DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

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= 1 = MINISTÈRE DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE -----=====----- UNIVERSITÉ DE TOAMASINA -----=====----- FACULTÉ DES LETTRES & SCIENCES HUMAINES -----=====----- DÉPARTEMENT DE PHILOSOPHIE -----=====----- Fahaizaña sy Fañahy DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX Mémoire en vue de l’obtention du diplôme de Maîtrise en philosophie présenté par : M lle RANDRIAMANANTOANINA Miarintsoanirina Sous la direction de Monsieur RAZAFITSIAMIDY Antoine Maître de Conférences 20 Décembre 2011 Année universitaire : 2011

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= 1 =

MINISTÈRE DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE

-----=====----- UNIVERSITÉ DE TOAMASINA

-----=====----- FACULTÉ DES LETTRES & SCIENCES HUMAINES

-----=====----- DÉPARTEMENT DE PHILOSOPHIE

-----=====-----

Fahaizaña sy Fañahy

DU MATERIALISME ANCIEN

AU MATERIALISME DE KARL MARX

Mémoire en vue de l’obtention du diplôme de Maîtrise en philosophie présenté par :

M lle RANDRIAMANANTOANINA Miarintsoanirina

Sous la direction de Monsieur RAZAFITSIAMIDY Antoine Maître de Conférences

20 Décembre 2011

Année universitaire : 2011

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DÉDICACE

À mes parents.

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REMERCIEMENTS

Nous pouvons dire que le présent ouvrage n’aurait pu être réalisé

sans l’aide de personnes de très bonne volonté avec leurs expériences et

leur compétence.

Pour cela, nous tenons à remercier de prime abord, Monsieur

Antoine RAZAFITSIAMIDY, Maître de conférences, enseignant et

encadreur, qui, malgré ses occupations, a pu nous diriger dans la

réalisation de cet ouvrage.

Nos vifs remerciements s’adressent aussi à nos parents qui nous

ont soutenue matériellement, voire moralement, lors de la réalisation de

ce mémoire.

Pour terminer, nous adressons également nos vifs remerciements à

tous ceux qui ont participé de près ou de loin à la réalisation de ce

travail ;

M lle RANDRIAMANANTOANINA Miarintsoanirina

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INTRODUCTION

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Karl Marx est un grand philosophe matérialiste de l’époque

contemporaine. Parmi les grands penseurs et philosophes connus du

XIX e siècle, Marx tient la place la plus importante dans la stratégie

créatrice d’une nouvelle société en vue de l’amélioration des conditions

de vie.

Selon Marx, les philosophes d’avant lui n’avaient fait

qu’interpréter le monde et toutes les théories politiques et sociales

avaient été, en règle générale, l’œuvre des classes possédantes ignorant

les intérêts de la masse populaire. L’histoire de la société reconnaît, en

effet, que le monopole des sciences est entre les mains de la classe

dominante au pouvoir, comme les sciences de la culture, de l’instruction

et des activités sociopolitiques. De plus, toujours avant Marx, la théorie

de l’histoire n’est pas une science basée sur la pratique sociale. Cette

théorie n’est que le processus de l’idée seulement.

Depuis 1844, époque où se formèrent ses idées, Marx a rejeté

catégoriquement l’idéalisme hégélien, pourtant une idéologie acceptée

par lui auparavant, avant d’avoir été influencé par la lecture de Ludwig

Feuerbach. Le marxisme donne plus de potentialité à l’étude des rapports

entre les hommes vivant socialement et la nature.

Les idées marxistes, de par cette étude, ne consistent pas qu’à

l’amélioration des conditions d’existence de la vie matérielle, au sein

desquelles, d’après Marx, les hommes établissent des rapports non

seulement entre eux, mais aussi et surtout avec la nature qui leur donne

naissance. C’est cette vision des rapports sociaux qui faisait de Marx un

« matérialiste ». D’où l’idée fondamentale de notre thème que nous

avons intitulé : « Du matérialisme ancien au matérialisme selon Karl

Marx ».

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En face de cette situation des questions se posent : quelles sont les

sources du matérialisme marxiste. Sous quelles formes se présentent ces

idées ?

Une solution meilleure du problème nous oblige à expliquer en

premier lieu ce qu’on entend par matérialisme, ensuite, en second lieu,

ce qu’est le matérialisme philosophique selon Marx. En troisième lieu,

nous allons essayer de parler et de réfléchir sur les principes du

matérialisme marxiste. C’est la raison pour laquelle nous insisterons

surtout sur l’analyse du matérialisme dialectique et de la conception

matérialiste de l’histoire.

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PREMIÈRE PARTIE

QU’EST-CE QUE LE MATÉRIALISME ?

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Le mot matérialisme désigne une attitude philosophique

caractérisée par le recours exclusif à la notion de matière pour expliquer

la totalité des phénomènes du monde physique et du monde moral. Cette

conception est attestée dès le moment où se forme, dans la Grèce

classique, la spéculation occidentale. Refoulée à l’arrière-plan par la

culture chrétienne de l’âge médiéval, elle se réaffirme avec force après la

Renaissance et semble dès lors avoir fait partie avec lui dans le

développement de la science moderne. Le matérialisme demeure par

excellence, jusqu’à nos jours, une philosophie de référence, ou de

prétention scientifique.

Ce matérialisme a été interprété par plusieurs philosophes depuis

l’Antiquité jusqu’à l’époque moderne. Mais, nous semble-t-il, seul est

arrivé à une interprétation exacte le matérialisme marxiste.

Pour mieux comprendre ce matérialisme marxiste, il semble

nécessaire de se référer à l’histoire du matérialisme depuis l’Antiquité

jusqu’à nos jours.

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CHAPITRE I

LE MATÉRIALISME ANCIEN

Le matérialisme ancien est apparu quelques siècles avant notre

ère, c’est-à-dire dans l’Antiquité.

Ce matérialisme ancien est né dans la société esclavagiste. Il

suscita la haine des conservateurs qui prônaient l’idéalisme, soutenaient

la religion et les superstitions, s’opposaient aux conceptions scientifiques

avancées pour se maintenir en place. Le matérialisme antique reflétait

globalement les intérêts de certains groupes progressistes de prolétaires

et d’esclaves.

L’apparition de ce matérialisme et les besoins des artisans, des

paysans, des marchands et des navigateurs ont fait naître et développer la

connaissance de l’astronomie, de la météorologie, des mathématiques, de

la mécanique et de la géographie. Ainsi, l’humanité a pu se libérer du

joug que lui imposaient les conceptions religieuses. Les germes de

matérialisme que renfermaient ces sciences et ces connaissances

s’organisèrent en système et donnèrent naissance à une philosophie

matérialiste de type élémentaire.

Ce matérialisme ancien, d’un point de vue général, a donc tenté

de faire progresser les sciences, mais il est encore faible. Selon le

matérialisme ancien, face à l’explication du monde, l’eau, le feu et la

terre sont la base de toutes choses et la formation de toutes choses. C’est

la combinaison d’atomes. Cette conception a abouti à l’athéisme.

On peut dire que le matérialisme ancien était basé sur l’atome,

surtout chez les matérialistes grecs anciens, comme Héraclite,

Démocrite, etc.

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À vrai dire, ce matérialisme ancien a été connu aussi en Chine et

en Inde par les philosophes les plus remarquables dans l’histoire du

matérialisme. En Chine, par exemple, nous connaissons Wang Chung,

Fan Zhen, etc. Et en Inde, il y a le Lokayata.

I.- LE MATÉRIALISME DE L’INDE

ANCIENNE

Le matérialisme de l’Inde ancienne a, parallèlement, la même

conception que le matérialisme chinois ancien qui croyait que l’eau, la

terre, le feu et le vent constituent le monde ou toutes les choses qui

existent dans l’univers.

Ce matérialisme de l’Inde ancienne est connu par le Lokayata.

Le Lokayata a des passages de caractère athéistique, qui sont

attribués à Charvaka, personnage mythique lui aussi. C’est pourquoi,

certains textes anciens donnent le nom de « charvaka » à ce courant

matérialiste.

Du point de vue ontologique, le Lokayata repose sur l’idée que

tous les objets de l’univers se composent de quatre éléments : terre, feu,

eau et air.

Ces éléments sont éternels et constants. Toutes les propriétés des

objets dépendent de la combinaison des éléments dont ils se composent

et de la proportion dans laquelle ces éléments se combinent. La

conscience, la raison et les organes des sens dérivent également d’une

combinaison d’éléments. Après la mort d’un être vivant, cette

combinaison se désagrège et ses composantes viennent s’ajouter aux

éléments correspondants du monde inorganique. Certains textes

comportent l’idée d’évolution, dans la mesure où ils précisent que les

éléments naissent les uns des autres.

La terre étant à l’origine de cette transformation, la gnoséologie

du Lokayata est sensualiste.

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La sensation est considérée comme la seule source de

connaissance. Les organes des sens sont susceptibles de percevoir les

objets, car les uns et les autres se composent des mêmes éléments.

Partant de ce principe, le Lokayata nie l’existence des objets non

perceptibles et suprasensibles, avant tout celle de Dieu, de l’âme, du

paradis, de l’enfer, etc.

II.- LE MATÉRIALISME CHINOIS ANCIEN

Les matérialistes chinois de l’Antiquité pensaient que toutes les

choses dans l’univers n’étaient pas des créations de l’esprit mais le

résultat d’une évolution et d’une transformation concrète de la matière

primitive et que tout objet pouvait retourner à son état initial. Ils

croyaient, par exemple, que le métal, le bois, l’eau, le feu et la terre

étaient les cinq éléments les plus fondamentaux qui constituent le

monde.

En Chine, quelques siècles avant Jésus-Christ, il existait déjà des

philosophes qui prônaient le matérialisme tels que Yang Zhy, Sun Zi,

Wang Chung, Fan Zhen, etc.

Des historiens chinois de la fin de la dynastie des Zhou

occidentaux (1121 – 771 avant Jésus-Christ), soutenaient :

« Toutes les choses dans l’univers sont nées de la combinaison de la terre et du métal, du bois, de l’eau, du feu »1.

Presque tous les matérialistes chinois anciens se sont basés sur

cette conception et contre les conceptions idéalistes et religieuses de leur

temps. Ainsi, le matérialisme de Yang Zhu (environ 395 – 335 avant

Jésus-Christ) est un matérialisme naïf qui critique sévèrement les

croyances religieuses et la foi en l’immortalité.

1 Ai Siqi, Matérialisme dialectique, et le matérialisme historique, Paris, Édition du

Centenaire p. 16.

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Il affirmait, par exemple, que tous les événements et les

phénomènes de la nature et de la société sont gouvernés par le principe

de la nécessité naturelle qu’il définissait comme le destin. Sur ce plan,

ses opinions ne sont pas libres à cause d’un déterminisme fataliste. Il

disait, en effet, que tout est voué à la mort et à l’anéantissement. Et par

voie de nécessité naturelle, la vie fait place à la mort, tout ce qui apparaît

va vers sa destruction.

Dans le domaine de l’éthique, il met au premier plan l’individu

qui aspire à une satisfaction maximale de ses passions et de ses désirs, et

il appelle à jouir du présent dans sa vie et à ne pas se donner la peine de

penser à ce qui adviendra après la mort. Mais il n’a pas poussé à

l’extrême l’expression de son hédonisme et de son eudémonisme.

L’individualisme de Yang Zhu fut une réaction contre la hiérarchisation

éthique et sociale des hommes, prêchée par le confucianisme.

Face à la domination de l’idéalisme de Confucius et de Mencius,

Xun Zi (298 – 235 avant Jésus-Christ) donne l’explication sur les

mouvements naturels. Par contre, Confucius vécut à l’époque des

printemps et automnes (722 – 481 avant Jésus-Christ), fut le représentant

de l’idéologie de l’aristocratie esclavagiste en déclin et le fondateur de

l’école confucéenne idéaliste. Il prônait la théorie du mandat du ciel et

de la volonté divine, était partisan des cérémonies religieuses

traditionnelles. Son humanisme plaidait en faveur des zhouli (rites des

Zhou) qui maintenaient l’esclavage.

Il tenait le « juste milieu » pour effacer les contradictions et

s’opposer aux réformes. Il entreprit aussi une compilation systématique

de la culture traditionnelle.

L’idéal de Mencius qui vécut à l’époque des royaumes

combattants (405 – 222 avant Jésus-Christ), développa l’idéalisme de

Confucius et répandit l’idée suivante :

« Toutes choses sont innées en moi »,

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c’est-à-dire que Xun Zi était donc contre l’idéalisme de Confucius et de

Mencius. En les opposant, Xun Zi disait que

« Les mouvements naturels obéissent à des lois dont l’existence ne dépend pas socialement de la vie de Yao et dont l’extinction n’est pas lui non plus à l’anéantissement de Jie »1.

Reprenant par là l’idée matérialiste que tout changement répond

à des lois objectives, Wang Chung (104 – 27 avant Jésus-Christ), face à

la domination des Han (206 avant Jésus-Christ – 220 après Jésus-Christ),

nie complètement l’existence d’un Dieu personnifié, partant du point de

vue que le ciel et la terre sont des réalités matérielles que le monde

naturel évolue au rythme des mille et une choses qui le composent. Il

s’oppose aux idéalistes représentés par Dong Zhoushu (175 – 105 avant

Jésus-Christ) qui affirmait que « le ciel et l’homme sont un ». L’homme

est la réplique du ciel et que le ciel confère au roi tous ses pouvoirs. Le

souverain règne en vertu d’un mandat céleste.

Whang Chung critique de manière incisive toutes les absurdités

sur la religion et les superstitions, sur l’immortalité de l’âme. Whang

Chung s’éleva contre la théorie confucéenne du « ciel » qui attribuait à

ce dernier la qualité de démiurge déterminant l’apparition et l’évolution

des phénomènes et des choses.

Conformément à la doctrine de Whang Chung, les éléments

matériels qi constituent l’essence du monde et l’homme fait partie de la

nature, sa genèse résulte de la condensation du qi. La dissipation du qi

signifie la mort et la destruction. Whang Chung attribuait aux sensations

le rôle du point de vue du départ de la connaissance du monde objectif. Il

niait l’existence de connaissance « innée ». Whang Chung prit la

position contre la théorie subordonnant la vie sociale aux manifestations

spontanées des forces de la nature. Selon lui, l’histoire aurait un

1 Yao et Jie sont deux empereurs mythologiques de la haute Antiquité chinoise, le

premier réputé pour sa bonté, le second pour sa cruauté. Ai Siqi, Matérialisme dialectique et matérialiste historique, p. 18.

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caractère cyclique, la période de déclin succédant à la période de

prospérité et ainsi de suite.

Fan Zhen qui vécut à l’époque des dynasties du Nord et du Sud

(420 – 581) développa le matérialisme en luttant contre le bouddhisme.

S’appuyant sur l’idée que :

« Tant que la forme existe, l’esprit l’habite, dès que la forme disparaît, l’esprit s’éteint »1.

Il en tira des arguments pour montrer que l’esprit est le produit

de la matière et s’en prit violemment à la religion et à la superstition

prêchées par les bouddhistes (immortalité de l’âme et rétribution selon

les mérites).

III.- LE MATÉRIALISME GREC ANCIEN

Le matérialisme grec ancien a aussi sa propre conception sur le

matérialisme comme sur le matérialisme chinois et indien de l’Antiquité.

La caractéristique du matérialisme grec ancien est de s’élever contre

l’idéalisme et les conceptions religieuses de son temps, car la vision du

monde de l’idéalisme et de la religion ne font qu’un.

En opposant l’idéalisme et la religion, il interprète le monde

selon les lois objectives et scientifiquement progressistes, etc.

Le matérialisme grec antique était la source de développement du

processus de la connaissance humaine dans des domaines scientifiques.

C’est grâce au courage des matérialistes grecs que les sciences de

l’astronomie, des mathématiques, de la physique, etc. ont pu se

développer.

Ressemblant aux matérialistes chinois et indiens, les matérialistes

grecs ont aussi la même vision sur la reconnaissance de la matérialité du

1 Ai Siqi, Matérialisme dialectique et matérialiste historique, p. 20.

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monde et la croyance que le métal, le bois, l’eau, le feu et la terre étaient

les éléments les plus fondamentaux qui constituent le monde.

Dans l’Antiquité grecque, Empédocle, Héraclite, Leucippe,

Démocrite, Épicure et Lucrèce sont les grands matérialistes les plus

célèbres.

Empédocle est un matérialiste grec ancien. Pour lui, la diversité

des choses est ramenée à quatre éléments naturels : terre, eau, air et feu.

Cette doctrine subsista au cours des siècles dans la philosophie antique et

médiévale, l’action de deux forces opposées. Attraction et repoussement

expliquent, selon Empédocle, l’union et la séparation des éléments. La

prédominance de telle ou telle force explique les différents stades par

lesquels passe le développement de l’univers. Empédocle a pressenti le

phénomène de l’évolution des êtres vivants par la sélection naturelle des

combinaisons plus viables. Cette idée d’Empédocle a eu une énorme

portée historique.

Pour Héraclite, le feu est l’élément premier de la nature, le plus

apte au changement et le plus mobile. C’est du feu que tirent leur

origine, le monde dans son ensemble aussi bien que toute chose, en

particulier, et même l’âme.

Héraclite affirme que

« le monde, unité du tout, n’a été créé par aucun des dieux, ni par aucun des hommes, mais a été, est et sera un feu éternellement vivant, qui s’allume et s’éteint selon des lois1 ».

Toute chose naît du feu en vertu d’une nécessité qu’Héraclite

nomme le logos. Mais le processus universel revêt un caractère

cyclique : toute chose redevient « feu ». La vie de la nature est un

mouvement ininterrompu au cours duquel toute chose, toute propriété, se

transforme en son contraire, le froid devient chaud, le chaud devient

froid.

1 Dictionnaire philosophique, p. 223.

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Du fait que tout est en perpétuelles transformation et rénovation,

« on ne peut se baigner deux fois dans le même fleuve, car de nouvelles eaux coulent toujours sur toi »1.

Dans la vie de l’homme, cette transformation de chaque chose en

son contraire est non pas un simple changement, mais une lutte

universelle. Or, la lutte des contraires met en évidence leur identité, celle

du haut et du bas, de la vie et de la mort, etc.

Le caractère universel du changement et la transformation de

chaque propriété en son contraire rendent toute qualité relative.

Les sensations sont à la base de la connaissance. Mais seule la

pensée mène à la sagesse. Si même une chose se dérobait au monde

perceptible à la sensation ; elle n’échapperait pas au monde de la raison.

Héraclite oppose sa vision du monde à celle de la plupart de ses

contemporains et concitoyens. Une conception aristocratique de la

société se trouve associée chez lui à des éléments progressistes. C’est

ainsi qu’il s’élève contre le droit non écrit traditionnel auquel restaient

attachés les aristocrates et lui oppose la loi instituée par l’État, pour

laquelle les citoyens doivent se battre comme pour les murs de leur cité.

Parmi les matérialistes anciens, Leucippe, Démocrite, Épicure et

Lucrèce furent la marque du développement de la doctrine atomiste

matérialiste.

Leucippe et Démocrite sont les premiers fondateurs de la théorie

atomiste dans l’Antiquité. Le mérite d’avoir fondé cette théorie revient à

Leucippe, mais la tâche de Démocrite était d’expliquer ou de continuer

la théorie de son maître. Les autres (Épicure et Lucrèce) ne sont que

leurs commentateurs.

Plusieurs siècles plus tard, Marx prend comme thèse de doctorat :

« La différence entre la philosophie de la nature de Démocrite et

Épicure ».

1 Dictionnaire philosophique, p. 223.

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Parlons du matérialisme de Démocrite. Il est considéré par

Lénine comme l’interprète le plus brillant du matérialisme dans

l’Antiquité. Démocrite est un des fondateurs de l’atomisme. Il

reconnaissait l’existence de deux principes premiers : les atomes et le

vide. Les atomes, corpuscules indivisibles dont se compose la matière,

sont immuables, éternels, en mouvement perpétuel et se distinguent

uniquement par la forme, la grosseur, la position et l’ordre dans lequel ils

se trouvent placés. Les qualités sensibles (son, couleur, odeur, etc.) ne

sont pas inhérentes aux atomes, elles sont purement subjectives et ne

proviennent nullement de la nature des choses.

Il y a déjà là un embryon de la théorie des qualités primaires et

secondaires des choses. Les corps sont formés par une combinaison

d’atomes, et la séparation de ces derniers entraîne mort de ces corps. Une

quantité infinie d’atomes se meuvent perpétuellement dans un vide

atomisé infini, mais divisible, se déplaçant dans différentes directions, ils

entrent parfois en collision et forment des tourbillons d’atomes.

Telle est l’origine de l’infinité des mondes qui naissent et

meurent, qui ne sont pas créés par un Dieu, mais apparaissent et

disparaissent naturellement en vertu d’une nécessité.

Identifiant causalité et nécessité, Démocrite niait la contingence

qu’il considérait comme résultant de l’ignorance. Dans sa théorie de la

connaissance, il parlait de l’hypothèse que les corps émettent de fines

enveloppes (des idoles ou images des choses) qui affectent nos sens.

