thibaudeau à Maritain,Meudon (Kolbsheim)

[14.10.35] Maritain, Meudon, à André Laurendeau(CRLG, P2/A, 23 : carte postale)

21.10.35 Maritain, Champagnole (Jura), à A.Laurendeau (CRLG, P2/A, 11)

9.12.35 Maritain, Meudon, à Paul Beaulieu (ECF,1983 : 17-18)

27.3.36 Éva Thibaudeau à Maritain, Toronto(Kolbsheim)

6.5.36 A. Laurendeau, Paris, à Maritain (Kolbsheim)

6.36 P. Beaulieu à Maritain, Toronto (ECF, 1983 :18-19)

26.10.36 Mme Thibaudeau à Maritain, Meudon(Kolbsheim)

11.11.36 Maritain aux dames Thibaudeau (archives,University of St. Michael’s College, photocopie,publiée dans l’article de L. Dewan, voir section4)

18.12.36 P. Beaulieu à Maritain, Meudon (ECF, 1983 :19-20)

4.1.37 Maritain, Meudon, à P. Beaulieu (ECF, 1983 :21)

21.1.37 Père Bruckberger et Maritain à Charles deKoninck (DAUL, archives de Koninck)

Bibliographie

1.1 Correspondance manuscrite

[1922] Maritain à Marcolin-Antonin Lamarche (Revuedominicaine, voir section 1.2)

24.10.27 Raymond-Marie Voyer, o.p., Marseille, àMaritain (Kolbsheim)

13.3.28 R.-M. Voyer, o.p., Rome, à Maritain(Kolbsheim)

24.12.31 Abbé Maurice Roy, Québec, à Maritain,Meudon (Kolbsheim)

2.10.34 Abbé M. Roy, Québec, à Maritain à bord del’Alaunia, Pointe-au-Père (Kolbsheim)

4.10.34 Madeleine Thibaudeau à Maritain à bord del’Alaunia (Kolbsheim)

4.10.34 Mme Alfred Thibaudeau à Maritain à bord del’Alaunia (Kolbsheim)

9.10.34 Mme Thibaudeau à Maritain a/s Dominicains deQuébec (Kolbsheim)

20.10.34 Mme Thibaudeau à Maritain, Meudon(Kolbsheim)

22.10.34 Madeleine Thibaudeau à Maritain, Meudon(Kolbsheim)

21.10.34 Maritain à madame Thibaudeau (archives,University of St. Michael’s College, photocopie,publiée dans l’article de L. Dewan, voir section4)

29.12.34 Éva R. Thibaudeau à Maritain, Meudon(Kolbsheim)

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30.11.38 P. Beaulieu à Maritain, NY (Kolbsheim)

28.12.38 C. Hurtubise à Maritain (Kolbsheim)

25.1.39 P. Beaulieu à Maritain, Meudon (Kolbsheim)

14.2.39 Maritain, Meudon, à P. Beaulieu (ECF, 1983 :28)

15.4.39 C. Hurtubise à Maritain (Kolbsheim)

4.1.40 C. Hurtubise et Robert Charbonneau àMaritain, Chicago (BAC)

13.2.40 P. Beaulieu à Maritain, Toronto (Kolbsheim)

5.4.40 Maritain, Chicago, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC)

2.5.40 Guy Sylvestre, Ottawa, à madame JacquesMaritain (Kolbsheim)

7.5.40 Maritain, St. John’s College, Annapolis, MD àJ. Le Moyne (Kolbsheim)

19.5.40 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

19.7.40 G. Sylvestre, Ottawa, à madame JacquesMaritain (Kolbsheim)

21.10.40 Maritain, NY, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC)

26.10.40 R. Charbonneau ou C. Hurtubise à Maritain,NY (BAC)

27.10.40 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

29.10.40 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

4.11.40 R. Charbonneau à Maritain, NY (BAC)

16.11.40 Maritain à C. Hurtubise (BAC)

Bibliographie

25.2.37 P. Beaulieu à Maritain, Meudon (ECF, 1983 :22-23)

3.4.37 A. Laurendeau, Paris, à Maritain (Kolbsheim)

19.6.37 A. Laurendeau, Paris, à Maritain (Kolbsheim)

25.8.37 P. Beaulieu, Paris, à Maritain, Meudon(Kolbsheim)

Toussaint 37 P. Beaulieu, Paris, à Maritain, Meudon(ECF, 1983 : 23)

3.11.37 Maritain, Meudon, à P. Beaulieu, Paris (ECF,1983 : 24)

28.11.37 P. Beaulieu, Paris, à Maritain, Meudon (ECF,1983 : 24-25)

28.12.37 Abbé M. Roy à Maritain, Meudon (Kolbsheim)

21.2.38 Secrétaire de Maritain à C. de Koninck (DAUL,P112/C, 229)

15.3.38 C. de Koninck à Maritain (DAUL, P112/C,229)

5.9.38 Jean Le Moyne, Paris, à Maritain (Kolbsheim)

19.10.38 P. Beaulieu à Maritain, Chicago (Kolbsheim)

22.10.38 Maritain, Chicago, à P. Beaulieu (ECF, 1983 :25-26)

31.10.38 Maritain, Chicago, à P. Beaulieu (ECF, 1983 :26-27)

2.11.38 Maritain, Providence, à P. Beaulieu (ECF,1983 : 27)

4.11.38 P. Beaulieu à Maritain, South Bend (Kolbsheim)

28.11.38 Claude Hurtubise à Maritain, NY (Kolbsheim)

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1.4.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

5.4.41 Maritain, NY, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC)

23.4.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

5.5.41 Maritain, NY, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC)

8.5.41 Madeleine Thibaudeau à Maritain, NY(Kolbsheim)

13.5.41 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

30.5.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

7.6.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

18.6.41 Maritain, NY, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC)

24.6.41 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

26.6.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

17.7.41 Maritain, NY, à G. Sylvestre (archives,University of St. Michael’s College)

17.7.41 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

21.7.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

Bibliographie

16.11.40 C. Hurtubise à Maritain, NY (BAC)

19.11.40 C. Hurtubise à Maritain, NY (BAC)

21.11.40 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

13.12.40 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

13.12.40 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

26.12.40 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

4.1.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

10.1.41 Maritain, Chicago, à C. Hurtubise (BAC)

15.1.41 Maritain, Chicago, à C. Hurtubise (BAC)

19.1.41 Maritain, Chicago, à C. Hurtubise (BAC)

20.1.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain,Chicago (BAC)

23.1.41 Maritain, Chicago, à C. Hurtubise (BAC)

25.1.41 C. Hurtubise à Maritain, NY (BAC)

2.2.41 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

6.2.41 C. Hurtubise à Maritain, NY (BAC)

7.2.41 C. Hurtubise à Raïssa Maritain, NY (BAC)

25.2.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

8.3.41 Raïssa Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

20.3.41 C. Hurtubise à Maritain, NY (BAC)

31.3.41 Maritain, NY, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC)

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26.10.41 G. Sylvestre, Ottawa, à Raïssa Maritain(Kolbsheim)

3.11.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

12.11.41 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

12.11.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

14.11.41 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

17.11.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

18.11.41 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

21.11.41 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

24.11.41 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

1.12.41 Maritain, NY, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC)

2.12.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

4.12.41 Maritain, NY, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC)

14.12.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

17.12.41 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

19.12.41 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

[25.12.41] Maritain à C. Hurtubise (BAC)

Bibliographie

22.7.41 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

25.7.41 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC,télégramme)

27.7.41 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

31.7.41 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

31.7.41 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

8.8.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

8.8.41 Raïssa Maritain, Long Island, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

31.8.41 Raïssa Maritain, Long Island, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

16.9.41 Maritain, NY, à G. Sylvestre (archives,University of St. Michael’s College)

23.9.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

27.9.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

3.10.41 Maritain, NY, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC)

4.10.41 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

22.10.41 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

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175Mens174

30.5.42 Maritain, NY, à G. Sylvestre (archives,University of St. Michael’s College)

1.6.42 Maritain, NY, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC)

4.6.42 R. Charbonneau à Maritain, NY (BAC)

6.6.42 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

9.6.42 Maritain, NY, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC)

26.6.42 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

30.6.42 Maritain, NY, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC)

27.8.42 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

30.8.42 Maritain, NY, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC)

30.8.42 Maritain, Croton Falls, à G. Sylvestre(archives, University of St. Michael’s College)

21.9.42 Maritain, NY, à G. Sylvestre (archives,University of St. Michael’s College)

[12.42] C. Hurtubise à Maritain, NY (BAC)

8.12.42 Maritain, NY à R. Charbonneau (BAC,télégramme)

11.12.42 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

8.1.43 C. Hurtubise à Maritain, NY (BAC)

Bibliographie

25.12.41 Maritain, NY, à J. Le Moyne (Kolbsheim)

[1941] Éva Thibaudeau à Raïssa Maritain (Kolbsheim)

[sans date] Raïssa et Jacques Maritain à C. Hurtubise(BAC, carte)

9.1.42 Maritain, NY, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC)

14.1.42 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

26.1.42 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

30.1.42 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain,Toronto (BAC)

3.2.42 Maritain, Toronto, à C. Hurtubise (BAC)

20.2.42 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

16.3.42 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

18.3.42 É. Thibaudeau à Raïssa Maritain, NY(Kolbsheim)

27.3.42 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

22.4.42 Maritain à C. de Koninck (DAUL, archives deKoninck)

24.4.42 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

1.5.42 C. de Koninck à Maritain (DAUL, archives deKoninck)

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177Mens176

18.5.43 G.-R. Benoit, Ottawa, à Maritain, NY(Kolbsheim)

18.5.43 Maritain, NY, à G.-R. Benoit, Ottawa(Kolbsheim)

19.5.43 C. Hurtubise à Raïssa Maritain, NY(Kolbsheim)

19.5.43 Raïssa Maritain à C. Hurtubise (BAC)

19.5.43 Maritain, NY, à G. Sylvestre (archives,University of St. Michael’s College)

20.5.43 R. Charbonneau à Maritain, NY (Kolbsheim)

20.5.43 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

21.5.43 Maritain, NY, à G.-R. Benoit, Ottawa(Kolbsheim)

21.5.43 Marcel Raymond à Maritain, NY (Kolbsheim)

21.5.43 Raïssa Maritain à C. Hurtubise (BAC)

22.5.43 Georges Pelletier à Maritain, NY (Kolbsheim)

22.5.43 G.-R. Benoit à Maritain, NY (Kolbsheim)

22.5.43 R. Charbonneau à Maritain, NY (Kolbsheim)

22.5.43 R. Charbonneau à Maritain, NY (BAC)

23.5.43 Maritain, NY, au cardinal Villeneuve, Québec(Kolbsheim)

23.5.43 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

24.5.43 Maritain, NY, à R. Charbonneau (BAC, carte àpropos de dom Jamet)

25.5.43 Auguste J. Durelli, Montréal, à Maritain, NY(Kolbsheim)

Bibliographie

27.1.[43] Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

sans date Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

18.2.43 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

23.3.43 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

17.4.43 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

21.4.43 Maritain, NY, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC)

26.4.43 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

3.5.43 Maritain, NY, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC)

4.5.43 C. Hurtubise à Maritain, NY (BAC)

6.5.43 G.-R. Benoit, Ottawa, à Maritain, NY(Kolbsheim)

8.5.43 C. Hurtubise et R. Charbonneau à Maritain, NY(BAC)

8.5.43 Maritain, NY, à G. Sylvestre (archives,University of St. Michael’s College)

15.5.43 Raïssa Maritain à C. Hurtubise (BAC)

17.5.43 A. Albert à Maritain, NY (Kolbsheim)

18.5.43 Maritain, NY, à C. Hurtubise et R.Charbonneau (BAC, avec lettre au directeur duDevoir, à propos de dom Jamet)

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28.6.43 Maritain, NY, à G. Sylvestre (archives,University of St. Michael’s College)

2.7.43 C. Hurtubise à Raïssa Maritain, NY (BAC)

8.7.43 C. Hurtubise à Maritain, NY (BAC)

12.7.43 Raïssa Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

21.7.43 C. Hurtubise à Raïssa Maritain, NY (BAC)

4.8.43 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

18.8.43 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

18.8.43 C. Hurtubise à Raïssa Maritain, NY (BAC)

31.8.43 Raïssa Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

Sans date Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

3.9.43 C. Hurtubise à Raïssa Maritain, NY (BAC)

13.9.43 Maritain, NY, à G. Sylvestre (archives,University of St. Michael’s College)

25.9.43 C. Hurtubise à Maritain, NY (BAC)

6.10.43 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

[9.10.43] G. Sylvestre, Ottawa, à madame JacquesMaritain (Kolbsheim)

10.10.43 Maritain, Toronto, à C. Hurtubise (BAC)

13.10.43 Maritain, Toronto, à G. Sylvestre (archives,University of St. Michael’s College)

19.10.43 Maritain, Toronto, à C. Hurtubise (BAC)

Bibliographie

26.5.43 R. Charbonneau à Raïssa Maritain, NY (BAC)

27.5.43 G. Pelletier à Maritain, NY (Kolbsheim)

28.5.43 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

29.5.43 C. Hurtubise à Maritain, NY (Kolbsheim)

29.5.43 C. Hurtubise à Maritain, NY (BAC)

31.5.43 Raïssa Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

[sans date] C. Hurtubise à Maritain (BAC, « The Cardinaltakes up... », page dactylographiée)

1.6.43 Rodolphe Camirand à Maritain, NY(Kolbsheim)

5.6.43 Cardinal Villeneuve, Québec, à Maritain, NY(Kolbsheim)

9.6.43 Maritain, NY, à R. Camirand (Kolbsheim)

11.6.43 Maritain, NY, au cardinal Villeneuve(Kolbsheim)

11.6.43 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

11.6.43 Raïssa Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

17.6.43 C. Hurtubise à Raïssa Maritain, NY(Kolbsheim)

17.6.43 C. Hurtubise à Maritain, NY (BAC)

18.6.43 C. Hurtubise à Maritain, NY (BAC)

26.6.43 Maritain, NY, à R.Charbonneau (BAC)

26.6.43 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

26.6.43 Raïssa Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

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3.5.44 C. Hurtubise à Maritain, NY (Kolbsheim)

4.8.44 Maritain, East Hampton, au père L.-M. Régis(CHQ no 6, automne 1996 : 115)

16.8.44 C. Hurtubise à Maritain, NY (Kolbsheim)

15.10.44 Maritain, NY, au père L.-M. Régis (CHQ no 6,automne 1996 : 116)

20.10.44 Maritain, NY, à G. Sylvestre (archives,University of St. Michael’s College)

29.10.44 Maritain, NY, au père L.-M. Régis (CHQ no 6,automne 1996 : 116-117)

2.12.44 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

14.12.44 C. Hurtubise à Raïssa Maritain, NY(Kolbsheim)

16.12.44 C. Hurtubise à Maritain, NY (Kolbsheim)

11.1.45 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

5.2.45 C. Hurtubise à Maritain, NY (Kolbsheim)

5.2.45 Maritain, NY, à G. Sylvestre (archives,University of St. Michael’s College)

6.2.45 P. Beaulieu, Washington, à Maritain(Kolbsheim)

17.2.45 Les Thibaudeau, télégramme à Maritain, NY(Kolbsheim)

23.2.45 Maritain, NY, à C. Hurtubise (Kolbsheim)

2.3.45 Maritain, NY, à G. Sylvestre (archives,University of St. Michael’s College)

Bibliographie

25.10.43 C. Hurtubise à Maritain, Toronto (BAC)

25.10.43 C. Hurtubise à Raïssa Maritain, NY (BAC)

25.10.43 Maritain, Toronto, à C. Hurtubise (BAC)

27.10.43 Raïssa Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

9.11.43 C. Hurtubise à Raïssa Maritain, NY (BAC)

18.11.43 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

21.11.43 Raïssa Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

24.11.42 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

29.11.43 C. Hurtubise à Raïssa Maritain (BAC)

5.12.43 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

7.12.43 C. Hurtubise à Raïssa Maritain, NY (BAC)

13.12.43 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

14.12.43 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

15.12.43 C. Hurtubise à Maritain, NY (BAC)

21.12.43 Maritain, NY, à C. Hurtubise (BAC)

23.12.43 Raïssa Maritain, NY, à G. Sylvestre(Kolbsheim)

11.2.44 É. Thibaudeau à Raïssa Maritain, NY(Kolbsheim)

8.4.44 Maritain, NY, à G. Sylvestre (archives,University of St. Michael’s College)

11.4.44 R. Charbonneau à Maritain, NY (Kolbsheim)

Après 11.4.44 Maritain à R. Charbonneau (Kolbsheim)

25.4.44 Maritain, NY, au père Louis-Marie Régis (CHQno 6, automne 1996 : 114-115)

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pas été retenus, à l’exception des quelques textes publiés enfrançais. Nous n’incluons ici que les textes portant la signa-ture des auteurs ; on trouvera plusieurs recensions de confé-rences, non signées mais parfois très détaillées, à la section 3.

2.1. Livres et articles de Jacques Maritain (1922-1950, par ordrechronologique)

MARITAIN, Jacques. « De la philosophie moraleadéquatement prise », Revue de l’Université d’Ottawa, III(avril-juin 1933), p. 105*-134*. [Houde 1973-II, 215]

——. « Le thomisme et le sens du mystère », Revue del’Université d’Ottawa, IV (juillet-septembre 1934), p. 149*-161*. [Houde 1973-II, 215]

Reproduction de l’introduction aux Sept leçons sur l’être,qui paraît en même temps chez Téqui à Paris avec quel-ques variantes.

——. « Le rôle temporel du chrétien », La Relève, 1ère série,no 5 (octobre 1934), p. 93-97.

Ce texte sera repris et augmenté pour former une par-tie d’Humanisme intégral [SCJM 4-5, p. 29]. L’influencede Maritain sur le groupe de La Relève n’est plus à dé-montrer. En témoignent les nombreux textes publiéspar lui dans la revue, mais encore plus, la fréquenceavec laquelle les collaborateurs québécois de La Relèvese réfèrent à ses écrits. Un nombre important de comp-tes rendus et d’articles sur Maritain sont recensés dansles sections suivantes, mais beaucoup plus s’y réfèrent,le citent ou s’en inspirent.

——. « À propos de la Question juive », La Revue domini-caine, vol. XLI, no 6 (juin 1935), p. 401-410. [Houde 1973-II, 215].

Bibliographie

1.2. Correspondance publiée

MARITAIN, Jacques. « [Lettre à M.-A. Lamarche] », LaRevue dominicaine, vol. XVIII, no 12 (décembre 1922),p. 515-516.

Remerciements pour l’article consacré à Antimodernedans Le Devoir du 7 octobre 1922. Maritain refuse uneinvitation, faute de temps. La même lettre paraît dansLe Devoir du 2 décembre, p. 2 [SCJM 15, p. 27].

« Choix de lettres de Jacques et Raïssa Maritain à PaulBeaulieu, Robert Charbonneau, Jean Le Moyne, Guy Syl-vestre, 1935-1971 », Écrits du Canada français, no 49 (1983),p. 7-114.

Chacun des correspondants accompagne ses lettres d’untémoignage sur ses relations avec les Maritain (voir lesnotices dans la section 4).

HUOT, Giselle et Benoît LACROIX. « Lettres inédites deChenu, Gilson et Maritain à Louis-Marie Régis, o.p. », LesCahiers d’histoire du Québec au XXe siècle, no 6 (automne1996), p. 111-130.

Quatre lettres de Maritain, écrites de New York ouEast Hampton, au père Régis, des 25 avril, 4 août, 15et 29 octobre 1944. Originaux aux archives domini-caines, Province Saint-Dominique du Canada, monas-tère Saint-Albert-le-Grand, Montréal.

2. Livres et articles de Jacques et Raïssa Maritainpubliés au Québec et au Canada français

Cette section recense les livres, articles, lettres ouver-tes, préfaces, entretiens, transcriptions de conférences et re-censions publiés par Jacques et Raïssa Maritain au Québec etau Canada français. Les articles parus au Canada anglais n’ont

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ception politiciste, qui veut faire du politique une idéetechnique et étrangère à la morale, dans la lignée deMachiavel (132-33). Le politique est plutôt, selon Ma-ritain, un domaine humain, i.e. moral (134). Pour com-prendre ceci, il faut distinguer la morale individuelle (pasen cause ici) (134) et le bien commun, « bien non seule-ment matériel mais aussi et principalement moral »(135). En réponse à ceux qui voient dans la morale unsurmoralisme, un pharisaïsme, Maritain la définitcomme une activité concrète, aux règles jamais tracéesd’avance (136), ce qui permet de régler le problèmede la subordination de la politique à la morale (137).

——. « Témoignage », dans RAYMOND, Marcel, HenriGhéon, Montréal, Le Cep, 1939, p. 132-134. [SCJM 19,p. 15]

Pages tirées de La Revue fédéraliste, janvier-février 1927.

« Entretien avec Jacques Maritain », [Interview par ClaudeHurtubise et Paul Beaulieu], La Relève, 4e série, no 8 (mars1939), p. 227-230.

Entretien réalisé au mois de novembre 1938 à Toronto.Les questions portent sur le « problème des relationsentre la religion et la culture et [sur le] problème durégime temporel, de la démocratie », particulièrementen ce qui concerne l’Amérique.

MARITAIN, Jacques. « L’Amérique vue : La démocratiechrétienne », Le Jour, vol. II, no 35 (samedi 13 mai 1939),p. 4.

Reprise d’un texte publié dans Temps Présent. Maritain yprésente une Amérique consciente du « péril couru parla civilisation » et de la nécessité de défendre la démo-cratie et [d’]élaborer une nouvelle démocratie » selonles valeurs chrétiennes. Citant les évêques américains, ilprésente aux Français l’exemple d’un épiscopat démo-

Bibliographie

Reproduction d’un article de La Vie spirituelle, 2e an-née, no 22, t. II, no 4 (juillet 1921). Près de quinze ansséparent la rédaction de cet article et sa reproductiondans La Revue dominicaine. Les idées qui s’y trouvent sontcelles d’un Maritain encore associé à L’Action française,cependant que le philosophe a significativement évo-lué depuis. Cet article a-t-il été reproduit avec sa per-mission ? Une note de la première page affirme queMaritain avait promis une contribution originale quin’a pu être livrée, mais ne dit pas s’il a suggéré le choixdu texte imprimé. Maritain y concède le « rôle de sub-version » des juifs, leur caractère de « ferment de ré-volution » (402) et énonce la « nécessité d’une lutte desalut public contre les sociétés secrètes judéo-maçon-niques [...] » et de « mesures générales de préservation »(403). Il rappelle cependant l’importance de raisonnersans haine sur la question juive (404). Il note que l’Églisecatholique est héritière d’Israël (405), souligne la récentevague de conversion de juifs au christianisme et ap-pelle les prières des catholiques pour que ces conver-sions se poursuivent (406-409). Conclusion : il faut« unir dans l’intégrité de la vie chrétienne deux vertuscontraires en apparence : d’unir à la juste défense desintérêts de la cité l’amour surnaturel pour tous les hom-mes » (410).