La perception sensorielle est la source première de la raison dans

la connaissance. C’était, en politique, un partisan de la démocratie telle

qu’on la concevait dans la Grèce antique et un adversaire de

l’aristocratie esclavagiste. Son matérialisme eut pour continuateurs

Épicure et Lucrèce.

Inspirés par la doctrine atomiste de Leucippe et de Démocrite,

Épicure et Lucrèce allaient élaborer l’atomisme encore une fois dans

l’Antiquité. Même s’ils étaient atomistes, la façon d’expliquer leurs

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théories reste différente. Marx la distingue bien dans sa thèse de

doctorat.

Pour Épicure (341 – 270 avant Jésus-Christ), Dieu reste dans

l’au-delà, n’a rien à voir avec les affaires des hommes. Donc, il niait

l’intervention des Dieux dans les affaires du monde et reconnaissait la

matière en tant que principe éternel, possédant une source de mouvement

interne.

Réprimant les théories atomistes de Leucippe et de Démocrite, il

apporta des modifications originales. Pour expliquer la possibilité de

collision entre des atomes se déplaçant dans le vide à la même vitesse, il

introduisit la notion de déviation spontanée (entièrement conditionné) de

l’atome de sa trajectoire rectiligne.

Cela fonde une vision plus profonde du rapport entre la nécessité

et la contingence qui constitue un pas en avant, par rapport au

déterminisme mécaniste de Démocrite.

Dans sa théorie de la connaissance, Épicure est sensualiste. Les

sensations sont vraies en soi, parce qu’elles résultent de la réalité

objective, les erreurs n’étant dues qu’à leur mauvaise interprétation. Son

explication matérialiste de son émergence des sensations est naïve. La

surface des corps et des particules très fines dont le flux ininterrompu

pénètre dans les sens et produit les images des choses.

La connaissance vise à délivrer l’homme de l’ignorance et de la

superstition, de la peur des dieux et de la mort, sans quoi le bonheur est

impassible. Son éthique préconise un désir raisonnable fondé sur un

idéal individualiste qui consiste à éviter la souffrance et à atteindre un

état d’esprit joyeux et serein.

Selon Épicure, ce n’est pas l’activité qui est la plus rationnelle

pour l’homme, mais la tranquillité de l’âme, l’ataraxie. Sa doctrine

matérialiste fut déformée par la philosophie idéaliste, par exemple, celle

de Hegel.

Page 19: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

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Lucrèce a continué la doctrine d’Épicure. Lucrèce voulait que sa

philosophie indique la voie du bonheur à l’individu emporté par le

tourbillon des luttes sociales et des désastres abattus par la terreur des

Dieux, de la mort et des châtiments dans l’au-delà. Pour se délivrer de

ses peurs, il faut, estime Lucrèce, se pénétrer des idées épicuriennes sur

la nature des choses, de l’homme et de la société. L’âme est mortelle, car

elle n’est, enseigne Lucrèce, qu’une combinaison provisoire de

particules de matières et, après la mort, se désagrège en atomes isolés.

Le fait d’avoir appris que l’âme est mortelle exclut non

seulement la foi dans l’au-delà, mais aussi celle des châtiments après la

mort, et libère l’homme de la terreur de l’enfer. La peur de la mort se

dissipe en conséquence, en tant que nous ne sommes plus. La peur des

dieux s’évanouit aussi, dès que nous apprenons qu’ils n’habitent pas ce

monde, mais mènent leur vie bienheureuse dans les espaces vides entre

les mondes, aussi ne peuvent-ils exercer aucune influence sur la destinée

humaine.

Lucrèce donna une belle image et une explication matérialiste de

l’univers, de la nature de l’homme, du développement de la culture

matérielle et de la technique. Ce fut un grand penseur de l’Antiquité

romaine.

Le poème de Lucrèce contribua énormément au développement

de la philosophie matérialiste de la Renaissance. Le matérialisme antique

est donc le signe ou le témoin premier du développement de la science

physique, cosmologique, astronomique, naturelle des la formation du

monde, etc.

En ayant le courage de développer ces sciences, tous les

matérialistes grecs anciens prenaient de la haine ou de la position contre

l’idéalisme ou la conception religieuse qui estime que l’être surnaturel

est destiné à la vie de l’homme et partisan de l’idéologie démocratique

esclavagiste.

À la différence des dialectiques idéalistes qui affirmaient que

l’idée est antérieure à la matière, on négligeait totalement l’existence

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objective du monde. Les matérialistes grecs antiques ont des conceptions

contraires à l’idéalisme qui disait que la matière est antérieure à la

conscience. Le sens est le premier organe et intermédiaire entre l’objet et

la raison. Le matérialisme antique a pour but d’émanciper l’homme sous

le joug de l’esclave qu’on a appliqué par la religion et l’idéalisme, et

pour s’organiser en une nouvelle société dans laquelle le matérialisme

antique met en place la valeur de la classe inférieure (l’esclave) et met

l’homme au-dessus de toute la nature qui existe dans le monde.

En résumé, le matérialisme antique est la première doctrine qui

dégage la méthode du processus de la connaissance le plus véritable,

spécialement pour les matérialistes grecs anciens en quête de principe

unifiant au sein de la mutabilité universelle de toutes choses. Il a formé

le concept de matière cosmique, substance universelle se substituant à

toutes les transformations et dont toute chose individuelle émerge pour y

retourner plus tard. Cette matière était en partie identifiée avec quelques

matières spécifiques, comme l’eau, l’air ou le feu, mais partiellement

seulement, car cette dernière n’avait d’autres attributs que d’être matériel

avec lequel toutes choses étaient faites.

De plus, Ai Siqi disait : « Le matérialisme primitif de l’Antiquité

présente généralement les caractéristiques fondamentales suivantes :

Premièrement, il affirmait l’unité de la substance du monde

mais, dans son essence, il faisait une large place à la sensibilité et à

l’intuition et ramenait concrètement le monde unifié à telle ou à telle

forme matérielle.

Deuxièmement, il recelait un début de pensée dialectique en

affirmant que le monde est un tout unifié où toutes les choses et tous les

êtres sont mutuellement en rapport et exercent réciproquement leurs

effets les uns sur les autres ; tous les objets qui composent l’univers

évoluent, se meuvent, naissent et périssent ensemble. Les matérialistes

de l’Antiquité avaient commencé à percevoir les causes fondamentales

de changement et de développement dans les effets réciproques des

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forces antagonistes contenues en toutes choses et entrent en conflit : « le

froid et le chaud, l’ombre et la lumière, la droite et la courbe, etc.) »1

1 Ai Siqi, Matérialisme dialectique et matérialiste historique, p. 18.

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CHAPITRE II

LE MATÉRIALISME DU MOYEN ÂGE (NOMINALISME)

Le Moyen Âge féodal en Europe fut entièrement dominé par le

christianisme, la philosophie était l’humble servante de la théologie.

Mais, au sein de cette philosophie institutionnalisée, servant directement

la religion et l’Église, le nominalisme s’opposait au réalisme : les

nominalistes pensaient que tout objet est antérieur aux concepts

universels, ce qui revient à reconnaître la primauté de l’objet sur le

concept, l’idée :

Au Moyen Age, les tendances matérialistes se manifestèrent

dans le nominalisme, dans les doctrines affirmant l’éternité de la nature

et de Dieu, et dans les hérésies panthéistes du haut Moyen Age.

« Chez les matérialistes anglais, écrivait Marx, le nominalisme est un élément capital, et il constitue d’une façon générale la première expression du matérialisme. »1

Les réalistes affirmaient, quant à eux, que le concept est

antérieur à toutes choses, que les objets concrets dérivent des concepts.

Les luttes entre nominalistes et réalistes représentent dans une

certaine mesure l’opposition entre matérialisme et idéalisme à cette

époque.

1 Karl Marx et Friedrich Engels, La sainte famille, Paris, Éditions Sociales, 1969,

p. 154.

Page 23: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 23 =

En réalité, nominalisme (représentant du matérialisme du Moyen

Age, à l’opposé des adeptes du réalisme médiéval, les nominalistes

affirmaient aussi que seules les choses isolées avec leurs qualités

individuelles, existent réellement.

Les notions générales (créées par notre pensée) de ces choses,

loin d’exister indépendamment d’elles, ne reflètent même pas leurs

qualités et propriétés. Le nominalisme s’approchait du matérialisme

quant à la reconnaissance de la primauté de la chose et du caractère

secondaire de la notion.

Pour reprendre les termes de Marx, ce fut la première expression

du matérialisme au Moyen Age. Les nominalistes ne comprenaient

toutefois pas que les notions générales reflètent des qualités réelles des

choses objectivement existantes et que les choses singulières ne sont pas

séparées de l’universel mais le contiennent en elles.

Duns Scot et Roscelin étaient les représentants les plus en vue du

nominalisme du XIe au XIVe siècle.

I.- LE NOMINALISME DE DUNS SCOT

Duns Scot (1270 - 1308), est un théologien et philosophe

écossais, représentant de la scolastique. Il critique vivement le thomisme.

À la différence de saint Thomas d’Aquin, il entendait séparer la

philosophie de la théologie, démontrant l’impossibilité de fonder

rationnellement l’idée d’une création à partir du néant, et faisait

dépendre la raison de la volonté. Dieu est la liberté absolue. Dans les

controverses des universaux, il prit parti pour le nominalisme. Il

introduisit dans la logique, le concept d’« intention » et fut le premier à

opposer les notions de concret (le terme est de lui) et d’abstrait.

Page 24: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 24 =

II.- LE NOMINALISME DE ROSCELIN

Roscelin (vers 1050 - vers 1122), est un philosophe scolastique

né en Compiègne, connu pour sa polémique avec Anselme, archevêque

de Canterbury et Abélard, ainsi que pour son interprétation hérétique de

la Trinité, formée, selon lui, de trois personnes complètement distinctes.

Cette doctrine trithéïste fut condamnée par l’Église, et Roscelin se vit

contraint de l’abjurer. Roscelin fut l’un des fondateurs de la tradition

nominaliste dans la philosophie médiévale (nominalisme).

Au témoignage d’Anselme, il affirmait que les notions générales

ne sont que des sons produits par un « ébranlement de l’air » (flatus

vocis). Pour Roscelin seuls existent réellement les objets isolés pouvant

être perçus par les sens. Il ne subsiste de ses œuvres qu’une lettre à

Abélard.

Page 25: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 25 =

CHAPITRE III

LE MATÉRIALISME MODERNE

En passant par des périodes historiques (Antiquité, Moyen Age,

temps modernes, époque contemporaine), le matérialisme a toujours de

la haine contre la religion, le mysticisme, l’idéalisme, et plus tard, la

métaphysique et ne cesse d’avoir des progressions vers la victoire et

d’avoir une envie de surpasser ses adversaires.

Depuis l’Antiquité, ses adversaires (idéalisme, religion,

mysticisme, à plus tard, la métaphysique) prenaient la place la plus

dominante, la plus élevée pendant ces longues périodes. C’était difficile

de contrarier et d’ébranler les propositions qui venaient de l’idéalisme et

de la religion. Tous les matérialistes s’entendaient à embrasser

l’athéisme dont l’objectif était le renversement définitif de ces régimes

qui haussaient Dieu au-dessus de toutes les natures.

Seul Dieu, selon eux, peut guider la vie des hommes. L’homme

ne peut rien faire sans se laisser guidé par la volonté de Dieu.

En passant cette période historique de l’époque contemporaine,

le matérialisme se met debout et a une grande victoire contre l’idéalisme

et la religion, parce que les sciences de la nature se développent vers des

tendances matérialistes.

Donc c’est à l’étape suivante du développement du matérialisme

que le matérialisme contemporain est connu par les ouvrages des

matérialistes européens (Français, Anglais, Allemands) qui commencent

au début du XVIIe siècle jusqu’au XIXe siècle.

Comment évolue-t-il ce matérialisme contemporain ?

Page 26: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 26 =

I.- LE MATÉRIALISME FRANÇAIS

Le matérialisme français est connu par D’Holbach, Diderot,

Helvétius, La Mettrie.

Le matérialisme de D’Holbach critique la religion et la

philosophie idéaliste, surtout celle de Berkeley et aussi la philosophie

mécaniste.

Le matérialisme de D’Holbach est aussi parmi les matérialismes

atomistes modernes, car il parle d’atomes :

« La matière est tout ce qui, d’une façon ou d’une autre, agit sur nos organes des sens, elle est composée d’atomes immuables et indivisibles dont les propriétés fondamentales sont l’étendue, la pesanteur, la forme et l’impénétrabilité. »1

Donc, le matérialisme de D’Holbach est aussi parmi les

matérialismes atomistes modernes parce qu’il parle d’atome.

Le matérialisme de D’Holbach considère le mouvement comme

attribut de la matière, comme un simple déplacement des corps dans

l’espace. L’homme fait partie de la nature aux lois de laquelle il obéit.

Défenseur du déterminisme, D’Holbach a toutefois de la causalité une

conception purement mécaniste. Il nie l’existence objective de la

contingence qui n’est pour lui que ce dont nous ignorons les causes.

Sensualiste dans sa théorie de la connaissance, il s’élève contre

l’agnosticisme.

En politique, il est partisan de la monarchie constitutionnelle,

voire de l’absolutisme éclairé. Sa conception de la société est idéaliste.

Pour lui, c’est l’opinion qui gouverne le monde. D’Holbach voit dans

l’instruction le moyen de libérer les hommes. L’ignorance de sa propre

nature a fait que le genre humain s’est trouvé asservi, est devenu victime

1 Dictionnaire philosophique, p. 232.

Page 27: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 27 =

des gouvernements. Pour D’Holbach, la société bourgeoise en

développement est celle du royaume de la raison.

Pour Diderot (1713 - 1784), cependant, en philosophie, passa

rapidement du déisme et de l’idéalisme éthique au matérialisme (en

psychologie, dans sa théorie de la nature et de la connaissance) et à

l’athéisme. À la conception matérialiste mais mécaniste de la nature qui

était aussi celle de La Mettrie et de D’Holbach, il apporta des éléments

de dialectique, idée d’une relation entre la matière et le mouvement, de

la corrélation des processus naturels, du caractère éternellement

changeant de toutes les formes dans la nature, au sujet de la manière dont

le mouvement mécanique des particules matérielles est susceptible

d’engendrer le contenu spécifique des sensations.

Diderot défend l’idée d’une sensibilité générale de la matière.

Développant ce point de vue, il esquisse une théorie matérialiste des

fonctions psychiques, anticipant sur la théorie des réflexes, et les

hommes, et les animaux sont des instruments pourvus de la faculté de

sentir et de se souvenir. Sa théorie de la connaissance rejette la thèse

idéaliste du caractère spontané de la pensée : toute spéculation a sa

source dans la nature, et nous ne faisons qu’enregistrer les phénomènes

connus empiriquement entre lesquels existe une relation, soit nécessaire,

soit conventionnelle. Il ne s’ensuit pas, selon Diderot que nos sens

reflètent les objets avec l’exactitude d’un miroir, il n’y a pas entre la

plupart des sensations et leurs causes extérieures plus de ressemblance

qu’entre les représentations et les noms qu’elles reçoivent dans le

langage.

Diderot développe la thèse de Bacon selon laquelle la

connaissance, dont la source est tout empirique, n’a point pour fin la

vérité en soi, mais la recherche des moyens de rendre l’homme plus

parfait et d’accroître sa puissance. Diderot tient compte du rôle des

techniques et de l’industrie dans le développement de la pensée et de la

connaissance.

Page 28: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 28 =

Cette dernière a pour guide et pour méthode l’expérimentation et

l’observation. C’est en prenant appui sur elles que la pensée parvient à

un savoir, sinon tout à fait certain, du moins hautement probable.

Diderot dit que le fondateur du marxisme tenait en haute estime

son matérialisme. On trouve chez lui, écrivait Engels, des « chefs-

d’œuvre de dialectique ». Diderot, dit Lénine, est parvenu jusqu’au seuil

de la conception moderne du matérialisme et « a opposé nettement les

principales tendances philosophiques »1.

Mais il est demeuré idéaliste dans sa conception des phénomènes

sociaux. Il lutta contre le despotisme féodal, mais faisait de la monarchie

éclairée son idéal politique.

Le sensualisme de Locke, à l’exclusion de ses éléments

idéalistes est à la base de sa philosophie. Selon lui, c’est par les

sensations que nous apprenons à connaître la matière dans sa réalité

objective.

La mémoire était pour lui un autre instrument de la

connaissance. De façon très simpliste, il concevait la pensée comme une

simple combinaison de sensations. Il soulignait le rôle du milieu social

dans la formation du caractère de l’homme, justifiant ainsi la nécessité

de remplacer les rapports féodaux par des rapports capitalistes.

Toutefois, ce sont la connaissance humaine et les passions qui

jouent, selon lui, un rôle déterminant dans le développement social.

Marx a très bien défini la doctrine d’Helvétius :

« Les propriétés sensibles et l’amour-propre, la jouissance et l’intérêt personnel bien compris sont le fondement de toute morale. L’égalité naturelle des facultés humaines, l’unité entre les progrès de la raison et le progrès de l’industrie, la bonté naturelle de l’homme, la toute-puissance de l’éducation, voilà les éléments principaux de son système »2.

1 Vladimir Ilitch Oulianov dit Lénine, Œuvres, tome 14, p. 36. 2 Karl Marx et Friedrich Engels, La sainte famille, p. 157.

Page 29: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 29 =

La reconnaissance par Helvétius de la nécessité d’une

harmonisation des intérêts sociaux, de l’égalité des facultés

intellectuelles, a joué un rôle important dans l’élaboration du socialisme

utopique.

La Mettrie (1709 - 1751) se fondant sur la physique de Descartes

et le sensualisme de Locke, considérait le monde comme la

manifestation d’une substance matérielle étendue, intérieurement active,

sensible, dont les formes sont les règnes minéral, végétal et animal (ce

dernier incluant l’homme). Il appréhendait le processus de la pensée, qui

n’est propre qu’à l’homme et est le résultat de son organisation

complexe, comme la comparaison et la combinaison des représentations

résultant de la perception et de la mémoire. Adepte du mécanisme, La

Mettrie était proche des idées évolutionnistes. Il estimait que les causes

principales du progrès historique étaient l’instruction publique et

l’activité des personnalités éminentes et était un partisan de

l’absolutisme éclairé.

La Mettrie professait l’athéisme et fut persécuté pour ses

opinions, mais en même temps, il reconnaissait cependant que la foi

religieuse est nécessaire aux masses populaires.

En général, le matérialisme français est une nouvelle étape du

développement de la pensée matérialiste, supérieur sur le plan tant

national que mondial, au matérialisme du XVIIe siècle. À la différence

du matérialisme anglais du XVIIe siècle, qui reflète, à bien des égards,

un compromis entre la noblesse et la bourgeoisie, le matérialisme

français était l’idéologie de la bourgeoisie progressiste. Il avait pour but

de dispenser les lumières et d’armer idéologiquement une large fraction

de la société : bourgeois artisans, intellectuels bourgeois et une partie de

l’aristocratie aux opinions avancées.

Les origines de ce matérialisme français sont incarnées, au XVIIe

siècle, par Gassendi, et surtout par le matérialisme mécaniste de la

physique de Descartes, ainsi que par le matérialisme anglais.

Page 30: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 30 =

La doctrine de Locke de l’origine empirique, du savoir, la

critique des idées innées cartésiennes, une conception essentiellement

matérialiste de l’expérience y ont ajouté un rôle important. Non moins

considérable fut l’influence exercée par les thèses pédagogiques et

politiques de Locke, selon lesquelles, la formation de la personnalité est

conditionnée par l’éducation et l’ordre social. Mais loin d’assimiler

purement et simplement le sensualisme matérialiste et empirique du

philosophe anglais, le matérialisme français a délivré sa théorie de tout

penchant pour le rationalisme cartésien.

En plus de la mécanique qu’il considérait toujours comme

prépondérante, le matérialisme français s’est appuyé sur la médecine, la

physiologie et la biologie. Grâce à cela, il a pu développer un certain

nombre d’idées nouvelles par rapport au matérialisme du XVIIe siècle,

dont les plus significatifs furent les éléments de dialectique dans la

doctrine de la nature de Diderot. Les théories éthiques, sociales et

politiques de ce dernier sont encore plus originales.

Poursuivant dans ce domaine l’œuvre de Hobbes, de Spinoza et

de Locke, le matérialisme français a dégagé la pensée de l’abstraction

naturaliste qui l’enserrait ainsi, contrairement à Hobbes qui établissait

une analogie entre l’instinct de conservation chez l’homme et l’inertie

mécanique du corps physique. Helvétius et de D’Holbach considéraient

l’intérêt comme un moteur spécifique du comportement humain.

Rejetant l’accommodement que constituent le panthéisme et le déisme,

le matérialisme français faisait ouvertement la propagande d’un athéisme

fondé sur les conclusions des sciences de la nature et de l’homme. Marx

a fait un bref historique, extrêmement riche d’idées du matérialisme

français dans l’ouvrage La sainte famille. Dans Matérialisme et

empiriocriticisme, Lénine a montré le rôle immense joué par le

matérialisme français du XVIIIe siècle.

Dans l’élaboration des bases philosophiques de tout

matérialisme, tout expliquait les défauts de la théorie : le caractère

métaphysique des méthodes et l’interprétation idéaliste des phénomènes

du développement social et du progrès.

Page 31: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 31 =

Le paragraphe suivant nous permettra de parler du matérialisme

anglais. Qu’en est-il exactement ?

II.- LE MATÉRIALISME ANGLAIS

En Angleterre, le matérialisme connut un développement

remarquable grâce à Bacon (1561 - 1626), Hobbes (1588 - 1679) et

Locke (1632 - 1704). Le principal mérite de Francis Bacon fut

d’appliquer pour la première fois à la connaissance des sciences

naturelles. Les idées matérialistes consistaient à affirmer que les

véritables sources de la connaissance humaine sont les sensations et

l’expérience. Elles affirmaient aussi l’existence objective de la matière et

pressentaient que le mouvement est une propriété inhérente à la matière.

Mais la philosophie de Bacon et de Locke en resta au niveau

d’un matérialisme métaphysique, tandis que Hobbes est un mécaniste.

En politique, les matérialistes anglais sont des partisans de la révolution

bourgeoise qui, plus tard, s’étend en France et en Allemagne.

Le matérialisme anglais fut donc la source du développement de

la science de la nature contemporaine en Europe. En réalité, en Europe,

les sciences naturelles modernes commencèrent à se développer à partir

de la seconde moitié du XVe siècle. Pour connaître les lois qui régissent

les différentes formes du mouvement de la nature, les naturalistes

commencèrent par rassembler et par classer les matériaux. Puis la nature

fut décomposée en ses parties distinctes, les divers processus et les objets

naturels furent séparés en classes déterminées et la constitution interne

des corps organiques fut étudiée dans la variété de leurs aspects

anatomiques. À cette époque, les sciences de la nature en étaient, comme

l’a fait remarquer Engels :

« Mais cette méthode nous a également légué l’habitude d’appréhender les objets et les processus naturels dans leur isolement, en dehors de la grande connexion d’ensemble, par conséquent non dans leur mouvement, mais dans leur repos, comme des éléments non essentiellement variables, mais fixes, non dans leur

Page 32: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 32 =

vie mais dans leur mort. Et quand, grâce à Bacon et à Locke, cette manière de voir passa de la science de la nature à la philosophie, elle produisit l’étroitesse d’esprit spécifique des derniers siècles, le mode de pensée métaphysique »1.

Néanmoins, ces différentes branches des sciences naturelles, à

l’exception de la mécanique et des mathématiques, étaient à l’époque

très mal connues. Comme le matérialisme devait s’appuyer sur le succès

des sciences naturelles pour expliquer l’univers, il fut lui-même

inévitablement limité par l’insuffisance de leur développement. C’est la

raison pour laquelle, le matérialisme antérieur aux XVII e et XVIII e

siècles n’a pu se débarrasser de son aspect métaphysique et mécaniste.

Comme le matérialisme français, sa conception sociale demeure

à la conception sociale idéaliste.

1.- Le matérialisme de Hobbes

Hobbes est aussi un matérialiste mécaniste et parmi les

révolutionnaires bourgeois contemporains en Angleterre. Hobbes

systématisa le matérialisme de Francis Bacon. Marx relève le caractère

unilatéral du matérialisme de Hobbes :

« Le monde sensible perd son charme original et devient le sensible abstrait du géomètre. Le mouvement physique est sacrifié au mouvement mécanique ou mathématique, la géométrie est proclamée science principale »2.

Pour Hobbes, le monde est un ensemble de corps obéissant aux

lois du mouvement mécanique. Hobbes réduit aussi la vie intellectuelle

des êtres vivants à des mouvements et à des efforts. Ils sont, selon

Hobbes, des mécanismes complexes obéissant entièrement à des

influences extérieures. Hobbes nie le caractère objectif de la diversité

1 Friedrich Engels, Anti-Dühring, Moscou, Éditions du Progrès, 1987, p. 51. 2 Karl Marx et Friedrich Engels, La sainte famille, p. 155.

Page 33: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 33 =

qualitative de la nature qu’il considère comme procédant des sensations

humaines fondées sur les différences mécaniques entre les choses.

Dans sa théorie du droit et de l’État, Hobbes rejette l’idée de

l’origine divine des institutions sociales et défend la théorie du contrat

social. Tout en considérant la monarchie absolue comme la forme la

meilleure de l’État, il ouvre la voie à bien des principes révolutionnaires.

Son idéal est moins le principe monarchique en tant que tel, qu’un

caractère limité du pouvoir de l’État.

Les droits de l’État sont à ses yeux compatibles avec les intérêts

des classes qui, au milieu de XVIIe siècle, avaient accompli la révolution

bourgeoise en Angleterre. Dans sa théorie de la société et de l’État, on

trouve en germe une conception matérialiste des phénomènes sociaux.

2.- Le matérialisme de Bacon

Le matérialisme de Bacon (1561 – 1626) est un matérialisme

métaphysique. Il est considéré comme un des fondateurs du matérialisme

et de la science expérimentale des temps modernes. Dans sa philosophie

matérialiste, il développa une nouvelle conception de la science et une

théorie de l’induction.

Le but suprême de la connaissance était d’accroître l’emprise de

l’homme sur la nature. Bacon estimait que seule la science étudiant les

causes authentiques des phénomènes était susceptible d’y parvenir.

Aussi, combattait-il la scolastique.

Toute la science antérieure était marquée soit par le dogmatisme

(le savant tisse ses démonstrations par la méthode déductive, à la

manière d’une araignée, en partant de ses propres notions), soit par

l’empirisme caractérisé par un assemblage de faits non raisonnés. Bacon

préconise le scepticisme à l’égard du savoir déjà acquis. Mais il admet la

possibilité d’acquérir un savoir authentique à condition de reformer la

méthode.

Page 34: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 34 =

Dans un premier temps, il fallait, selon lui, débarrasser l’esprit

des erreurs (idoles) qui l’obsèdent en permanence. Les fausses

représentations, une fois éliminées, il devenait possible d’arriver à la

vraie méthode de la science nouvelle. D’après Bacon cette science serait

une synthèse rationnelle des données empiriques. Ses déductions

(axiomes moyens) seraient fondées sur les données d’une classification

méthodologique ou de l’induction. L’induction partirait de la conception

analytique de l’expérience.

Le développement étroit de ce principe incita Bacon (et plus tard

Locke) à appliquer la méthode métaphysique des sciences de la nature

propre à la science des XVe et XVIe siècles à la philosophie.

Dans la théorie de l’induction, il insista, pour la première fois,

sur l’importance des instances négatives, c'est-à-dire la sélection des cas

contredisant la classification, laquelle, s’avérant insuffisamment fondée,

exige une considération. Bacon en tant que philosophe, a le mérite

d’avoir, premièrement, rétabli dans ses droits la tradition matérialiste et

revu sous ce jour, les philosophes du passé en revalorisant le

matérialisme de la haute Antiquité grecque et en mettant en lumière les

erreurs de l’idéalisme.

Deuxièmement il mit au point sa propre conception matérialiste

de la nature, fondée sur la matière considérée comme un ensemble de

corps dotés d’une grande diversité de qualités.

Tous ces concepts de Francis Bacon répondaient aux besoins

nouveaux présentés à la science à l’époque de l’accumulation capitaliste

initiale en Angleterre.

Mais le matérialisme de Bacon était entaché d’inconséquences.

Ses convictions politiques se trouvèrent exprimées dans La nouvelle

Atlantide (1617), une utopie représentant une société idéale prospère

fondée sur les progrès de la science et une technique évoluée mais

divisée en classes dominées et dominantes.

Page 35: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 35 =

Le sous-titre suivant nous permettra de parler des idées de

l’Anglais John Locke concernant son matérialisme

3.- Le matérialisme de Locke

Locke (1632 - 1704), est un matérialiste métaphysique anglais. Il

développe la théorie de la connaissance de l’empirisme matérialiste.

Rejetant les idées cartésiennes, Locke déclare que l’expérience est

l’unique source de toutes les idées. Celles-ci naissent de l’action d’objets

extérieurs sur les organes des sens (l’idée sensitive). Ce dernier point fut

une concession à l’idéalisme. Par les idées de la sensation, nous

percevons dans les choses des qualités soit primaires, soit secondaires

(qualités primaires et secondaires).

Les idées acquises par l’expérience constituent les matériaux du

savoir, mais non le savoir lui-même. Pour devenir un savoir, le matériau

des idées doit être transformé par l’entendement dont l’activité n’est ni

sensation ni réflexion. L’entendement transforme les idées simples en

idées complexes.

À L’instar de Hobbes, Locke estime que le savoir général est

possible grâce au langage.

Bien que Locke ait été convaincu de nos capacités limitées de

connaître les substances matérielles et, qui plus est, spirituelles, on ne

peut le considérer comme un agnostique.

Selon lui, notre objectif n’est pas de connaître tout, mais

uniquement ce qui essentiel à notre comportement et à la vie pratique.

Or, un tel savoir est tout à fait à notre portée.

Dans sa doctrine du pouvoir politique et du droit, Locke

développe l’idée d’un passage de l’état naturel à l’état civique et aux

formes du gouvernement. La raison d’être de l’État, estime Locke, est la

sauvegarde de la liberté et la défense de la propriété acquise par le

travail. Aussi le pouvoir exercé par l’État ne peut-il être qu’arbitraire.

Page 36: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 36 =

Ce pouvoir se subdivise, dans le système de Locke, en premier,

législatif, deuxième, exécutif et troisième, fédéral.

La doctrine de l’État, élaboré par Locke, fut une tentative

d’adapter la théorie à la forme politique du gouvernement qui s’établit en

Angleterre à l’issue de la révolution bourgeoise de 1688 et du

compromis entre la bourgeoisie et le parti embourgeoisé de la noblesse.

La philosophie de Locke eut une grande portée historique.

L’idée que les hommes doivent changer eux-mêmes l’ordre social établi,

s’il n’assure pas à la personnalité une éducation et un épanouissement

dignes d’elle, fut largement utilisée pour justifier la révolution

bourgeoise. Un des courants du matérialisme français prend sa source

dans la doctrine de Locke.

D’autre part,

« La distinction, faite par Locke entre les qualités primaires et secondaires fut reprise par l’idéaliste Berkeley et l’agnostique Hume »1.

Si telles sont les idées anglaises concernant le matérialisme, de

l’autre côté de la Manche, qu’en pensent les Allemand ?

III.- LE MATÉRIALISME ALLEMAND

Vers le XVIIIe siècle, c’est l’étape suivante du développement

du matérialisme en Allemagne. Ce type de matérialisme atteignit son

apogée dans le matérialisme anthropologique de Feuerbach et le

matérialisme assez complet de Marx et Engels. Grâce à ces deux

tendances matérialistes, la critique de la religion, surtout l’essence du

christianisme et de l’idéalisme, devient de plus en plus forte.

1 Dictionnaire philosophique, p. 284.

Page 37: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 37 =

1.- Le matérialisme de Feuerbach

Feuerbach (1804 - 1872), est une philosophe athée allemand.

Son athéisme lui valut d’être destitué de l’université d’Erlanger. Ses

convictions évoluèrent, au cours de sa lutte contre la religion, passant

des positions des jeunes hégéliens au matérialisme.

Le matérialisme de Feuerbach a été le point de départ de la

formation de la philosophie marxiste. Sa défense du matérialisme eut

une influence énorme sur ses contemporains. L’évolution de sa

philosophie débuta par une critique de la conception hégélienne idéaliste

de l’essence de l’homme, qui, la réduisait à la conscience de soi. Rejeter

ce point de vue impliquait nécessairement le rejet de l’idéalisme en tant

que tel.

Le mérite de Feuerbach est d’avoir mis en lumière les liens entre

l’idéalisme et la religion. Il critique aussi sévèrement le caractère

idéaliste de la dialectique hégélienne. Sa critique de Hegel ouvrait la

voie à une mise en valeur du contenu rationnel de la philosophie

hégélienne. Mais en réalité, Feuerbach rejeta purement et simplement la

philosophie hégélienne et pour cette raison, fut incapable d’en apprécier

l’acquis principal.

La dialectique de la défense du matérialisme constitue le contenu

essentiel et le sens de la philosophie feuerbachienne.

Son anthropologie se traduit par la primauté attribuée au

problème de l’essence de l’homme conçu par lui-même comme l’objet

unique, universel et suprême de la philosophie.

Cependant, il ne parvient pas à pousser jusqu’au bout de sa

logique le point de vue matérialiste sur cette question, puisque l’homme

reste pour lui un individu abstrait, un être biologique. Dans sa doctrine

de la connaissance, il défendit les thèses d’empirisme et de sensualisme

en combattant résolument l’agnosticisme.

Page 38: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 38 =

Toutefois, il ne niait pas le rôle de la pensée dans la

connaissance et tenta de définir l’objet en fonction de ses rapports avec

l’activité du sujet. Il émit aussi des hypothèses sur la nature sociale de la

connaissance humaine et de la conscience, etc. Mais dans l’ensemble,

Feuerbach n’a pas su surmonter le caractère contemplatif du

matérialisme pré-marxiste. Cela est dû au fait que son interprétation de

l’histoire reposait entièrement sur des positions idéalistes. Sa vision

idéaliste des phénomènes sociaux tient à son désir d’appliquer

l’anthropologie, en tant que science universelle, à l’étude de la vie

sociale.

L’idéalisme de Feuerbach se manifeste clairement dans son

analyse de la religion et de la morale. Il envisage la religion comme une

aliénation des attributs de l’homme : l’homme se dédouble et contemple,

à travers Dieu, sa propre essence.

Feuerbach voit la cause de ce dédoublement dans le sentiment de

dépendance qu’éprouve l’homme face aux éléments naturels et à la

société. Ses conjectures concernant les racines sociales et historiques de

la religion présentent un intérêt particulier.

Néanmoins, Feuerbach n’a pas réussi à trouver un instrument de

lutte efficace contre la religion. Il l’a cherché dans la diffusion de la

lumière, et prêchait même la nécessité d’une religion nouvelle.

Faute de comprendre, le monde réel où vit l’homme, il fonde les

principes de sa morale sur le désir du bonheur inhérent à la nature

humaine, qui ne peut se réaliser qu’à condition que chacun limite

raisonnablement ses besoins et aime son prochain.

La morale forgée par Feuerbach est abstraite et en dehors de

l’histoire taillée sur la même mesure pour toutes les époques et toutes les

nations, on retrouve les idées de l’anthropologisme feuerbachien

interprétées dans un sens manifestement idéaliste chez un certain nombre

de philosophes idéalistes contemporains.

Page 39: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 39 =

2.- La naissance du matérialisme de Karl Marx et de Friedrich Engels

Après Feuerbach, Marx et Engels furent les grands matérialistes

des Lumières. C’est grâce à leur travail que le matérialisme tient son

fondement actuel, parce qu’ils ont abouti à l’interpréter scientifiquement

et méthodiquement par rapport aux matérialismes antérieurs.

En passant par des périodes historiques, le matérialisme réside

dans la conception idéaliste des sciences de la société

Marx, dès cette époque, avait vu les points faibles de la pensée

de Feuerbach. Elle ne s’encrait pas suffisamment dans l’actualité, dans

l’effort pour modeler la réalité selon les normes de la philosophie. Sans

doute, avait-elle réintégré l’homme concret et le réel dans la pensée

philosophique, mais elle semble en avoir chassé l’histoire.

Il n’empêche que le matérialisme de Feuerbach sera une porte

décisive. Il va mettre la philosophie en désir de remplir sa mission de

prouver sa vérité et de servir ainsi à la transformation du réel, mais il

faudra pour cela qu’il soit repensé par Marx.

Partant de l’analyse du matérialisme antérieur, Marx trouve que

tous les matérialistes ne sont pas capables de donner une notion véritable

du matérialisme, parce qu’ils ont la même conception de l’idéalisme,

surtout dans l’analyse du système social, en oubliant la valeur immense

de la classe ouvrière ou prolétarienne.

Le matérialisme de Marx et d’Engels se manifeste dans le

matérialisme historique et dialectique. La première analyse ou la critique

de tous les systèmes sociaux antérieurs sont en vue de dominer les autres

ou de les exploiter. Il s’agit surtout des systèmes capitalistes de Ricardo

qui développaient une théorie économique basée sur la propriété privée,

et laisse ou oublie la valeur immense des ouvriers.

Page 40: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 40 =

À l’époque, les théories politiques bourgeoises se sont

développées dans le monde européen et furent développées par quelques

matérialistes français.

Marx critique aussi ce système pour mettre en valeur le

prolétariat.

À l’époque de Hegel, l’idéalisme règne dans le monde de

l’Allemagne, selon la théorie politique de Hegel qui part de l’aliénation,

de l’asservissement populaire dans lesquels le peuple obéit à l’État.

Par cette analyse de toutes les conceptions sociales antérieures,

Marx aboutit au socialisme ou à la lutte des classes, à la démocratie

populaire.

Le matérialisme dialectique est la critique de toute conception

dialectique antérieure. Pour lui, toutes les conceptions dialectiques

antérieures ne sont pas capables de donner une explication véritable de la

dialectique. D’une façon générale, l’un des plus grands mérites de Marx

et d’Engels envers le matérialisme, est d’avoir élaboré une méthode

juste. Feuerbach a concentré ses efforts sur la lutte contre l’élément

spéculatif de la philosophie de Hegel, et il en a peu apprécié et utilisé

l’élément dialectique. Lénine, à ce propos, dit :

« La dialectique véritable n’est nullement le dialogue du penseur solitaire avec lui-même : elle est le dialogue entre moi et toi »1.

Premièrement, la dialectique de Hegel n’avait pas non plus le

sens d’un dialogue de penseur solitaire avec lui-même, et deuxièmement,

la remarque de Feuerbach détermine correctement le point de départ de

la philosophie, mais non pas sa méthode. Cette lacune a été comblée par

Marx et Engels, qui ont compris que c’eût été une erreur, en combattant

la philosophie spéculative de Hegel, de méconnaître sa dialectique.

Marx critique cette théorie dialectique de Hegel. Le matérialisme

dialectique marxiste est constitué par la loi de l’unité et la lutte des

1 Vladimir Ilitch Oulianov dit Lénine, Œuvres choisies, tome 38, p. 390.

Page 41: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 41 =

contraires, la loi du passage des changements quantitatifs à des

changements qualitatifs, la loi de la négation de la négation.

C’est le mérite de Marx d’avoir inventé cette nouvelle

conception matérialiste qui est la plus complète et la plus méthodique. Et

tous les matérialistes après Marx ne font que développer le matérialisme

marxiste comme Lénine et Mao Tsé-Toung.

Voilà donc l’histoire du matérialisme, en général, qui part de

l’Antiquité jusqu’à l’époque contemporaine. Chaque étape périodique du

matérialisme a son propre degré de l’interprétation du matérialisme.

Face à ces différentes explications du matérialisme, c’est le

matérialisme marxiste qui nous semble complet et applicable dans la

société.

Mais voyons de plus près tout cela, qu’est ce que vraiment le

matérialisme marxiste ?

Pour répondre à cette question, nous allons voir le matérialisme

dialectique et le matérialisme historique qui sont les bases de la

philosophie marxiste.

Page 42: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 42 =

DEUXIÈME PARTIE

LE MATÉRIALISME PHILOSOPHIQUE PROPREMENT

DIT

Page 43: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 43 =

CHAPITRE I

DÉFINITION DU MATÉRIALISME

La connaissance humaine de la réalité quotidienne est un aspect

qui représente la philosophie; c’est la raison pour laquelle, elle est un

champ de bataille pour les philosophes, sur l’expression de leurs idées.

Ce qui revient à dire que la philosophie leur provoque différentes

visions, différentes conceptions et différentes interprétations des choses

et de la réalité existante.

Cependant, il faut bien préciser que souvent dans la philosophie,

la question de l’existence de l’idée et de la matière est la première source

de divergence entre les philosophes.

C'est-à-dire, à cause de cela, la doctrine philosophique se divise,

à son tour, en deux grands camps diamétralement opposés, à savoir,

d’une part, la doctrine idéaliste et d’autre part, la doctrine matérialiste.

Autrement dit, le matérialisme dit le contraire ou l’opposé de ce

qu’affirme l’idéalisme, selon lequel le monde et la matière n’ont pas été

créés par un être supérieur, suprême. Ce qui signifie qu’ils se sont

formés eux-mêmes.

En effet, la matière est la première par rapport à l’idée et par

rapport à la pensée. Cela aboutit à la non-croyance aux esprits, aux

forces surnaturelles et aux dieux. Pour le matérialiste donc, ce qui est

visible est placé au premier plan, le concret prime sur l’abstrait.

Page 44: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 44 =

I.- LA VISION MATERIALISTE DE LA NATURE

1.- Qu’est-ce que la nature ?

Le matérialiste prétend que la nature est l’élément primordial

dans la constitution du monde. En effet, elle n’est pas d’un seul type

d’objet matériel, mais constituée par un assemblage de diverses matières

comme, par exemple, les arbres, les animaux, la vie, le feu, les oiseaux,

les mers, les océans, l’air, la terre, le tonnerre… Cela veut dire, tout ce

qui existe autour des êtres humains.