——. « Nature de la politique », La Relève, 2e série, no 5(janvier 1936), p. 131-139.

D’abord paru en 1935 dans Orientations (Paris) [SCJM10, p. 11]. Réflexion sur « la nature de la science et del’activité politiques », une des causes de la crise mondialeétant « la carence générale [...] d’une juste idée de lapolitique » (131). La distinction entre agir en chrétien eten tant que chrétien permet de comprendre ce qu’onentend par politique chrétienne (132). La rénovationchrétienne de l’ordre temporel s’oppose à une con-

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II, 215]. C’est le premier livre publié par les Éditionsde l’Arbre. Il contient un avant-propos absent de l’édi-tion originale. Rééditions à L’Arbre en 1941 dans lacollection « Problèmes actuels », puis en 1944. [SCJM19, p. 27-28]

——. « L’humanisme de Saint Thomas d’Aquin », MediaevalStudies [Toronto], vol. III (1941), p. 174-184. [SCJM 19,p. 31]

——. « Le Peuple de France », La Revue domini-caine, vol. XLVII, no 1 (janvier 1941), p. 6-18. [Houde 1973-II, 216]

Ces pages, qui formeront le chapitre III de À travers ledésastre (New York, Maison française, 1941) [Houde1973-II, 216], sont publiées ici « en primeur ». Mari-tain y soutient que le malheur de la France est un casparticulier d’un malheur universel, causé par une faussephilosophie de la vie qui a altéré pendant des années leprincipe vital des démocraties. Il dément des thèsesradiodiffusées lors de l’armistice, selon lesquelles ladécadence des Français aurait causé la défaite (6-7). Ilréprouve cette « fuite dans la morale » ; certes, la Francea péché, mais comment cela pourrait-il expliquer ladéfaite, alors que « les péchés des vainqueurs crientcontre le ciel » (10) ? Le peuple est responsable d’avoireu de mauvais chefs, d’avoir accepté d’être « parasité »par la classe politique, et de ce que la vie politique n’éma-nait pas de la vie profonde du peuple (8-9).

MARITAIN, Jacques et Raïssa. « Notre Maître perdu etretrouvé », La Revue dominicaine, vol. XLVII, no 2 (février1941), p. 61-68. [Houde 1973-II, 216]

Hommage à H. Bergson à l’occasion de sa mort. Sou-venirs, dettes et prises de distance. L’évolution de lapensée de Bergson au cours des ans rapproche le maî-tre et ses élèves de jadis.

Bibliographie

crate ; citant le président Roosevelt, il donne l’exempled’un politique qui « reconnaît la religion comme lasource de la démocratie et de la bonne foi internatio-nale ». Il s’agit bien entendu d’une démocratie renou-velée, rénovation qui doit se faire par la redécouvertede son « principe vital » : « la justice, la justice et l’amour,dont la source est divine ».

——. « L’Évangile et l’Empire païen », La Relève, 4e série,no 9 (juillet 1939), p. 257-264.

Fragment d’une conférence donnée à Paris en 1939,qui deviendra une partie du Crépuscule de la civilisation(note 1 du texte). Sur la conception du politique dansl’Empire païen, i.e. séparé de la pensée chrétienne, etincarné ici dans le national-socialisme allemand. Celui-ci repose sur « le principe du contre l’autre », de la hainede l’ennemi. Maritain y oppose la leçon de l’Évangile.

LIMAGNE, Pierre. Témoignage sur la situation actuelle enFrance, par un dirigeant français d’Action Catholique, préface deJacques Maritain, Montréal, Éditions de l’Arbre, 1941.[Houde 1973-II, 216]

Dans sa préface, Maritain raconte comment il a reçuce manuscrit et explique pourquoi, malgré certains dé-saccords avec son auteur – qui garde trop de ménage-ments envers le régime de Vichy –, il a voulu le rendreaccessible aux lecteurs catholiques canadiens et améri-cains. Il s’agit d’empêcher les catholiques de « se laissermystifier » par la propagande allemande, celle notam-ment qui prétend mener en Russie une « croisade »contre le communisme.

MARITAIN, Jacques. Le Crépuscule de la civilisation, Mon-tréal, Éditions de l’Arbre, 1941.

Une édition légèrement différente a paru en 1939 auxÉditions des Nouvelles Lettres à Paris [Houde 1973-

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——. « Sur la doctrine de l’Aséité divine », MediaevalStudies, vol. V (1942), p. 39-50.

Extraits d’un cours sur la liberté donné en 1937-1938à l’Institut catholique de Paris [SCJM 19, p. 53].

——. « Il faut parfois juger », Le Canada, mardi 22 décem-bre 1942, p. 2. [SCJM 19, p. 44]

Réponse à une lettre aux Français d’A. de Saint-Exupérypubliée par Le Canada le 30 novembre sous le titre« Voulez-vous, Français, vous réconcilier ? ». L’échangea d’abord paru dans le New York Times pour la lettrede Saint-Exupéry et dans Pour la victoire, pour la ré-ponse de Maritain. Après l’occupation de la zone librepar l’Allemagne et la disparition du régime de Vichy,Saint-Exupéry appelle à la réconciliation des Françaisafin de s’unir dans la lutte armée. Maritain reconnaît ladroiture de ses intentions et la générosité de son appel,mais refuse d’oublier la collaboration de ceux qui ontabdiqué en juin 1940, en particulier celle des chefs. Vi-chy n’est pas la France, insiste-t-il afin de dissiper uneconfusion entretenue par la lettre de Saint-Exupéry. Unerectification de Saint-Exupéry, brève et courtoise, fi-gure à la suite.

——. Il faut parfois juger, Ottawa, Service de l’Informationde la France Combattante, « Documents de la FranceCombattante », no 4, 1943, 12 p. [SCJM 19, p. 45]

——. « Les Laïques catholiques et le monde d’après-guerre », Le Catholique devant la guerre, Montréal, Radio-Canada, 1943, p. 125-142. [Houde 1973-II, 216]

Conférence lue sur les ondes de Radio-Canada le 2mai 1943, puis rediffusée le 9 mai, dans le cadre de lasérie « Le catholique devant la guerre », inaugurée parle cardinal Villeneuve le 7 février 1943. Le texte estaussi publié dans un grand nombre de journaux qué-

Bibliographie

MARITAIN, Jacques. « Descartes et la religion », La Revuedominicaine, vol. XLVII, no 5 (mai 1941), p. 232-241.

Reprise avec retouches légères d’un texte paru dans larevue Christus (Paris-Lyon), no 38 (septembre-octobre1937). Sera repris dans Pour la justice (1945) [SCJM 10,p. 25].

——. « Peuple de France », Le Droit, samedi 31 mai 1941.[SCJM 19, p. 34]

Extraits d’À travers le désastre. Guy Sylvestre est alorsresponsable de la page littéraire du Droit d’Ottawa.

——. « Profession de foi », « Poésie et métaphysique », « Lacité chrétienne », « Armes spirituelles », Le Droit, samedi 30août 1941, p. 18. [SCJM 19, p. 35]

Extraits de la Réponse à Jean Cocteau (1926), des Degrés dusavoir (1932), d’Humanisme intégral (1936) et De la vie d’orai-son (Jacques et Raïssa, 1922), accompagnant un articlede Guy Sylvestre intitulé « Jacques Maritain apôtre del’esprit » et des poèmes de Raïssa Maritain.

——. « Poésie et mystique », Le Droit, samedi 13 décembre1941, p. 18. [SCJM 19, p. 35]

Extraits des Degrés du savoir (1932) et de Frontières de lapoésie (1935).

MARITAIN et al. Devant la crise mondiale. Manifeste de catholi-ques européens séjournant en Amérique, New York, Maisonfrançaise, 1942.

Jacques et Raïssa Maritain signent ce manifeste rédigépar Auguste Viatte, professeur à l’Université Laval9.

MARITAIN, Jacques. « Spontanéité et indépendance »,Mediaeval Studies, vol. IV (1942), p. 23-32.

Sera repris dans De Bergson à Thomas d’Aquin (1944)[SCJM 19, p. 41].

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——. « Lettres au Devoir », Le Devoir, samedi 22 mai 1943,p. 2. [SCJM 19, p. 55]

Présentation par la rédaction du différend opposantMaritain à l’« Universitaire de langue française », dontle ton ne laisse aucun doute sur la position du journal(peu sympathique à Maritain). Suivent deux lettresadressées au rédacteur en chef par Maritain etl’« Universitaire ». Maritain affirme la non-pertinencedes questions posées par l’« Universitaire » sur les con-victions religieuses de J. Hadamard, alors que celui-ci,dans sa lettre, s’entête à déplorer que Maritain évite d’yrépondre. Cet échange semble clore le débat.

——. « Le cas de M. Jacques Maritain », Le Devoir, mercredi26 mai 1943, p. 2. [SCJM 19, p. 55]

Réponse de Maritain à l’article du 15 mai de DomJamet (voir notice section 4), suivie de sa réplique. Lesdeux documents occupent presque toute une page, cequi signale l’importance du débat pour la direction dujournal. Maritain y rectifie les nombreuses « erreurs defait » de la lettre de Jamet. Il explique la nature de sonassociation avec L’Action française et ses positions dansla crise de 1926 ; il justifie et maintient la position deneutralité (contre Franco et contre le communisme)prise durant la guerre civile espagnole ; il critique dure-ment les positions de Jamet vis-à-vis de Vichy et yoppose celles d’autres religieux hostiles au régime ; ilrépond enfin avec verve aux attaques personnellesportées contre lui. Maritain termine sa lettre, en ré-ponse aux propos de Jamet qui lui reproche de vou-loir être un chef, en réitérant sa volonté « de penser etd’agir en chrétien ». Répertorié sous le titre « Réponse àDom Jamet » dans SCJM 19, p. 55. A.J. Durelli, J. LeMoyne et M. Raymond prendront la défense de Mari-tain dans ce débat (voir notices dans la section 4).

Bibliographie

bécois : Le Canada, 5-6 mai 1943, p. 4 [Cloutier 2002,230] ; L’Action catholique, 4-5 mai 1943, p. 4 ; Le Nou-velliste, 6 mai 1943, p. 3, 9 et 12. Des extraits paraissentle 3 mai dans Le Droit, p. 7 ; La Patrie, p. 4 ; La Presse,p. 7 [SCJM 19, p. 51]. Ce texte est à l’origine des con-troverses avec Dom Jamet. Il donna aussi lieu à plu-sieurs articles élogieux.

——. « Jacques Maritain nous écrit », Le Canada, lundi 3mai 1943, p. 4.

Controverse à propos de Jacques Hadamard. Mari-tain répond ici à une lettre aux lecteurs anonyme, inti-tulée « Qui est donc ce M. Hadamard » et publiée dansLe Devoir du 6 avril 1943, qui accusait J. Hadamard,professeur à l’École Libre des Hautes Études de NewYork, d’anticléricalisme et de franc-maçonnerie. C’està titre de directeur de l’École Libre que Maritain ré-pond aux accusations portées contre son collèguemathématicien, en énumérant ses titres honorifiques eten évoquant le respect dont il jouit dans les commu-nautés scientifiques du monde entier. La lettre paraît lemême jour dans Le Devoir, accompagnée d’une répli-que. Répertorié sous le titre « Défense de Jacques Ha-damard » dans SCJM 19, p. 55.

——. « Qui est M. Hadamard ? suivi de Lettre deM. Maritain », Le Devoir, lundi 3 mai 1943, p. 10. [Cloutier2002, 230]

La lettre de Maritain est la même que dans la noticeprécédente. Dans sa réplique, l’« Universitaire de lan-gue française » porte à nouveau ses accusations et criti-que les mauvaises fréquentations de Maritain. La di-rection du journal, dans une N. de la R., se plaint de ceque la lettre de Maritain a été envoyée au Canada : onavait pourtant fait jadis à Maritain une si bonne publi-cité [sic !].

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secrètes correspondances qu’il a perçues dans les cho-ses, par une vision ou une intuition qui lui est propre etqui est [...] exprimable seulement dans une œuvre » (65-66). Le jugement artistique consiste à juger si l’artiste aou non quelque chose à dire (66). « Le premier devoirde l’artiste et du poète est d’être inébranlablement fi-dèles à leur vérité » (66).

——. « L’Immortalité de l’âme », La Nouvelle Relève, vol. III,no 1 (décembre 1943), p. 1-18.

Texte d’une conférence prononcée par Maritain àMontréal le 11 novembre 1943 sous les auspices del’ACFAS. Traduction par l’auteur de « The Immortalityof Man », paru dans The Review of Politics, vol. 3, no 4(octobre 1941). Sera repris ensuite dans De Bergson àThomas d’Aquin, New York, Maison française, 1944[SCJM 19, p. 29].

——. « Le Machiavélisme et l’éthique politique », La Revuedominicaine, vol. L, no 1 (janvier 1944), p. 6-24.

Extraits de Principes d’une politique humaniste, en primeur.

——. « Machiavel ou l’illusion du succès immédiat », LaNouvelle Relève, vol. III, no 2 (janvier-février 1944), p. 65-85.

Article déjà publié en anglais dans la Review of Politics dejanvier 1942. À paraître à New York sous le titre Prin-cipes d’une politique humaniste (note 1 de l’article).

——. « La conquête de la liberté », Les Carnets viatoriens11, 9e

année, no 2 (avril 1944), p. 153-158.« Extraits, sous forme analytique, de l’étude parue sousle même titre dans Gants du ciel. » [SCJM 19, p. 69]

——. Humanisme intégral. Problèmes temporels et spirituels d’unenouvelle chrétienté, Montréal, Éditions de l’Arbre, 1945.

Réimpression des Éditions Aubier (Paris, 1936).

Bibliographie

——. « La vraie signification du racisme », La Revue domini-caine, vol. XLIX, no 5 (mai 1943), p. 257-265.

Parties du discours de clôture prononcé le 25 janvier1943 lors d’une séance de l’Institut de droit comparéde l’École Libre des Hautes Études de New York,paru d’abord dans le recueil des communications decette séance, Le Droit raciste à l’assaut de la civilisation (NewYork, Maison française, 1943) [SCJM 19, p. 51-52].

——. « Lettre de nuit. La Vie donnée. Par Raïssa Mari-tain », La Nouvelle Relève, vol. II, no 8 (juillet-août 1943),p. 499-501. [Houde 1973-II, 216]

Recension du recueil de poèmes de Raïssa Maritainreprenant le texte d’une notice « prière d’insérer » de lapremière édition du recueil dans la collection « Les Îles »chez Desclée de Brouwer, Paris, 1939. L’introductionest différente dans l’édition montréalaise, qui contientelle aussi le « prière d’insérer » [SCJM 19, p. 14 et 58].

——. « La Conquête de la liberté », Gants du ciel10, no 1(septembre 1943), p. 85-109. [Houde 1973-II, 216]

Reprise du chapitre « The Conquest of Freedom »,paru dans R.N. Anshen (dir.), Freedom, Its Meaning, NewYork, Harcourt Brace, 1940 (note 1 du texte). Serarepris dans Principes d’une politique humaniste, New York,Maison française, 1944 [SCJM 19, p. 61]. Sur la « li-berté d’épanouissement de la personne humaine », dis-tincte de la liberté de choix, qui en est le présupposé.

——. « Sur le Jugement artistique », La Revue dominicaine,vol. XLIX, no 9 (septembre 1943), p. 65-68. [Houde 1973-II, 216]

Il s’agit de la première publication de ce texte [SCJM19, p. 51]. Maritain donne ici sa définition de l’art : « uneffort créateur dont la source est spirituelle, et qui nouslivre tout à la fois le soi le plus intime de l’artiste et les

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Reproduit sous forme de fascicule publicitaire pourLa Nouvelle Relève et les Éditions de l’Arbre (s.d.) [Houde1973-II, 217].

——. « Léon Bloy ou le pèlerin de l’absolu », Conférence àl’Alliance française de Montréal (vendredi 19 octobre1934), répertoriée par E. Tétreau dans Esquisses biographi-ques des Conférenciers de l’Alliance Française, 1e série, Comité deMontréal, École industrielle des Sourds-Muets, 1949, p. 74-76. [Houde 1973-II, 215]

2.2. Livre et articles de Raïssa Maritain (1940-1945)

MARITAIN, Raïssa. « Arbres », La Rotonde, vendredi 2février 1940, p. 1.

Poème tiré de Lettre de nuit – La vie donnée (Paris, Descléede Brouwer, 1939)16.

——. « Quelques souvenirs sur Ève Lavallière », La Ro-tonde, mardi 20 février 1940, p. 4.

Ce texte sur une célèbre actrice convertie et entrée dansles ordres sera remanié et repris dans Les Aventures de lagrâce (New York, Maison française, 1944, tome II desGrandes Amitiés). Repris aussi, sous le même titre, dansLe Droit, 15 janvier 1944, p. 217. Tout porte à croireque cette collaboration avec le journal étudiant puis lequotidien d’Ottawa est due à Guy Sylvestre.

——. « Poëmes : Nocturne, Louange de l’épouse, DeProfundis », La Relève, 5e série, no 1 (avril 1940), p. 20-22.

Poèmes tirés de Lettre de nuit – La vie donnée.

——. « La Croix du Sud », La Rotonde, jeudi 25 avril 1940,p. 4.

Poème tiré de Lettre de nuit – La vie donnée18.

Bibliographie

——. « L’impossible antisémitisme », dans Paul CLAUDELet al., Les Juifs, Montréal, Éditions de l’Arbre, 1945, p. 44-71.

Réimpression du volume paru chez Plon (Paris, 1939,coll. « Présences »).

MARITAIN, Jacques, Ambassadeur de France auprès duVatican. « Le Peuple de France », France-Canada, Ottawa,vol. III, no 3 (mars 1945), p. 10. [Houde 1973-II, 216]

EMMANUEL, Pierre. Combat avec tes défenseurs, préface deJacques Maritain, Montréal, Éditions Lucien Parizeau,194612.

Édition originale : Paris, Pierre Seghers, 1945. RobertÉlie mentionne l’édition québécoise dans un article surPierre Emmanuel paru dans La Nouvelle Relève en 194513.Ceci porte à croire que la date de publication au Qué-bec est 1945 plutôt que 1946.

MARITAIN, Jacques. Éléments de philosophie I. Introductiongénérale à la philosophie, 20e édition, Paris/Montréal, Téqui/Granger, 194614.

Édition originale : Paris, Téqui, 1920.

——. Éléments de philosophie II. L’ordre des concepts : 1. petitelogique (logique formelle), 13e édition, Paris/Montréal, Téqui/Granger, 194615.

Édition originale : Paris, Téqui, 1920.

——. « Beati qui persecutionem patiuntur propter justitiam[Bienheureux ceux qui souffrent persécution pour la jus-tice] », La Nouvelle Relève, vol. V, no 6 (janvier 1947),p. 481-493.

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Poèmes tirés de Lettre de nuit – La vie donnée. Cette pagecontient également un extrait de De la vie d’oraison (Jac-ques et Raïssa, Paris, Art catholique, 1925). Toute lapage est consacrée à Jacques et Raïssa Maritain22.

——. « À l’Aube de nouvelles amitiés », La Nouvelle Relève,vol. I, no 2 (octobre 1941), p. 65-70.

Quelques pages sur G. Rouault qui seront reprises dansLes Grandes Amitiés [Houde 1973-II, 216].

——. Lettre de nuit. La vie donnée, Montréal, Éditions del’Arbre, 1943.

Réimpression d’un recueil paru en 1939 chez Descléede Brouwer (Paris, collection « Les Îles »).

——. « Louange de l’épouse » et « La vérité, la foi », LaRotonde, vendredi 5 février 1943, p. 3 et 8.

Numéro spécial intitulé « Notre formation ». Le pre-mier texte est un poème tiré de Lettre de nuit – La viedonnée ; le second est une étude datée de 194323.

——. « Souvenirs », Gants du ciel, no 2 (décembre 1943),p. 61-79. [Houde 1973-II, 216]

Souvenirs de la fin du séjour de Jacques et Raïssa Ma-ritain en Allemagne (1906-1907), du Père Clérissac etde sa direction spirituelle, de la lecture de saint Tho-mas qui, selon R. Maritain, réconcilie la foi avec la rai-son. Louanges à saint Thomas. Retravaillé pour LesAventures de la grâce.

——. « Pierre et Christine », La Revue dominicaine, vol. L,no 2 (octobre 1944), p. 129-138. [Houde 1973-II, 216]

Sur le « frère » et la « sœur » de Jacques et Raïssa Mari-tain, Pierre et Christine van der Meer de Walcheren,convertis et, comme eux, filleuls de Léon Bloy. L’arti-cle relate le parcours du couple d’amis vers la conver-

Bibliographie

SYLVESTRE, Guy. Situation de la poésie canadienne, lettre-préface de Raïssa Maritain, Ottawa, Le Droit, 1941. [Houde1973-II, 216]

Le titre de ce petit recueil d’essais sur la poésie cana-dienne (un essai général et deux études de Regards etjeux dans l’espace de Saint-Denys Garneau et d’Axe etparallaxes de François Hertel) renvoie à Situation de lapoésie de Jacques et Raïssa Maritain (Paris, Desclée deBrouwer, 1938). Raïssa Maritain remercie Sylvestred’engager ce « dialogue » avec « ceux pour qui la poé-sie n’est ni une “distraction”, ni un art “d’agrément”, niune facile effusion sentimentale, mais un mode de con-naissance [...] ». La poétesse expose dans ces quelquespages sa conception de la poésie. Elle y discute aussicertains des jugements exposés par Sylvestre dansl’ouvrage. Claude Hurtubise mentionne cette préfacede Raïssa dans une recension dans la Nouvelle Relève,vol. I, no 1, p. 30-31 et 50.

MARITAIN, Raïssa. « Henri Bergson, souvenirs », LaRelève, 5e série, no 6 (mars 1941), p. 161-167.

Article d’abord paru en traduction anglaise dansCommonweal (janvier 1941). Sera repris dans Le Droit,samedi 3 mai 194119.