Cependant, l’existence ou l’apparition de la nature autour de

l’homme ne signifie nullement qu’elle dépend de lui. Au contraire, elle

lui échappe. C’est la raison pour laquelle, la nature est, en quelque sorte,

une composition des éléments matériels ou bien des réalités et qui, en

dernière analyse, répond à l’appellation d’“environnement matériel”.

2.- Origine de la nature

A.- Le point de vue d’Épicure

La base de la philosophie d’Épicure repose plus particulièrement

sur la recherche du “plaisir”. Ce qui revient à dire que pour lui,

l’important pour l’homme, c’est de profiter de la vie matérielle. Pour

cela, il faut connaître dans sa philosophie que la vie de l’homme n’est

possible que seulement dans le monde matériel et sensible. Ce qui

signifie qu’en dehors de la vie terrestre ou bien après la mort, il n’y a

plus rien. C’est pour cette raison donc qu’Épicure cherche la voie qui

mène à la rencontre du “plaisir”, en vue de la satisfaction de tout un

chacun, pour arriver au but à atteindre dans la vie.

Autrement dit, Épicure montre le chemin du plaisir comme la

satisfaction en vue du bonheur des hommes. Avant tout, il faut savoir

qu’en tant que continuateur de Démocrite, Épicure confirme sa vision

matérialiste de la genèse de la nature selon laquelle, les atomes,

Page 45: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 45 =

corpuscules indivisibles dont se compose la matière, sont immuables,

éternels et en perpétuel mouvement. Ainsi, les atomes se distinguent

uniquement par la forme, la grosseur, la position et l’ordre dans lequel ils

se trouvent placés. Ce qui revient à dire que tous les corps sont formés

par une combinaison d’atomes.

En effet, la séparation des atomes entraîne la disparition d’un

corps et donne, à cette occasion, naissance à un autre corps. Une quantité

infime d’atomes se place dans différentes directions où ils entrent en

combinaison et forme des tourbillons d’atomes. Telle est l’origine d’une

infinité de choses qui naissent, se meuvent, sans qu’elles aient besoin

d’un Dieu pour les créer. Bref, tout cela signifie que le monde est formé

par un assemblage de particules d’atomes en perpétuel mouvement.

B.- Le point de vue de Démocrite

Démocrite est un philosophe atomiste célèbre de l’Antiquité. On

appelle “atomisme”, une doctrine qui soutient que la matière, principe

premier de tout être, est formée d’atomes dont les propriétés engendrent,

par leur composition, tous les phénomènes du monde sensible.

Démocrite est cependant une des sources de la doctrine matérialiste.

C’est pourquoi on l’appelle “le père du matérialisme”. Pour lui, le monde

est formé par la réunion d’éléments naturels, comme l’air, l’eau, le feu,

la terre, etc. En ce sens, tous ces éléments sont produits par la

combinaison d’atomes de toute nature, c’est-à-dire, l’air est formé par la

combinaison d’atomes de l’air, l’eau est formée par la combinaison

d’atomes de l’eau, le feu est formé par la combinaison d’atomes de feu,

la terre par la combinaison d’atomes de la terre.

C'est pour cela que toute création ne sera possible sans

l’existence du mouvement ininterrompu. En d’autres termes, le

mouvement perpétuel est donc la force motrice de la formation de la

nature et du monde depuis toujours ; à défaut, il n’y a rien.

Page 46: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 46 =

Cependant, ce que Démocrite veut nous apprendre dans sa

philosophie, c’est la formation du monde par la combinaison d’atomes

en perpétuel mouvement. Alors, le mouvement est bel et bien nécessaire,

d’après la philosophie de Démocrite, pour une nouvelle création.

Pour terminer, la conception de la nature de Démocrite et

d’Épicure, pour eux, les dieux n’interviennent pas dans la genèse de

l’univers, car disait Démocrite, s’ils existent, ils sont formés par le même

processus de formation possible que celui des autres natures, c’est-à-

dire, faits par la combinaison d’atomes. En ce sens, Démocrite admet

donc l’existence des dieux, mais ils sont de même titre que les autres

éléments de la nature. Ce qui signifie qu’ils sont tous produits de

combinaisons d’atomes passagères et soumises à la nécessité universelle,

apparaissant et disparaissant naturellement. Les dieux de Démocrite sont

donc mortels, au même titre que les hommes et tous les êtres de

l’univers. En un mot, le monde n’a pas été créé, mais il s’est créé tout

seul par la combinaison des éléments constitutifs et contradictoires de

l’univers comme l’air, la terre, l’eau et le feu, qui sont tous produits de

combinaisons d’atomes.

Tout cela signifie que la formation du cosmos a été faite par la

matière toute seule. En effet, l’existence et le mouvement de la nature

sont expliqués tout au long du déroulement de la formation du monde

par la matière.

II.- LA CONCEPTION MATÉRIALISTE DE L’HOMME

L’étude de la nature de l’homme est l’une des particularités de la

doctrine matérialiste. Les matérialistes pensent que l’homme est un être

abandonné sur terre, solitaire et exposé aux aléas du destin. Cela signifie

que l’homme n’a pas de véritable créateur, comme le dit le christianisme.

Ainsi, il est condamné à assumer tout seul son avenir.

Cependant, il est clair que l’homme est la mesure de toutes

choses, c’est-à-dire que tout dépend de lui. Alors, d’après cette vision,

Page 47: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 47 =

Dieu n’existe pas ou s’il existe, il ne s’occupe pas des affaires de

l’homme. C’est pour cette raison que la plupart des matérialistes invitent

l’homme à se délivrer de la crainte, non seulement de la mort, mais aussi

et surtout des dieux, en vue de se contenter du bonheur et des joies que la

vie lui offre.

1.- Le point de vue de Karl Marx

La conception marxiste de l’homme est tout à fait en parfait

accord avec celle des autres matérialistes. Il dit même que l’homme est

pour l’homme l’être suprême. Cela explique l’appartenance de l’homme

à lui-même. L’homme est le possesseur de lui-même, c’est-à-dire que ce

qu’il fait n’est pas pour autre chose, mais c’est pour lui-même. En

d’autres termes, l’homme agit selon ses besoins et selon ses désirs. On

peut dire dans ce sens que son avenir dépend de lui-même. En un mot, il

est le maître de son destin.

À cet effet, l’idée du philosophe matérialiste Ludwig Feuerbach

dont Marx a été fasciné, proclame ouvertement l’athéisme qui dénonce

les caractères illusoires de la religion. Pour Feuerbach, la religion, en

l’occurrence, le christianisme, est en réalité l’ensemble des rapports de

l’homme avec lui-même, c’est-à-dire de son rapport avec son être qu’il

idéalise dans un monde. Dans L’essence du christianisme, il dit que

l’être divin n’est autre chose que l’être de l’homme délivré des liens et

des bornes de l’individu…

Toutes les déterminations de l’essence divine sont par

conséquent des déterminations de l’essence humaine. Cela veut tout

simplement dire que pour Feuerbach, le Dieu des chrétiens n’est autre

chose que l’homme total, l’homme parvenu au plein épanouissement de

son être, c’est-à-dire, l’idée que l’homme a de ce qu’il devrait être. Cette

idée n’est, en réalité, que le produit de son cerveau, donc l’homme la

protège hors de lui, la vénère et l’appelle “Dieu”. Ce qui fait que Dieu

est une idée produite par le cerveau humain et que la religion, définie

Page 48: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 48 =

comme le lien qui unit l’homme à Dieu, est une illusion de la pensée de

l’homme.

En face de cette situation, les idées marxistes excluent toute idée

de Dieu, puisque, pour Marx, Dieu est une grande aliénation pour

l’homme. Autrement dit, la croyance à l’existence de Dieu fait l’homme

prisonnier d’une situation pénible. À cause de cela, Marx a vivement

critiqué la religion parce que, pour lui, elle est un produit de l’oppression

de la nature, c’est-à-dire, par exemple, une impuissance matérielle

devant les cataclysmes naturels. C’est en quelque sorte, une faiblesse

intellectuelle. C’est aussi une oppression de classes.

Dans la société de classes, l’existence et le développement de la

religion trouvent leur origine dans l’oppression et l’exploitation de

classes, car la classe au pouvoir utilise au maximum la religion pour en

faire une arme et préserver sa domination.

Cependant, à l’époque de Marx, la religion est considérée comme

un instrument spirituel, une arme entre les mains de la classe dominante,

c’est-à-dire entre les mains de la bourgeoisie pour défendre son intérêt

afin de pouvoir continuer sa domination en vue d’une exploitation. Le

christianisme devient la religion de l’État Prussien de Frédéric

Guillaume III et les autorités religieuses sont totalement du côté de la

classe dominante qui détient le pouvoir politique et économique de cette

époque. En plus, même les thèmes des messes dominicales que les

autorités religieuses célèbrent, sont faits pour soulager moralement la

misère de la classe dominée et cacher l’exploitation en cours que font les

classes dominantes.

En effet, ces dernières préservent le système d’exploitation et

endorment les classes dominées à travers la religion, plus exactement à

travers les messes par les versets de promesses de la Bible. L’Église

catholique, elle-même dirigée par le Vatican, protège le système

capitaliste selon lequel le capitalisme et le travail salarié sont dans

l’ordre de la volonté divine. En ce sens, les ouvriers doivent accepter

sans se plaindre la place qui leur a été accordée par la volonté céleste.

Page 49: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 49 =

Cela veut dire que pour l’Église catholique, dans la société

capitaliste, tout est dicté par Dieu. C’est pourquoi Marx considère la

religion comme étant une organisation conservatrice entre les mains de

la classe dominante qui n’est rien d’autre que les bourgeois. Par

conséquent, les bourgeois utilisent la religion comme une arme

spirituelle efficace pour asservir le peuple. Alors, il faut démystifier la

mystification religieuse pour pouvoir dévoiler aux dominés la vérité

concrète de leur condition matérielle d’existence. C’est-à-dire, il faut

conscientiser les défavorisés en les amenant dans l’athéisme par

l’éducation, car avec le progrès de la société et l’aide de la science,

l’athéisme gagnera du terrain.

De toute façon, Marx estime que la religion disparaîtra quand la

cause de son apparition aura disparu, plus exactement, les hommes se

délivreront des préjugés religieux, lorsque le système capitaliste sera

détruit et que le communisme se réalise.

En plus de cela, Marx s'en explique plus en détail dans une page

qui ne laisse aucun doute sur sa pensée:

“… La religion est la conscience de soi et la valeur de l’homme qui, ou bien ne s’est pas encore conquis lui-même ou bien s’est déjà perdu à nouveau”1.

Cela veut dire que la religion ne fait pas l’homme, mais

inversement, c’est l’homme qui la fait véritablement. En ce sens,

l’homme n’est pas un être abstrait, installé hors du monde, mais

l’homme c’est le monde de l’homme, l’État, la société. Cet État, cette

société produisent la religion.

Toutefois, la religion est la théorie générale de ce monde ; ainsi,

elle est la réalisation fantastique de l’être humain parce que ce dernier ne

possède pas de réalité vraie. En effet, la lutte contre la religion est une

lutte contre ce monde dont la religion est l’arôme spirituel. La misère

religieuse est à la fois l’expression de la misère réelle et la protestation

1 Karl Marx, Contribution à la critique de la philosophie du droit de Hegel, pp. 51 et

55.

Page 50: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 50 =

contre cette misère réelle. C’est pourquoi, la religion est le soupir de la

créature tourmentée, l’âme du monde sans cœur. De même, elle est

l’esprit de situation dépourvue d’esprit. En un mot, la religion est

l’opium du peuple.

L’exigence de son bonheur véritable c'est l'abolition de la

religion en tant que bonheur illusoire du peuple, c’est-à-dire le bonheur

occasionné par la jouissance matérielle, plus précisément, le bonheur de

la vie matérielle. À cet effet, la critique de la religion déçoit l’homme,

qu’il réfléchisse, qu’il agisse, qu’il élabore sa réalité, comme le fait un

homme déçu, devenu raisonnable, afin qu’il gravite autour de lui-même

et par là, autour de son véritable soleil.

En somme, la religion n’est que le soleil illusoire qui se meut

autour de l’homme tant qu’il se meut autour de lui-même. Pour Marx

donc, la religion est nocive au peuple, c’est-à-dire qu’elle est un opium

pour le peuple dans un monde absurde, celui de la misère et de

l’exploitation préservée dans la société et légalisée par l’État. La religion

sert donc de refuge.

À cause de cette circonstance, Marx nous conseille de nous

délivrer de la religion et de l’idée de Dieu. Au moment où tout cela aura

disparu, l’homme deviendra capable, sans doute, d’agir sur la nature en

vue d’une modification par le travail à son gré.

2.- Le point de vue de l’évolutionnisme et de la biologie

La première créature, ancêtre des hommes, apparaît sur la terre, il

y a trois millions d’années, suppose la paléontologie. Cet ancêtre humain

ou l’homme primitif fut découvert par l’étude d’une fossile trouvée au

lac Turkana au Kenya. Cet être s’est dégagé d’une souche première

apparentée au grand singe, et cet ancêtre a évolué jusqu’à devenir cette

créature appelée homme. L’évolution s’est passée très lentement, car si

le premier ancêtre de l’homme a vécu il y a trois millions d’années, les

hommes primitifs ou préhominiens , ont vécu seulement un million

Page 51: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 51 =

d’années. Le temps passa et finalement apparut l’homme actuel, c’est-à-

dire, l’homo-sapiens sapiens.

Si l’on analyse la conception évolutionniste et biologiste de la

nature de Marx, on constate, en général, que l’homme est un produit de

l’évolution et non pas la créature de Dieu. Ce qui veut dire que dans la

nature, il y a de l’ordre et non pas du hasard. L’évolution permet

d’identifier l’homme des animaux. Ainsi, elle le fait apparaître comme

un être d’exception du fait que l’homme est le seul être capable

d’abstraction, d’invention, de pensée conceptuelle, qui peut agir en

fonction d’une fin, concevoir le bien et le mal, avoir une vie morale. Il

est un être capable de décision.

En plus de cela, l’homme est aussi par sa nature, un être social et

les influences sociales et affectives sont essentielles pour lui.

Pour conclure, d’après la conception matérialiste, l’homme est un

être vivant produit de l’évolution. Il vit dans l’univers et dans la nature.

Il est fait de corps, il est un être matériel, physique. Il se nourrit, se

chauffe, se vêt, construit un habitat, survit aux modifications du climat et

aux catastrophes naturelles. Donc, l’espèce humaine est née au sein de la

nature : avec et contre elle.

Si donc, à l’origine, par nature, l’homme est prisonnier, esclave

de la nature, de l’univers, par son travail, il a acquis la connaissance de

l’univers par son effort de dominer la nature, de la maîtriser et de la plier

à ses besoins. Ceci nous permettra d'approfondir dans le chapitre suivant

le fondement de l'idée et de la matière.

Page 52: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 52 =

CHAPITRE II

APERÇU SUR LE FONDEMENT DE L’IDÉE ET DE LA MATIÈRE

I.- RELATION ENTRE L’IDÉE ET LA MATIÈRE

La question de savoir ce qui est l’élément primordial entre la

matière et l’idée est l’une des raisons qui opposent le matérialisme aux

autres doctrines, entre autres, l’idéalisme et la métaphysique. Puisque,

comme le disait Engels :

“La grande question fondamentale de toute philosophie, et spécialement de la philosophie moderne, est celle du rapport de la pensée à l’être, de l’esprit à la nature ; la question de savoir quel est l’élément primordial, l’esprit ou la nature… Selon qu’ils répondaient de telle ou telle façon à cette question, les philosophes se divisaient en deux grands camps. Ceux qui affirmaient le caractère primordial de l’esprit par rapport à la nature et qui admettaient par conséquent, en dernière instance, une création du monde de quelque espèce que ce fût… formaient le camp de l’idéalisme. Les autres qui considéraient la nature comme l’élément primordial, appartenaient au camp du matérialisme”1.

Toutefois, tout autre emploi des notions d’idéalisme et de

matérialisme, au sens philosophique, ne fait que créer la confusion.

1 Vladimir Ilitch Oulianov dit Lénine, Karl Marx, p. 11.

Page 53: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 53 =

1.- Le point de vue de Marx

Karl Marx, en tant que matérialiste, a une vision tout à fait

contradictoire à la vision de l’idéaliste sur le rapport de la matière à

l’idée. À cet effet, il attaque particulièrement la pensée de Hegel. Marx

écrivait :

“Le mouvement de la pensée qu’il personnifie sous le nom de l’idée est le démiurge de la réalité…”1.

Dans ce sens, pour Hegel, c’est l’idée qui existe bien avant toutes

choses. Ainsi, elle est le créateur de toutes formes d’existence comme

celle du monde et celle de la nature de l’homme.

En d’autres termes, la philosophie hégélienne apprend que c’est

de l’idée que toutes formes d’existence trouvent leur origine. À défaut,

tout restera vide. Bref, l’idée est la première source de l’existence du

monde et de la matière, selon la vision hégélienne.

Cependant, Hegel considérait les objets et leur développement

comme de simples copies réalisées de l’idée. Ce qui veut dire, en

dernière analyse, que la formation des objets matériels n’est rien d’autre

que le produit de la manifestation extérieure du mouvement de la pensée

désignée sous le nom d’idée.

En face de cette circonstance, Marx n’hésite pas à apporter son

attaque contre la pensée hégélienne. Il disait :

“Pour moi, au contraire, le mouvement de la pensée n’est que le reflet du mouvement réel transporté et transposé dans le cerveau de l’homme”2.

Il n’est donc pas étonnant si Marx a critiqué la philosophie

hégélienne, puisque d’après la vision matérialiste, la nature avait déjà

son existence bien avant l’existence de l’idée et que cette dernière n’est

1 Karl Marx, Le Capital, critique de l’économie politique. Livre 1er, Le

développement de la production capitaliste, Paris, Éditions Sociales, 1976, Moscou, Éditions du Progrès, 1982, postface de la deuxième édition, titre abrégé : Le Capital.

2 Ibidem.

Page 54: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 54 =

rien d’autre que le produit, la copie du mouvement extérieur de la nature.

Ce qui indique aussi que l’idée est une créature de la nature, en ce sens

que le développement de l’idée dépend nécessairement du

développement du mouvement réel de la nature.

2.- Le point de vue d’Engels

La matière joue ainsi un rôle capital vis-à-vis du rapport à

l’homme, en ce sens que ce dernier est un produit de l’évolution de la

matière. En plus, l’idée est aussi, d’après la logique des choses, un

produit de la matière, du fait, non seulement qu’elle se trouve dans le

cerveau de l’homme, mais aussi en tant qu’une manifestation extérieure

du mouvement, du développement de la nature. En un mot, tout dépend

de la matière.

La philosophie matérialiste affirme donc l’importance majeure

de l’existence de la nature avant tout. Malgré tout cela, bien que l’idée

soit une créature de la nature, cela ne veut pas dire que prendre en

considération la fonction du cerveau humain signifie une contradiction

avec le matérialisme. Au contraire, parce que d’après le naturaliste

Thomas Henry Huxley :

“tant que nous observons et pensons réellement, nous ne pouvons jamais sortir du matérialisme”1.

En parfait accord avec la philosophie matérialiste de Marx,

Engels, en l’exposant dans l’Anti-Dühring. À ce propos, Lénine écrivait :

“L’unité du monde ne consiste pas en son être… L’unité réelle du monde consiste en sa matérialité, et celle-ci se prouve… par un long et laborieux développement de la philosophie et de la science de la nature… Le mouvement est le mode d’existence de la matière. Jamais, et nulle part, il n’y a eu de matière sans mouvement, et il ne peut y en avoir… Mais si l’on demande

1 Naturaliste anglais (1825 - 1895). Défenseur du transformisme, il s’est attaché à

montrer les affinités entre l’homme et le singe. (Larousse classique, p. 578).

Page 55: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 55 =

ensuite ce que sont la pensée et la conscience et d’où elles viennent, on trouve qu’elles sont des produits du cerveau humain et que l’homme est lui-même un produit de la nature, qui s’est développé dans et avec son milieu ; d’où il résulte naturellement que les productions du cerveau humain, qui en dernière analyse, sont aussi des produits de la nature, ne sont pas en contradiction, mais en conformité avec l’ensemble de la nature”1.

Dans ce passage, il est clair qu’Engels confirme le caractère

indépendant et primordial de la matière, en ce sens que l’intégrité du

monde ne signifie nullement l’achèvement de l’œuvre de l’idée du

monde, ni l’achèvement de l’œuvre de l’essence du monde. Au contraire,

l’intégrité du monde consiste surtout dans le caractère matériel du monde

lui-même. Cette vision est donc prouvée, partagée par une longue

investigation de la philosophie moderne, comme celle du matérialisme,

plus particulièrement, et de la science de la nature.

II.- MARX ET LA CRITIQUE DE LA MÉTAPHYSIQUE

Tout ce qui existe au-delà de la physique signifie la

métaphysique, autrement dit, en dehors de la réalité matérielle ou

sensible. Elle est comme une réflexion sur l’être, sur les principes

premiers et fondateurs d’une tendance inévitable de la raison. Elle est

aussi comme une recherche de la vérité.

1.- Au niveau de l’Être

Pour Platon et en l'occurrence pour la plupart des

métaphysiciens, le monde connaît une division en deux, à savoir, le

monde sensible et le monde intelligible.

Selon Platon, le “sensible” concerne toutes les formes d’objets

palpables, c’est-à-dire tout ce qu’on peut toucher, tout ce qu’on peut voir

et tout ce qu’on peut sentir. Bref, tout ce qui est perçu par les organes

des sens. 1 Vladimir Ilitch Oulianov dit Lénine, Karl MARX, p. 10.

Page 56: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 56 =

Toutefois, il faut souligner que selon la conception platonicienne,

le monde sensible, en tant que tel, n’est pas vraiment un monde réel qui

peut être considéré comme une véritable réalité, du fait de son caractère

changeant, singulier et multiple.

En effet, il ne peut pas faire l’objet de connaissance véritable à

laquelle correspondent nos opinions. C’est pourquoi Platon dit :

“Il n’y a pas de science de ce qui est en perpétuel mouvement”1.

C’est la raison pour laquelle le sensible est considéré par Platon

comme une source d’erreurs, puisqu’il est impossible d’avoir une

connaissance fiable sur ce qui change à chaque instant.

C'est la raison pour laquelle, Platon a fait intervenir l’existence

du monde intelligible. Étymologiquement, l’intelligible signifie tout ce

qui est uniquement saisi par l’intelligence, par l’esprit, ou ce qui est

concevable par la raison. Autrement dit, l’intelligible est uniquement

conçu par l’esprit, saisissable par la raison et est considéré comme une

réalité véritable à cause de son caractère universel, éternel, fixe et

immuable, donc certain.

Si on analyse à fond la conception platonicienne de la

dichotomie du monde, on trouve qu’il y a deux différents niveaux de

l’être, à savoir, l’être sensible, considéré par Platon comme le plus bas

degré de l’être et l’être intelligible qui est considéré comme le plus haut

niveau de l’être.

En face de cette circonstance, le matérialiste ne baisse pas les

bras pour défendre son opinion selon laquelle la réalité véritable se

trouve certainement dans le monde sensible, dans le monde visible,

c’est-à-dire dans le monde perçu par les sens. Ce qui veut tout

simplement dire que la raison et la pensée de l’homme ne sont que des

produits de la nature du monde sensible.

1 Platon, Euthydème, Méxène, Menon, Cratyle, pp. 13 - 14.

Page 57: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 57 =

Différemment de la pensée de Platon, le matérialiste insiste

surtout sur l’importance du mouvement et du changement de la nature

puisque sans eux, il est impossible d’avoir une nouvelle création, non

seulement au niveau de la nature elle-même, mais aussi au niveau de

l’idée.

En guise de conclusion, le matérialiste trouve dans la conception

métaphysique un gène fictif de la réalité existante alors qu’il n’existe

pourtant pas. Par exemple, le monde des idées de Platon est la source du

monde matériel, selon lui. Mais effectivement ce monde est utopique.

C’est à cause de cela que l’homme est plongé dans l’illusion totale. On

peut dire même que l’enseignement platonicien fait marcher l’homme à

l’aveuglette, c’est-à-dire qu’au lieu d’apprendre ce qui est devant, autour

de lui, Platon, au contraire, l’amène dans des représentations

fantasmatiques.

2.- Au niveau de la connaissance

L’étude de la ligne dans le livre VI de La République1 nous

explique clairement le rapport du sensible à l’intelligible. Il s’agit plus

particulièrement du rapport d’obscurité en ce sens que le sensible

correspond à l’opinion. Ce qui veut dire qu’il est le plus bas degré de la

connaissance. Il peut donc faire surgir des erreurs.

En effet, l’opinion est le premier degré de la connaissance ayant

pour objet le sensible et le devenir. Ainsi, l’opinion se caractérise par

l’inconsistance et l’ambiguïté. En un mot, l’opinion fausse n’est pas

claire, donc elle est mensongère et obscure.

Cependant, au niveau de la connaissance, on peut dire que le

monde sensible ne peut être l’objet de science véritable, à cause de son

caractère toujours changeant qui ne nous permet pas d’accéder à la

connaissance vraie. On ne peut en former que des opinions fausses, qui

1 Platon, La République, 509 e - 510 e.

Page 58: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 58 =

sont incapables de se justifier elles-mêmes, car elles sont en

contradiction permanente.

Selon Platon, la véritable science est fixe et immuable, sûre et

certaine. Ce qui veut dire en ce sens que la connaissance intelligible est

tout à fait constante et permanente car :

“Il n’y a pas, dit-il, de science que de ce qui est fixe et immuable”1.

Ainsi,

“Il n’est pas possible de saisir un objet qui change”2.

Tout cela signifie que d’après la philosophie de Platon, on ne

peut avoir de connaissance vraie qu’en dehors du monde sensible, plus

précisément, dans le monde intelligible.

D’après le naturaliste John Locke, l’unique source de la

connaissance ce sont les sens, les expériences et la répétition des

expériences. Cela veut dire que pour l’empirisme et la science, la

connaissance ne se trouve qu’au niveau du monde sensible et elle est

incontestablement saisie par les sens et acquise par l’expérience. En

d’autres termes, c’est l’expérience sensible qui peut être la seule source

de la connaissance vraie. Ce qui se prouve à travers la vie quotidienne

des hommes.

Voici deux exemples : comment pouvoir dire que le sucre est

doux sans l’avoir goûté ? Et comment pouvoir dire que la glace est si

froide sans l’avoir touchée ? Ce qui signifie que la connaissance vraie

n’est acquise qu’à travers les sens. Contrairement à Descartes, affirmant

que nos sens nous trompent, le matérialiste et l’empiriste soutiennent que

nos sens ne nous trompent jamais.

En bref, selon la conception matérialiste, le monde sensible

dispose de la réalité vraie. Ainsi, il est uniquement la seule source de

1 Platon, Euthydème, Ménéxène, Menon, Cratyle, pp. 13 - 14. 2 Eugène Régis Mangalaza, Lire et comprendre Platon, p. 35.

Page 59: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 59 =

toutes sortes de connaissances humaines, car en dehors, tout est

pratiquement impossible.

Le philosophe à coup de marteau Nietzsche va nous faire découvrir un nouveau sens de la métaphysique.

III.- NIETZSCHE ET LE RENVERSEMENT DE LA

MÉTAPHYSIQUE

La philosophie de Nietzsche est une dénonciation de l’idéalisme

et un renversement de la métaphysique puisque, d’après lui, cette

dernière est une fable, un mensonge, un produit de la haine de la vie, en

ce sens qu’elle se caractérise par la condamnation de ce monde du

devenir, du changement et l’invention d’un au-delà qui serait le monde

vrai, le monde de l’être.

En effet, la métaphysique forge la fiction d’un dualisme :

dualisme d’un monde apparent qui est le monde sensible et d’un monde

authentique, idéal. Ce qui revient à dire qu’elle consiste à discréditer le

monde des sens : le monde sensible est le monde de l’illusion, de la

contradiction :

“Toute la diversité et le bariolage du monde empirique, dit Nietzsche, ses qualités changeantes, l’ordre qui en règle le flux et le reflux, tout cela est impitoyablement rejeté comme pure apparence et illusion”1.

Est construite ainsi la fable d’un arrière-monde de la vérité.

Donc, par opposition au monde sensible qui est le monde de la

souffrance et du mal, l’arrière-monde est le monde du bien et le bonheur

suprême ne peut se trouver que dans ce monde idéal. Ainsi, l’être au-delà

du monde sensible est identifié au Bien. “Le monde vrai serait le

bon…”2

1 Friedrich Nietzsche, La naissance de la philosophie à l’époque de la tragédie

grecque, in Vie et vérité, Paris, Gallimard, 1951; p. 29. 2 Friedrich Nietzsche, La volonté de puissance, Paris, Librairie Générale Française,

1991, tome I, livre I, § 182.

Page 60: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 60 =

1.- Critique des origines de la métaphysique

Nietzsche renverse et dépasse la métaphysique par une critique

radicale. La construction d’un arrière-monde, d’un au-delà du monde,

n’est, en effet, que la conséquence du refus de la seule réalité : la réalité

du monde du devenir. Et la métaphysique n’est ainsi que “déguisement”

du néant, car selon l’adage :

“L’homme cherche un principe au nom duquel il puisse mépriser l’homme ; il invente un autre monde pour pouvoir calomnier et salir ce monde-ci, en fait, il ne saisit jamais que le néant et fait de ce néant un Dieu, une vérité appelés à juger et à condamner cette existence-ci”1.

Cependant, le refus de la réalité, le devenir, a sa source dans la

haine de la vie. Le monde du devenir est le monde de l’imprévisible, du

changement, de l’incertain, et cette imprévisibilité, ce changement

engendrent la peur chez l’homme craintif, faible. D’où l’affirmation

selon laquelle :

“Ceux qui sont las, souffrants ou craintifs, entendent par “bonheur suprême” l’immortalité, le repos, quelque chose de très voisin du sommeil profond…”2

Cela veut dire que la peur et la douleur qui sont à l’origine des

raisonnements métaphysiques et de la fiction d’un au-delà, arrière-

monde qui serait le monde du permanent parce que :

“Un monde qui ne puisse ni se contredire, ni tromper, ni changer, un monde vrai où l’on ne souffre pas”3.

En d’autres termes, le monde de l’au-delà sera un monde

meilleur. Il sera ainsi le monde du bien. Cette projection des valeurs

morales dans un arrière-monde vient là, encore d’une dépréciation de ce

monde-ci, d’un dénigrement du changement et de la multiplicité, d’une

impuissance devant la vie et la lutte qu’elle exige. Donc, 1 Friedrich Nietzsche, La volonté de puissance, tome I, livre I, § 210. 2 Friedrich Nietzsche, Œuvres posthumes, § 133, in Vie et vérité, pp. 33-34. 3 Nietzsche, La volonté de puissance, tome II, Introduction, § 6.

Page 61: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 61 =

“Le vrai monde serait le bon parce que l’apparence, le changement, la contradiction, la lutte sont jugés immoraux ; besoin d’un monde d’où ils seraient absents”1.

Parce que c’est l’homme faible devant la vie, le “raté”, c’est-à-

dire celui qui dénigre la vie, les valeurs vitales de la lutte, celui qui n’a

plus de force devant la vie, qui va consacrer toutes les valeurs opposées à

ce qu’exige la lutte vitale et les projeter dans un monde autre qui en sera

la justification. Ainsi, pour se venger des esprits plus forts que le sien, le

raté a besoin de la moralité du manteau du silence supérieur, de

l’affabilité de la douceur, et d’autres drapés idéalistes sous lesquels nous

voyons aller les contempteurs incurables d’eux-mêmes qui sont les

incurables vaniteux.

En plus, l’homme se venge de la vie et des valeurs vitales. La

morale est une expression de la volonté de vengeance et ainsi, l’origine

du mensonge métaphysique.

À l’origine des contradictions métaphysiques, Nietzsche

démontre donc la présence d’une haine de la vie. Il dit :

“douleur et impuissance ont créé tous les outre-monde”2.

D’où le terme “nihilisme” de Nietzsche, c’est-à-dire la volonté de

nier la vie. Ainsi, la métaphysique est le produit d’une vie déclinante,

l’expression de la décadence, d’une lassitude de vivre, voire d’une

volonté de ne pas vivre.

2.- L’affirmation de la vie et l’éternel retour

Le renversement de la métaphysique et l'affirmation du devenir

comme seule réalité, c'est la lutte contre le nihilisme, contre la haine de

la vie. L’homme fort affirme la réalité, la vie et le devenir. Donc, d’après

la philosophie de Nietzsche, l’affirmation de la vie s’exprime dans la

1 Friedrich Nietzsche, La volonté de puissance, tome I, § 182. 2 Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra, I, p. 4.

Page 62: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 62 =

doctrine de l’éternel retour , “au lieu de métaphysique et de religion, la

doctrine du retour éternel”1.

C'est-à-dire que toutes choses reviennent éternellement et nous

sommes toujours avec elles. Par exemple, la moindre douleur, le

moindre plaisir, la moindre pensée, le moindre soupir, tout de la vie

reviendra encore, tout ce qu’il y a en elle d’indiciblement grand et

d’indiciblement petit, tout reviendra et reviendra dans le même ordre ;

c’est pour cette raison donc que la philosophie de Nietzsche exclut toute

idée d’un être ou d’une idée absolue et universelle.

Toutefois, l’affirmation de la vie est inséparable de l’affirmation

de l’éternel retour, de tout le courant du devenir. L’homme fort,

autrement dit, le surhomme, est celui qui parvient à se dépasser lui-

même, c’est-à-dire il dépasse sa faiblesse par une volonté de vie qui est

la volonté de puissance ; il est aussi celui qui affirme chaque moment,

qui transfigure le monde par cette affirmation.

En bref, il est donc clair que la doctrine matérialiste, plus

particulièrement le marxisme est catégoriquement optimiste, non

seulement sur la qualité primordiale de la nature vis-à-vis de l’idée, mais

aussi sur l’importance du rapport qui existe entre la nature et l’homme.

En ce sens que, selon Marx, en tant qu’être du besoin, en tant qu’être du

progrès, l’homme transforme la nature par le biais du travail et de

l’action. Maintenant, on va voir le matérialisme dialectique et le

matérialisme historique qui sont les principes de la philosophie marxiste.

Ainsi finit la deuxième partie de ce travail, nous allons aborder

maintenant la troisième partie intitulée Les principes du matérialisme

marxiste.

1 Friedrich Nietzsche, La volonté de puissance, tome II, Introduction, § 19.

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= 63 =

TROISIÈME PARTIE

LES PRINCIPES DU MATÉRIALISME MARXISTE

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= 64 =

CHAPITRE I

LE MATÉRIALISME DIALECTIQUE

Le matérialisme dialectique créé au milieu du XIXe siècle par

Marx et Engels fut la forme la plus avancée et la plus conséquente du

matérialisme. Non seulement il corrigea les insuffisances déjà

mentionnées de l’ancien matérialisme, mais il dépassa la conception

idéaliste de la société, commune à tous ses représentants.

Au cours de l’histoire ultérieure du matérialisme, deux lignes

foncièrement distinctes se sont dégagées avec netteté : l’une c’est le

développement dialectique et historique, l’autre c’est l’apparition de

multiples variétés de matérialisme vulgaire et simple.

Parmi ces dernières, la plus typique fut une sorte de matérialisme

vulgaire, proche du positivisme, variante du matérialisme, apparue à la

charnière des XIXe et XXe siècles, qui dénatura le matérialisme

dialectique, s’inspira, elle aussi du positivisme. Dans la seconde moitié

du XIXe siècle, le matérialisme venu à maturité s’est avéré incompatible

avec les intérêts des classes étriquées de la bourgeoisie.

Les philosophes bourgeois le taxent d’amoralisme, l’identifiant à

un matérialisme simpliste. Certains idéalistes (Camap, Bachelard, Sartre)

prétendent représenter le matérialisme « vrai » et le « plus moderne ».

Estompant, dans bien des cas, l’opposition du matérialisme et de

l’idéalisme, les philosophes bourgeois ont recours, non seulement au

positivisme et au néoréalisme, mais à des constructions aussi amorphes

et ambiguës que l’est l’actuel naturalisme américain.

Page 65: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 65 =

On constate chez les chercheurs progressistes contemporains, une

évolution du matérialisme naturaliste, vers le matérialisme et finalement

le matérialisme dialectique (Langevin, Joliot, Curie et d’autres…). Le

développement du matérialisme dialectique se caractérise notamment par

un enrichissement constant d’idées nouvelles. L’étape actuelle de la

science exige, en effet, que de nombreux chercheurs naturalistes

deviennent des partisans du matérialisme dialectique.

Par ailleurs, l’évolution de la pratique socio-historique et celle de

la science requièrent que la philosophie du matérialisme elle-même se

développe et se concrétise perpétuellement. C’est ce qu’elle fait dans une

lutte incessante contre les nouvelles variantes d’idéalisme.

Le matérialisme dialectique, à la suite de l’enseignement de

Hegel, se réduit aux trois lois suivantes : la loi de l’unité et de la lutte des

contraires, la loi du passage des changements quantitatifs à des

changements qualitatifs et la loi de la négation de la négation. C’est

encore au mérite de Hegel de les avoir découvertes, mais elles sont

développées d’une manière idéaliste. Pour lui, elles sont de pures lois de

la pensée. Mais Marx va transposer dans le monde vivant les lois de la

dialectique.

I.- HISTOIRE DE LA DIALECTIQUE

Le mot dialectique a été déterminé ou défini par plusieurs

philosophes. Chaque conception dialectique au cours de l’histoire est

connue par son développement progressiste. En effet, la dialectique est une science qui a pour objet l’étude

des lois les plus générales du développement de la nature, de la société et

de la pensée. Une longue histoire précède la conception scientifique de la

dialectique, et pour aboutir à la notion dialectique marxiste, il a fallu

transformer, dépasser le sens primitif de ce terme.

Page 66: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 66 =

1.- Les dialectiques classiques

Avant, la dialectique désignait une méthode de discussion par

question et réponse fondée par Socrate. Chez les sophistes, la dialectique

socratique, c’est le mouvement habile du discours afin de persuader le

plus possible, même si les choses sont contraires à la vérité : c’est de la

rhétorique.

Socrate avance un argument ou une définition au départ, mais qui

sera nié à la fin de la discussion. Il trouve l’intérêt dans l’attente. La

vérité capable de résister, de critiquer un tel schéma de la dialectique,

garde encore sa valeur. On trouve une idée analogue dans la dialectique

moderne.

Les dialectiques anciennes soulignaient déjà le caractère

changeant de tout ce qui existe, elle concevait la réalité comme un

processus, le passage de toute propriété en son contraire. Par exemple,

Héraclite fut considéré comme le premier dialecticien, il est connu pour

avoir élaboré une théorie du devenir fondée sur l’idée des contradictions.

Du conflit des contradictions naît un accord, une harmonie. Tout est en

mouvement perpétuel.

Aristote a entrepris d’analyser les contradictions que soulevait la

tentative de penser les notions de mouvement et de pluralité. Il a lui-

même distingué la dialectique (science des opinions probables) de

l’analytique (science de la démonstration).

La dialectique de Platon, comme le chemin de la connaissance

vers l’intelligible, vers la science, vers l’immuable, vers la contemplation

des idées éternelles, c’est la dialectique ascendante.

Il faut dépasser la dispersion dans le sensible, pour trouver le

chemin de l’intelligible, le repos où l’un et le multiple sont

simultanément donnés. L’achèvement de la montée se trouve dans la

contemplation, dans la vision d’un être transcendant, immuable.

Page 67: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 67 =

Malheureusement, le dynamisme de sa dialectique ne concerne que

l’esprit, l’idée, en négligeant le sensible.

Selon Marx, une telle dialectique doit réétudier et se dépasser

pour trouver sa valeur exacte dans la connaissance du monde objectif et

son développement, comme chez Hegel.

Nous ferons une brève incursion au Moyen Âge, pour connaître

un peu la dialectique de cette époque. 2.- La conception dialectique au Moyen Âge

Au Moyen Âge, la scolastique donne le nom de dialectique à la

logique formelle qu’elle oppose à la rhétorique. Cette logique formelle

est une science qui étudie les formes de la pensée (concepts, jugements,

raisonnements, démonstrations), quant à leur structure logique, c’est-à-

dire abstraction faite du contenu concret de la pensée, afin de dégager le

mode général de relation entre les composantes de ce contenu.

Sa tâche principale consiste à édicter des lois et des principes

dont le respect constitue une condition indispensable pour parvenir à des

conclusions vraies qui fondent toute connaissance humaine. La logique

formelle (dialectique scolastique du Moyen Âge) tire son origine des

travaux d’Aristote qui créa la syllogistique. Une contribution importante

y fut apportée par les premiers stoïciens, au Moyen Âge, par les

scolastiques Duns Scot et Guillaume d’Occam.

Mais cette conception dialectique se poursuit à l’époque de la

Renaissance. Le sous-titre suivant nous reportera à cette époque.

3.- La conception dialectique à l’époque de la

Renaissance

À l’époque de la Renaissance, Nicolas de Cuse et Giordano

Bruno, avancent l’idée dialectique de la coïncidence des contraires.

Giordano Bruno développait également une série de thèses

dialectiques relative à l’unité, à la cohérence et au mouvement universel

Page 68: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 68 =

dans la nature ainsi qu’à la convergence des contraires dans l’infiniment

grand et l’infiniment petit.

Ainsi, pour Nicolas de Cuse, la coïncidence des contraires vient

de la conception de la philosophie chrétienne, une doctrine plaçant Dieu

au-dessus des contraires. Tous les contraires coïncident en Dieu : le fini

et l’infini, le plus petit et le plus grand, l’unique et le multiple, etc. La

doctrine de Nicolas de Cuse relative à la coïncidence des contraires en

Dieu, contient, en dépit de sa teneur mystique et idéaliste, plusieurs idées

fécondes : la critique du caractère borné des oppositions discursives ;

l’anticipation du concept des quantités infinitésimales ; la question des

limites de l’application de la loi de la contradiction aux connaissances

mathématiques.