——. « Nocturne », Le Droit, samedi 10 mai 1941, p. 5.« Reproduction fautive d’un poème de Lettre de nuit20. »

——. « Les Grandes Amitiés. Léon Bloy », Le Droit, samedi16 août 1941, p. 18.

Extrait des Grandes Amitiés, alors à paraître (New York,Maison française, 1941)21.

——. « Arbres », « Lettre de nuit », « La croix du sud », LeDroit, samedi 30 août 1941, p. 18.

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pouillés pour les dates correspondant aux visites de Maritainau Québec, soit les mois d’octobre 1934, de février 1940 etde novembre 1943. Le Jour (fondé à Montréal en 1937) a éga-lement été dépouillé pour les périodes correspondant aux vi-sites de 1940 et 1943. Le Devoir a en outre été consulté pourles périodes du 3 avril au 24 mai 1933, et de janvier 1934[séjours à Toronto], ainsi que du 1er juillet au 7 août 1937[Guerre civile espagnole].

1933

« Jacques Maritain viendra l’an prochain », Le Devoir, lundi 3avril 1933, p. 1. [Houde 1973-II, 215]

Petite colonne : Édouard Montpetit annonce pour l’an-née suivante des cours de Maritain sous les auspices del’Institut scientifique franco-canadien. Il devait venir cetteannée, mais le voyage est reporté à l’année suivante.Brève présentation du philosophe.

« Jacques Maritain À Toronto », Le Devoir, lundi 3 avril1933, p. 7.

Quinze lignes sur le départ de Maritain de Toronto. Lesous-titre précise : « Le philosophe français s’en retourneen France par Boston et New York après avoir donnédes cours à l’Institut des études médiévales du CollègeSaint-Michel ».

GIRARD, René, S.J. « Lettre sur Maritain. À propos descours professés à Toronto par l’éminent philosophe fran-çais », Le Devoir, mercredi 24 mai 1933, p. 1-2. [Houde1973-II, 215]

« Chronique » du séjour de J. Maritain à Toronto, enréponse à une demande d’Omer Héroux à l’auteur.Sur les locaux où ont lieu les cours ; sur Maritain lui-même ; sur le sujet des cours.

Bibliographie

sion en insistant sur le rôle de Bloy, raconte leur vieaprès la conversion et l’entrée au couvent de leurs deuxenfants. À la mort de leur fils, ils décident de se séparerpour entrer en religion chacun de leur côté. Ils en sor-tent après deux ans, sur les conseils du supérieur. Pierrevan der Meer de Walcheren dirige les éditions Descléede Brouwer, à Paris. Extrait des Aventures de la grâce.

——. « Lettre de Raïssa Maritain », La Nouvelle Relève,vol. III, no 9 (décembre 1944), p. 522.

Lettre publiée à l’occasion de la mort d’Hector de Saint-Denys Garneau.

——. « Deus Excelsus Terribilis », La Nouvelle Relève,vol. III, no 10 (janvier 1945), p. 581-586.

Poème.

——. « André Gide », La Revue dominicaine, vol. LI (février1945), p. 120-123.

En note : « Mme M. en réponse à ce qui la concernedans “André Gide ou l’art de la fugue”, livraison dejanvier, p. 38, nous demande de reproduire cet extraitdes Grandes Amitiés, t. II, p. 219 s24. »

3. Recensions des œuvres de Jacques et RaïssaMaritain dans les revues et journaux québécois etcanadiens-français

3.1. Annonces et recensions de conférences (par ordre chronologique)

Cette section comprend les comptes rendus et les an-nonces des conférences données par Jacques Maritain auQuébec. Nous y incluons les annonces, car elles révèlent l’am-pleur de la diffusion publique dont ont joui ces visites. Lesquotidiens Le Devoir, La Presse et Le Canada de Montréal ainsique L’Action catholique et L’Événement de Québec ont été dé-

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« Jacques Maritain chez nous », L’Action catholique, mardi 9octobre 1934, p. 4.

Ce court article imprimé dans la page éditoriale re-prend quelques mots de la présentation de Maritainpar Mgr Pâquet, avant d’inciter « tout homme entrete-nant quelque prétention à la culture » à aller écouter sesconférences.

« Jacques Maritain à l’Université Laval », L’Événement, mardi9 octobre 1934, p. 12 et 11.

Résumé de la conférence « Science et sagesse ».

« Emparons-nous des sommets dans le domaine des scien-ces », L’Action catholique, mercredi 10 octobre 1934, p. 3 et9.

Compte rendu de la cérémonie de clôture du congrèsde l’ACFAS contenant une recension du discours deMaritain, dans lequel le philosophe précise qu’il appellenon pas à un retour au Moyen Âge, mais à la réconci-liation de la sagesse et de la science moderne.

« Les conférences de M. Jacques Maritain », L’Action catholi-que, mercredi 10 octobre 1934, p. 9.

Recension de la conférence du 9 octobre sur l’« idéalhistorique d’une nouvelle chrétienté ». On insiste sur lefait que la nouvelle chrétienté n’est pas un retour auMoyen Âge : « Dans la nouvelle civilisation l’œuvrecommune ne devra apparaître comme une œuvre di-vine à réaliser sur terre, [...] mais comme une civilisa-tion qui admettra l’idée évangélique de la personnehumaine et de sa dignité. » Sur la même page, on trouveune annonce pour deux autres conférences à l’Univer-sité Laval (sur « La tragédie de l’humanisme » et sur lenouvel humanisme, respectivement les 10 et 12 octo-bre) et pour une causerie sur l’enseignement de la phi-losophie destinée aux professeurs (11 octobre).

Bibliographie

1934

« M. J. Maritain à l’Université », L’Action catholique, lundi 8octobre 1943, p. 3.

10 lignes d’annonce pour les deux conférences don-nées les 8 et 9 octobre à l’Université Laval, portant sur« La tragédie de l’humanisme » et « Science et sagesse ».

« J. Maritain à l’Université », L’Événement, lundi 8 octobre1934, p. 3.

Annonce de la série de causeries à l’Université Laval.On mentionne que ce n’est pas la première annonce.

« Bienvenue à Jacques Maritain », L’Événement, lundi 8octobre 1934, p. 4.

En page éditoriale, mot de bienvenue, annonce descinq conférences et présentation de Maritain comme« l’âme du renouveau catholique de son pays ». On in-siste sur sa qualité de converti et de convertisseur,d’« apôtre », en rappelant notamment son influence surErnest Psichari.

« M. Jacques Maritain à l’Université Laval. Première confé-rence de l’éminent philosophe français. – “Science et sa-gesse”. – Comment le monde antique et le monde moderneont compris la sagesse. – Mgr Pâquet présente le conféren-cier », L’Action catholique, mardi 9 octobre 1934, p. 3 et 9.

Ce court article reprend des éléments de la présenta-tion faite par Mgr Pâquet, lequel insiste surtout sur lechoix louable de Maritain de se consacrer au travail del’esprit, par opposition à l’action dans le monde. Suitun bref résumé de la conférence intitulée « Science etsagesse ».

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« Les conférences de M. Jacques Maritain », L’Action catholi-que, samedi 13 octobre 1934, p. 3.

Compte rendu de la conférence du 12 octobre sur lenouvel humanisme chrétien. On reconnaît Humanismeintégral (à paraître, 1936).

« M. Maritain au séminaire », L’Événement, samedi 13 octo-bre 1934, p. 3.

Très bref compte rendu de la causerie avec les profes-seurs de philosophie.

« 4e conférence de Jacques Maritain », L’Événement, samedi13 octobre 1934, p. 16.

Compte rendu de la conférence « Communisme etathéisme ».

H. G. « Bienvenue à M. Jacques Maritain », Le Canada,lundi 15 octobre 1934, p. 2.

Annonce de la venue de Maritain, présenté commequelqu’un qui « vit pour la pensée et la vérité », venu« familiariser les intelligences avec les hautes idées de laphilosophie officielle du catholicisme », et comme un« initiateur des intelligences moyennes aux vérités diffi-ciles ». Son rôle est présenté comme « plus modeste[que celui d’autres grands philosophes catholiques,]quoique très méritoire. Il est un de ceux qui ont rajeunila philosophie thomiste, ou mieux qui lui ont redonnéla vie [...] ».

O[mer]. H[éroux]. « M. Jacques Maritain », Le Devoir, lundi15 octobre 1934, p. 1.

Petite colonne. Annonce de la venue de Maritain, courteprésentation élogieuse, mot de bienvenue.

Bibliographie

« L’ACFAS », Le Devoir, mercredi 10 octobre 1934, p. 1.Dix lignes. Clôture du congrès de l’ACFAS (tenu à Qué-bec), où Maritain a prononcé un discours.

« Trois discours au banquet de l’Acfas », L’Événement,mercredi 10 octobre 1934, p. 3 et 13.

Compte rendu du discours de Maritain à la clôture ducongrès de l’ACFAS.

« 2e conférence de Jacques Maritain », L’Événement, mercredi10 octobre 1934, p. 3 et 13.

Résumé de la conférence sur le monde médiéval.

« Les conférences de M. Jacques Maritain. Mgr Camille Roy,P.A, présente le conférencier. – M. Maritain traite de la“tragédie de l’humanisme”. – L’humanisme anthropocentri-que est inhumain. – Il faut revenir à l’humanisme chrétien »,L’Action catholique, jeudi 11 octobre 1934, p. 11.

Le journaliste mentionne le grand succès des confé-rences de Maritain à Québec avant de rendre comptede la conférence de la veille.

« 4e conférence de Jacques Maritain », L’Événement, jeudi 11octobre 1934, p. 14.

Résumé de la conférence sur la tragédie de l’huma-nisme. Le titre devrait se lire : « 3e conférence [...] ».

« Conférence de M. J. Maritain », L’Action catholique, ven-dredi 12 octobre 1934, p. 3.

Très bref compte rendu de la causerie avec les profes-seurs de philosophie. Maritain met l’accent sur l’élève,qui « doit jouer un rôle plus important que le profes-seur » dans l’enseignement de la philosophie.

« Les conférences de M. Maritain. Les sujets, les dates etl’endroit », Le Devoir, vendredi 12 octobre 1934, p. 2.

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« M. Maritain au Plateau », Le Devoir, mardi 16 octobre1934, p. 1.

Dix lignes. Annonce de sa conférence du soir.

« Les problèmes spirituels et temporels d’une nouvellechrétienté. La conférence donnée hier soir par M. JacquesMaritain sur la tragédie de l’humanisme », Le Devoir, mardi16 octobre 1934, p. 2-3. [Houde 1973-II, 215 (avec titreabrégé)]

Compte rendu détaillé de la première conférence d’uncycle de quatre sur les « problèmes spirituels et tempo-rels d’une nouvelle chrétienté », prononcée à la salleSaint-Sulpice. Le texte n’est pas signé, mais plusieursparties s’apparentent à une transcription en style direct.La salle était comble, remarque le journaliste : plusieursauditeurs ont dû rester debout. On reconnaît, dans lecompte rendu de la conférence, l’argumentation d’Hu-manisme intégral.

« M. Jacques Maritain au “Cercle Universitaire” : “Bergsonet saint Thomas” », Le Devoir, mardi 16 octobre 1934, p. 8.

Vingt lignes. Annonce d’un déjeuner-conférence le sa-medi 20 octobre à 13 h.

REYNALD. « La tragédie de la pensée humaniste », LaPresse, mardi 16 octobre 1934, p. 24. [Cloutier 1995, 70]

Compte rendu. L’auteur note la foule nombreuse etl’importante délégation d’ecclésiastiques présents.

F. L. « L’exposé d’un nouvel humanisme. M. Jacques Mari-tain fait une vaste récapitulation historique du spirituel », LeCanada, mercredi 17 octobre 1934, p. 3.

Résumé de la deuxième conférence à l’École du Pla-teau : « Un nouvel humanisme ». Propos qu’on retrou-vera dans Humanisme intégral.

Bibliographie

« M. Jacques Maritain. Sa grande simplicité de manières —Son air de jeunesse — Méthode de travail — Sa meilleurecollaboratrice — L’Institut catholique — Au Canada », LeDevoir, lundi 15 octobre 1934, p. 3.

Les journalistes ont interviewé le philosophe. L’articleconsiste en un portrait, accompagné d’un aperçu deses méthodes de travail et du travail de sa femme. Ony trouve aussi des propos sur l’Institut catholique deParis, sur l’importance de la participation des laïquesau développement de la philosophie française et, en-fin, l’annonce de ses conférences à Montréal.

« Maritain dans la Métropole », L’Action catholique, mardi 16octobre 1934, p. 1.

Quelques lignes du correspondant de Montréal annon-çant l’arrivée de Maritain et recueillant ses commentai-res.

HARVEY, Jean-Charles. « La vie des idées. La métaphysi-que chrétienne de Jacques Maritain », Le Canada, mardi 16octobre 1934, p. 2.

J.-Ch. Harvey évoque une rencontre informelle deMaritain avec un groupe d’intellectuels qui se réunis-sent régulièrement au restaurant Kerhulu de Québec,puis présente les grandes lignes de deux des quatreconférences prononcées à l’Université Laval de Qué-bec, auxquelles il a assisté. On reconnaît dans la distinc-tion entre deux humanismes (anthropocentriste etthéocentrique), dans les propos sur l’athéisme du com-munisme russe et sur le « petit-bourgeois », les thèsesd’Humanisme intégral.

« La tragédie de l’humanisme », Le Canada, mardi 16 octo-bre 1934, p. 325.

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Il explique que le communisme aurait des origines chré-tiennes, et esquisse le processus de substitution de cesvaleurs chrétiennes opéré par le marxisme. L’hommecollectif est alors substitué à l’homme-personne. Lanouvelle chrétienté, conclut-il, devra transfigurer nonseulement l’homme, mais aussi les structures sociales.

REYNALD. « L’humanisme d’une nouvelle chrétienté », LaPresse, mercredi 17 octobre 1934, p. 24. [Cloutier 1995, 70]

« Le rôle de la science dans la synthèse du savoir. Confé-rence de M. Jacques Maritain sous les auspices del’“ACFAS” », Le Devoir, jeudi 18 octobre 1934, p. 8.[Houde 1973-II, 215 (avec titre abrégé)]

« Voici un résumé du magistral exposé de M. Mari-tain. ». Hors du cycle de quatre conférences, celle-citraite du même sujet sous un autre angle, plus techni-que. La sagesse est supérieure à la science ; Maritain va« caractériser les grandes positions prises dans l’Anti-quité, dans le monde chrétien et dans le monde mo-derne à l’égard des ces deux termes [...] : sagesse etscience. » À la fin de l’article, annonce de la conférencedu soir à l’école du Plateau.

« Jacques Maritain à l’Institut des études médiévales », LeDroit, jeudi 18 octobre 1934, p. 9.

Annonce des trois conférences organisées à Ottawapar l’Institut des études médiévales, les 21, 22 et 23octobre. La même annonce sera reprise le samedi 20octobre 1934, p. 14.

REYNALD. « Pour redonner son rang à la sagesse », LaPresse, jeudi 18 octobre 1934, p. 18. [Cloutier 1995, 70]

F. L. « Le chrétien et le monde. M. Jacques Maritainpronostique le rôle et la gloire du laïcat chrétien », LeCanada, vendredi 19 octobre 1934, p. 3.

Bibliographie

« L’hommage à Maritain. L’allocution du R. P. M.-A.Lamarche, O.P. », Le Devoir, mercredi 17 octobre 1934,p. 4. [Houde 1973-II, 215 (avec titre abrégé)]

Texte de l’allocution présentée le lundi soir à la salleSaint-Sulpice. Citations de Réflexions sur l’intelligence surl’universalité de la philosophie thomiste. Éloge de ceque certains appellent l’intransigeance de Maritain, queLamarche préfère nommer sa « complète honnêteté ».Sur la fausseté de l’idée selon laquelle Maritain et lesautres restaurateurs du thomisme rejettent en bloc toutenouveauté, inscrivant ainsi Maritain entre “nouveauté”et tradition (« sa parole autorisée viendra confirmer cequi a été enseigné dans notre faculté et dans lesscolasticats de la ville et de la banlieue [...] ». Lamarchesouligne la présence du clergé, des universitaires et desprofessionnels ainsi que de femmes, laissant entendreque le consensus s’établit alors autour de la personne etde l’œuvre de Maritain.

« M. Maritain à L’Alliance Française », Le Devoir, mercredi17 octobre 1934, p. 7.

Cinq lignes. Annonce de la conférence du vendredi soir.

« Les problèmes spirituels et temporels d’une nouvellechrétienté. La deuxième conférence de M. Jacques Maritainsur : un nouvel humanisme », Le Devoir, mercredi 17 octo-bre 1934, p. 8.

Texte de la 2e conférence du cycle de quatre, au Pla-teau. Le texte n’est pas signé, mais plusieurs parties s’ap-parentent à une transcription en style direct. Là encore,ce sont les thèses qui seront développées dans Huma-nisme intégral : exposition des deux positions pures qu’ontrouve au terme de l’évolution historique des tempsmodernes : la position chrétienne pure et la positionathéiste pure. Maritain expose les « raisons profondes »de l’athéisme russe comme principe du communisme.

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« Léon Bloy, le “mendiant ingrat”, a donné une voix à lamultitude des pauvres et des oubliés. Il se considéraitchargé de dénoncer l’iniquité du monde où il vivait — Safoi immuable — Vocation de pauvreté et de misère —Comment s’explique la violence de son langage », Le Devoir,samedi 20 octobre 1934, p. 3.

Conférence à l’Alliance française. « En voici un bienbref et trop pâle résumé », écrit l’auteur de cet article.

« Léon Bloy, le pèlerin de l’absolu », La Presse, samedi 20octobre 1934, p. 24. [Cloutier 1995, 70]

PERRIER, abbé Armand, collaboration spéciale. « LesConférences de M. Jacques Maritain », La Presse, samedi 20octobre 1934, p. 24.

Il s’agit non pas d’un résumé, mais d’une réflexion surcette visite de Maritain et sa signification, suivie d’unrelevé des points tirés des conférences qui paraissentsusceptibles d’une application immédiate.

F. L. « M. Maritain, hôte du Cercle universitaire. Il indiqueles faiblesses du bergsonisme et le devoir du thomisme », LeCanada, lundi 22 octobre 1934, p. 3.

Résumé de la causerie sur Bergson du samedi midi.

« Au Cercle Universitaire. M. Maritain, Bergson et saintThomas. Devant un bel auditoire, M. Jacques Maritainprononce la dernière de la belle série de ses conférences àMontréal », Le Devoir, lundi 22 octobre 1934, p. 2.

Recension de la causerie du samedi midi précédent auCercle universitaire. Le texte n’est pas signé, mais plu-sieurs parties s’apparentent à une transcription en styledirect. Le conférencier rappelle des souvenirs de Berg-son et montre quelle est la faiblesse de son système : illaisse de côté la raison, l’intelligence. Saint Thomas y

Bibliographie

Suite du cycle de conférences à l’École du Plateau surles problèmes spirituels et temporels d’une nouvellechrétienté. Universalité de la religion chrétienne.

« Cours et conférences de M. Maritain », Le Devoir, vendredi19 octobre 1934, p. 1.

Dix lignes d’annonces. Le soir même au Ritz : confé-rence sous les auspices de l’Alliance française. Le len-demain à 11 h : fin du cycle de quatre conférences à lasalle Saint-Sulpice ; le lendemain à 13 h : causerie surBergson au Cercle universitaire.

« M. Maritain au “Cercle Universitaire” », Le Devoir, ven-dredi 19 octobre 1934, p. 1.

Annonce de 5 lignes.

« Les Problèmes spirituels et temporels d’une nouvellechrétienté. Le chrétien et le monde — Le spirituel et letemporel — Le Royaume de Dieu — La mission temporelledu chrétien à l’égard de l’instauration d’un nouvel ordrechrétien du monde. La Conférence de M. Jacques Maritain,hier soir », Le Devoir, vendredi 19 octobre 1934, p. 6.[Houde 1973-II, 215 (avec sous-titre abrégé)]

L’article, non signé, passe du discours indirect au dis-cours direct. Long compte rendu de la 3e conférencedu cycle de quatre. Maritain présente la position chré-tienne pure.

REYNALD. « Le chrétien dans le monde nouveau », LaPresse, vendredi 19 octobre 1934, p. 19. [Cloutier 1995, 70]

« M. Maritain à l’Alliance française. “Je pouvais devenir unsaint, je suis un homme lettré”, a dit Léon Bloy », Le Ca-nada, samedi 20 octobre 1934, p. 4.

Recension de la conférence de la veille au Ritz, à l’invi-tation de l’Alliance française.

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nes destructives de l’ordre chrétien, de l’athéisme desadeptes de Moscou et de l’irréligion doucereuse detrop de nos contemporains. » Résumé détaillé de laconférence (3 colonnes).

REYNALD. « La chrétienté de l’époque à venir », La Presse,lundi 22 octobre 1934, p. 15. [Cloutier 1995, 70]

F. L. « La chrétienté doit être tolérante. M. Jacques Maritaindit ce que doit être l’idéal d’une nouvelle chrétienté », LeCanada, mardi 23 octobre 1934, p. 3.

Recension de la dernière conférence du cycle de quatresur une nouvelle chrétienté, prononcée samedi avant-midi.

« L’Idéal historique d’une nouvelle chrétienté. Dernièreconférence de M. Jacques Maritain sur les problèmes spiri-tuels et temporels d’une nouvelle chrétienté », Le Devoir,mardi 23 octobre 1934, p. 8 et mercredi 24 octobre 1934,p. 10 et 7. [Houde 1973-II, 215 (avec sous-titre abrégé)]

Transcription de la conférence du 20 octobre.

« Philosophie et sciences. Deuxième cours de M. JacquesMaritain. – Présidence d’honneur de S.E. Mgr GuillaumeForbes, archevêque d’Ottawa », Le Droit, mardi 23 octobre1934, p. 3.

Liste des notables présents. Compte rendu détaillé dela conférence portant sur le débat opposant la philo-sophie et les sciences, et en particulier sur le problèmede la philosophie de la nature, ou de la physique.

« Monsieur Jacques Maritain. Une conférence de M. Mari-tain sur la philosophie chrétienne au Scolasticat Saint-Joseph », Le Droit, mardi 23 octobre 1934, p. 12.

Compte rendu d’une rencontre avec la communautédu Scolasticat suivie d’une conférence.