Ce bref aperçu de la dialectique à l’époque de la Renaissance

nous conduit aux temps modernes. C’est l’objet du développement

suivant. 4.- La dialectique dans les temps modernes

Dans les temps modernes, Descartes et Spinoza furent les

dialecticiens les plus connus, et ils donnèrent malgré le règne de la

métaphysique, des modèles de raisonnement dialectique.

Descartes, sur le développement de la connaissance, place au

premier plan le doute. Selon lui, il faut d’abord mettre en doute ce qui

existe. Ce doute n’est nullement inspiré par la conviction que tout ce qui

existe est inconnaissable. C’est uniquement un moyen de remonter à la

vérité première et incontestable de toute connaissance, vérité qu’il

résume dans cette affirmation : « Cogito, ergo sum ». Partant de là, il

tente de démontrer l’existence de Dieu, puis de fonder sa conviction en

la réalité du monde extérieur.

Les théories de Descartes relatives à l’authenticité immédiate de

la conscience de soi, aux idées innées (parmi lesquelles il rangeait l’idée

de Dieu et celle de la substance spirituelle ou corporelle) ont influencé la

Page 69: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 69 =

philosophie idéaliste postérieure et ont été critiquées par les partisans du

matérialisme.

Spinoza, imitant à la dialectique de Descartes, interprète sa

théorie de la connaissance à la manière métaphysique. Il place le savoir

intellectuel fondé sur l’esprit au-dessus du savoir sensible, inférieur et a

abaissé le rôle de l’expérience

On peut dire aussi que la dialectique métaphysique à l’époque

moderne se rapproche de la dialectique réelle, mais elle reste

métaphysique ; on peut le dire antidialectique.

« À l’époque moderne, la notion de métaphysique apparaît en tant que mode de pensée antidialectique résultant d’une connaissance unilatérale, dans laquelle les choses et les événements sont considérés comme immuables et indépendants les uns des autres, tandis que le rôle des contradictions internes en tant que source de développement de la nature et de la société est méconnu ».1

Marx et Engels ont montré l’inconsistance scientifique du mode

de pensée métaphysique et lui ont opposé la méthode dialectique

matérialiste, en s’appuyant sur l’ensemble des données formées par les

sciences et par l’évolution sociale. Lénine a montré qu’ériger en absolu

tel ou tel aspect ou moment du processus cognitif, c’est faire de la

métaphysique.

5.- La dialectique du XVIII e siècle

Les idées dialectiques abondent en France au XVIIIe siècle, chez

Rousseau et Diderot. Pour le premier, les contradictions sont une

condition du développement historique. La dialectique de Rousseau

aboutit à professer le déisme. Il croyait non seulement à l’existence de

Dieu, mais aussi à l’immortalité de l’âme. Il considérait la matière et

l’esprit comme deux principes existants de toute éternité (dualisme).

1 Dictionnaire philosophique, p. 320.

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= 70 =

Sensualité dans la théorie de la connaissance (sensualisme), il admettait

néanmoins l’innéité des idées morales.

En outre, Diderot étudie les contradictions de la conscience

sociale chez les contemporains. En principe, sa dialectique est

sensualiste, c'est-à-dire que la source de la connaissance est la sensation.

Il apporta des éléments de dialectique, idée d’une relation entre la

matière et le mouvement, la corrélation des processus naturels, le

caractère éternellement changeant de toutes les formes dans la nature.

Au sujet de la manière dont le mouvement mécanique des

particules matérielles est susceptible d’engendrer le contenu spécifique

des sensations, Diderot défend l’idée d’une sensibilité générale de la

matière.

Développant ce point de vue, il esquisse une théorie matérialiste

des fonctions psychiques, anticipant sur la théorie des réflexes, et les

hommes et les animaux sont des instruments pourvus de la faculté de

sentir et de se souvenir.

Sa théorie de la connaissance rejette la thèse idéaliste du

caractère spontané de la pensée. Toute spéculation a sa source dans la

nature et nous ne faisons qu’enregistrer les phénomènes connus

empiriquement entre lesquels, existe une relation soit nécessaire, soit

conventionnelle.

Diderot développe la thèse de Bacon selon laquelle la

connaissance dont la source est tout empirique, n’a point pour finalité la

vérité en soi, mais la recherche des moyens de rendre l’homme plus

parfait et d’accroître sa puissance.

Les fondateurs du marxisme tenaient en haute estime son œuvre

et ses théories. On trouve chez lui, écrivait Engels, des « chefs-d’œuvre

de la dialectique ».

« Diderot, dit Lénine, est parvenu jusqu’au seuil de la conception moderne du matérialisme et « a

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= 71 =

opposé nettement les principales tendance philosophique »1.

S’il en ainsi de la dialectique au XVIIIe siècle, nous allons voir

maintenant les trois lois fondamentales régissant le matérialisme

dialectique

II.- LES TROIS LOIS FONDAMENTALES DU

MATÉRIALISME DIALECTIQUE

Le matérialisme dialectique, comme nous l’avons déjà dit plus

haut, est constitué par trois lois fondamentales, telles que, la loi de

l’unité et de la lutte des contraires, la loi du passage des changements

quantitatifs à des changements qualitatifs et la loi de la négation de la

négation.

Le premier fondateur de ces termes est Hegel, mais le problème,

il l’explique d’une manière idéaliste. Marx va transformer dans le monde

vivant les lois de la dialectique ? À ce propos, voici ce que Engels, l’ami

de Marx, écrit :

« La dialectique est non seulement la science théorique de la pensée, mais aussi science du développement de la nature et de la société. »2

1- Loi de l’unité et de la lutte des contraires

La loi de l’unité, c’est la loi générale de la réalité et de la

connaissance par la pensée humaine exprimant l’essence de la

dialectique matérialiste.

Chaque objet concret contient des contraires. Par contraires, le

matérialisme dialectique entend des éléments, des aspects, etc., qui se

trouvent dans une unité indissoluble, qui s’excluent mutuellement et cela

non seulement sous divers rapports, mais encore sous un réel et même 1 Vladimir Ilitch Oulianov dit Lénine, Œuvres, t. 14, p. 36. 2 Friedrich Engels, Anti-Dürhing, p. 220.

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= 72 =

rapport, c'est-à-dire qu’ils s’interpénètrent. Il n’existe pas de contraires

sans unité comme il n’existe pas d’unité sans contraires : par exemple, la

coexistence de la bourgeoisie et du prolétariat.

Ces deux classes forment la société capitaliste, elles sont

constamment en lutte et en conflit. La lutte va aboutir à un

bouleversement révolutionnaire, le prolétariat s’émancipe. La lutte des

contraires conditionne la vie future et harmonieuse de l’humanité.

Dans cette étude, l’unité contient en soi la différence, c'est-à-dire

le prolétariat et l’autre classe différente de la bourgeoisie. Pourtant, il est

son complément. On doit ici vérifier que la véracité de la dialectique au

sens marxien et hégélien ne se limite pas seulement à l’origine de la

pensée subjective, mais elle s’étend au processus de l’histoire de la

société et de la nature.

L’unité des contraires est relative, temporaire, alors que leur lutte

est absolue. Cette loi explique la source interne objective de tout

mouvement et, sans recourir à une force étrangère, permet de concevoir

le mouvement comme automouvement. La pensée dialectique ne

morcelle pas le tout, en isolant abstraitement les extrêmes, mais au

contraire, elle appréhende le tout comme organique, comme un système

dans lequel le contraire s’interpénètre en conditionnant tout le processus

de développement. C’est à travers cette loi que s’exprime sous sa forme

la plus concentrée, l’opposition de la pensée dialectique à la pensée

métaphysique spéculative, qui interprète la source du mouvement

comme étant seulement distincte du mouvement lui-même et comme lui

étant extérieur, et l’unité comme quelque chose qui coexiste avec la

variété.

Toute l’histoire de la dialectique est celle de la lutte menée

autour de l’unité des contraires comme Héraclite, Nicolas de Cuse,

Bruno, Kant et Hegel faisaient l’analyse des contradictions.

Le marxisme a interprété et développé la loi de l’unité et de la

lutte des contraires comme loi de la connaissance et loi du monde

objectif d’un point de vue matérialiste. Aborder cette loi à partir du

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= 73 =

principe de la coïncidence de la dialectique, de la logique et de la théorie

de la connaissance, revient à combattre les tentatives de la réduire à la

somme des exemples, et à la concevoir comme loi générale de l’être et

de la pensée.

L’universalité de cette loi est la base de ses fonctions

méthodologiques dans le processus de la connaissance. La solution des

contradictions fait avancer la recherche selon la logique de l’objet lui-

même, et est un moyen rationnel d’élaboration des concepts nouveaux et

de leur synthèse.

La contradiction dialectique dans la connaissance ne se réduit

pas à l’opposition de la thèse à l’antithèse. Elle consiste dans le

mouvement vers la solution. Comprendre une contradiction dialectique

veut dire comprendre comment elle se développe et se résout. Le

processus de développement se réalise à travers le heurt des contraires

tant intérieurs qu’extérieurs.

La dialectique envisage les contraires extérieurs non point

comme des essences au départ différentes par nature, mais comme le

résultat du dédoublement de l’un, et en dernière analyse, comme

émanant des contraires internes.

La théorie marxiste de l’évolution sociale est fondée sur cette loi.

Sur l’étude des contradictions de la société, elle était la thèse de la lutte

des classes comme force motrice du développement de la société divisée

en classes et déduit de cette thèse ses conclusions révolutionnaires. Le

socialisme est le résultat logique du développement et de la révolution au

moyen de la révolution sociale des contradictions du capitalisme. Quant

aux contradictions et aux formes de leur résolution, elles sont

extrêmement variées. Le socialisme se développe aussi par voie de

contradictions, mais ces dernières ont un caractère spécifique

(contradictions antagoniques et non antagoniques).

La catégorie de la contradiction dialectique revêt également une

grande importance méthodologique pour les sciences naturelles

contemporaines, qui se heurtent de plus en plus souvent à la nature

Page 74: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 74 =

contradictoire des objets. Le marxisme-léninisme a fait de la catégorie de

la contradiction le propre d’un mode de pensée fondé sur une

assimilation intégrale du monde par un homme qui n’a point à craindre

les contradictions ni à empêcher leur résolution. L’importance

conceptuelle et informative de cette loi, selon laquelle aucun degré de

développement ni aucun acquis de l’histoire ne devraient être considérés

comme définitifs, réside aussi dans le fait qu’elle oriente sur l’œuvre de

création infinie.

Voilà ce qui concerne la première loi, la loi de l’unité et de la

lutte des contraires. Actuellement, nous allons essayer de voir un peu

plus en profondeur la loi du passage des changements quantitatifs à des

changements qualitatifs. 2- Loi du passage des changements quantitatifs à des

changements qualitatifs

La deuxième loi qui fait partie du matérialisme dialectique, c’est

la loi du passage des changements quantitatifs à des changements

qualitatifs. Dans cette loi, le marxisme veut démontrer que les sociétés

de classes ont besoin de transformation et d’être succédées par la classe

prolétarienne.

Engels prenait comme exemple l’eau. Un certain changement de

température fait passer l’eau de l’état liquide, soit à l’état solide, soit à

l’état gazeux. La dialectique marxiste n’est rien d’autre que la

dialectique hégélienne remise sur ses pieds et appliquée au réel. Fidèles

au principe du matérialisme dialectique, Marx et Engels se montrent

optimistes qu’un jour, la classe anciennement opprimée aura tous les

pouvoirs, puisque rien n’existe éternellement. Ce qui est puissant

deviendra un jour impuissant. De la réalité mourante naît une nouvelle

réalité plus viable. La démocratie prolétarienne chassera de l’histoire la

démocratie bourgeoise. Seule la classe prolétarienne pourra se charger de

réaliser une transformation sociale radicale.

En réalité, La loi du passage des changements quantitatifs à des

changements qualitatifs est une des lois fondamentales de la dialectique

Page 75: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 75 =

expliquant le mécanisme du mouvement et du développement. D’après

cette loi universelle du développement, une accumulation graduelle de

changements quantitatifs imperceptibles, aboutit, à une certaine étape, à

des changements qualitatifs radicaux, à un bond de l’ancienne qualité à

une qualité nouvelle (qualité et quantité, mesure, bond). Cette loi est

inhérente à tous les processus du développement dans la nature, la

société de la pensée. Elle permet de comprendre la conception

dialectique du développement et ce qui la distingue des diverses

conceptions métaphysiques qui réduisent le mouvement et le

développement uniquement à des changements quantitatifs de ce qui

existe sans destruction de l’ancien ni création du nouveau, le

développement de toute science (physique, chimie, biologie, etc.).

L’expérience historique universelle de transformation sociale intervenue

au cours des dernières décennies confirme et enrichit la théorie

dialectique du développement en tant que processus des changements

qualitatifs consécutifs aux changements quantitatifs.

Les changements quantitatifs et qualitatifs sont interdépendants

et se déterminent les uns les autres ; on assiste non seulement au passage

de la quantité à la qualité, mais aussi au processus inverse, à un

changement des caractéristiques quantitatives par suite du changement

de la qualité des objets et des phénomènes.

C’est ainsi que le passage du capitalisme au socialisme a

provoqué un changement considérable des indices quantitatifs ;

développement économique et culturel plus rapide, croissance de revenu

national, etc. Les changements quantitatifs et qualitatifs ne sont pas

absolus. Les mêmes changements sont qualitatifs par rapport à certaines

propriétés (moins générales) et quantitatifs par rapport à d’autres

propriétés (plus générales). Le passage du capitalisme du stade pré-

monopoliste au stade monopoliste n’est donc pas un changement

qualitatif absolu : la qualité du capitalisme n’a changé que dans la

mesure où il y a acquis certains nouveaux traits et propriétés substantiels,

sa nature étant restée la même.

Page 76: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 76 =

Tout processus de développement est à la fois continu et

discontinu. Ceci dit, la discontinuité se manifeste sous la forme d’un

bond qualitatif et la continuité sous celle d’un changement quantitatif

(évolution et révolution).

Le marxisme démontre le caractère antiscientifique des vues des

idéologues bourgeois et des révisionnistes de droite, qui ramènent le

développement de la société à une lente évolution, à de petites réformes,

et nient les bonds, les bouleversements révolutionnaires, ainsi que des

idées avancées par les anarchistes et les révisionnistes de « gauche », qui

méprisent la nécessité de longs efforts persévérants pour rassembler les

forces, organiser et préparer les masses, en vue d’actions

révolutionnaires décisives.

Hegel fut le premier à formuler cette loi. Or, les catégories de la

quantité, de la qualité et leur passage réciproque, se présentent chez lui,

d’abord, sous une forme abstraite dans le cadre de l’idée absolue et

seulement ensuite, dans la nature.

La philosophie marxiste considère cette loi, non comme une

prémisse de la construction du monde, mais comme le résultat de l’étude

du monde, comme le reflet de ce qui se passe en réalité. Étant une loi des

plus importantes du monde objectif, elle est à la fois un principe

important de la connaissance du monde et de sa transformation

consciente. À mesure que changent les conditions de l’évolution sociale,

on voit changer également les formes de la manifestation des lois de la

dialectique.

Le passage des changements quantitatifs à des changements

qualitatifs prend la forme de révolutions politiques : les changements

sociaux s’y opèrent graduellement en éliminant ce qui a fait son temps,

et en engendrant les éléments nouveaux. C’est la loi principale de la

transformation du socialisme en communisme.

3- Loi de la négation de la négation

Page 77: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 77 =

La loi de la négation de la négation est une des lois

fondamentales de la dialectique. Cette loi permet d’expliquer la loi de la

transformation d’une chose en son contraire par la lutte des

contradictions internes, la loi du remplacement de l’ancien par le

nouveau et la loi de la progression par vagues.

La négation de la négation fut pour la première fois formulée

dans le système idéaliste de Hegel qui l’applique au développement de

l’esprit, c’est-à-dire qu’elle est l’union ou le retour de l’esprit à Dieu,

après s’être aliéné dans le monde. Le marxiste a remis cette loi sur la

terre.

« Exemple : un grain d’orge, s’il rencontre les conditions normales et de l’humidité, il subit sous l’action de la chaleur et de l’humidité, une métamorphose spéciale, il germe ; le grain périt comme tel, il est remplacé par la plante née de lui, qui est la négation du grain.

Mais quel est le cours normal de la vie de cette plante ? Elle grandit, fleurit et féconde, et finalement produit de nouveau des grains d’orge et dès que ceci est mûr, la tige meurt, elle est aussi de son côté niée. Résultat de cette négation de la négation, nous avons de nouveau des grains d’orge du commencement, non simplement, multiplié, 10, 20 ou 30 fois »1.

Nous voyons dans ce même grain, la négation de l’autre et le

processus de son développement. Si on transporte la triade dialectique à

ce grain, on peut dire que le premier grain représente l’affirmation au

sein de laquelle se cache la négation.

La plante née du premier grain, cette nouvelle plante sera niée à

son tour au bout d’un certain temps. La négation de la négation devient

le point de départ de la nouvelle négation et ainsi de suite. La négation

de la négation devient le fonctionnement sans cesse de la plante : la

vieille plante est dépassée en laissant derrière elle la plus jeune.

1 Friedrich Engels, Anti-Dühring, p. 210.

Page 78: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 78 =

En réalité, la loi de la négation de la négation exprime la

succession, la liaison du nouveau avec l’ancien. La répétition, au stade

supérieur du développement, de certaines propriétés du stade inférieur,

prouve le caractère progressif de l’évolution.

En dialectique, la catégorie de la négation signifie la

transformation d’un objet en un autre, s’accompagne de la destruction du

premier objet. Mais il s’agit d’une destruction qui ouvre l’horizon à une

nouvelle évolution et intervient comme élément de liaison, en conservant

tout le contenu positif des stades déjà franchis. Engendrée par les lois

internes des phénomènes, la négation dialectique intervient comme une

auto-négation. L’essence de la négation dialectique conditionne

également cette particularité de l’évolution qui s’exprime par la double

négation (ou par la négation de la négation). L’auto-développement de

l’objet est le fait des contradictions internes qui lui sont inhérentes (unité

et lutte des contraires, loi de la négation, présence en lui de sa propre

négation).

La contradiction est levée au cours du mouvement de l’objet (et

de la connaissance), ce qui signifie l’émergence d’une « tierce » négation

par rapport aux deux contraires. Mais comme non seulement ils

s’excluent l’un et l’autre, mais s’interpénètrent aussi. La « tierce »

négation est une négation qui intervient comme une conservation

(dépassement-conservation).

Les prémisses et les conditions ayant engendré un objet, loin de

disparaître avec son développement, sont reproduites par lui. Dans la

pensée, ceci s’exprime par la négation de la négation, par une

intellection plus profonde à une nouvelle étape de l’évolution de la

théorie des aspects de la vérité auxquels on est déjà parvenu. Il découle

du principe de l’unité de la dialectique, de la logique et de la théorie de

la connaissance qu’on ne saurait donner une interprétation correcte du

caractère universel de la loi de la négation de la négation que si on

l’étudie comme une loi de l’activité pratique et théorique. La pratique

étant à la base des rapports humains avec le monde extérieur, ses

particularités conditionnent aussi le rapport théorique (cognitif). Celui-ci

Page 79: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 79 =

consiste à ce que la reproduction d’un objet en évolution n’est possible

qu’en tant qu’histoire de sa connaissance, à travers les théories et les

conceptions, se niant les unes les autres dialectiquement.

C’est par ce mouvement que s’opèrent le développement de la

connaissance universelle et la négation d’une théorie par une autre, que

se manifestent les lois des mouvements du monde matériel comme

négation de l’un de ses états par un autre. C’est ici aussi qu’on trouve

l’explication du fait que l’état nié n’est pas rejeté, mais conservé sous

une forme modifiée.

En effet, l’approche unilatérale de l’objet dégage en lui quelque

chose de constant qui se conserve au cours de la négation. Aussi

l’évolution de la théorie scientifique n’est-elle possible que si l’on

préserve le contenu positif d’une connaissance niée, que si on

l’incorpore dans une théorie nouvelle.

Dans les sciences de la nature, ce rapport entre l’ancienne théorie

et la théorie nouvelle se traduit dans le principe de correspondance, qui

révèle la dialectique propre du monde objectif. Voici pourquoi la loi de

la négation de la négation intervient tout comme une loi de la

connaissance que comme une loi du monde objectif.

Ce premier chapitre de la troisième partie nous a permis

d’étudier le matérialisme dialectique. Le prochain chapitre étudiera le

matérialisme historique de Karl Marx.

Page 80: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 80 =

CHAPITRE II

LE MATÉRIALISME HISTORIQUE

I.- L’ÉCONOMIE POLITIQUE, PRAXIS ET HISTOIRE

Pour les marxistes, elle prend en considération la seule structure

sociale de la production des biens matériels aux divers stades historiques

de la société. L’économie politique consiste dans l’étude des rapports

sociaux de production.

Cependant, l’économie politique ne se limite pas à l’étude des

seules catégories économiques telles qu’elles existent dans le système

capitaliste, elle doit appréhender l’origine de celles-ci et suivre les

différentes formes historiques qu’elles ont pu revêtir au cours de

l’histoire et prévoir les conditions sociales de leur disparition.

À cet égard, la méthode utilisée est le matérialisme historique qui

est l’application de la philosophie matérialiste et le principe de la

dialectique à l’étude de l’évolution des sociétés depuis l’Antiquité.

Engels définit le matérialisme historique comme étant une conception

marxiste de l’histoire qui cherche la cause première et le grand moteur

de tous les événements historiques importants dans le développement

historique de la société, dans la transformation des modes de production

d’échange, dans la division de la société qui en résulte et dans la lutte de

classes entre elles. Ce qui signifie que le matérialisme historique, science

marxiste de la société, est une conception matérialiste de la société elle-

même. En plus de cela, pour Marx, la production matérielle à partir de la

praxis constitue la base concrète de l’existence sociale des hommes. En

ce sens que chaque forme des sociétés historiques se caractérise par un

Page 81: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 81 =

mode de production donné : la différence entre la société qui existe dans

l’histoire tient donc à la différence de son mode de production.

En d'autres termes, le matérialisme historique est une conception

dialectique, c’est-à-dire une conception selon laquelle la société est une

réalité en transformation constante, transformation résultant du

développement de la praxis dans la production et en particulier au

développement des contradictions internes d’ordre matériel entre les

forces productives et les rapports de production. À un certain stade de la

production sociale, ces contradictions prennent la forme de la lutte de

classes. Celle-ci, élément constitutif de la praxis, constitue le principe

d’explication du remplacement d’une forme de société par une autre.

En termes plus simples, le matérialisme historique est une

conception selon laquelle l’histoire de toute société s’explique

essentiellement dans la production et dans la lutte de classes par le biais

de la praxis.

En effet, en considérant le processus de production, le

matérialisme historique ne se contente pas d’expliquer l’aspect technique

qui préside dans la production de biens matériels, mais surtout arrive à

déceler la place détenue par l’homme dans le processus de la production.

Contrairement aux auteurs classiques, Marx et Engels estiment que dans

l’étude de l’économie, l’accent doit être avant tout mis sur la praxis de la

production qui détermine, en dernière analyse, la répartition des biens et

ses manifestations sociales. Pour les marxistes, la compréhension de tout

phénomène social doit avant tout passer par l’économie qui étudie des

rapports sociaux de production.

Page 82: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 82 =

II.- LA DÉTERMINATION DE LA VIE SOCIALE PAR

L’ÉCONOMIE

1.- Praxis et rapport de production

En tant que fait social, la production entraîne la relation

nécessaire entre les hommes. Ce qui revient à définir le rapport de

production comme un ensemble de relations qui s’établissent entre les

hommes dans le processus social de production. En d’autres termes, on

appelle rapports de production, l’ensemble des rapports qui s’établissent

entre les hommes dans l’accomplissement social du travail (par exemple,

l’organisation et l’exécution du travail? C'est encore le rapport entre

patron et salarié qui s’exprime sur le travail indirect et le travail

direct…), leur rapport à la propriété des moyens de production

(propriétaire et non propriétaire), ainsi que leur rapport au produit du

travail social? En d'autres termes, c’est la répartition du point de vue de

la distribution et de l’échange ainsi que leur position vis-à-vis de la

consommation effective des produits du travail. Finalement donc, c'est

leur position vis-à-vis de la richesse nationale.

À un certain stade du développement historique de la société, ces

rapports de production deviennent rapports de classes, c’est-à-dire des

rapports d’exploitation des dominés par les dominants et par là-même,

des rapports de lutte de classes. Cela veut dire en ce sens que l’élément

essentiel des rapports de production (conditionnant la position des

individus dans l’accomplissement du travail et vis-à-vis du produit du

travail, c’est le rapport des individus aux propriétaires des moyens de

production. D’une part, les propriétaires des moyens de production sont

des classes privilégiées dans la production et d’autre part, les non-

propriétaires des moyens de production sont des classes défavorisées,

exploitées et obligées de vendre leur force de travail.

Dans ces conditions, la praxis est un élément essentiel des

rapports de production car l’accomplissement du travail social dans la

production est le produit du travail social dépendant de la praxis.

Page 83: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 83 =

2.- Praxis et force productive

Les forces productives sont constituées par l’ensemble des

modes de production et des forces de travail des hommes dans le

processus de la praxis productive, particulièrement les forces

productives sont constituées par :

- Les conditions naturelles de production, c’est-à-dire les

ressources naturelles, la matière première et le sol qu’il s’agit de

transformer dans la praxis productive.

- Les moyens techniques de travail qui ne sont rien d’autre que

l’ensemble des instruments créés par l’homme pour transformer la

nature.

- La force de travail des hommes ou bien la qualité de la main-

d’œuvre, la puissance physique des travailleurs ainsi que leur savoir et

leur savoir-faire.

En un mot, les forces productives sont l’ensemble des éléments

naturels, techniques et humains dont la combinaison rend possible la

création des biens matériels nécessaires pour l’existence sociale. Dans

les forces productives, ce sont les éléments techniques qui constituent les

éléments essentiels car la productivité générale de la société en dépend.

Cependant, les éléments techniques et les éléments humains forment ce

qu’on appelle “moyen de production”.

Dans ces conditions, la praxis en est également un élément

essentiel car la transformation de la nature par les moyens de production

et par les forces de travail ne se fait que par le biais de la praxis.

3.- Praxis et mode de production

Les forces productives déterminent les rapports, c’est-à-dire qu’à

chaque degré du développement des forces productives (degré qui se

mesure en fonction de l’état et de la qualité des instruments techniques

Page 84: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 84 =

de travail utilisés, en fonction de leur efficacité et de leur productivité)

correspond nécessairement un type particulier des rapports de

production. C’est la combinaison à un moment historique du

développement de la société des forces productives correspondant qui

constituent ce qu’on appelle “mode de production”, en ce sens que celui-

ci permet de distinguer chaque forme historique des sociétés.

4.- Rapport entre infrastructure et superstructure

Dans une société donnée, les rapports de production forment les

structures fondamentales de base et constituent l’infrastructure de la

société. Les rapports sociaux dépendant des rapports de production,

c’est-à-dire que dans une société donnée, il y a d’autres activités

(juridique, politique et idéologique) auxquelles les hommes doivent se

livrer et qui sont liées directement à l’activité de production. Autrement

dit, le rapport entre infrastructure et superstructure est un rapport de

dépendance c’est-à-dire que finalement, la superstructure d’une société

(juridique, politique et idéologique) dépend de son infrastructure laquelle

est constituée par les rapports de production dont la forme essentielle est

la structure économique de cette société.

En termes plus simples, la forme d’une société ou d’un mode de

production dépend entièrement de son économie selon Marx.

5.- Le processus de la transformation de la société

La correspondance entre les forces productives et les rapports de

production caractérise un mode de production, mais les forces

productives sont mobiles, c’est-à-dire qu’elles ne restent pas dans le

même état mais elles se développement progressivement.

Ce développement se traduit par la découverte ou l’utilisation de

nouvelles ressources, de nouvelles matières premières, ainsi que par

l’augmentation de la main-d’œuvre, l’augmentation de la population et

surtout l’amélioration des moyens techniques de production. De leur

Page 85: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 85 =

côté, les rapports de production sont statiques, les éléments de la

superstructure, c’est-à-dire la structure juridico-politique et idéologique,

contribue au maintien des rapports de production. Ce qui signifie que la

classe dominante de ce rapport de production veut toujours continuer à

pérenniser le rapport d’exploitation en cours.

Cela veut dire que les lois, le pouvoir politique et idéologique

d’une société y sont instaurées pour défendre les intérêts de la classe

dominante. Or, à un certain stade du développement des forces

productives issues du développement des moyens de production, les

rapports de production n’y conviennent plus et entrent en contradiction

avec les forces productives : il y a donc non-correspondance entre les

forces productives et les rapports de production, or selon la loi de la

dialectique marxiste héritée de la dialectique hégélienne, toute

contradiction entraîne un mouvement et par conséquent un

développement vers une autre réalité. D’où la contraction entre forces

productives et rapports de production constitue la condition objective de

la transformation de la société.

Dans ces conditions, il nécessite une révolution sociale pour

mettre en place de nouveaux rapports de production plus conformes aux

nouvelles forces productives ; c’est-à-dire la transformation du mode de

production. L’ensemble de la société est donc rendu nécessaire par le

développement des forces productives et de sa contradiction avec les

anciens rapports de production.

Toutefois, le facteur principal expliquant le passage d’un mode

de production à un autre, donc, le changement historique de la société,

c’est le développement des forces productives. Selon la théorie marxiste,

l’histoire de la société se résume à la succession des moyens de

production.

- Le mode de production communautaire primitif se caractérise

par la faiblesse des moyens techniques de production, par la propriété

collective des moyens de production et par la répartition égalitaire du

produit des travaux.

Page 86: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 86 =

- Le mode de production esclavagiste fut caractérisé par la

propriété privée des moyens de production, par l’amélioration des

moyens techniques grâce à la maîtrise des métaux et des pierres

permettant ainsi le sur-travail de l’esclave qui est lui-même un moyen de

production.

- Le mode de production féodale se caractérise par l’amélioration

des instruments de production fondamentalement agricole. Ce sont les

propriétaires fonciers, c’est-à-dire les nobles qui dominent socialement :

la subdomination des serfs a engendré le sur-travail en vue de redevance

ou d’impôt.

- Le mode de production capitaliste est caractérisé par la

production industrielle dominante, par la propriété de la minorité

bourgeoise utilisant des moyens techniques à haut degré d’efficacité et

une main-d’œuvre salariée.

- Le mode de production socialiste est caractérisé par la propriété

collective des moyens de production, l’égalité dans le travail, la

production planifiée et la répartition en fonction du travail. Par

conséquent, le développement de la production entraînerait la

suppression progressive des formes de propriétés privées et constituerait

les conditions principales de passage au communisme.

6.- Classe sociale et lutte de classes à travers l’histoire des

sociétés

“On appelle “classe” des vastes groupes d’hommes qui se distinguent par la place qu’ils occupent dans un système historiquement défini de production sociale, par leur rapport vis-à-vis des moyens de production, par leur rôle dans leur organisation sociale du travail donc par les modes d’obtention et l’importance des richesses dont ils disposent”1.

Selon la théorie marxiste, l’existence de classes sociales a été la

conséquence historique de l’apparition et de la généralisation des

1 Roger-Gérard, Sociologie politique, p. 39.

Page 87: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 87 =

propriétés. En effet, avec la propriété privée, les membres de la société

se divisent en deux groupes distincts. Il s'agit des propriétaires des

moyens de production, qui dans l’organisation sociale du travail,

exercent une fonction de direction et de contrôle. Mais ils profitent

également du produit du travail social, formant la classe dominante

économiquement. D'autre part, il y a les non-propriétaires des moyens de

production, qui sont les travailleurs effectifs. Ce sont eux qui créent les

biens matériaux nécessaires mais qui ne reçoivent qu’une faible partie du

produit de leur travail formant la classe dominée.

Avec la propriété privée, les rapports de production sont devenus

des rapports d’exploitation en ce sens que la conséquence nécessaire de

tels rapports est l’apparition des conflits et d’affrontements entre les

classes.

Cependant, la lutte des classes désigne l’ensemble de ces conflits

plus ou moins violents résultant de la contradiction des intérêts matériels

de classes. Ce qui veut dire que la lutte de classes est donc

essentiellement une lutte économique avant d’être politique et elle se

trouve à tous les niveaux de la société, c’est-à-dire dans l’infrastructure

comme dans la superstructure. En effet, dans la société de classes, ce qui

domine économiquement domine aussi politiquement. L’État en tant

qu’une institution politique des classes dominantes a pour fonction

essentielle la répression de la classe dominée, c’est-à-dire que l’appareil

de l’État sert à empêcher la suppression des rapports d’exploitation.

Donc, il sert à maintenir les rapports de production existants : d’où

chaque classe dominante instaure une structure politique particulière

pour défendre ses intérêts de classes.

C’est la raison pour laquelle, dans la société de classes, il y a

deux grandes idéologies correspondant aux deux classes principales du

mode de production, mais la classe dominante économiquement domine

aussi idéologiquement : l’idéologie dominante d’une société est celle de

la classe dominante.

Page 88: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 88 =

7.- Classe en soi et classe pour soi

À partir d’un moment, dans un mode de production donné, des

individus se trouvent dans une situation identique au sein de la

production sociale, en particulier vis-à-vis de la propriété des moyens de

production. En réalité, ils ont des conditions matérielles d’existence plus

ou moins semblables même s’ils ne sont pas conscients de cette identité

fondamentale de leur situation sociale, ils forment objectivement une

classe.

On appelle “classe en soi” une classe inconsciente de sa situation

sociale, c’est-à-dire une classe où les membres ne sont pas conscients de

leur situation commune et que par conséquent, chacun agit socialement

pour défendre ses intérêts personnels sans penser aux intérêts de classes.

Elle devient classe pour-soi lorsque les membres sont devenus

conscients de leur situation commune dans la société laquelle situation

détermine les intérêts communs, qu’ils s’organisent pour défendre leurs

intérêts non seulement sur le plan économique mais aussi sur le plan

politique. La classe pour-soi est donc une classe devenue consciente,

agissant comme force sociale, économique et politique.

En résumé, dans la société, il y a une évolution de classe,

laquelle commence par l’existence de la classe soi-disant vulgaire, c’est-

à-dire une classe qui ne tient pas compte de la situation commune mais

qui agit selon ses intérêts particuliers. Ensuite, la classe cohésive selon

laquelle chaque membre agit non selon chaque intérêt personnel mais

selon son intérêt commun.

Bref, on constate que la pratique sociale est incontestablement la

base de tout développement non seulement au niveau de la connaissance

mais aussi au niveau des conditions d’existence des hommes au sein de

la société. Cependant, la pratique connaît deux phases différentes : la

première, il s’agit d’une théorie de la connaissance qui essaie de trouver

de véritables connaissances de la réalité existante pour pouvoir

transformer le monde et qui se traduit sous le terme de “matérialisme

Page 89: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 89 =

dialectique”. La seconde est une théorie de l’histoire, selon Marx,

d’après laquelle ce sont l’économie, les rapports de production, les

inégalités sociales qui sont à la base de toute société et qui conditionnent

son développement ou son appauvrissement. Cela se traduit sous le

terme de “matérialisme historique”. Ce qui signifie que le matérialisme

dialectique et le matérialisme historique sont deux théories-clé de la

pratique sociale en ce sens qu’elles sont inséparables l’une de l’autre

dans le processus du développement de la société humaine.

Page 90: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 90 =

CONCLUSION

Page 91: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 91 =

La conception matérialiste dans la philosophie de Karl Marx a

provoqué un grand bouleversement de la situation dans la société

presque à travers le monde.

La conception matérialiste marxiste critique tous les systèmes

philosophiques classiques, et le système capitaliste de production qui se

basent sur l’exploitation de l’homme par l’homme. Ce système

d’exploitation se manifeste dans la domination des classes ouvrières par

les moyens de propriété privée ou capital.

Vu cette circonstance et en critiquant tous ces systèmes

philosophiques, Marx avançait une nouvelle conception philosophique

pour éradiquer les théories sociales et les systèmes philosophiques

classiques.

Cette nouvelle conception se caractérise dans l’élaboration du

matérialisme dialectique et du matérialisme historique. Dans le premier

cas, il critique tous les systèmes dialectiques classiques, surtout le

système dialectique de Hegel qui était son maître.

Hegel a avancé aussi sa dialectique par le moyen de la

transcendance laquelle coïncide avec Dieu. Cette coïncidence avec Dieu

est appliquée dans le monde avant.

Marx trouve que ce système dialectique de son maître conduit à

l’aliénation politique, religieuse et économique. En critiquant ce système

dialectique, Marx avançait les trois lois fondamentales de la dialectique,

telles que la loi de l’unité et la lutte des contraires, la loi de la négation

de la négation et appliquait cette théorie à la société.

Page 92: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 92 =

Hegel a le mérite d’avoir fondé la dialectique, mais il l’a

expliquée d’une manière idéaliste.

Dans le second cas, Marx se lance dans l’analyse du système

social en critiquant les systèmes sociaux antérieurs, surtout l’idéalisme

de son temps et le capitalisme qui ont pris naissance avec l’apparition de

la société de classes basées sur un système d’exploitation de classe et sur

la distinction entre le travail manuel et le travail intellectuel.

Dans une société dominée par une classe dominante, la lourde

tâche du travail productif repose sur la classe exploitée tandis que la

gestion de la société, l’administration monopolisée par les membres de la

classe exploiteuse exagérant unilatéralement le rôle du travail intellectuel

auquel ils confèrent un pouvoir absolu.

L’analyse du système social marxiste aboutit à la suppression

de toutes les sociétés de classes et rend l’égalité à l’humanité tout entière

et la propriété collective de production.

Ainsi donc, la conception matérialiste dans la philosophie de

Karl Marx est un système philosophique plus scientifique et plus

méthodique par rapport aux systèmes philosophiques et aux régimes

classiques. Si on veut supprimer le décalage entre les riches et les

pauvres à notre époque imposé par le capitalisme, il faut réétudier le

socialisme marxiste en accordant la même valeur et la même égalité au

peuple tout entier.

Page 93: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 93 =

BIBLIOGRAPHIE

Page 94: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

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Page 96: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

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VI. WEBOGRAPHIE Karl Marx, Contribution à la critique de la philosophie de Hegel,

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htm. (Date de navigation 17/12/2010 à 15 :45). Karl Marx, Question juive, htt://perso.wanadoo.fr/Karl

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Page 97: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 97 =