Bibliographie

remédie. Or, le danger du thomisme et de la scolasti-que, c’est d’être justement scolaire, poursuit Maritain.Elles doivent se renouveler au contact de la réalité, afind’être une philosophie qui observe et qui vive. [Cetarticle et celui de la notice suivante, en p. 8 du Devoir dumême jour, sont répertoriés en un seul sous « Bergsonet saint Thomas » dans Houde 1973-II, 215.]

POULIN, Père Gonzalve. « Comme un souffle d’espoir »,Le Devoir, lundi 22 octobre 1934, p. 3.

Lettre des lecteurs. L’auteur voit dans le fait qu’un phi-losophe aussi abstrait que Maritain remplisse les sallesl’annonce d’« un goût inédit chez nous pour la chosereligieuse » et espère que cela saura « développer cheznous une nouvelle forme de littérature et tarir à jamaisl’orientation actuelle, si lourdement documentaire. »

« Les conférences de M. Maritain. Le conférencier expliquecomment une société chrétienne peut renaître, mais diffé-rente sous plusieurs aspects, de la société chrétienne dumoyen âge », Le Devoir, lundi 22 octobre 1934, p. 8.

« Compte rendu schématique » de la conférence dusamedi matin (dernière de la série de quatre sur lesproblèmes spirituels et temporels d’une nouvelle chré-tienté). Le compte rendu détaillé est reporté au lende-main. Non signé.

« La sagesse et la science. Ouverture des cours de M.Jacques Maritain chez les Dominicains. – Présidence d’hon-neur de Monsieur le ministre de France », Le Droit, lundi 22octobre 1934, p. 10.

Compte rendu de la conférence donnée la veille, fortcourue par « l’élite intellectuelle religieuse et laïque de lacapitale ». Le journaliste fait une liste des notables pré-sents. Maritain est présenté par le R.P. Peghaire comme« l’ennemi irréconciliable et les plus influent des doctri-

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Canada, de tout temps. Mais il craint que ce ne soit iciune philosophie de musée : « souvent regardée et mêmede temps à autre rafraîchie, mais fixée tout de même,sans vie » (381), il craint que nous soyons « bergsonienssans le savoir » (i.e. sujets à l’indolence intellectuelle)(382). « Notre renaissance thomiste, à nous, ne consis-terait-elle pas à rendre vraiment productif et agissantce qui a été placidement gardé jusqu’ici ? [...] La penséeest, doit être une vie, voilà ce que nous laissera votre sou-venir. » (383)

——. « Jacques Maritain », Revue trimestrielle canadienne,vol. I, no 1 (décembre 1934), p. 7.

1935

« Allocution de Monsieur Maritain », Annales de l’ACFAS,vol. I (1935), p. 116-117.

Résumé du discours prononcé lors du banquet de clô-ture du congrès de l’ACFAS, le 9 octobre 1934, à Qué-bec.

1936

« M. Jacques Maritain », Le Devoir, vendredi 10 janvier1936, p. 1.

Annonce de l’arrivée de Maritain en Amérique duNord. L’Institut scientifique franco-canadien comptel’inviter à Montréal. Cette visite n’aura pas lieu.

1939

« Maritain ne viendra pas ! », Le Jour, 28 janvier 1939, p. 1.Voici le texte intégral de cette courte annonce, en unedu journal : « Nous apprenons de source bien infor-mée que l’éminent écrivain et conférencier catholique

Bibliographie

« L’idéal historique d’une nouvelle chrétienté. M. JacquesMaritain parle hier soir à l’Université d’Ottawa. – La nou-velle chrétienté sera “communautaire” », Le Droit, mercredi24 octobre 1934, p. 9.

Liste des notables présents et compte rendu détaillé dela conférence.

« Philosophie et théologie. Troisième cours de M. J. Mari-tain. – Présidence d’honneur de S.E. M. Raymond Brugère,ministre de France au Canada », Le Droit, mercredi 24octobre 1934, p. 11.

Liste des notables présents et compte rendu détaillé dela dernière conférence donnée à l’Institut d’études mé-diévales, portant sur le « débat de la philosophie et dela théologie, ou plutôt du problème si actuel de la phi-losophie chrétienne ». L’article se termine sur une trans-cription des remerciements adressés à Maritain par leR.P. B. Mailloux, o.p., président de l’Institut.

LA RELÈVE. « Les problèmes spirituels et temporels...d’une nouvelle chrétienté », La Relève, 1re série, no 5 (octo-bre 1934), p. 118-122 et 101.

Compte rendu des conférences données par Maritainà Montréal la semaine précédente.

« Conférences », La Rotonde, 1er novembre 1934, p. 155.Mention de la conférence prononcée à l’Universitéd’Ottawa le 23 octobre.

VOYER, R.-M. « Remerciements à M. Jacques Maritain »,La Revue dominicaine, vol. XL, no 12 (décembre 1934),p. 380-384. [Houde 1973-II, 215]

Discours prononcé le soir de la conférence au Cercleuniversitaire. L’auteur a étudié à Paris avec Maritain. Ilrappelle la place d’honneur dont jouit le thomisme au

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d’une rencontre avec les journalistes, pendant laquelleMaritain a refusé de se prononcer sur les événementsinternationaux. Annonce des conférences à venir etpropos sur Bergson, sur la personne humaine et sur lasociété et l’égalité, sujets de ses conférences.

« Jacques Maritain parle du grand philosophe Bergson », LeCanada, mardi 20 février 1940, p. 6.

Résumé de la conférence de la veille, dans laquelleMaritain traite de Bergson et considère sa philosophieen regard de celle de saint Thomas.

« Les conférences. M. Jacques Maritain et la philosophie deBergson », Le Devoir, mardi 20 février 1940, p. 9.

Une colonne. Résumé de la conférence de la veille etannonce de celle du lendemain.

« Les conférences. Le deuxième cours de M. Jacques Mari-tain. Relations entre la personne et la société », Le Devoir,mercredi 21 février 1940, p. 7.

Une colonne. Résumé de la conférence de la veille.

« M. Jacques Maritain à l’Alliance française », Le Devoir,mercredi 21 février 1940, p. 8.

Dix lignes. Annonce de la conférence du vendredi sui-vant.

« L’éminente valeur de la personne humaine », La Presse,mercredi 21 février 1940, p. 9.

Le sous-titre se lit : « Maritain rappelle qu’en doctrinethomiste, celle-ci fait partie de la société, mais de parsa fin surnaturelle lui est supérieure. » Compte rendude la conférence de la veille. Le journaliste inscrit lespropos de Maritain dans la mouvance personnalisted’Esprit, pour cette conférence portant sur la distinc-

Bibliographie

français Jacques Maritain, qui devait revenir cette an-née donner à Québec et à Montréal une série de con-férences, ne viendra pas, contrairement à ce qu’on avaitprécédemment annoncé en ce sens. Qu’est-ce qui a pumotiver ainsi ce changement de décision ? Craindrait-on en quelques milieux québécois l’influence que pour-rait avoir sur notre peuple le catholicisme éclairé de cetesprit d’élite ? »

1940

« Les cours de Jacques Maritain », Le Devoir, vendredi 2février 1940.

Quinze lignes. Annonce de la venue prochaine du phi-losophe.

« Les conférences de M. Jacques Maritain. Lundi, mardi etmercredi prochains », Le Devoir, jeudi 15 février 1940, p. 12.

Quinze lignes. Annonce des conférences de la semainesuivante.

« À l’Institut. M. Jacques Maritain de retour parmi nous »,Le Devoir, lundi 19 février 1940, p. 3.

Une colonne sur le séjour de Maritain et les conféren-ces prévues. Maritain refuse de prendre position pu-bliquement sur la guerre.

« Les conférences de M. Jacques Maritain. La Philosophiebergsonienne de la morale et de la religion », Le Devoir,lundi 19 février 1940, p. 6.

Dix lignes. Annonce de la première conférence.

« Les conférences de M. Maritain en notre ville », La Presse,lundi 19 février 1940, p. 11 et 24.

Le sous-titre se lit : « Le célèbre philosophe donneratrois leçons en l’École Technique ». Rédigé à la suite

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joue un rôle important après la guerre », notamment« un rôle de trait d’union entre l’Europe et le mondeslave d’une part et les grandes puissances occidentales,les États-Unis, le Canada, l’Angleterre, d’autre part. »Maritain croit en la réalisation d’une IVe République.Programme des cours et conférences.

LAPORTE, Pierre. « M. J. Maritain attire plus de trois centsélèves à son cours », Le Canada, mardi 9 novembre 1943,p. 11.

Reportage sur le premier d’une série de cinq cours surla liberté à l’Université de Montréal. Annonce des pro-chains cours et autres conférences inscrits au pro-gramme de cette visite.

« Les entrevues. M. Jacques Maritain », Le Devoir, mardi 9novembre 1943, p. 3.

Début du séjour. Annonce du programme de confé-rences et entrevue. Portrait physique : « Maritain a peuchangé depuis une dizaine d’années que nous avons eule privilège de ses visites ». Sur son travail aux États-Unis, sur la jeunesse américaine, dont il découvre lasoif d’apprendre et les hautes préoccupations. Mari-tain donne des nouvelles de France et des écrivainsfrançais qui sont pour la plupart « restés fidèles à laliberté » au lieu de « passer à la collaboration ».

« Conférence de M. Maritain », L’Action catholique, mercredi10 novembre 1943, p. 8.

Très bref compte rendu de la conférence de la veillesur « La philosophie bergsonienne » et annonce desactivités de la semaine.

« Conférence de Jacques Maritain, au Windsor », Le Canada,mercredi 10 novembre 1943, p. 11.

Annonce de la conférence « Autorité et démocratie ».

Bibliographie

tion entre les notions d’individu et de personne et surl’inscription de la personne dans la société.

« La conception chrétienne de la nature humaine », LeCanada, jeudi 22 février 1940, p. 5.

Résumé de la conférence de la veille, intitulée : « L’éga-lité chrétienne ». Maritain a distingué trois conceptionsde l’homme : empiriste, idéaliste et réaliste. La dernière,qui « admet l’égalité de nature entre les hommes », estprivilégiée par le philosophe. Les inégalités de fait en-tre les hommes ne doivent pas, selon lui, être suppri-mées, mais « compensées par la justice sociale ». Onmentionne les remerciements adressés à Maritain parÉdouard Montpetit.

« Une théorie nuancée de l’égalité humaine », La Presse,jeudi 22 février 1940, p. 14.

Compte rendu de la conférence de la veille.

1943

« Une leçon de Jacques Maritain », Le Canada, 5 mai 1943,p. 4.

Éloges de la causerie diffusée les 2 et 9 mai 1943 àRadio-Canada.

« M. Jacques Maritain à la Société d’Étude », La Presse,vendredi 5 novembre 1943, p. 4.

Quinze lignes d’annonce de la conférence du mardisuivant sur Bergson.

« Le rôle de la France. Opinions de M. J. Maritain concer-nant le destin de son pays », La Presse, lundi 8 novembre1943, p. 3 et 23.

Écrit à partir d’une interview, où Maritain affirme croirequ’« il y a beaucoup de chances pour que la France

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« Jacques Maritain conférencier à l’Institut démocratiquecanadien. », L’Événement, jeudi 11 novembre 1943, p. 3 et11.

Le sous-titre apporte des précisions sur l’événement :« Le grand philosophe français parle de la démocratieen fonction de l’autorité. – Première conférence publi-que de l’Institut démocratique. – Présidence de M. T.-D. Bouchard. – L’hon. Gouin présente le conféren-cier. »

« Autorité et liberté à concilier. M. Maritain propose d’yparvenir au moyen de la “démocratie organique” », LaPresse, jeudi 11 novembre 1943, p. 15.

Compte rendu de la conférence de la veille, sous lesauspices de l’Institut démocratique canadien, et prési-dée par T.-D. Bouchard, ministre de la Voirie. Le sé-nateur Léon-Mercier Gouin a présenté le philosophe.

LAPORTE, Pierre. « Chronique universitaire : L’immorta-lité, une certitude naturelle et philosophique [...] Conférencede M. Jacques Maritain à l’Université de Montréal hier soir[...] », Le Canada, vendredi 12 novembre 1943, p. 12 et 2.

Une centaine de spectateurs étaient présents pour cetteconférence sur l’immortalité de l’âme, rapporte le jour-naliste, avant de donner un résumé substantiel des pro-pos du philosophe.

« M. Maritain et l’immortalité de l’âme », Le Devoir, ven-dredi 12 novembre 1943, p. 9.

Trois paragraphes. Bref résumé de la conférence don-née à l’auditorium de l’université sous les auspices del’ACFAS.

« La personne humaine est immortelle. Conférence de M.Jacques Maritain, hier soir, à l’Université », La Presse, ven-dredi 12 novembre 1943, p. 19.

Bibliographie

« M. Maritain à la société d’études et de conférences », LeCanada, mercredi 10 novembre 1943, p. 12.

Sous-titre : « Le savant philosophe parle de la philoso-phie bergsonienne de la morale et de la religion ». Laconférence porte sur les Deux sources de la morale et de lareligion de Bergson. Compte rendu d’une colonne.

« La philosophie bergsonienne. M. Jacques Maritain à laSociété d’Études et de Conférences », Le Devoir, mercredi10 novembre 1943, p. 5.

Sur la conférence de la veille portant sur Bergson. Onnote qu’à cette époque, Maritain « réhabilite » Bergson(à la lumière des Deux sources de la morale et de la religion),après l’avoir durement critiqué en 1913. Annonce de laconférence du lendemain.

« La doctrine bergsonienne, M. Jacques Maritain parle dugrand philosophe à la Société d’étude », La Presse, mercredi10 novembre 1943, p. 4.

Résumé de la conférence de la veille.

LAPORTE, Pierre. « Chronique universitaire : Inaugurationofficielle du cours universitaire de l’année [...] Deuxièmecours de M. Jacques Maritain sur la liberté [...] », Le Canada,jeudi 11 novembre 1943, p. 3.

Dans cette chronique sur les actualités universitaires,très bref résumé du cours de la veille à l’Université deMontréal, sur « le jugement et sur la nature du librearbitre ».

« Démocratie et autorité », Le Devoir, jeudi 11 novembre1943, p. 3.

Bref résumé de la conférence de la veille.

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Résumé étendu (2 colonnes) de la causerie de la veilleau Cercle universitaire.

« Réfutation du machiavélisme. “Philosophie de la politiquequ’il faut détruire”, dit Jacques Maritain », La Presse, lundi15 novembre 1943, p. 12.

Dîner-conférence organisé par le Cercle universitaire.Le journaliste note le souci de vulgarisation dont a faitpreuve Maritain, à la grande appréciation du public.Résumé de la conférence avec photo. Maritain fut pré-senté par le Dr Oscar Mercier, président du Cercle, etremercié par le R.P. Ceslas Forest, O.P., doyen de laFaculté de philosophie de l’Université de Montréal.

3.2. Recensions d’ouvrages de Jacques Maritain (ordre chronologique)

GAGNÉ, Florido. « Jacques Maritain, Éléments de Philoso-phie. Fascicule I, Introduction à la Philosophie […] », Ensei-gnement secondaire au Canada, III (1919-1920), p. 272-273.[Cloutier 1995]

Ouvrage paru à Paris chez Téqui, 1920.

« J. Maritain. – Éléments de Philosophie, Introduction généraleà la philosophie […] », La Revue dominicaine, vol. XXVI,no 10 (octobre 1920), p. 320. [Cloutier 1995]

P. S. « Jacques Maritain, Théonas, […], Nouvelle LibrairieNationale, 1922 », Le Canada français, vol. IX, no 1 (septem-bre 1922), p. 78. [Cloutier 1995]

Compte rendu élogieux de Théonas ou les entretiens d’unsage et de deux philosophes sur diverses matières inégalementactuelles, paru en 1921 (l’auteur se trompe sur la date deparution). L’auteur en conseille la lecture et loue le res-pect du thomisme de Maritain.

Bibliographie

Résumé de la conférence de la veille, donnée à l’invita-tion de l’ACFAS et de la Société de philosophie deMontréal.

« Les trois formes de démocratie », L’Action catholique,samedi 13 novembre 1943, p. 19.

Bref résumé de la conférence de la veille sur les rap-ports entre la « démocratie et l’autorité », dans l’opti-que d’une nécessaire réorientation des régimes démo-cratiques après la guerre.

« Jacques Maritain à Montréal », Le Jour, samedi 13 novem-bre 1943, p. 4.

Dans l’impossibilité de donner un compte rendu de laconférence donnée à l’Institut démocratique canadien,le journal offre quelques notes biographiques sur le con-férencier.

« Une causerie de monsieur Maritain », L’Action catholique,lundi 15 novembre 1943, p. 9.

Résumé de la conférence de la veille au Cercle univer-sitaire de Montréal, intitulée « La fin du machiavélisme »,où Maritain condamne le machiavélisme des régimeshitlérien et mussolinien.

LAPORTE, Pierre. « La justice politique est un facteuressentiel de bonheur. Brillante causerie de M. JacquesMaritain sur “la fin du machiavélisme” au Cercle universi-taire. Dilemme des démocraties [...] », Le Canada, lundi 15novembre 1943, p. 3.

Résumé de cette dernière conférence à Montréal, à la-quelle ont assisté trois cents personnes. Compte rendudétaillé.

« Le machiavélisme ne réussit qu’à engendrer le malheur deshommes », Le Devoir, lundi 15 novembre 1943, p. 5.

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juge quant à lui « plus profitable de se servir de la mé-thode […] déductive » (59). Les pages 61 et suivantesportent sur un article de Maritain sur « La métaphysi-que des physiciens » – dont Einstein – paru dans laRevue universelle (X, 10, août 1922). Maritain y critique laraison scientifique qui n’accepte de s’exercer que sur cequ’elle peut mesurer, accordant toutefois son admira-tion au génie d’Einstein.

A[rthur] R[obert]. « Jacques Maritain, Eléments de philosophie,II, l’ordre des concepts. 1 Petite logique (logique formelle) [...] P.Téqui, Paris, 1923 », Le Canada français, vol. XII, no 4(décembre 1924). [Cloutier 1995]

Recension nuancée de ce deuxième volume du manuelde Maritain. L’auteur n’est pas toujours d’accord avecMaritain, mais reconnaît la valeur de l’ouvrage. La di-dactique, la rigueur et le ton sont loués ; certaines opi-nions sur des « questions somme toute secondaires »sont discutées.

BASTIEN, Hermas. « Trois réformateurs, par Jacques Mari-tain », L’Action française, vol. XIV (juillet 1925), p. 322-323.

Recension de Trois Réformateurs. Luther, Descartes, Rous-seau, Paris, Plon, 1925 (premier volume paru dans lacollection « Le Roseau d’Or », dirigée par Maritain).L’auteur qualifie déjà Maritain de « célèbre philosophethomiste » et fait allusion à Antimoderne, déjà connu. Illoue l’ouvrage et sa méthode.

L[ionel] G[roulx]. « Primauté du Spirituel, par Jacques Mari-tain […] », L’Action française, vol. XVIII, no 3 (septembre1927), p. 188. [Cloutier 1997]

Compte rendu favorable par L. Groulx de ce livreparu en 1927 chez Plon à Paris (coll. « Le Roseaud’Or ») et publié à la suite de la condamnation parRome de L’Action française de Paris. Dans son com-

Bibliographie

A[rthur]. R[obert]. « Jacques Maritain, Antimoderne [...].Édition de la Librairie des Jeunes […] Paris », Le Canadafrançais, vol. IX, no 2 (octobre 1922), p. 156. [Cloutier 2002]

Ouvrage paru à l’été 1922. L’auteur souligne l’inspira-tion thomiste de ce qui est décrit comme un combat« pour le triomphe complet de la philosophie scolasti-que » (157).

LAMARCHE, M.-A. « À propos d’“Antimoderne” », LaRevue dominicaine, vol. XXVIII, no 11 (novembre 1922),p. 454-457. [Cloutier 1995]

L’auteur fait bon accueil à Antimoderne, admettant vo-lontiers que « la philosophie moderne a fait son temps »(454). Il souligne l’ouverture de Maritain aux avancéesscientifiques et artistiques, faisant de lui l’exemple duthomiste qui se tient « toujours “en avant du mouve-ment de recherche […], recueillant avec sollicitude,purifiant, rectifiant et dirigeant tout effort vers le vrai.[…]” » (454). Le compte rendu s’achève avec un sou-hait : voir « l’apparition sur nos estrades [à la faculté dephilosophie de l’Université Laval] de M. Jacques Mari-tain » (457). Le texte est reproduit du Devoir du 7 octo-bre 1922 (indiqué en fin d’article). En réponse à cecompte rendu, une lettre de remerciement de Maritainparaît dans La Revue dominicaine et dans Le Devoir, endécembre 1922 (notice section 1.2).

ROBERT, Arthur. « Chronique philosophique », Le Canadafrançais, vol. X, no 1 (février 1923), p. 56-69. [Cloutier 1995]

Recension d’Éléments de philosophie I (Paris, Téqui, 1920).Le recenseur reconnaît la valeur de l’ouvrage, mais n’estpas d’accord avec la méthode. Maritain choisit de pré-senter les sujets « pratiques » (psychologie et cosmolo-gie) avant ceux « qui n’ont plus rien de matériel », telsl’ontologie ou la métaphysique, privilégiant une pro-gression du concret vers l’abstrait (58-59). A. Robert

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ques « amis de l’ordre » pour L’Action française, maisnote que l’alliance est paradoxale et pose un cas deconscience, parce que les chefs de L’Action française sontnon-croyants (460). Il souligne le prestige des auteurs(Maritain est ce « philosophe bien connu, l’un des maî-tres les plus brillants de l’université catholique de Pa-ris »), sans cacher leurs sympathies passées pour L’Ac-tion française (459). En conclusion, le recenseur écrit :« Notre intention en écrivant ces pages n’a pas été dechercher querelle d’[A]llemands. Nous avons tout sim-plement voulu contribuer [à] faire connaître un ouvragedont le Saint-Père lui-même a parlé en termes très élo-gieux. [...] L’Université Laval, fière de suivre à la lettreles moindres directions pontificales, est heureuse, dansles pénibles circonstances actuelles, de dire respectueu-sement au Pape [...] qu’elle comprend plus que jamaispourquoi Rome a parlé. » (467)

A[rthur]. R[obert]. « B. Bernadot, P. Doncœur, E. Lajeunie[…], Jacques Maritain, Clairvoyance de Rome [...], ÉditionsSpes, Paris, 1929 », Le Canada français, vol. XVII, no 6(février 1930), p. 428. [Cloutier 1995]

Les auteurs de Pourquoi Rome a parlé répondent dans cenouvel ouvrage aux critiques qui leur ont été adressées.De nouveau, Maritain reçoit des éloges dans la suite dela polémique autour de L’Action française.