INDEX

Page 98: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 98 =

NOMS COMMUNS

A

Absolutisme éclairé ........... 26, 29

Abstraction .............................. 51

Absurde ................................... 50

Agnosticisme ..................... 26, 37

Air ........ 10, 15, 20, 24, 44, 45, 46

Aliénation .......................... 38, 39

Aliénation politique ................. 91

Âme .... 11, 13, 14, 15, 18, 19, 50,

69

Amour-propre .......................... 28

Analytique ......................... 34, 66

Anarchistes .............................. 75

Anthropologie ................... 37, 38

Anthropologisme feuerbachien

............................................. 38

Antiquité . 8, 9, 11, 14, 15, 16, 17,

19, 20, 25, 34, 40, 45, 80

Antithèse.................................. 73

Aristocratie .............................. 29

Aristocratie esclavagiste ... 12, 17

Artisans................................ 9, 29

Astronomie .......................... 9, 14

Ataraxie ................................... 18

Athéisme..... 9, 25, 27, 29, 30, 36,

47, 49

Atome ...................................... 26

Atomes . 9, 17, 18, 19, 26, 44, 45,

46

Atomes de feu ......................... 45

Atomes de l’air ........................ 45

Atomes de l’eau ....................... 45

Atomes de la terre ................... 45

Atomisme .......................... 17, 45

B

Besoins .............................. 34, 38

Bond .................................. 74, 75

Bonds....................................... 75

Bonheur ................................... 38

Bouddhisme ............................ 14

Bourgeois ................................ 49

Bourgeoise .............................. 86

Bourgeoisie ..... 29, 36, 48, 71, 72

C

Capacités ................................. 35

Capital ......................... 22, 54, 91

Capitalisme ............ 48, 73, 75, 92

Capitaliste ................................ 34

Causalité ............................ 17, 26

Changement ............................ 20

Changements qualitatifs ... 40, 65,

71, 74, 75, 76

Changements quantitatifs . 40, 65,

71, 74, 75, 76

Charvaka ................................. 10

Charvaka ................................. 10

Christianisme .. 22, 36, 46, 47, 48

Classe dominante .. 48, 49, 85, 87

Classe dominée ................. 48, 87

Classe ouvrière ........................ 39

Classe prolétarienne ................ 74

Classes ..................................... 48

Classes dominantes ........... 48, 87

Classes dominées .................... 48

Page 99: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 99 =

Classes possédantes ................... 5

Combinaison ..................... 28, 29

Communisme .............. 49, 76, 86

Conception biologiste ............. 51

Conception dialectique 65, 74, 81

Conception évolutionniste ....... 51

Conception marxiste.......... 47, 80

Conception matérialiste 6, 27, 33,

34, 40, 51, 58, 80, 91, 92

Conception scientifique ........... 65

Concepts ................ 22, 34, 67, 73

Confucinisme .......................... 12

Connaissance .... 9, 11, 13, 14, 16,

17, 18, 20, 26, 27, 28, 31, 33,

35, 37, 43, 51, 56, 57, 58, 66,

67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 76,

78, 79, 88

Connaissances ......................... 58

Conscience ...... 37, 49, 54, 68, 69

Contingence ................. 17, 18, 26

Contradiction .. 54, 55, 57, 59, 60,

85, 87

Contradictions 61, 66, 69, 72, 73,

76, 78, 81

Contrat social .......................... 33

Corps ............... 26, 30, 31, 32, 34

Couleur .................................... 17

Courage ............................. 14, 19

Culture ....................... 5, 8, 12, 19

D

Déductions ............................... 34

Déisme ............................... 27, 30

Démiurge ........................... 13, 53

Démocratie .................. 17, 39, 74

Démocratie bourgeoise ........... 74

Démocratie populaire .............. 39

Démocratie prolétarienne ........ 74

Démonstrations ................. 33, 67

Dépassement-conservation ..... 78

Despotisme .............................. 28

Déterminisme .............. 12, 18, 26

Développement progressiste ... 65

Dialecticien ............................. 66

Dialectique20, 27, 28, 30, 37, 40,

65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72,

73, 74, 76, 77, 78, 79, 80

Dialectique ascendante ............ 66

Dialectique hégélienne ............ 85

Dialectique marxiste ......... 65, 85

Dialectique moderne ............... 66

Dialectique socratique ............. 66

Doctrine .... 24, 28, 30, 35, 36, 37,

45, 61

Doctrine idéaliste .................... 43

Doctrine marxiste .................... 48

Doctrine matérialiste .. 43, 45, 46,

62

Doctrine philosophique ........... 43

Doctrines ................................. 52

Droit .................................. 33, 35

E

Eau .. 9, 10, 11, 14, 15, 20, 45, 46,

74

Économie .................... 81, 84, 89

Économie politique ................. 80

Éducation .............. 28, 30, 36, 49

Page 100: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 100 =

Égalité .......................... 28, 29, 86

Église ................................. 22, 24

Église catholique ............... 48, 49

Empirisme ................... 33, 35, 37

Enfer .................................. 11, 19

Entendement ............................ 35

Esclavage ................................. 12

Esclaves ..................................... 9

Essence .............................. 47, 55

Essence de l’homme ................ 37

État16, 33, 35, 36, 39, 48, 49, 50,

87

Éthique ........................ 12, 18, 27

Eudémonisme .......................... 12

Évolution .. 10, 11, 13, 15, 37, 50,

51, 54, 65, 69, 73, 75, 76, 77,

78, 79, 80, 88

Exécutif ................................... 35

Existence .. 43, 44, 46, 48, 49, 53,

54, 56, 60, 80, 83, 86, 88

Exploitation de l’homme par

l’homme ............................... 91

F

Feu ..9, 10, 11, 14, 15, 20, 44, 45,

46

Flatus vocis ............................. 24

Fleuve ...................................... 16

Foi ................................ 11, 19, 29

Forces productives 81, 83, 84, 85

G

Géographie ................................ 9

Gnoséologie ............................. 10

H

Haine ........... 9, 19, 25, 59, 60, 61

Harmonie ................................. 66

Hédonisme .............................. 12

Hérésies panthéistes ................ 22

Histoire ..... 5, 6, 8, 10, 13, 37, 38,

39, 40, 64, 65, 72, 73, 74, 78,

80, 81, 85, 86, 89

Homo-sapiens sapiens ............ 51

Humanisme ............................. 12

I

Idéalisme 5, 9, 12, 14, 19, 20, 22,

25, 27, 34, 35, 36, 37, 38, 39,

43, 52, 59, 64, 65

Idéalisme hégélien..................... 5

Idées éternelles ........................ 66

Idées innées ....................... 30, 68

Idéologie ............ 5, 12, 19, 29, 87

Idéologie dominante ................ 87

Idéologies ................................ 87

Idoles ................................. 17, 33

Ignorance ..................... 17, 18, 26

Individualisme ......................... 12

Induction ........................... 33, 34

Industrie ............................ 27, 28

Inégalités sociales ................... 89

Infrastructure ..................... 84, 87

Intelligible ............................... 66

Intention .................................. 23

J

Jeunes hégéliens ...................... 36

Jugements ................................ 67

Page 101: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 101 =

L

Législatif.................................. 35

Liberté ............................... 23, 35

Logique.............................. 23, 37

Logique formelle ..................... 67

Logos ....................................... 15

Lois ........................ 26, 31, 32, 85

Lokayata ............................ 10, 11

Lumières ............................ 29, 38

Lutte de classes ..... 80, 81, 82, 87

Lutte des classes ...................... 39

Lutte des contraires .... 16, 40, 65,

71, 72, 78, 91

M

Mandat du ciel ......................... 12

Marchands ................................. 9

Marxisme ................................. 62

Marxisme-léninisme ................ 73

Masse populaire ........................ 5

Matérialisme ... 6, 8, 9, 10, 11, 14,

17, 22, 23, 25, 26, 27, 28, 30,

31, 32, 33, 34, 36, 37, 38, 39,

40, 43, 45, 52, 54, 55, 64, 65,

68, 70

Matérialisme ancien ........ 5, 9, 10

Matérialisme anglais ......... 29, 31

Matérialisme anthropologique 36

Matérialisme antique ..... 9, 19, 20

Matérialisme contemporain ..... 25

Matérialisme de Feuerbach37, 39

Matérialisme dialectique .... 6, 40,

41, 62, 64, 65, 71, 74, 89, 91

Matérialisme français . 26, 28, 29,

30, 32, 36

Matérialisme historique ... 39, 41,

62, 80, 81, 89, 91

Matérialisme historique et

dialectique ............................ 39

Matérialisme marxiste .... 6, 8, 40,

41

Matérialisme mécaniste .......... 29

Matérialisme métaphysique ... 31,

33

Matérialisme naïf .................... 11

Matérialisme philosophique ...... 6

Matérialisme pré-marxiste ...... 37

Matérialisme primitif .............. 20

Matérialisme simpliste ............ 64

Matérialisme vulgaire ............. 64

Mathématique .......................... 32

Mathématiques ........ 9, 14, 32, 68

Matière 26, 27, 28, 31, 34, 69, 70

Mécanique ......... 9, 27, 30, 32, 70

Métal ................................. 11, 14

Métaphysique . 25, 30, 32, 35, 52,

55, 57, 59, 61, 68, 69, 72

Métaphysiques ........................ 60

Météorologie ............................. 9

Méthode déductive .................. 33

Méthode métaphysique ........... 34

Mode de production ... 81, 84, 85,

86, 87

Monarchie constitutionnelle .... 26

Monarchie éclairée .................. 28

Monde objectif ...... 67, 72, 76, 79

Morale ............................... 28, 38

Page 102: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 102 =

Mort .... 10, 12, 13, 16, 17, 18, 19,

31, 44, 47

Mouvement .... 15, 18, 26, 27, 31,

32, 45, 46, 53, 54, 56, 66, 67,

70, 72, 73, 74, 78, 85

Mouvement perpétuel........ 17, 45

Moyen Âge ............ 22, 23, 25, 67

Moyens de production 82, 83, 85,

86, 87, 88

Mysticisme .............................. 25

N

Naturalisme américain ............ 64

Nature ... 5, 11, 13, 15, 17, 19, 20,

22, 25, 26, 27, 30, 31, 32, 33,

34, 37, 38, 44, 45, 46, 48, 50,

51, 52, 53, 54, 55, 56, 62, 65,

67, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75,

76, 79, 83

Natures .................................... 46

Navigateurs ............................... 9

Nécessité... 12, 15, 17, 18, 28, 29,

38, 46, 76

Négation de la négation .... 40, 65,

71, 76, 77, 78, 79, 91

Néoréalisme ............................. 64

Noblesse ............................ 29, 36

Nominalisme ............... 22, 23, 24

O

Odeur ....................................... 17

Opium ...................................... 50

Opium du peuple ..................... 50

Ordre social ....................... 30, 36

Orge ......................................... 77

Ouvriers ................................... 39

P

Paléontologie ........................... 50

Paradis ..................................... 11

Parti ......................................... 23

Paysans ...................................... 9

Pensée subjective .................... 72

Peur ............................. 18, 19, 60

Phénomènes ... 27, 28, 30, 33, 37,

70, 75, 78

Philosophe atomiste ................ 45

Philosophe matérialiste ........... 47

Philosophes ....................... 43, 52

Philosophie ...... 43, 44, 46, 52, 54

Philosophie de Nietzsche . 59, 61,

62

Philosophie de Platon .............. 58

Philosophie feuerbachienne .... 37

Philosophie hégélienne ..... 37, 53

Philosophie idéaliste ......... 26, 68

Philosophie marxiste ... 37, 41, 76

Philosophie matérialiste ... 33, 54,

80

Philosophie moderne ............... 55

Physique ..... 8, 14, 19, 29, 30, 32,

51, 55, 75, 83

Plaisir....................................... 44

Politique .... 26, 28, 31, 35, 36, 39

Positivisme .............................. 64

Praxis .................... 80, 81, 82, 83

Préhominiens ........................... 50

Prolétaires .................................. 9

Page 103: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 103 =

Prolétariat .................... 39, 71, 72

Propriété collective ...... 85, 86, 92

Propriété privée ..... 39, 86, 87, 91

Psychologie ............................. 27

Q

Qi ............................................. 13

R

Raison ... 6, 10, 16, 17, 20, 23, 26,

28, 32, 35, 37, 43, 44, 47, 55,

56, 62, 87

Raisonnements ........................ 67

Rapports capitalistes................ 28

Rapports de production .... 81, 82,

84, 85, 87, 89

Rapports féodaux .................... 28

Rationalisme cartésien ............ 30

Réalisme .................................. 22

Réalité objective ................ 18, 28

Religion 9, 13, 14, 20, 22, 25, 26,

36, 37, 38, 47, 48, 49, 50, 61

Renaissance ................... 8, 19, 67

Révisionnistes ......................... 75

Révolution ............................... 85

Révolution bourgeoise 31, 33, 36

Révolution sociale ................... 73

Rhétorique ......................... 66, 67

S

Sagesse .................................... 16

Scepticisme ............................. 33

Science ............ 31, 32, 33, 34, 38

Sciences .. 5, 9, 14, 19, 25, 30, 31,

32, 34, 38, 69, 73, 79

Sciences naturelles

contemporaines .................... 73

Scolastique .................. 23, 33, 67

Sensation ................................. 35

Sensations . 13, 16, 18, 27, 28, 31,

32, 70

Sensible ................. 29, 32, 66, 68

Sensualisme ........... 28, 29, 30, 37

Socialisme ....... 29, 39, 73, 75, 76

Socialisme marxiste ................ 92

Socialisme utopique ................ 29

Société .... 5, 9, 11, 16, 19, 20, 26,

29, 33, 34, 38, 40, 48, 49, 50,

64, 65, 69, 71, 72, 73, 74, 75,

80, 81, 82, 83, 84, 85, 87, 88,

89, 91, 92

Société bourgeoise .................. 26

Société capitaliste .............. 49, 71

Société de classes .................... 48

Société esclavagiste................... 9

Sociétés ................................... 80

Sociétés historiques ................. 80

Sophistes ................................. 66

Souffrance ......................... 18, 59

Superstructure ............. 84, 85, 87

Syllogistique ............................ 67

Système capitaliste 48, 49, 80, 91

Système social marxiste .......... 92

Systèmes dialectiques classiques

............................................. 91

Systèmes philosophiques .. 91, 92

Page 104: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 104 =

T

Techniques .............................. 27

Temps modernes ..................... 68

Terre ..... 9, 10, 11, 13, 14, 15, 44,

45, 46, 50, 77

Théologie ........................... 22, 23

Théorie ............ 49, 85, 86, 88, 89

Théories sociales ..................... 91

Théories-clé ............................. 89

Thèse ........................... 27, 70, 73

Thomisme ................................ 23

Tourbillons ........................ 17, 45

Transcendance ......................... 91

Transformation ..... 39, 74, 75, 76,

77, 80, 81

Transformation de la nature .... 83

Transformation de la société ... 85

Transformation du mode de

production ............................ 85

Travail ..................................... 35

Travail intellectuel .................. 92

Travail manuel ........................ 92

Travail salarié .......................... 48

U

Utopie ...................................... 34

V

Vent ......................................... 10

Vérité . 27, 39, 49, 59, 60, 66, 68,

70, 78

Vide ............................. 17, 18, 53

Vie . 5, 12, 13, 15, 16, 19, 25, 31,

32, 35, 38, 44, 47, 50, 51, 58,

59, 60, 61, 62, 71, 77

Volonté .............................. 23, 25

Z

Zhouli ...................................... 12

Page 105: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 105 =

NOMS PROPRES DE PERSONNES

A

Abélard .................................... 24

Ai Siqi ..................................... 20

Allemands ............................... 25

Anglais .................................... 25

Anselme ............................. 23, 24

Aristote .............................. 66, 67

B

Bacon ......... 27, 31, 32, 33, 34, 70

Berkeley ............................ 26, 36

C

Confucius ................................ 12

Curie ........................................ 65

D

D'Holbach .................... 26, 27, 30

Démocrite .. 9, 15, 16, 17, 18, 44,

45, 46

Descartes ..................... 29, 58, 68

Diderot ....... 26, 27, 28, 30, 69, 70

Dieu ... 11, 13, 17, 18, 22, 23, 25,

38, 45, 47, 48, 49, 50, 51, 60,

68, 69, 76, 91

Dieux ......... 15, 18, 19, 43, 46, 47

Dong Zhoushu ......................... 13

Duns Scot .......................... 23, 67

E

Empédocle ............................... 15

Engels . 28, 31, 36, 38, 39, 40, 52,

54, 55, 69, 70, 74, 80, 81

Épicure 15, 16, 17, 18, 19, 44, 46

F

Fan Zhen ..................... 10, 11, 14

Feuerbach ... 5, 36, 37, 38, 39, 40,

47

Français ................................... 25

Frédéric Guillaume III ............ 48

G

Giordano Bruno....................... 67

Guillaume d’Occam ................ 67

H

Han .......................................... 13

Hegel . 18, 37, 39, 40, 53, 65, 67,

71, 72, 76, 91, 92

Helvétius ............... 26, 28, 29, 30

Héraclite ............ 9, 15, 16, 66, 72

Hobbes............. 30, 31, 32, 33, 35

Hume ....................................... 36

J

Joliot ........................................ 65

K

Kant ......................................... 72

L

La Mettrie .......................... 26, 29

Langevin .................................. 65

Lénine ........ 17, 28, 30, 40, 69, 70

Leucippe ................ 15, 16, 17, 18

Page 106: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 106 =

Locke ... 28, 29, 30, 31, 34, 35, 36

Lucrèce .................. 15, 16, 17, 19

M

Mao Tsé-Toung ....................... 40

Marx 5, 6, 16, 18, 22, 23, 28, 30,

32, 36, 39, 40, 41, 47, 48, 49,

50, 51, 52, 53, 54, 62, 64, 65,

67, 69, 71, 74, 79, 80, 81, 84,

89, 91, 92

Mencius ................................... 12

N

Nicolas de Cuse ........... 67, 68, 72

Nietzsche ................................. 59

P

Platon ..................... 55, 56, 57, 58

R

Ricardo .................................... 39

Roscelin ............................. 23, 24

S

Socrate ..................................... 66

Spinoza .............................. 30, 68

Sun Zi ...................................... 11

T

Thomas d’Aquin ...................... 23

Thomas Henry Huxley ............ 54

Trinité ...................................... 24

W

Wang Chung ................ 10, 11, 13

Whang Chung ......................... 13

X

Xun Zi ..................................... 12

Y

Yang Zhu ........................... 11, 12

Yang Zhy ................................. 11

Z

Zhou .................................. 11, 12

Page 107: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

= 107 =

NOMS PROPRES DE LIEUX

A

Allemagne ................... 31, 36, 39

Angleterre ........ 31, 32, 33, 34, 36

C

Canterbury ............................... 24

Chine ................................. 10, 11

Compiègne .............................. 23

E

Erlanger ................................... 36

État Prussien ............................ 48

Europe ............................... 22, 31

F

France ...................................... 31

G

Grèce ................................... 8, 17

I

Inde .......................................... 10

K

Kenya ...................................... 50

T

Turkana ................................... 50

V

Vatican .................................... 48

Page 108: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

TABLE DES MATIÈRES

Page 109: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

DU MATÉRIALISME ANCIEN AU MATÉRIALISME DE KARL MARX ................................................................................................................................................................................ 1 DÉDICACE .................................................................................................................................................................. 2 REMERCIEMENTS ........................................................................................................................................... 3 INTRODUCTION ................................................................................................................................................. 4 PREMIÈRE PARTIE : QU’EST-CE QUE LE MATÉRIALISME ? ............ 7

CHAPITRE I : LE MATÉRIALISME ANCIEN ............................................................ 9

I.- LE MATÉRIALISME DE L’INDE ANCIENNE ......................................... 10

II.- LE MATÉRIALISME CHINOIS ANCIEN ...................................................... 11

III.- LE MATÉRIALISME GREC ANCIEN ............................................................. 14

CHAPITRE II : LE MATÉRIALISME DU MOYEN ÂGE

(NOMINALISME) ............................................................................................................................ 22

I.- LE NOMINALISME DE DUNS SCOT .................................................................. 23

II.- LE NOMINALISME DE ROSCELIN .................................................................... 24

CHAPITRE III : LE MATÉRIALISME MODERNE ............................................ 25

I.- LE MATÉRIALISME FRANÇAIS .............................................................................. 26

II.- LE MATÉRIALISME ANGLAIS ............................................................................... 31

1.- Le matérialisme de Hobbes ................................................................................................... 32

2.- Le matérialisme de Bacon ...................................................................................................... 33

3.- Le matérialisme de Locke ....................................................................................................... 35

III.- LE MATÉRIALISME ALLEMAND .................................................................... 36

1.- Le matérialisme de Feuerbach ........................................................................................... 37

2.- La naissance du matérialisme de Karl Marx et de Friedrich

Engels .......................................................................................................................................................... 39

DEUXIÈME PARTIE : LE MATÉRIALISME PHILOSOPHIQUE ......... 42

CHAPITRE I : DÉFINITION DU MATÉRIALISME .................................... 43

I.- LA VISION MATERIALISTE DE LA NATURE ...................................... 44

Page 110: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

1.- Qu’est-ce que la nature ? ......................................................................................................... 44

2.- Origine de la nature ....................................................................................................................... 44

A.- Le point de vue d’Épicure ..................................................................................................... 44

B.- Le point de vue de Démocrite ........................................................................................... 45

II.- LA CONCEPTION MATÉRIALISTE DE L’HOMME...................... 46

1.- Le point de vue de Karl Marx ............................................................................................ 47

2.- Le point de vue de l’évolutionnisme et de la biologie ............................. 50

CHAPITRE II : APERÇU SUR LE FONDEMENT DE L’IDÉE ET

DE LA MATIÈRE ......................................................................................................................... 52

I.- RELATION ENTRE L’IDÉE ET LA MATIÈRE ........................................ 52

1.- Le point de vue de Marx .......................................................................................................... 53

2.- Le point de vue d’Engels ......................................................................................................... 54

II.- MARX ET LA CRITIQUE DE LA MÉTAPHYSIQUE ..................... 55

1.- Au niveau de l’Être ........................................................................................................................ 55

2.- Au niveau de la connaissance ............................................................................................. 57

III.- NIETZSCHE ET LE RENVERSEMENT DE LA

MÉTAPHYSIQUE........................................................................................................................ 59

1.- Critique des origines de la métaphysique .............................................................. 60

2.- L’affirmation de la vie et l’éternel retour .............................................................. 61

TROISIÈME PARTIE : LES PRINCIPES DU MATÉRIALISME MARXISTE ............................................................................................................................................................... 63

CHAPITRE I : LE MATÉRIALISME DIALECTIQUE ..................................... 64

I.- HISTOIRE DE LA DIALECTIQUE ........................................................................... 65

1.- Les dialectiques classiques .................................................................................................... 66

2.- La conception dialectique au Moyen Âge ............................................................. 67

3.- La conception dialectique à l’époque de la Renaissance ...................... 67

4.- La dialectique dans les temps modernes ................................................................. 68

5.- La dialectique du XVIIIe siècle ......................................................................................... 69

Page 111: DU MATERIALISME ANCIEN AU MATERIALISME DE KARL MARX

II.- LES TROIS LOIS FONDAMENTALES DU MATÉRIALISME

DIALECTIQUE ............................................................................................................................... 71

1- Loi de l’unité et de la lutte des contraires ............................................................... 71

2- Loi du passage des changements quantitatifs à des changements

qualitatifs ................................................................................................................................................. 74

3- Loi de la négation de la négation ...................................................................................... 76

CHAPITRE II : LE MATÉRIALISME HISTORIQUE ................. 80

II.- LA DÉTERMINATION DE LA VIE SOCIALE PAR L’ÉCONOMIE82

1.- Praxis et rapport de production ........................................................... 82

2.- Praxis et force productive ..................................................................... 83

3.- Praxis et mode de production .............................................................. 83

4.- Rapport entre infrastructure et superstructure.................................. 84

5.- Le processus de la transformation de la société .............................. 84

6.- Classe sociale et lutte de classes à travers l’histoire des sociétés 86

7.- Classe en soi et classe pour soi ............................................................ 88

CONCLUSION ...................................................................................................................................................... 90 BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................................. 93

I. ŒUVRES DE KARL MARX ............................................................................................... 94

II. ŒUVRES DE FRIEDRICH ENGELS ...................................................................... 94

III. ŒUVRES DE KARL MARX ET DE FRIEDRICH ENGELS .... 94

IV. OUVRAGES GÉNÉRAUX ................................................................................................ 94

V. DICTIONNAIRES .......................................................................................................................... 96

VI. WEBOGRAPHIE ........................................................................................................................... 96

INDEX .................................................................................................................................................................. 96

TABLE DES MATIÈRES ...................................................................................................................... 108