G.L. « Jacques Maritain. — Éléments de Philosophie. II. L’Or-dre des Concepts. I. Petite Logique (Logique formelle). Huitièmeédition revue et corrigée, Paris, Pierre Téqui, […], 1933 »,Revue de l’Université d’Ottawa, IV, vol. 3 (1934), p. 73*-74*.

Compte rendu favorable.

Bibliographie

mentaire sur ce compte rendu, Y. Cloutier remarquel’« élasticité de la réception groulxienne : il appuie lespositions de Maritain tout en spécifiant que le philoso-phe ne visait pas les catholiques de L’Action française[...] » [Cloutier 1997, 402-403]. L. Groulx assure que lelivre rassurera l’esprit et la foi de ceux qui ont été trou-blés par les décisions du Saint-siège concernant la miseà l’Index du journal dirigé par C. Maurras.

A[rthur]. R[obert]. « Jacques Maritain. Primauté du Spirituel[...], Paris, librairie Plon, 1927 », Le Canada français, vol. XV,no 2 (octobre 1927), p. 156. [Cloutier 1995]

Elogieux compte rendu. L’auteur en conseille la lec-ture qui « ramènera à bon port les intelligences désem-parées ». Maritain ne dit rien de nouveau, selon l’auteur,mais le dit avec originalité, conviction et personnalité :« son mérite est d’avoir fait remonter à la surface desvérités nécessaires, en train de couler à pic ».

ROBERT, Arthur. « Pourquoi Rome a parlé », Le Canadafrançais, vol. XV, no 7 (mars 1928), p. 458-467. [Cloutier1995]

Long compte rendu de cet ouvrage collectif paru en1927 (Paris, Éditions Spes), dans lequel Maritain signeun texte intitulé « Le sens de la condamnation ». Cetarticle d’A. Robert donnera lieu aux remerciements etfélicitations du Cardinal Gaspari au directeur du Ca-nada français (XV, 9, mai 1928, p. 655) [Cloutier 1995].Le ton de l’introduction laisse comprendre que le pro-blème qui déchire la France ne se pose tout simple-ment pas au Québec. L’auteur espère que le volumeconvaincra enfin les sceptiques, mais souligne que leproblème n’est « au fond pas compliqué du tout, maisque les passions, les intérêts se plaisent à [l’]obscurcirau grand préjudice de la religion elle-même » (458).L’auteur comprend la sympathie de certains catholi-

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que philosophe, J. Maritain s’est donné cette noblemission de rappeler l’actualité et la pérennité du tho-misme [...] ».

——. [notice sur Introduction à la philosophie dans] La penséecatholique, Montréal, Éditions du Devoir, 1936, p. 157.

Recension d’Éléments de philosophie (1920) dans le chapi-tre sur « la Philosophie », section « ouvrages d’intro-duction ». « Ouvrage indispensable. Livre classique,pour les étudiants et pour les maîtres ».

——. [notice sur Primauté du spirituel dans] La pensée catholi-que, Montréal, Éditions du Devoir, 1936, p. 123.

Primauté du spirituel (1927) est recensé dans le chapitre« Sociologie et action catholique ». « L’un des plus im-portants ouvrages de notre temps. À l’occasion de lacrise de L’Action française de Paris, l’auteur a traité d’unefaçon magistrale de la connexion du spirituel et du tem-porel, du doctrinal et du politique. [...] Tous les hom-mes d’Action catholique doivent méditer cet ouvrage. »

——. [notice sur Réflexions sur l’intelligence et sur sa vie propredans] La pensée catholique, Montréal, Éditions du Devoir,1936, p. 161.

Cet ouvrage paru à Paris à la Nouvelle Librairie Na-tionale (1924) est recensé ici dans le chapitre sur « laPhilosophie », section « traités sur différentes parties dela philosophie ». Selon l’auteur, il « [...] présente au nomdu réalisme thomiste la plus ferme critique de l’erreuridéaliste, principe foncier des maux dont souffrent lesesprits aujourd’hui ».

——. [notice sur Théonas dans] La pensée catholique, Mon-tréal, Éditions du Devoir, 1936, p. 161.

Sur Théonas ou les entretiens d’un sage et de deux philosophessur diverses matières inégalement actuelles (Paris, Nouvelle

Bibliographie

LONGPRÉ, Anselme. [notice sur Antimoderne dans] Lapensée catholique, Montréal, Éditions du Devoir, 1936,p. 158.

Ce livre est un « essai bibliographique d’études reli-gieuse » (7) dans lequel plusieurs ouvrages de Maritainsont répertoriés et commentés. Antimoderne (1922) ap-paraît dans le chapitre sur « la Philosophie », section« ouvrages d’introduction ». « Livre plein d’idées etd’idées fières », commente l’auteur.

——. [notice sur Art et scolastique dans] La pensée catholique,Montréal, Éditions du Devoir, 1936, p. 149.

Art et scolastique (Paris, L’Art catholique, 1920) apparaîtdans le chapitre sur « l’art religieux ». « Le plus impor-tant ouvrage sur la théorie de l’art, unique en songenre ».

——. [notice sur Distinguer pour unir ou les Degrés du savoirdans] La pensée catholique, Montréal, Éditions du Devoir,1936, p. 164.

Cet ouvrage, paru à Paris chez Desclée de Brouwer en1932, est recensé dans le chapitre sur « la Philosophie »,section « traités sur différentes parties de la philoso-phie ». L’auteur affirme : « avec le “Dieu” de Garrigou-Lagrange, ce livre est l’ouvrage de philosophie le plusimportant de notre temps et classe définitivementMaritain parmi les plus grands philosophes de l’huma-nité. »

——. [notice sur Le Docteur Angélique dans] La pensée catholi-que, Montréal, Éditions du Devoir, 1936, p. 167.

Cet ouvrage sur saint Thomas, paru à Paris chez PaulHartmann en 1929, apparaît ici dans le chapitre sur « laPhilosophie », section « quelques lectures historiques ».« Édition accessible et tout à fait remarquable d’uneœuvre d’une haute portée intellectuelle. Apôtre autant

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PRESSÉ, Fr. Léo. « Les Juifs parmi les nations », Les Carnetsdu théologue, IIIe année, no 3 (juin 1938), p. 121-122. [Houde1973-II, 215]

Recension d’un article paru dans la Vie intellectuelle du25 février 1938 et dans lequel Maritain montre l’inad-missibilité de l’antisémitisme pour les catholiques.

SABY, P. Pierre. « Le Chrétien et le monde », Les Carnets duthéologue, IIIe année, no 3 (juin 1938), p. 122-123. [Houde1973-II, 215]

Recension et recommandation d’un article paru dansla Vie intellectuelle du 10 avril 1938.

COUSINEAU, Jacques. « Jacques Maritain, Le Crépuscule dela civilisation », Relations, no 3 (mars 1941), p. 83. [Houde1973-II, 216]

L’ouvrage, d’abord publié en 1939 à Paris aux Édi-tions Les Nouvelles Lettres, est repris en 1941 auxéditions de l’Arbre à Montréal. C’est de cette rééditionque J. Cousineau fait un compte rendu fort élogieux.

ROY, Louis-Philippe. « À Travers le Désastre », L’Actioncatholique, lundi 24 mars 1941, p. 4. [Houde 1973-II, 216]

Recension critique d’À travers le désastre (New York,Maison française, 1941), livre portant sur la guerre etvendu à la Librairie d’action catholique. Malgré les dé-saccords du journaliste (et du journal) avec Maritain ausujet de la guerre d’Espagne et du régime de Vichy,Roy propose une lecture favorable du livre, car celui-ci explique les raisons de la capitulation française sanstrop accabler le maréchal Pétain. L’auteur annonced’autres articles à venir sur le même sujet (voir les deuxnotices suivantes).

Bibliographie

Librairie Nationale, 1921). Dans le chapitre sur « laPhilosophie », section « traités sur différentes parties dela philosophie ». « Sur le ton d’une libre conversation,l’auteur traite de quelques problèmes métaphysiquesles plus étroitement liés à la vie de notre époque ».

CHARBONNEAU, Robert. « “Lettre sur l’Indépen-dance” », La Relève, 2e série, nos 9-10 (mai-juin 1936),p. 261-262.

Maritain publie la Lettre sur l’indépendance en 1935 à Pa-ris (Desclée de Brouwer, coll. « Courrier des Iles »), àla suite des protestations qu’avaient suscitées dans lesmilieux catholiques sa participation à Vendredi, hebdo-madaire indépendant de gauche. R. Charbonneau s’in-téresse surtout ici à l’indépendance affirmée par Mari-tain à l’égard des partis de gauche et de droite, expli-quant les circonstances de la publication. Il souligneaussi que selon Maritain, l’intervention des catholiquesdans la sphère politique doit se faire non pas en tantque membres de l’Église, mais « à titre de membreschrétiens d’une cité terrestre particulière » (262). Cetteindépendance revendiquée par Maritain est avant tout,pour R. Charbonneau, un engagement à ouvrir le dia-logue avec les idées de gauche.

LAURENDEAU, André. « Le dernier livre de JacquesMaritain : “Humanisme intégral” », L’Action nationale,vol. IX, no 3 (mars 1937), p. 175-176.

Compte rendu d’Humanisme intégral. Problèmes temporelset spirituels d’une nouvelle chrétienté, paru en 1936 à Parischez Fernand Aubier/Éditions Montaigne. Le livre estdécrit comme « l’une des œuvres capitales de l’épo-que » (175). A. Laurendeau exprime, malgré certainesréserves, sa reconnaissance envers Maritain pour cetouvrage. « Nous aurons à maintes reprises l’occasiond’y revenir et de nous en inspirer », conclut-t-il (176).

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G. P. « Jacques Maritain, Crépuscule de la civilisation », LesCarnets viatoriens, VIIIe année, no 3 (juillet 1942), p. 231-232.[Houde 1973-II, 216]

Il s’agit d’un compte rendu peu sympathique, même sison auteur n’attaque pas de front les positions de Ma-ritain.

« Autour et alentour. Maritain et Saint-Exupéry », Le Ca-nada, mardi 22 décembre 1942, p. 2.

Brève présentation de l’échange entre les deux écri-vains publié dans les pages du journal.

LE MOYNE, Jean. « Les Juifs – Par Paul Claudel, JacquesMaritain et plusieurs autres distingués écrivains », Le Ca-nada, lundi 26 avril 1943, p. 4.

Recension faite à l’occasion d’une réimpression aux Édi-tions de l’Arbre d’un ouvrage collectif d’abord paru àParis chez Plon (coll. « Présences », 1937). L’auteur nerend pas compte de chacun des articles, mais reprendles idées générales, en faisant mention spéciale à la con-tribution de Maritain.

SARAGON. « Le drame des lettres françaises sous l’occu-pation : trahison ou silence », Le Canada, lundi 26 juillet1943, p. 4.

Présentée comme un compte rendu d’À travers le désas-tre, cette colonne contient surtout des propos sur lacollaboration et les problèmes de l’édition et de la cen-sure en France occupée. Le cas de la publication dulivre de Maritain, d’abord à l’étranger puis en Franceaux éditions de Minuit, est cité en exemple. Extrait deRésistance, journal français clandestin.

LE MOYNE, Jean. « Revue des revues », Le Canada, lundi20 septembre 1943, p. 5.

Bibliographie

——. « Maritain et Vichy », L’Action catholique, jeudi 27mars 1941, p. 4.

Suite de la recension précédente. L.-P. Roy est tendreavec Maritain, car celui-ci ne condamne pas en blocPétain et le gouvernement de Vichy ; le philosophe ap-paraît cependant comme « trop sévère » envers le ma-réchal.

——. « Maritain, de Gaulle et la France », L’Action catholi-que, vendredi 4 avril 1941, p. 4.

Suite de la recension précédente ; l’auteur y examine laposition de Maritain vis-à-vis du général de Gaulle etfélicite le philosophe de garder une attitude nuancée,plaçant le sort de la France au-dessus de l’adhésion àun parti.

J[ean]-Ch[arles] H[arvey]. « Chronique des livres : Témoignagesur la situation actuelle en France par un dirigeant d’actioncatholique », Le Jour, samedi 28 février 1942, p. 2.

J.-Ch. Harvey mentionne la préface de Maritain et enfait l’éloge.

SYLVESTRE, Guy. « Confession de foi », Le Droit, samedi 11avril 1942.

Ce « testament spirituel » est paru à New York, Mai-son française, 1941. La recension insiste sur la positionnuancée de Maritain, qui s’oppose autant aux anti-reli-gieux qu’aux bien-pensants. G. Sylvestre reprend lespropos par lesquels Maritain positionne sa philosophieen regard de la science moderne : elle n’y est pas op-posée, mais explore une autre sphère de la connais-sance, où elle accède par le biais de l’« irrationnel » etdu « surrationnel ». Le compte rendu se termine surun hymne à l’amour : sans amour, toute chose – y com-pris les progrès scientifiques et la foi religieuse – « sertà rendre les hommes plus mauvais et plus malheureux ».

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LAMARCHE, Ant. « Jacques Maritain, “Humanisme inté-gral”. Les Éditions de l’Arbre. Montréal, 1944 [...] », LaRevue dominicaine, vol. LI, no 10 (octobre 1945), p. 188.[Cloutier 2002]

L’auteur rappelle la réception controversée d’Huma-nisme intégral lors de sa parution en 1936 (en Europe eten Amérique). La recension est très favorable. Nonseulement le livre a le mérite de « piquer notre apathieintellectuelle », mais il fait « le procès des idéologies quiont conduit notre siècle à la ruine » et exalte « l’effica-cité des principes thomistes dans la reconstruction dumonde ». Une nuance : tout n’est pas que clarté dansHumanisme intégral.

GIRARD, René. « Compte rendu de la Correspondanceavec le R.P. Garrigou-Lagrange à propos de Lamennais etMaritain, par Jules Meinvielle », Relations, no 88 (avril 1948),p. 127. [Houde 1973-II, 217]

Compte rendu de 10 lignes sur ce livre dont l’auteuraffirme que Maritain renouvelle les erreurs de Lamen-nais, condamnées par l’Église. Dans ses réponses,Garrigou-Lagrange admet qu’il y a là du vrai, maisreste plus nuancé.

3.3. Recensions d’ouvrages de Raïssa Maritain (par ordrechronologique)26

SYLVESTRE, Guy. « Lettre de nuit. La Vie donnée », LaRevue dominicaine, vol. XLVI, no 9 (septembre 1940), p. 103-104. [Sylvestre 1983]

Recension du recueil de poèmes paru en 1939 à Parischez Desclée de Brouwer (collection « Les Îles »), quisera réédité à Montréal aux Éditions de l’Arbre en 1943

Bibliographie

Recension de l’article de Maritain paru dans La Revuedominicaine, « Sur le jugement artistique », vol. XLIX, no 9(septembre 1943), p. 65-68.

« Livres et revues. Des témoignages chrétiens », Le Devoir,20 novembre 1943, p. 8.

Dans une chronique de la page littéraire, article sur lacollection « Civilisation » dirigée par Jacques Maritainà la Maison française d’éditions de New York. L’auteurprésente un certain nombre d’ouvrages de la collec-tion et cite l’avant-propos de Maritain expliquant lesobjectifs de la collection.

SAINTONGE, Frédéric, « Jacques Maritain : Principes d’unepolitique humaniste, New-York, Éditions de la Maison Fran-çaise, 1944 », Relations, no 46 (octobre 1944), p. 277-278.[Houde 1973-II, 216]

L’auteur donne un compte rendu élogieux où Mari-tain est présenté comme un guide pour les démocra-tes.

Fra. « Jacques Maritain, Humanisme intégral, édité à Paris(Fernand Aubier), réimprimé en Canada par les Éditions del’Arbre [...] », Le Canada français, vol. XXXII, no 10 (juin1945), p. 796-797. [Cloutier 2002]

Maritain est ambassadeur au Vatican au moment de laréimpression par les Éditions de l’Arbre de Humanismeintégral (1945). Éloges et recommandation des juge-ments de Maritain sur « les grandes expériences huma-nistes du passé ». « Sa doctrine sûre est une sauvegardepour l’esprit qui veut être à la fois chrétien et moderne. »

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BEAULIEU, Simone. « Les Œuvres nouvelles, III, MaisonFrançaise, New York, 1943 », Gants du ciel, no 2 (décembre1943), p. 99-100.

Recension d’un ouvrage collectif contenant un textede Raïssa Maritain. Éloge des pages de Raïssa, « Joursde Soleil en France », des souvenirs de GeorgesRouault, Éric Satie et Georges Auric.

LE MOYNE, Jean. « Poèmes. “Lettre de nuit”, “La viedonnée”, par Raïssa Maritain – 1 vol. aux Éditions del’Arbre », Le Canada, lundi 3 janvier 1944, p. 5.

Le recueil est réédité à Montréal aux Éditions de l’Ar-bre en 1943. Cette recension a été reproduite dans lesÉcrits du Canada français, 49 (1983), p. 83-87.

RAYMOND, Marcel. « Les Aventures de la grâce, par RaïssaMaritain », La Nouvelle Relève, vol. IV, no 1 (avril 1945),p. 64-68.

Tome II des Grandes Amitiés, paru en 1941 à New York(Maison française).

——. « Les Œuvres nouvelles », La Nouvelle Relève, vol. IV,no 1 (avril 1945), p. 71-75.

Recension d’un ouvrage collectif contenant un textede Raïssa.

4. Études sur Jacques et Raïssa Maritain au Québec(1920-1950) (ordre alphabétique)

Cette section offre le relevé le plus complet possibledes études et articles approfondis sur Maritain publiés au Qué-bec entre 1920 et 1950. Nous y incluons également les tra-vaux d’histoire, de littérature ou de sociologie, québécois ounon, qui documentent la question de l’influence de Maritainau Québec et au Canada français pendant cette période. Nous

Bibliographie

——. « Les Grandes Amitiés », Le Droit, samedi 15 novem-bre 1941. [Sylvestre 1983]

Paru à New York, Maison française, 1941.

RAYMOND, Marcel. « Les Grandes Amitiés par RaïssaMaritain », La Nouvelle Relève, vol. I, no 3 (décembre 1941),p. 179-182.

Après un bref survol des œuvres de Raïssa Maritainconnues au Canada, M. Raymond donne un long etélogieux compte rendu de cet ouvrage de souvenirsqui est aussi, remarque-t-il, un document précieux surle renouveau catholique en France au début du XXe

siècle. Suit un résumé centré sur la biographie de RaïssaMaritain.

D’APOLLONIA, Luigi. « Raïssa Maritain : Les GrandesAmitiés. – New-York, Éditions de la Maison Française,1941 [...] », Relations, no 15 (mars 1942), p. 83-84. [Houde1973-II, 216]

Raconte les étapes successives de la « délivrance de tousles positivismes » qui menèrent Raïssa et Jacques Mari-tain vers la conversion au catholicisme.

BEAULIEU, Simone-A. « Chagall par Raïssa Maritain », LaNouvelle Relève, vol. II, no 8 (juillet-août 1943), p. 507-508.

Recension de ce livre illustré paru à la Maison française(New York, 1943).

SYLVESTRE, Guy. « Raïssa Maritain : Marc Chagall, illustré,Maison française, New York, 1943 », Gants du ciel, no 1 (sep-tembre 1943), p. 113-114. [Sylvestre 1983, 113]

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nier. En plus de recenser les contributions de Maritainà La Relève, les auteurs font état des controverses susci-tées par ses prises de position lors des guerres d’Éthio-pie et d’Espagne, et de l’importance accordée à sonthomisme renouvelé dans le cours classique de la gé-nération de La Relève. Selon les auteurs, La Relève n’auraitpu « développer et légitimer son projet de rénovationdu catholicisme et de la vie spirituelle » sans les échan-ges avec les auteurs européens, dont Maritain.

ANGERS-FABRE, Stéphanie. « Le versant canadien-français de la génération “non-conformiste” européenne desannées trente : la revue La Relève », Recherches sociographiques,XLIII, 1 (2002), p. 133-148.

ARMOUR, Leslie. « Maritain, Canada, and the ScholasticTradition », « Maritain and Gilson in Canada [dossier] »,Maritain Studies/Études maritainiennes, vol. 15 (1999), p. 52-69.

Nous incluons les articles de ce numéro spécial à labibliographie pour l’information du lecteur, même s’ilest indiqué clairement que les relations de Maritain avecle Canada français appartiennent à un tout autre rayon(« a wholly other shelf », écrit L. Dewan dans le mêmenuméro, p. 19). L. Armour examine les différentes éco-les du thomisme au Canada (français et anglais) à l’épo-que des visites de Maritain, et son inscription dans lesdébats philosophiques, en plus d’étudier l’influence élar-gie de Maritain au Canada.

BAAS, Émile. « Jacques Maritain et la charité », La NouvelleRelève, vol. II, no 2 (décembre 1942), p. 87-89.

Dans un numéro hommage à Jacques Maritain.

Bibliographie

laissons de côté les travaux portant sur Maritain au Canadaanglais, sauf lorsqu’ils contiennent des informations suscep-tibles d’éclairer ses relations avec le Québec.

Nous avons pris le parti de ne pas retenir les nombreuxtextes québécois de la période qui se réfèrent à Maritain sansen faire leur sujet principal ; leur inclusion aurait pratique-ment doublé l’ampleur de la présente bibliographie. Il est in-déniable, en effet, que Maritain fait partie du paysage intel-lectuel québécois des années 1930 à 1950. Quelques excep-tions ont retenu notre attention : on trouvera un petit nombred’articles pour lesquels la pensée de Maritain constitue l’unedes influences principales et affichées. Il est entendu qu’il entredans ces choix une part de subjectivité. Nous indiquons cesnotices par un astérisque et les accompagnons d’une note ex-plicative.ALLARD, Jean-Louis. « Le rayonnement de Jacques Mari-tain au Canada français », Cahiers Jacques Maritain, no 31(décembre 1995), p. 41-50.

AMYOT, Éric. Le Québec entre Pétain et de Gaulle. Vichy, laFrance Libre et les Canadiens français, 1940-1945, Montréal,Fides, 1999.

Quelques passages sur l’influence exercée par JacquesMaritain sur l’opinion canadienne vis-à-vis du gouver-nement de Vichy et de la France Libre.

ANGERS, Stéphanie et Gérard FABRE. Échanges intellectuelsentre la France et le Québec, 1930-2000 : les réseaux de la revueEsprit avec La Relève, Cité libre, Parti pris et Possibles,Québec, PUL, 2004.

Le chapitre 2, intitulé « La Relève, au cœur des échangesavec les intellectuels européens » (17-46), traite des re-lations entre la revue montréalaise et Maritain, lequelaurait joué les intermédiaires entre La Relève et Mou-

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——. « La chaleur de l’accueil chez Jacques et RaïssaMaritain », Écrits du Canada français, no 49 (1983), p. 7-16.

Témoignage et souvenirs incluant une chronologie desrencontres et des rapports entre les Maritain et l’équipede La Relève, une interprétation des diverses polémi-ques entourant les positions politiques de Maritain etdes précisions sur les publications de Jacques et RaïssaMaritain en Amérique.

BÉLANGER, M. « Monsieur Maritain », Revue de l’Universitéd’Ottawa, XIII (octobre 1943), p. 444-447. [Houde 1973-II,216]

BIRON, Michel. L’Absence du maître, Montréal, PUM, 2000(coll. « Socius »), p. 49-68.

Quelques pages de cet ouvrage établissent un lien entreles positions de Maritain sur la poésie moderne et l’écri-ture « liminaire » d’Hector de Saint-Denys Garneau.Citant Art et scolastique, M. Biron soutient qu’« À défautd’une esthétique, [Maritain] laisse le poète aux prisesavec un malaise dont Garneau ne parviendra jamais àse libérer. Le seul moyen de se prémunir contre le pé-ché d’orgueil et d’assumer la position paradoxale défi-nie par Maritain (être un artiste inconscient de son art),c’est de soustraire l’écriture à sa mise en scène sociale. »(59-60).

BLANCHET, Charles. « La correspondance Étienne Gil-son-Jacques Maritain (1923-1971) », Cahiers Jacques Maritain,no 23 (octobre 1991), p. 43-64.

C’est grâce à É. Gilson, l’un des fondateurs du Pontifi-cal Institute of Mediaeval Studies de Toronto dès 1925,que Maritain sera invité à donner des conférences auCanada, puis au Québec.

Bibliographie

BASTIEN, Hermas. « Figure de philosophe. Jacques Mari-tain », L’Action française, vol. XIII (janvier 1925), p. 54-56.

Note biographique où Maritain est désigné comme« Le célèbre professeur de philosophie de l’Institut ca-tholique de Paris [...] » (54) et comme le « plus brillantmaître actuel » du thomisme en France (55). Bastienmentionne le travail de Maritain comme chroniqueurde philosophie à la Revue universelle (on suppose que lelien de cette revue avec L’Action française de Paris estconnu des lecteurs) (55).

——. « Jacques Maritain », dans Itinéraires philosophiques,Montréal, Librairie d’Action canadienne-française, 1929,p. 119-136.

Ce chapitre offre un récit du parcours biographiquede Maritain, centré sur l’époque de sa conversion et sespremières années de carrière.

*——. Rencontres avec moi-même, BAnQ, Fonds MSS-257,boîte 1, 478 p.

Cette autobiographie non publiée offre un bon exem-ple d’un auteur de la génération précédant celle dite« de La Relève » : Bastien, actif dans les milieux intellec-tuels dès les années 1920, s’est aussi intéressé vivementà Maritain. Dans ce texte autobiographique, il recon-naît son influence et signale les ouvrages dans lesquels ila voulu dialoguer avec lui. Bastien s’est éloigné deMaritain à partir du « virage » à gauche de ce dernierau milieu des années 1930, tout en continuant le dialo-gue.

BEAULIEU, Paul. « Le Pèlerinage vers l’absolu », LaNouvelle Relève, vol. I, no 5 (février 1942), p. 273-284.[Houde 1973-II, 216]

Étude sur Les Grandes Amitiés de Raïssa Maritain (NewYork, Maison française, 1941).

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signe qu’après le rapport Parent, le thomisme et la phi-losophie de Maritain paraissent appartenir à une autreépoque.

« La célébration du cinquantenaire d’Humanisme intégral àOttawa », Études maritainiennes/Maritain Studies, no 3 (avril1987).

*CHARBONNEAU, Robert. « Notes sur la jeunesse.Jeunesse et régime », La Relève, 2e série, no 4 (décembre1935), p. 99-103.

Dans ce texte sur la jeunesse moderne, R. Charbon-neau intègre la distinction maritainienne entre l’agir enchrétien et l’agir en tant que chrétien, et se réfère à Maritainpour affirmer l’incompatibilité du système économi-que libéral et des valeurs chrétiennes.

——. « Hommage », La Nouvelle Relève, vol. II, no 2 (décem-bre 1942), p. 65.

Introduction d’un numéro spécial consacré à JacquesMaritain.

*——. Connaissance du personnage, Montréal, L’Arbre, 1944.R. Charbonneau fait de François Mauriac, auteur duRomancier et ses personnages (Corrêa Buchet-Chastel, 1933),la référence principale de ce recueil d’essais sur le ro-man. Cependant, les positions de Maritain sur la créa-tion artistique, notamment en ce qui concerne la res-semblance de l’œuvre avec l’âme de son créateur, demême que ses opinions sur la responsabilité morale duromancier, ont manifestement eu beaucoup d’impor-tance pour le développement de la théorie romanes-que de R. Charbonneau. Cela n’est pas sans donnerlieu à certaines des ambiguïtés de ce recueil. En effet,les deux « maîtres » de Charbonneau défendent despoints de vue divergents (exposées dans Art et scolasti-

Bibliographie

BOILY, Hélène. « Entre la raison et l’expérience : pour uneapproche des fondements intellectuels de la pensée artisti-que au Québec dans les années vingt », mémoire de maîtriseen études des arts, UQAM, 1998.

H. Boily étudie la pénétration de la philosophie néo-thomiste, et plus particulièrement des idées esthétiquesde Maritain, dans les milieux artistiques et intellectuelsquébécois des années 1920. Son étude fait ressortir laparenté d’idées entre Maritain et plusieurs intellectuelsquébécois, parmi lesquels Louis Dantin, ArthurLaurendeau et Hermas Bastien. C’est, à notre connais-sance, la seule étude qui documente l’influence de Ma-ritain dès les années 1920.

BOIS, Bérengère. « Jacques Maritain : controverses etinfluences 1930-1960 », mémoire de maîtrise en histoirecontemporaine, Université Jean Moulin, Lyon 3, Faculté deslettres et communications, 1995-1996.

Porte surtout sur la controverse philosophique quioppose Maritain à C. De Koninck.

BOURNEUF, Roland. Saint-Denys Garneau et ses lectureseuropéennes, Québec, PUL, 1969 (coll. « Vie des lettrescanadiennes ›, no 6).

Cette étude présente plusieurs références à Maritain etexamine l’influence du philosophe sur le poète.

BRAULT, Jean-Rémi. « Souvenirs de Jacques et RaïssaMaritain », Les Cahiers d’histoire du Québec au XXe siècle, no 6(automne 1996), p. 131-139.

J.-R. Brault raconte comment il a essayé, en 1965,d’acheter un fonds d’œuvres des Maritain et de tra-vaux consacrés à leur pensée afin de démarrer un cen-tre de documentation Jacques et Raïssa Maritain auCollège de Sainte-Thérèse. Le projet restera sans suite,

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cette peinture, et si son art et son cœur sont assez purs[...] pour le faire sans connivence. » (232)

CLOUTIER, Yvan. « De quelques usages québécois deMaritain : la génération de La Relève », dans BenoîtMelançon et Pierre Popovic (dir.), Saint-Denys Garneau et LaRelève, Fides-CETUQ, 1995, p. 62-66.

——. « L’influence de Maritain : un déterminant de laréception de Vatican II au Québec », dans Gilles Routhier(dir.), L’Église canadienne et Vatican II, Montréal, Fides, 1997,p. 397-411.

En introduction au recueil, Gilles Routhier rappelle que« [d]ans cet ensemble consacré à l’Église canadienne etVatican II, poser la figure de Maritain ne semble pasimmédiatement évident. Cela s’impose pourtant [...].Les évêques qui participaient au concile étaient des gensde leur époque et de leur génération. Leurs représenta-tions avaient été formées par les débats de leurs an-nées de formation et de ministère. [...] Comment fairealors l’impasse sur les courants de pensée majeurs quiavaient marqué leur temps de formation ? À cet égard,la figure de Maritain, relayée par la suite par les écritsde Mounier et l’équipe de la revue Esprit, nous sembleincontournable tant elle a marqué les débats québécoisdes années 1920 à 1940. Faire appel à la figure deMaritain, c’est situer Vatican II non pas comme unegénération spontanée, mais dans une lignée et commeun moment particulier dans une série d’événements quijalonnent l’histoire des idées au cours des annéespréconciliaires. » (21-22)

L’hypothèse de Cloutier est que « la réception positivede Maritain (conception du monde et figure) dans lesannées 1920, 1930 et 1940 aurait contribué à légitimerune parole du laïcat » et donc à rendre possible la ré-ception positive, plusieurs années plus tard, de Vatican

Bibliographie

que (1920), puis Frontières de la poésie (1935) pour Mari-tain, et dans Le Roman (1928) pour Mauriac).

——. « Rencontre avec Jacques Maritain », Écrits du Canadafrançais, no 49 (1983), p. 41-42.

R. Charbonneau affirme devoir son attachement authomisme à Maritain plus qu’à l’enseignement reçu auCollège Sainte-Marie ; il déplore par ailleurs avoir mis« trop de temps à [se] détacher » de cette influence.Texte non daté.

CHARBONNEAU, Robert et Claude HURTUBISE. « Ceque nous devons à Jacques Maritain », La Nouvelle Relève,vol. II, no 2 (décembre 1942), p. 70-71.

Dans un numéro spécial consacré au philosophe, lesauteurs rappellent leur découverte de Maritain au col-lège, par la lecture de Primauté du spirituel, Trois Réforma-teurs et Art et scolastique, puis la rencontre de l’hommeen 1934. Maritain « rétablissait les contacts de la penséecatholique avec les avant-gardes », c’est pourquoi il atant plu aux jeunes animateurs de La Relève.

CHARLAND, Raymond-Marie. « Puis-je lire des ro-mans ? », La Revue dominicaine, vol. XLIII, no 5 (mai 1937),p. 228-23427.

L’auteur tente de répondre à la question suivante : quelsromans sont bons, lesquels sont mauvais ? La questionde la responsabilité du romancier envers les âmes deses lecteurs est posée (229). R.-M. Charland prend ap-pui sur Maritain (Art et scolastique) : l’art est souveraindans son domaine propre, mais par le sujet et dans lesujet il est subordonné au bien du sujet (230). Plus loin,on trouve une autre citation d’Art et scolastique : « laquestion n’est pas de savoir si un romancier peut ounon peindre tel ou tel aspect du mal. La question es-sentielle est de savoir à quelle hauteur il se tient pour faire

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G. Cohen rappelle le rôle joué par Maritain durant laguerre comme ambassadeur officieux de la France enAmérique, de même que la fondation de l’École Libredes Hautes Études de New York.

CORMIER, Guy. « Jacques Maritain », La Presse, 1er mai1973.

Témoignage d’un ancien de Cité libre.

CUNNINGHAM, Henri-Paul. Coup d’œil sur l’histoire de lafaculté de philosophie, Québec, Publications de l’UniversitéLaval, s. d., s. p. [Cloutier 1997]

À propos des conférences de Maritain à Québec et deson influence là-bas, « certaine » selon Y. Cloutier [1997,405].

« Dans l’Église et dans l’ordre », La Revue dominicaine,vol. XXVII, no 8 (août 1921), p. 246-247.

Dans une chronique sur l’actualité des études thomis-tes, on trouve une section intitulée « Jacques Maritain ».« Toujours à propos de la renaissance thomiste »,l’auteur donne une citation de Léon Daudet dans L’Ac-tion française, lequel loue les contributions de Maritain àla Revue universelle, notamment en opposition au criti-cisme allemand.

DÉCARIE, Vianney. « Témoignage. Jacques Maritain », LeDevoir, 3 mai 1973.

Souvenirs et témoignages sur Maritain, son influence,son apport au Québec.

*DE KONINCK, Charles. « Réflexions sur le problème del’Indéterminisme », Revue thomiste, 45e année, tome XLIII(1937), p. 227-252 et 393-409. [Cloutier 2002, 231]

Article contre le déterminisme et fondant une critiquedes sciences exactes qui reposent sur ce principe.

Bibliographie

II (398). Selon lui, « l’ambiguïté de la thèse maritainiennese prête à des usages très divers, voire opposés ». Parexemple, la notion d’humanisme intégral « servit devisa idéologique pour justifier l’autonomie de l’actiondes laïcs mais aussi l’action censoriale » (399), ce quifait écho aux propos de Pierre Hébert (2004, voir no-tice ci-dessous) tout en y apportant quelque nuance.Par ailleurs, l’influence de Maritain aura touché deuxgénérations avec des positions très différentes – deL’Action française à la France Libre (400). L’auteur dis-tingue trois moments dans la réception de Maritain auQuébec. Un « premier arrimage » se fait dans les an-nées 1920 auprès du clergé et de « lecteurs, intellectuelscatholiques, d’orientations et de milieux divers » (401-403). Il rejoint ensuite un « public élargi » avec les con-férences de 1934 qui créent un effet de mode (403),alors que « [l]a réputation de Maritain est confirméepar les institutions hôtes montréalaises [...] » (404). En-fin, des « zélateurs » de Maritain – La Relève et les édi-tions de l’Arbre (405-408), « de jeunes intellectuels dontl’influence est déterminante dans le journalisme et dansl’édition » (408-409), ainsi que les dominicains et leursphère d’influence (409) – répandent ses idées.

——. « Maritain, Mounier et le Québec : une tutelle édito-riale », dans Claude Hauser et Yvan Lamonde (dir.), Regardscroisés entre le Jura, la Suisse romande et le Québec, Québec/Porrentruy, Presses de l’Université Laval/Office du patri-moine et de la culture de la République et Canton du Jura,2002, p. 223-235.

COHEN, Gustave. « Appendice. Jacques Maritain, notrenouvel ambassadeur au Vatican », dans Ceux que j’ai connus,Montréal, Éditions de l’Arbre, 1946, p. 201-209. [Houde1973-II, 217]

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soutient enfin que « les personnalistes sont, au fond,d’accord avec ceux dont ils prétendent combattre leserreurs » : les individualistes et les totalitaristes.

Maritain, qui n’est jamais nommé par C. De Koninck,ne se serait pas senti visé par le livre [Angers et Fabre2004, 37-38]. T. Eschmann prit néanmoins sa défenseen 1945 (notice ci-dessous) ; la réplique de C. DeKoninck laissera voir plus clairement les désaccordsentre les deux philosophes (voir notice suivante).

——. « In Defense of St. Thomas », Laval théologique etphilosophique, vol. I, no 2 (1945), p. 9-109. [Houde 1973-II,217]

Réponse à T. Eschmann (notice ci-dessous), qui prit ladéfense de Maritain après la publication de De la pri-mauté du bien commun contre les personnalistes en 1942 (no-tice ci-dessus). C. De Koninck remarque deux réac-tions provoquées par son ouvrage de 1942 : certainsont voulu défendre Maritain qui était attaqué, alors qued’autres ont soutenu que ce n’était pas lui qu’on atta-quait. Il rappelle qu’il n’a jamais nommé Maritain, maissurtout, il exprime le souhait que ce dernier parle pourlui-même dans cette affaire. Pour C. De Koninck, l’ap-parition de ces deux interprétations contradictoiresprouve que Maritain n’a jamais donné de réponse claire,philosophique, au problème traité.

DEPRÉS, Louis. « Cette aventure divine : l’amitié », LaRelève, 2e série, no 7 (mars 1936), p. 215-221.

Article portant sur l’amitié qui unit Maritain à E. Psichari.

Bibliographie

L’auteur renvoie à Maritain, notamment à Science et sa-gesse (p. 406 et 408).

——. De la primauté du bien commun contre les personnalistes.Extrait de la Semaine religieuse de Québec, 55e année (1942), nos

12, 13, 14 et 15, Québec, s.e., 1942.Cette brochure lance une controverse opposant Char-les De Koninck à Maritain [Houde 1973-II, 216]. Letexte sera repris en volume l’année suivante, dans uneversion plus étendue et accompagnée d’un autre essai,Le Principe de l’ordre nouveau (Québec/Montréal, Édi-tions de l’Université Laval/Fides, 1943). Le cardinalVilleneuve en signe alors la préface. Aussi « La Notionde bien commun », L’Académie Canadienne Saint Thomasd’Aquin (12e session, les 14 et 15 octobre 1942), Qué-bec, Imprimerie Franciscaine Missionnaire, 1945, p. 51-108 [Houde 1973-II, 216].

Après avoir établi les distinctions entre le bien com-mun et le bien singulier des personnes, l’auteur s’atta-que à ceux qui soutiennent que le bien des personnesest supérieur au bien commun, i.e. que le bien com-mun est bien en tant qu’il bénéficie à chacune des per-sonnes (on comprend qu’il s’agit des « personnalistes »).Pour C. De Koninck, le bien commun inclut le biendes particuliers, mais il le dépasse : subordonner le biencommun à celui des personnes, c’est créer une « so-ciété, non pas d’hommes libres, mais de tyrans [...] oùle chef éventuel n’est que le plus astucieux et le plusfort parmi les tyrans » (8), une société sans ordre. Il veutdémontrer que les positions des personnalistes suppo-sent une conception collectiviste de la société comme « en-tité séparable de ses membres » (20), conception quiinstaure une tension entre la personne et la société. Aucontraire, pour C. De Koninck, la société et l’ordre so-cial sont, plus encore que chacune des personnes indi-viduelles, à l’image de la perfection divine (20). L’auteur

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ait jamais envoyé [sic] la France », il représente « le typeparfait de l’honnête personne de la nouvelle chrétienté ».Laissant de côté ses œuvres, P. Dumas veut « soulignerquelques aspects de son enseignement ». Suit une syn-thèse des conférences de 1934, que l’auteur conclut encitant le mot de Maritain adressé aux jeunes nationalis-tes canadiens-français : « Contentez-vous d’exister », i.e.,d’« Exister, existentiellement et essentiellement, en ca-tholiques ».

*——. « Le nationalisme des jeunes Canadiens-français »,Journées thomistes II (1937), p. 21-25.

L’auteur, membre des Jeune-Canada, a prononcé cetteallocution aux Journées thomistes de 1936. Il fait ap-pel à Maritain pour sa définition du nationalisme.

DURAND, Jean-Dominique. « La grande attaque de 1956 »,Cahiers Jacques Maritain, no 30 (juin 1995), p. 2-31.

Brève référence à la polémique avec C. de Koninck,1942.

DURELLI, Augusto-J. « L’exemple humain de JacquesMaritain », La Nouvelle Relève, vol. II, no 2 (décembre 1942),p. 72-86.

Dans un numéro spécial consacré à Maritain. L’atti-tude de Maritain devant la guerre – son refus de fer-mer les yeux sur les injustices qu’elle déchaîne – offreun « exemple humain, un exemple d’humanisme inté-gral ». Ce texte rend hommage au philosophe qui des-cend dans l’arène politique pour défendre ce qu’il croitjuste, en dépit de son dégoût. L’auteur passe en revueles combats successifs qu’a menés Maritain : de ses lut-tes contre les bourgeois qui l’accusaient de commu-nisme en 1935, jusqu’à ses écrits de guerre.

Bibliographie

DEWAN, Lawrence. « Jacques Maritain and Toronto (AVisit to P.I.M.S.-S.M.C. Archives) », « Maritain and Gilsonin Canada [dossier] », Maritain Studies/Études maritainiennes,vol. 15 (1999), p. 13-51.

L’auteur examine le contenu des archives du PontificalInstitute of Mediaeval Studies et du St. Michael’sCollege de l’Université de Toronto. Ce fonds contient,entre autres documents, des lettres échangées entre Jac-ques Maritain, Étienne Gilson et Gerald B. Phelan, àpartir desquelles l’auteur établit les détails de l’organi-sation, des dates et du contenu des cours donnés lorsdes visites de Maritain à Toronto (p. 15-50). On y trouveaussi des lettres de Maritain à divers correspondantsquébécois tels que Guy Sylvestre et Éva Thibaudeau,dont sont cités de larges extraits (p. 13, 17, 21, 23, 40-41), ainsi que quelques indications sur le séjour del’automne 1934 à Montréal et Ottawa (p. 21-22).

*DUBOIS, Fr. André-Émile. « Les “Institutions” dans lachrétienté nouvelle », Les Carnets du théologue, IIIe année, no 3(juin 1938), p. 85-97.

Dernier d’une série de trois articles étudiant respecti-vement les symptômes de la civilisation nouvelle, les ca-ractéristiques des âmes dans cette civilisation, et ici, les ins-titutions qui l’encadreront. Sans qu’il s’agisse à propre-ment parler d’études sur Maritain, les ouvrages et lesconférences où il définit les contours de la « chrétienténouvelle » paraissent en être l’une des inspirations pre-mières ; chacun des articles, en particulier celui du Fr.Dubois, fourmille de références aux écrits de Mari-tain.

DUMAS, Paul. « Jacques Maritain au pays de Canada », LeSemeur, vol. XXX, no 3 (novembre 1934), p. 44-49.

L’auteur fait une élogieuse présentation de Maritain :« L’un des plus magnifiques ambassadeurs que nous

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*——. « L’art dans la cité », La Relève, 2e série, no 3 (novem-bre 1935), p. 84-88.

R. Élie s’appuie sur Art et scolastique et la Réponse à JeanCocteau pour développer une réflexion sur l’art.

*——. « Rupture », La Relève, 2e série, no 6 (février 1936),p. 172-177.

L’influence du philosophe se fait sentir dans cette criti-que du dualisme et de la séparation de l’homme mo-derne, ainsi que dans quelques remarques sur le com-munisme. On trouve une longue citation de Du Régimetemporel et de la liberté.

*——. « Le Christ et l’ouvrier », La Relève, 3e série, nos 5-6(avril-mai 1937), p. 158-160.

Compte rendu d’un numéro de l’hebdomadaire Septconsacré à l’ouvrier (4e année, no 155 (12 février) : cenuméro contient un article de Maritain intitulé « Avecle peuple » [SCJM 10, p. 22]). L’article de R. Élie con-tient une longue citation de Maritain soutenant qu’il faut,à l’exemple du Christ qui a vécu parmi eux et a souf-fert avec eux, exister avec les ouvriers. R. Élie reprendaussi les propos de Maritain qui explique la nécessitéde rejoindre les masses ouvrières et les raisons éthiquespour tenter de le faire : elles sont une réserve de non-pharisaïsme ; elles importent par le nombre, car « c’estdans la masse que la vie jette ses racines » ; et enfin, dupoint de vue historique, la masse ouvrière accède main-tenant à sa majorité.

ESCHMANN, I. Th. « In Defense of Jacques Maritain »,The Modern Schoolman [St. Louis], vol. XXII (May 1945),p. 138-208. [Houde 1973-II, 216]

Défense de Maritain contre C. De Koninck.

Bibliographie

D[URELLI28], Augusto J. « Une nouvelle attaque contreMaritain », Le Canada, lundi 24 mai 1943, p. 4.

Lettre au directeur du journal publiée sous la rubrique« Tribune libre » à la suite des attaques portées contreMaritain par Dom Jamet. L’auteur reprend et contre-dit un à un les arguments de Dom Jamet. À propos del’influence exercée par Maritain en France avant laguerre, il rappelle que « Sept, Temps Présent, La Vie Intel-lectuelle, La Vie Spirituelle, La Revue des Jeunes, l’Aube, Es-prit, s’inspiraient constamment de lui ». Maritain, ajoute-t-il, est attaqué de toutes parts, comme le fut le Christ.

*FOURNIER, R. La Théologie de l’Action catholique, Montréal,Grand Séminaire/Granger Frères (coll. « Theologica MontisRegii »), 1940. [Cloutier 1997, 406]

« Humanisme intégral figure parmi les ouvrages recom-mandés aux futurs prêtres du diocèse de Montréal »,notait Y. Cloutier [1997, 406-407]. En effet, ce livre deMaritain figure dans la bibliographie donnée en débutde volume. Dans son explication des doctrines théo-logiques qui sous-tendent l’action catholique, R. Fournierfait référence à plusieurs ouvrages de Maritain pouréclairer des points tels que l’aspect social de la naturehumaine et la notion de participation (sont cités Huma-nisme intégral, Trois Réformateurs, Du régime temporel et de laliberté, Science et sagesse et Les Degrés du savoir).

*ÉLIE, Robert. « Le sens poétique », La Relève, 1ère série,no 8 (mars 1935), p. 205-207.

R. Élie oppose une poésie moderne abstraite, intellec-tualisée et sans contact avec le réel, à l’image du mondemoderne, à une veine poétique pure, incarnée parC. Baudelaire et P. Claudel, qui rattache le réel aux réa-lités supérieures spirituelles. Ce texte est structuré par lathéorie des âges développée par Maritain dans Huma-nisme intégral.

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——. « De Maritain à l’abbé X, en passant par un laïque »,Vivre, vol. I, no 6 (janvier 1935), p. 18-19.

Réplique de Gagnon à la suite d’une réponse à sonarticle « Un maître, pas un fossile » publiée dans la tri-bune du lecteur de l’Ordre du 12 décembre 1934 (Vi-vre reproduit la lettre). L’échange s’inscrit dans le cadrede la visite de Maritain à Québec. Discussion sur l’en-seignement (laïc et religieux) au Québec.

GAUVREAU, Michael. The Catholic Origins of Quebec’s QuietRevolution, 1931-1970, Montréal, McGill-Queen’s UniversityPress, 2005.

Cet ouvrage défend la thèse voulant que les idéaux dela Révolution tranquille ont été forgés en grande partieà l’intérieur des milieux et institutions catholiques, enparticulier au sein des mouvements d’Action catholi-que spécialisée. M. Gauvreau insiste sur l’identification,dans le discours des promoteurs de l’Action catholi-que, de l’Église aux valeurs de la jeunesse, une idéeempruntée aux mouvements « non-conformistes »français des années 1930 ; à ce titre, l’humanisme inté-gral de Maritain fait partie, selon M. Gauvreau, dessources d’inspiration des mouvements d’Action catho-lique. Nombreuses références à Maritain.

GILMARD [pseudonyme de Gérard Petit]. « Jacques Mari-tain », La Relève, 3e série, no 8 (1937), p. 200-208.

Survol de la vie et de la pensée de Maritain (Antimoderne,Trois Réformateurs, Réflexions sur l’intelligence, Les Degrés dusavoir). Le même texte sera repris dans La Vraie France(voir notice suivante) [Houde 1973-II, 215].

GILMAR [pseudonyme de Gérard Petit]. La Vraie France,Montréal, Fides, 1941.

Série d’essais sur les écrivains français catholiques del’entre-deux-guerres : Ernest Psichari, Charles Péguy,

Bibliographie

FRA DOMENICO. « Chronique. Le Thomisme chez leslaïcs », La Revue dominicaine, vol. XXVII, no 3 (mars 1921),p. 85-87. [Cloutier 1995]

Une partie de la « Chronique » de Fra Domenico pré-sente les informations suivantes. Les formations ly-céenne et universitaire françaises, laïques, tendaient àséparer l’élite du thomisme. Mais les thèses thomistessont maintenant admises comme matières à l’examenen Sorbonne (85). C’est donc la promesse d’un avenirpour la philosophie de l’Église (86). L’auteur souligneles honneurs faits au thomisme dans la Revue universelle,« organe du parti de l’Intelligence ». Maritain est consi-déré ici comme « le philosophe laïque du jour » ; bienqu’il ne soit « pas disciple de Rome », l’auteur citeC. Maurras qui encense Maritain (86). D’autres mou-vements thomistes sont enfin désignés, dont la nou-velle faculté de philosophie de l’Université de Mon-tréal (86-87).

GAGNON, Jean-Louis. « Un maître, pas un fossile », Vivre,vol. I, no 5 (décembre 1934), p. 25-28.

Ce texte fait suite à « Des maîtres, pas des fossiles »,article du même auteur, paru dans le vol. I, no 3, p. 5-7. Cet article établissait un contraste entre le renouveaude la jeunesse française de l’après-guerre et la jeunessecanadienne-française, relevant notamment l’inanité del’instruction au Canada. L’élève y désapprend à pen-ser, manque d’audace, a peur. La jeunesse « veut [...]des chefs [pas des fossiles] qui sauront canaliser sesénergies tout en lui gardant son personnalisme » (7).Le présent article est un compte-rendu commenté d’unecauserie donnée à l’Université Laval à l’intention desprofesseurs de philosophie, laquelle « donne raison »aux propos tenus par J.-L. Gagnon dans le numéroprécédent.

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faut néanmoins tenir compte du fait que l’humanismeintégral dépasse la seule personne de Maritain. P. Héberttraitera cette hypothèse qui touche à la réception qué-bécoise de Maritain à propos de la revue Lectures deFides (chap. 4).

*HERTEL, François. « Position du personnalisme », L’Ac-tion nationale, vol. XI, no 2 (février 1938), p. 95-116.

Hertel s’appuie sur la définition de la civilisation don-née par Maritain dans Humanisme intégral, pour cet essaioù il définit les notions de personne et d’individu, avantd’énoncer ce que seraient les grandes lignes d’une civi-lisation personnaliste.

« Hommage à Maritain », La Rotonde, jeudi 25 avril 1940.[Sylvestre 1983]

Double page consacrée à Jacques et Raïssa Maritaindans le journal des étudiants de l’Université d’Ottawa.Guy Sylvestre est alors directeur de La Rotonde. Con-tient les textes suivants : Swann [pseudonyme de G.Sylvestre], « Le drame de Jacques et Raïssa Maritain » ;Raïssa Maritain, « La Croix du sud » (poème tiré deLettre de nuit) ; Adéodat Zoppin, « Maritain et l’Art » ;Henri Charbonneau, « Maritain et la Cité chrétienne » ;Guy Sylvestre, « La sagesse de Maritain ».

« Hommage à Jacques Maritain », La Nouvelle Relève, vol. II,no 2 (décembre 1942), p. 65-98 et 117.

Numéro spécial à l’occasion du soixantième anniver-saire de Jacques Maritain. Voir les notices de chacundes articles dans cette section.

Bibliographie

Léon Bloy, Paul Claudel, François Mauriac, JacquesMaritain (p. 102-116), Philippe Pétain, Jacques Copeau,Henri Ghéon, Dom Bellot. Le pseudonyme de l’auteurserait la contraction de Gilson et Maritain [Houde 1973-II, 215].

HAUSER, Claude. « Introduction » à D’un monde à l’autre...Journal d’[Auguste Viatte,] un intellectuel jurassien au Québec(1939-1949), vol. I mars 1939 - novembre 1942, Québec/Paris/Courrendlin, PUL/L’Harmattan/Éditions Communi-cation jurassienne et européenne, 2001, p. xi-xlviii.

Auguste Viatte, d’origine suisse et naturalisé français,est professeur de littérature française à l’Université La-val de 1933 à 1949. Cette introduction à la publicationde son journal offre un tour d’horizon critique des re-lations, directes et indirectes, entre lui et Maritain. Cel-les-ci restent en général assez distantes. Les deux hom-mes sont appelés à collaborer, notamment, au mo-ment de la rédaction du manifeste Devant la crise mon-diale : manifeste de catholiques européens séjournant en Améri-que (1942), rédigé à l’initiative d’A. Viatte et du PèreDelos. Le texte du journal présente quelques passagessur Maritain.

HÉBERT, Pierre et Élise SALAÜN. Censure et littérature auQuébec. Des vieux couvents au plaisir de vivre 1920-1959, Mon-tréal, Fides, 2004.

P. Hébert voit l’humanisme intégral comme « une phi-losophie de récupération censoriale », une manière pourles censeurs d’intérioriser la censure. « L’humanismeintégral récupère les velléités d’émancipation person-nelle en les intégrant dans une perspective globale, chré-tienne. Toutes les activités de la personne, toutes lesentreprises sociales doivent être comme innervées parla divinité. » (128) Il ne nomme pas Maritain ici, mais yfera référence plus loin dans la même optique (221). Il

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GIRARD, René. « L’œuvre de Maritain. Pour la présenterau public », Le Devoir, samedi 20 octobre 1934, p. 1-2.[Houde 1973-II, 215]

Article sur la pensée de Jacques Maritain en général.Distinction dans l’œuvre de Maritain entre les ouvra-ges polémiques (contre les erreurs philosophiques mo-dernes) et les ouvrages constructifs (cherchant à récon-cilier le monde moderne avec la philosophia perennis).Dessein apostolique de son œuvre. Présentation de plu-sieurs livres de Maritain et suggestions de lecture. Artet scolastique est qualifié de chef-d’œuvre. Trois Réforma-teurs révèle, selon l’auteur, un « grand historien ». R.Girard conclut en affirmant que l’œuvre de Maritain« mérite d’être lue ».

ISWOLSKY, Hélène. « La maison de Meudon », dans Autemps de la lumière, Montréal, Éditions de L’Arbre, 1945,p. 83-100. [Houde 1973-I, 168]

Souvenirs des soirées de tenues par les Maritain dansleur maison de Meudon.

JAMET, Dom Albert, O.S.B. « M. Maritain. Un penseur ?Oui. Mais un chef ? », Le Devoir, samedi 15 mai 1943, p. 1-2. [Houde 1973-II, 216]

Début d’une controverse qui opposera le religieux auphilosophe. L’auteur attaque Maritain à la suite de ladiffusion d’une causerie, les 2 et 9 mai 1943, sur lesondes de Radio-Canada. Dom Jamet lui reproche sonphilosémitisme, son retard à condamner L’Action fran-çaise avant sa mise à l’Index, ses positions durant le conflitespagnol et son opposition à Vichy. Il rappelle quel’Église de France appuie le gouvernement de Vichy etque Rome l’a reconnu. L’auteur appuie à plusieurs re-prises sur la question juive, qui obsèderait et aveugle-rait Maritain ; de même il cherche à le discréditer àcause de sa condition de converti. Son objectif est de

Bibliographie

HOUDE, Roland. « Mort du philosophe, vie de la philoso-phie — Jacques et Raïssa Maritain au Québec », Relations,no 383 (juin 1973), p. 166-168.

À l’occasion de la mort de Jacques Maritain, R. Houdelivre ses souvenirs du philosophe et de son influenceau Québec. Repris dans Notes et documents, no 13 (octo-bre-décembre 1978), p. 16-19.

——. « Jacques et Raïssa Maritain au Québec, II — élé-ments de bibliographie critique », Relations, no 384 (juillet-août 1973), p. 214-217.

Repris sous le titre « Répertoire bibliographique Mari-tain au Québec », dans Notes et documents, no 26 (jan-vier-mars 1982), p. 32-42.

*HURTUBISE, Claude. « De la Révolution spirituelle,préliminaires », La Relève, 2e série, no 3 (novembre 1935),p. 78-83. [Houde 1973-II, 215]

Le propos de C. Hurtubise repose sur le présupposéde la « nécessité d’une révolution où l’esprit soit le prin-cipe informant » (78). L’auteur tente de définir cetterévolution spirituelle qui s’accomplit dans la longuedurée et dont le « but » (80), l’« idéal » (81), reste indé-terminé (comme demeure volontairement indéterminéle moment de sa réalisation). Cette définition de la ré-volution se développe avec l’aide de citations et réfé-rences à Mounier et à Maritain, ainsi qu’au manifestePour le bien commun29. L’auteur aborde enfin l’exemplede la guerre d’Éthiopie en se référant notamment aumanifeste Pour la justice et la paix30 et à la revue Sept (82-83).

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*LAURENDEAU, André. Notre nationalisme, Montréal,Tracts Jeune-Canada, no 5 (1935).

La première partie de cet essai est structurée selon ladistinction maritainienne entre l’agir en tant que chrétienet l’agir en chrétien. L’auteur cite, pour référence, un ar-ticle de Maritain paru dans Sept. La seconde partie dé-veloppe la forme de nationalisme adoptée parA. Laurendeau et s’éloigne de Maritain.

——. « On juge la “Relève” », Le Devoir, samedi 24 octobre1936, p. 2.

Le sous-titre précise : « Témoignage du P. PaulDoncœur et de MM. Jacques Maritain, EmmanuelMounier, Daniel-Rops et Emile Baas ». L’article estrepris dans L’Action catholique du 4 novembre 1936,p. 4 [SCJM 10, p. 19].

——. « Un “hommage à Jacques Maritain” », L’Actionnationale, vol. XX, no 4, (décembre 1942), p. 319-323.

Écrit à l’occasion de la parution du numéro hommagede La Nouvelle Relève. Laurendeau rappelle la dette pas-sée envers Maritain et lui rend hommage malgré lesdivergences présentes (à propos de la guerre). L’auteurtermine en affirmant la nécessité d’une indépendanced’esprit et de conscience par rapport au maître, et dansl’absolu.

*LAURENDEAU, Arthur. « Le catholicisme et l’art »,L’Action française, vol. X (juillet 1923), p. 5-15.

Étude sur les relations entre le beau et le vrai, à traversune critique de l’esthétique classique et un plaidoyer pourune esthétique catholique délivrée de la morale. Plu-sieurs références à Art et scolastique (Paris, Librairie del’Art Catholique, 1920).

Bibliographie

détruire le capital symbolique de Maritain. Il affirmeque s’il n’était de la guerre, celui-ci ne serait pas re-connu en France, ni écouté de personne. Son succès enAmérique et ses prises de positions politiques irritentDom Jamet : il veut bien reconnaître ses qualités dansle domaine de la spéculation philosophique, mais re-fuse de le considérer comme un chef. Le rôle de Ma-ritain comme médiateur après la condamnation deL’Action française est perçu ici négativement, comme unsigne d’aveuglement.

——. « Dom Jamet répond à M. M. Raymond », Le Canada,31 mai 1943.

Réponse à l’article de Marcel Raymond du 21 mai (voirnotice ci-dessous).

LAFLEUR, Bruno. « Promenade sur la terrasse avec Jac-ques Maritain », L’Événement, mardi 9 octobre 1934, p. 3.

Entrevue avec Maritain : il est question de Péguy etPsichari et des relations qu’il a entretenues avec eux ;Maritain commente et corrige les propos des frèresTharaud sur le sujet.

——. « M. Jacques Maritain », L’Hebdo Laval, 12 octobre1934, p.1-231.

Hommage à Maritain et reconnaissance de son ensei-gnement et de son influence. « M. Jacques Maritain n’estpas un philosophe – ou plutôt c’est un philosophe vé-ritable [...]. Son enseignement s’adresse à des esprits, età des esprits supérieurs, mais aussi et peut-être davan-tage à des cœurs. Ne lui faisons pas l’injure de l’admi-rer en dilettantes. »

LAMONDE, Yvan. Histoire sociale des idées au Québec. 1896-1929, Montréal, Fides, 2004.

Le chapitre VIII porte sur L’Action française de Mon-tréal et de Paris.

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——. « La pensée de Saint Paul », La Nouvelle Relève, vol. I,no 3 (décembre 1941), p. 164-175.

Étude sur le livre du même nom paru à New York(Maison française, 1941), un choix de textes de saintPaul présentés et commentés par Maritain. J. Le Moyney décrit un Maritain non seulement philosophe, maisthéologien et mystique (165), qui offre sur saint Paul« une initiation très simple et très accessible », et nonune biographie ou un commentaire exégétique (169).Il souligne la pertinence du chapitre intitulé « le mys-tère d’Israël », « où [Maritain] réunit une série de textes[…] d’une importance extrême en raison des ravagescroissants que fait chez nous l’antisémitisme » (171-172).

——. « Dom Jamet à côté de M. Maritain », La NouvelleRelève, vol. II, no 7 (juin 1943), p. 385-390.

Réponse à Dom Jamet (Le Devoir, 15 mai 1943). Ladéfense de Maritain s’appuie sur son influence auprèsdes catholiques de France et du monde entier. À pro-pos de l’affaire de L’Action française, Le Moyne écrit :« est-ce donc si extraordinaire que la lumière lui soitvenue de Rome ? Est-ce donc si honteux que d’avoirobéi au chef de l’Église et obéi jusqu’au plus intime deson être, jusqu’à modifier intégralement et sans retourses opinions et jusqu’à abolir tout regret ? Si tel est lecas [...] c’est tout à son honneur [...] » (387). Le Moynetermine sur une peinture de « l’homme de droite »(389).

——. « Les Maritain — de loin, de près », Écrits du Canadafrançais, no 49 (1983), p. 47-71.

Témoignage sur les relations de l’auteur et du groupede La Relève avec les Maritain, relations intellectuelles,éditoriales et amicales dont l’auteur évoque les accordset les désaccords. J. Le Moyne affirme avoir pris sesdistances avec la philosophie de Maritain. Texte daté

Bibliographie

——. « Sur deux livres de Maritain », L’Action nationale,vol. XVII, no 3 (mars 1941), p. 236-242.

Réflexion à partir de Crépuscule de la civilisation (1939) etÀ travers le désastre (1940). L’auteur émet des réservessur le dernier volume à cause de la sévérité de Maritainenvers le maréchal Pétain.

LE CAVALIER, Louis. « Un apôtre laïc : Jacques Mari-tain », Le Semeur, vol. XXV, no 1 (août 1928), p. 6-8.

Article extrêmement élogieux à l’égard de Maritain :considéré comme « à coup sûr le plus ardent et le plusclairvoyant » parmi les artisans de la « magnifique flo-raison catholique » de France. L’auteur rappelle sa con-version puis sa découverte de saint Thomas, mentionnequelques controverses (avec le Père L. DeGrandmaison), cite un passage de la Réponse à Jean Coc-teau et mentionne élogieusement Antimoderne et Primautédu spirituel. Il admire les qualités de mystique de Mari-tain et le considère comme « l’un des modèles les plusparfaits de l’apôtre laïc. »

E. L. [Eugène L’Heureux]. « Petites notes : Christianisme etmonde chrétien », L’Action catholique, lundi 15 octobre 1934,p. 4.

Réflexion sur le manque de christianisme de plusieurschrétiens, suscitée par les conférences de Maritain.

LE MOYNE, Jean. « Illuminations et sécheresses », LaRelève, 4e série, no 4 (avril 1938), p. 111-117.

Recension du numéro d’octobre 1937 des Étudescarmélitaines (22e année, vol. II) sur la psychologie reli-gieuse et contenant un article de Raïssa Maritain intitulé« Du recueillement poétique ».

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MICHEL, Florian. « Jacques Maritain en Amérique du Nord– I : 1933-1940 », Cahiers Jacques Maritain, no 45 (décembre2002), p. 27-86.

——. « Un réseau d’intellectuels européens en Amérique duNord. Diffusion, réception et américanisation de la penséecatholique. Années 1920 - années 1960 », doctorat enHistoire, Paris, École pratique des Hautes Études, 2006.

MICHON, Jacques. « Les Éditions de l’Arbre », Voix etImages, 41 (hiver 1989), p. 194-210.

Histoire et analyse de la maison d’édition fondée en1941 par R. Charbonneau et C. Hurtubise de La Re-lève. Maritain est considéré comme un parrain des Édi-tions de l’Arbre. Crépuscule de la civilisation est leur pre-mière parution en 1941 et remportera un bon succès(197). Maritain a une influence certaine sur les orienta-tions de la maison d’édition, dirige officieusement unecollection (« Problèmes actuels »), en plus de mettre leséditeurs en contact avec plusieurs auteurs (198-199).On se rappelle que Y. Cloutier parlait de « tutelle édi-toriale » [Cloutier 2002]. Selon J. Michon, « La dimi-nution de cette influence se fait sentir après 1945 » (199).

——. « Les Éditions de l’Arbre 1941-1948 », dans JacquesMichon (dir.), Éditeurs transatlantiques, Sherbrooke/Mon-tréal, Ex libris/Tryptique, 1991, p. 13-41.

« M. Jacques Maritain rencontre les jeunes », La Patrie,vol. 56, no 199 (17 octobre 1934), p. 9.

Très court article faisant état d’une rencontre de Mari-tain avec les jeunes de La Relève et des Jeune-Canada, laveille.

MOUGEL, René. « Les années de New York, 1940-1945 »,Cahiers Jacques Maritain, nos 16-17 (avril 1988), p. 7-28.

Bibliographie

de septembre 1983. Repris dans Roger Rolland et GillesMarcotte (dir.). Jean Le Moyne. Une parole véhémente, Mon-tréal, Fides, 1998.

LONGPRÉ, Anselme. La pensée catholique, Montréal, Édi-tions du Devoir, 1936. [Cloutier 1997]

« Essai bibliographique d’études religieuses [composéd’]un choix succinct de quelques-uns des livres les pluspropres à faciliter l’étude de la pensée catholique, con-dition indispensable de l’Action catholique et de touteffort de restauration sociale » (7). Huit ouvrages deMaritain sont répertoriés et commentés (notices dansla section 3.2).

MAURER, Armand. « Some memories of Jacques Mari-tain », « Maritain and Gilson in Canada [dossier] », MaritainStudies/Études maritainiennes, vol. 15 (1999), p. 11-12.

Premier texte d’un dossier comprenant trois articlessur Maritain au Canada et portant principalement sursa présence à Toronto.

MEUNIER, E.-Martin et Jean-Philippe WARREN. Sortir dela « Grande noirceur ». L’horizon personnaliste de la Révolutiontranquille, Sillery, Septentrion, 2002.

Ce petit ouvrage défend la thèse voulant que la Révo-lution tranquille aurait obéi à une inspiration profon-dément religieuse, à travers un certain nombre d’intel-lectuels influencés par le catholicisme « non-confor-miste » des mouvements Ordre nouveau et Esprit. Si l’in-fluence de Maritain au Québec est très peu étudiée ici(l’accent est mis sur l’influence d’E. Mounier et d’Es-prit dans l’après-guerre), les auteurs reconnaissent, dansla première partie du livre, son rôle dans le développe-ment d’une « éthique personnaliste » à l’intérieur de lapensée catholique, opposée à l’« éthique post-triden-tine » traditionnelle.

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théologiques. Faut-il y voir le reflet de l’importance desquestions logiques et épistémologiques à cette étape dela formation ? Sans doute. À ce titre on peut donc direque c’est le néo-scolastique plutôt que le penseur poli-tique qui aura touché les théologiens québécois » (130).

POMEYROLS, Catherine. « Les échos de la condamnationde L’Action française au Québec », Sources. Travaux historiques,53-54 (2000), p. 61-72.

C. Pomeyrols analyse les réactions québécoises à la con-damnation par Rome de L’Action française de Paris àtravers le traitement de l’événement dans divers jour-naux de la province : Le Devoir, L’Action catholique, LeCourrier de Saint-Hyacinthe, Le Progrès du Saguenay, LeSemeur, La Revue dominicaine. Selon l’auteur, le reniementde L’Action française ne fut pas chose facile. Elle inter-prète le silence de certains journaux sur l’affaire aprèsla condamnation dans le sens d’un désaccord avecRome.

RAYMOND, Marcel. « La jeunesse de Jacques Maritain »,La Nouvelle Relève, vol. II, no 2 (décembre 1942), p. 90-98 et117.

Sur les relations de Maritain avec E. Psichari, C. Péguy,H. Bergson et L. Bloy, dans un numéro hommage àMaritain.

——. « Jacques Maritain, le Roseau d’Or et la NouvelleRevue française », Le Canada, 21 mai 1943, p. 4. [Cloutier2002, 231]

Réponse à Dom Jamet. L’auteur perçoit chez DomJamet une crainte « de se sentir dépossédé par un laïcdes textes évangéliques, apostoliques [...] ». Il critiqueles moyens mensongers utilisés par Dom Jamet (unclerc) : ce dernier associe Maritain à la NRF pour lais-ser entendre qu’il a des sympathies communistes, et le

Bibliographie

O’CONNOR, John J. « Fraternal Twins: The Impact ofJacques Maritain on Callaghan and Charbonneau », Mosaic:A Journal for the Interdisciplinary Study of Literature, 14, 2(1981), p. 145-163.

L’auteur étudie l’influence de Maritain sur les romansIls posséderont la terre de Robert Charbonneau (1941) etThey Shall Inherit the Earth de l’écrivain canadien Mor-ley Callaghan.

PARTIKIAN, Pierre et Louis ROUSSEAU. La Théologiequébécoise contemporaine (1940-1973) : genèse de ses producteurs ettransformations de son discours, Québec, Institut supérieur dessciences humaines, Université Laval, 1977.

Étude surtout quantitative basée en grande partie surun questionnaire distribué à environ 1000 théologiensquébécois. En ce qui concerne leurs influences intellec-tuelles, les répondants ont dû nommer les trois auteursles ayant le plus influencés à trois moments de leurcarrière (études de 1er cycle, études avancées et carrièred’enseignant). « [N]ous avons pu constater un groupede plus de trois cent producteurs d’influence [dans le-quel] dominaient un certain nombre de ténors [...] »,dont Maritain fait partie (103, en note). Les auteurschoisissent d’étudier ces influences selon la nationalitédes auteurs (influence française, italienne, allemande, etc.)(104). Thomas d’Aquin est l’influence dominante detous les théologiens interrogés ; elle n’a jamais cessé decroître de 1920 à 1952 (122). L’influence française estsurtout celle de « l’école dominicaine française du XXe

siècle » (127) : y figurent le P. Garrigou-Lagrange (127-129), Maritain (129-130), M.-D. Chenu et Y. Congar.Maritain représente le « catholicisme [...] comme unealternative valable à la pensée contemporaine » (129).« Il est assez remarquable de constater que Maritain aexercé le plus clair de son influence au Québec dans lesannées trente, et cela au niveau des premières Études

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RÉGIS, L.-M., O.P. « Un livre. La Philosophie de la nature.Quelques “apories” », Études et Recherches (Ottawa), Cahier 1(1936), p. 127-156. [Houde 1973-II, 215]

« La première et peut-être la seule étude canadienne enprofondeur d’un ouvrage de Maritain », selonR. Houde. L’auteur prend un livre de Maritain, LaPhilosophie de la nature : essai critique sur ses frontières et sonobjet (Paris, Téqui, 1935), pour prétexte à ses réflexionssur les relations entre Philosophie et Sciences. Il entre-prend une critique serrée du livre, portant dans un pre-mier temps sur la notion d’abstraction, puis dans unsecond temps sur la distinction entre la philosophie dela nature et la métaphysique. L’étude est appuyée surune lecture des textes d’Aristote et de saint Thomas,dont l’auteur tire des conclusions qu’il confronte aveccelles de Maritain, généralement pour les réfuter. Enrésumé, l’auteur reproche à Maritain de s’éloigner de laposition thomiste. La critique, ici, n’est nullement pré-sentée sur le ton d’une attaque, mais bien comme unediscussion toute philosophique : l’auteur remercie Ma-ritain d’avoir éveillé ses réflexions.

*LA RELÈVE. « Pour une démocratie vraie », La Relève,4e série, no 9 (juillet 1939), p. 265-267.

Prise de position contre la guerre et pour un « renou-vellement des formes actuelles de la démocratie », afinde parvenir à une « démocratie véritable qui sauvegar-derait les droits de la personne en l’intégrant dans unecommunauté humaine, en établissant une tension fé-conde entre le bien de l’individu et le bien commun. »On trouve plusieurs références et citations de Maritain.

Bibliographie

blâme d’avoir publié au « Roseau d’Or » un livre quin’y a jamais paru ! Pour M. Raymond, le courage deMaritain fait contraste avec ces attaques malhonnêtes.Il voit dans l’article de Dom Jamet un exemple dudésaveu de l’action catholique des laïcs prônée par lePape Pie XI. Il ne répond pas aux accusations de Jameten ce qui a trait à l’affaire de L’Action française.

——. « Dom Jamet ou l’art d’avoir raison », Le Canada, 2juin 1943, p. 4. [Cloutier 2002, 231]

Réponse à une lettre aux lecteurs de Dom Jamet, elle-même réponse à l’article du 21 mai de M. Raymond.Pas de mention de l’affaire de L’Action française.

[La rédaction]. « M. Maritain, la France et nous », Les Car-nets viatoriens, Xe année, no 3 (juillet 1945), p. 161-167.[Houde 1973-II, 216]

Article polémique. Maritain a critiqué les rédacteurs dela revue, partisans de Pétain, dans un article publié àParis sous le titre : « La France vue d’Amérique ». Unhebdomadaire montréalais (pas nommé) a secondéMaritain dans ses critiques. Voici la réponse. L’auteursemble vouloir polariser la querelle pour opposer clercset laïcs, car Maritain est taxé d’anticléricalisme. Ontrouve une longue critique de la France anticléricale dela Troisième République, qui a ébranlé, selon l’auteur,la foi en la France du Canadien moyen (162-164). Il estreproché à Maritain de « collaborer » avec des pen-seurs athées (164-65). L’auteur s’élève contre le libéra-lisme, qui est « le fanatisme des faibles », et reproche àMaritain de souhaiter « une France chrétienne et libé-rale » (166). La France, conclut-il, faillit à sa mission, àson élection chrétienne (166-67).

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souvenir : un idéal. Le jeune homme a bien assimilé laleçon de Maritain et reprend ses idées : sanctificationde la vie profane, chrétienté analogue au monde mé-diéval, etc. É. Simard trouve dans l’enseignement deMaritain un appel à l’apostolat des Canadiens françaisen Amérique du Nord.

SIMON, Yves R. « Pour le soixantième anniversaire deJacques Maritain », La Nouvelle Relève, vol. II, no 2 (décem-bre 1942), p. 66-69.

Dans un numéro spécial consacré à Maritain. Ancienélève de Maritain du temps de son enseignement à Parisdurant les années 1920, Y. Simon rappelle les soiréesde Meudon, où l’on étudiait la philosophie de saintThomas en restant « aussi loin que possible de touteversion rationaliste du thomisme » et fait l’éloge desMaritain. Le même texte paraît dans Le Canada du sa-medi 23 janvier 1943, p. 4.

SWEET, William. « Études maritainiennes en Amérique duNord », Cahiers Jacques Maritain, no 42 (juin 2001), p. 57-63.

Sur les deux associations Maritain aux États-Unis et auCanada.

SYLVESTRE, Guy. « Jacques Maritain apôtre de l’esprit »,Le Droit, samedi 30 août 1941, p. 18. [SCJM 19, p. 35]

Toute la page est consacrée à Jacques et Raïssa Mari-tain et comprend des extraits de leurs œuvres (voirnotices dans les sections 2.1 et 2.2).

——. « Une poétesse mystique », Le Canada français,vol. XXX, no 1 (septembre 1942), p. 30-35. [Sylvestre 1983,112]

Étude de l’œuvre poétique de Raïssa Maritain. Sa poé-sie est, pour l’auteur, une preuve que « l’amour mysti-que n’abolit point l’amour humain, qu’il ne faut pas

Bibliographie

ROY, Christian. « De La Relève à Cité Libre : avatars dupersonnalisme au Québec », Vice versa, décembre 1986-janvier 1987, p. 14-16.

Survol de l’influence personnaliste au Québec, de LaRelève à Parti Pris en passant par Cité Libre. L’auteursoutient la thèse selon laquelle le personnalisme aurapermis à la notion d’individu de « s’acclimater » auQuébec, en quelque sorte malgré elle, puisque le per-sonnalisme se méfie de la notion d’individu, à laquelleil substitue celle de personne.

ROY, Maurice, prêtre. « Jacques Maritain », L’Action catholi-que, vendredi 12 octobre 1934, p. 4.

Publié dans la colonne principale de la page éditoriale.Comparé à E. Psichari et à C. Péguy, avec qui il sym-bolise pour les Canadiens le renouveau catholique fran-çais, Maritain est considéré par l’auteur comme le plusillustre de ce mouvement. M. Roy se réjouit que la con-naissance de l’homme (par ses conférences) s’ajoute àcelle des livres : il voit en lui un modèle pour le Canadafrançais, qui doit allier à « l’effervescence de la jeunesse »les « fortes disciplines de la pensée ».

Le Scrutateur. « Pétain ou Maritain ? », Les Carnets viatoriens,VIe année, no 2 (avril 1941), p. 129-130. [Houde 1973-II,216]

Critique de l’article paru dans La Revue dominicaine enjanvier 1941 : « Le peuple de France ».

SIMARD, Émile. « Jacques Maritain », L’Action catholique,samedi 20 octobre 1934, p. 17.

Cet article est publié dans la page « La voix de la jeu-nesse catholique » et l’auteur est membre du comitérégional de l’ACJC. À la suite des conférences de Ma-ritain à Québec, le philosophe est décrit comme un« apôtre » qui a laissé dans l’âme des jeunes plus qu’un

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VOYER, Raymond M., Dominicain. « Maritain à Mon-tréal », L’Action nationale, vol. IV, no 3 (novembre 1934),p. 193-201.

L’auteur analyse l’impression produite par les confé-rences de Maritain (octobre 1934), en particulier chezles laïcs. Une bonne part des auditeurs (laïcs d’âge mur)n’avait pas fait de philosophie depuis le collège : « D’unbeau mouvement d’ensemble, les laïcs s’étaient [jadis]désintéressés d’une culture qui regardait les “curés”. Orils étaient là [...] ». Ceux-ci eurent-ils des difficultés àsuivre le philosophe ? Eurent-ils des remords d’avoir« abandonné » la pensée ? (194, 197) « Ce qu’ils s’étaienthabitués à regarder comme de vaines querelles [...] toutcela s’animait soudain, laissait transparaître des influen-ces latentes et impérieuses à travers les angoisses et lesespoirs de nos situations sociales bien actuelles et bienconcrètes. [...] se dessinait [...] cette idée de la portéepratique, dans la vie d’une société, des abstractions deses philosophes. » (195) Une autre part de l’auditoireétait composée de jeunes (étudiant(e)s et jeunes pro-fesseurs), « plus avisés que leurs aînés, énergiquementconseillés par l’inquiétude de leur époque, [...] assez bienpréparés à une telle parole » par les cours suivis et lalecture des ouvrages de Maritain (197). L’auteur se fé-licite du chemin parcouru depuis vingt ans (198). Ilexprime, même en tant que prêtre, son admiration pourMaritain et pour sa « façon d’être catholique » (199).

——. « Alexis Carrel et Jacques Maritain : l’humanismeintégral à la rescousse de la science », La Revue dominicaine,vol. XLIII, no 2 (septembre 1937), p. 61-70.

L’auteur entreprend une critique de L’Homme, cet in-connu d’A. Carrel. Il approuve ses critiques des sciencesexactes et sa volonté de réintégrer le spirituel dans l’étudede l’homme, mais regrette qu’il ait entrepris d’étudierla part spirituelle de l’homme précisément à l’aide des

Bibliographie

nécessairement haïr le monde pour aimer Dieu ».L’auteur désire manifestement résoudre le conflit op-posant corps et esprit dans la pensée catholique.

——. « Raïssa Maritain », Poètes catholiques de la Francecontemporaine, Montréal, Fides, 1943, p. 95-105. [Houde1973-II, 216]

Reprise du texte de la notice précédente.

——. « Le don d’écouter chez Maritain », Écrits du Canadafrançais, no 49 (1983), p. 88-90.

Témoignage sur les relations de l’auteur avec les Mari-tain ; informations sur le programme de l’Institut dephilosophie de l’Université d’Ottawa (1937-1941) etsur l’influence qu’y a exercée Maritain.

Un néophyte édifié. « Les parias, les intouchables et DomJamet », Le Canada, samedi 29 mai 1943, p. 4.

L’auteur de cette lettre au directeur du Canada défendMaritain et attaque Dom Jamet avec les armes de l’iro-nie.

VANDERPELEN-DIAGRE, Cécile. « À l’ombre desclochers. Le monde catholique et la littérature au Québec(1918-1939) », Revue d’histoire de l’Amérique française, 58, 1(été 2004), p. 3-26.

Discussion de l’influence de Maritain sur les membresdu mouvement de La Relève en ce qui a trait aux rela-tions entre littérature et morale (p. 20-24). L’horizonde l’article est l’émergence d’une écriture romanesquecatholique engagée (sur le modèle du « renouveau ca-tholique » français mené par Bernanos, Mauriac etDaniel-Rops), qui tarde à apparaître au Québec, ce quecherche à expliquer l’auteur.

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du fonds est en traitement au moment où nous soumettons notre travailpour publication.9 Les éditeurs des Œuvres complètes de Jacques et Raïssa Maritain attribuent cetexte, « en bonne part, à la plume de Jacques Maritain » (vol. XV, Fribourg/Paris, Éditions universitaires/Éditions Saint-Paul, 1995, p. 881). Le journald’A. Viatte contredit cette version : C. Hauser (dir.), D’un monde à l’autre...Journal d’un intellectuel jurassien au Québec (1939-1949), vol. I, mars 1939 - novem-bre 1942, Québec /Paris/Courrendlin, PUL /L’Harmattan/Éditions Com-munication jurassienne et européenne, 2001, p. 295.10 Cette revue, éditée par Fides de 1943 à 1946, a été fondée par Guy Sylvestre,par ailleurs chroniqueur littéraire au quotidien Le Droit d’Ottawa. L’expres-sion « Gants du ciel » est tirée de la Lettre à Jacques Maritain de Jean Cocteau (cf.Œuvres complètes de Jacques et Raïssa Maritain, vol. III, Fribourg, Éditions uni-versitaires, 1984, p. 669), ce qui indique bien l’importance de la figure deMaritain pour la publication et son fondateur. Sylvestre s’explique à ce sujetdans le texte liminaire du premier numéro.11 Les Carnets viatoriens prennent la suite des Carnets du théologue et sont pu-bliés à Joliette.12 Source : Bibliothèque et Archives nationales du Québec,www2.bnquebec.ca/rfq/auteurs/012182.htm (juillet 2007).13 R. Élie, « Pierre Emmanuel », Œuvres, Montréal, Hurtubise HMH, 1979,p. 77-78.14 Source : Bibliothèque et Archives nationales du Québec,www2.bnquebec.ca/rfq/auteurs/012182.htm (juillet 2007).15 Source : Bibliothèque et Archives nationales du Québec,www2.bnquebec.ca/rfq/auteurs/012182.htm (juillet 2007).16 Référence trouvée dans « Œuvres de Raïssa Maritain. Bibliographie » dansJ. et R. Maritain, Œuvres complètes, vol. XV, Fribourg/Paris, Éditions universi-taires/Éditions Saint-Paul, 1995, p. 875.17 Ibid., p. 87518 Ibid., p. 876.19 Ibid., p. 878.20 Ibid., p. 879.21 Ibid., p. 879.

Bibliographie

méthodes expérimentales. Cela fait du livre d’A. Carrel,selon R. Voyer, « une immense glorification de l’espritscientifique ». L’auteur trace néanmoins des liens entreles « doléances [du Dr Carrel] contre la fausse notionde la nature de l’homme » et la critique de l’inhumanitédu matérialisme moderne développée par Maritaindans Humanisme intégral. Il conseille la lecture parallèledes deux ouvrages : « Je ne sais que [Humanisme inté-gral] pour faire comprendre exactement le livre deCarrel. »

NOTES

1 Les résultats de cette enquête menée par Le Nouveau Journal sont présentéspar G. Lesage, o.m.i., dans Notre éveil culturel, Montréal, Rayonnement, 1963,p. 135-170.2 L[ionel] G[roulx], « Primauté du Spirituel, par Jacques Maritain […] », L’Ac-tion française, vol. XVIII, no 3 (septembre 1927), p. 188.3 Nos 4-5, novembre 1982 (pour les années 1930-1934), no 10, octobre 1984(1935-1938), no 12, novembre 1985 (1924-1929), no 15, octobre 1987 (1906-1923) et no 19, octobre 1989 (1939-1945). Les renvois à ces publications sontindiqués par le sigle SCJM suivi du numéro du supplément et de la page,entre crochets dans le corps du texte.4 Nom de famille de l’auteur, date de publication, numéro de page.5 Nous remercions Michel Lacroix de l’Université du Québec à Trois-Rivièresde nous avoir donné accès à la photocopie de la correspondance Maritain-Hurtubise conservée à BAC.6 Voir le site du Centre : www.maritain.fr.7 Voir l’article de L. Dewan, « Jacques Maritain and Toronto (A Visit to P.I.M.S.-S.M.C. Archives) », Études maritainiennes / Maritain Studies, vol. 15 (1999), p.13-51.8 Ces lettres permettent de croire que le fonds Guy Sylvestre à BAC est d’unerichesse égale à celle du fonds Claude Hurtubise. Le fonds Sylvestre à BAC nesemble pas encore ouvert (juillet 2007) à la consultation et la notice descriptive

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22 Ibid., p. 87923 Ibid., p. 883.24 Cité dans ibid., p. 887.25 Référence fournie par J. Blais, De l’ordre et de l’aventure, la poésie au Québec de1934 à 1944, Québec, PUL, 1975, p. 34.26 Un certain nombre de comptes rendus d’œuvres de Raïssa Maritain sontsignalés par P. Beaulieu et G. Sylvestre dans les témoignages et notes explica-tives accompagnant la publication de leurs échanges épistolaires avec les Mari-tain dans les Écrits du Canada français no 49 (1983). La plupart de ces mentionssont imprécises et nous n’avons pu retracer les articles en question : selonP. Beaulieu, Les Grandes Amitiés et Marc Chagall sont recensés dans Le Canada ;G. Sylvestre affirme avoir donné dans Le Droit des articles sur Les Aventures dela grâce et La Conscience morale et l’état de nature.27 Référence fournie par J. Michon, Histoire de l’édition littéraire au Québec au XXe

siècle. Volume 1 : La naissance de l’éditeur (1900-1939), Montréal, Fides, 1999, p.357.28 Nom illisible sur le microfilm du Canada.29 Pour le bien commun. Les responsabilités du Chrétien et le moment présent, Paris,Desclée de Brouwer, 1934. Paru à la suite des émeutes du 6 février 1934 enFrance, lesquelles ont failli mener à une prise de pouvoir par des mouvementsd’extrême-droite. Ce manifeste condamnant autant le fascisme que le com-munisme porte la signature de Jacques Maritain. Cf. H. Bars, Maritain en notretemps, Paris, Bernard Grasset, 1959, p. 381 ; Bernard Doering, Jacques Maritainand the French Catholic Intellectuals, Notre Dame, University of Notre DamePress, 1983, p. 70-71.30 En réponse au Manifeste des intellectuels français pour la défense de l’Occidentpublié en octobre 1935 à l’initiative d’Henri Massis pour empêcher les sanc-tions contre l’Italie, Maritain signe le Manifeste pour la justice et pour la paix,publié dans Sept et La Vie catholique, dans lequel sont condamnés l’invasionitalienne de l’Éthiopie et le massacre de sa population. Cf. Bars, Maritain ennotre temps, p. 382.31 J. Blais répertorie cet article, avec un titre différent, dans De l’ordre et del’aventure, la poésie au Québec de 1934 à 1944, Québec, PUL, 1975, p. 34.

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