MODELISATION HYDROMECANIQUE PRELIMINAIRE … 2002 B pp Souley.pdf · mars 1961 à juin 1962 par la...

12
JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 1 MODELISATION HYDROMECANIQUE PRELIMINAIRE D’ENNOYAGE D’UN SITE DANS LE BASSIN FERRIFERE LORRAIN M. Souley, M. Al Heib, A. Thoraval LAEGO-INERIS, Ecole des Mines de Nancy, Parc Saurupt, 54042 Nancy Cedex, www.mines.u-nancy.fr/laego, [email protected], [email protected] @mines.u-nancy.fr, [email protected]. RESUME : Dans le cadre d’une recherche entreprise par le GISOS 1 afin de comprendre et quantifier les phénomènes qui caractérisent le devenir des ouvrages souterrains, il a été décidé de réaliser une expérimentation in situ, visant à étudier l’effet d’un ennoyage partiel sur la stabilité d’une exploitation par chambres et piliers abandonnés au stot 2 de Tressange. Une modélisation hydromécanique préalable a permis d’étudier l’impact de l’ennoyage partiel sur la stabilité locale des piliers et des intercalaires en estimant l’amplitude des variations attendues. Le modèle a permis également d’optimiser le dimensionnement et le positionnement du système de mesures mis en place pour suivre l’expérimentation. MOTS-CLEFS : Comportement, hydromécanique, milieux poreux, chambres et piliers, ennoyage. ABSTRACT : In the framework of researches undertaken by GISOS in order to understand and quantify the phenomena related to the behavior of abandoned underground excavations, an in situ experiment aiming to study the effect of partial flooding on the stability of abandoned room and pillar mine, are initiated at the stot of Tressange. A preliminary hydro-mechanical modeling allows to study the impact of partial flooding on the local stability of room-pillars and immediate roof, by estimating the magnitudes of induced variations. The model equally allowed to optimize the design as well as the location of measurement system set up to follow the experiments. KEY-WORDS : Behavior, hydro-mechanics, porous medium, room and pillar, flooding. 1. Introduction Des désordres importants ont eu lieu consécutivement à l’arrêt des exploitations dans le bassin ferrifère lorrain. Certains de ces désordres sont apparus à la suite de l’ennoyage induit par l’arrêt de pompages d’exhaure minière, et donc par la remontée du niveau des eaux, infiltrées en particulier le long des fractures induites par les travaux miniers. Ces événements ont justifié l’effort de recherche entrepris pour comprendre et quantifier les phénomènes caractérisant le devenir des ouvrages souterrains dans l’optique de gérer au mieux les conséquences sur la surface de l’arrêt des travaux miniers. A cette fin, des expérimentions in situ visant à étudier entre autres l’influence de l’ennoyage sur la stabilité des anciennes exploitations par chambres et piliers abandonnés, ont été entreprises dans le cadre du GISOS. Ces expérimentations sont localisées dans une partie du stot de Tressange (ou site pilote) au Nord du bassin ferrifère lorrain. Ce stot a été exploité entre 1968 et 1974 sur trois niveaux (couches brune, grise et jaune) séparés par des couches marneuses et calcaires. Le taux de défruitement varie de 23 à 43%. 1 GISOS (Groupement de recherche sur l’Impact et la Sécurité des Ouvrages Souterrains) réunissant l’INPL, le BRGM, l’INERIS et l’Ecole des Mines de Paris 2 appelé également stot de protection des villages et infrastructures. Cette zone exploitée par chambres et piliers abandonnés devrait en théorie rester stable à long terme (les piliers en place supportant l’ensemble du recouvrement) en opposition aux zones totalement dépilées qui induisent un affaissement au moment de l’exploitation

Transcript of MODELISATION HYDROMECANIQUE PRELIMINAIRE … 2002 B pp Souley.pdf · mars 1961 à juin 1962 par la...

Page 1: MODELISATION HYDROMECANIQUE PRELIMINAIRE … 2002 B pp Souley.pdf · mars 1961 à juin 1962 par la société luxembourgeoise ARBED (exploitant) : l’un au mur de la couche jaune

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 1

MODELISATION HYDROMECANIQUE PRELIMINAIRE D’ENNOYAGE D’UN SITE DANS LE BASSIN FERRIFERE LORRAIN

M. Souley, M. Al Heib, A. Thoraval

LAEGO-INERIS, Ecole des Mines de Nancy, Parc Saurupt, 54042 Nancy Cedex, www.mines.u-nancy.fr/laego, [email protected], [email protected] @mines.u-nancy.fr, [email protected].

RESUME : Dans le cadre d’une recherche entreprise par le GISOS1 afin de comprendre et quantifier les phénomènes qui caractérisent le devenir des ouvrages souterrains, il a été décidé de réaliser une expérimentation in situ, visant à étudier l’effet d’un ennoyage partiel sur la stabilité d’une exploitation par chambres et piliers abandonnés au stot2 de Tressange. Une modélisation hydromécanique préalable a permis d’étudier l’impact de l’ennoyage partiel sur la stabilité locale des piliers et des intercalaires en estimant l’amplitude des variations attendues. Le modèle a permis également d’optimiser le dimensionnement et le positionnement du système de mesures mis en place pour suivre l’expérimentation. MOTS-CLEFS : Comportement, hydromécanique, milieux poreux, chambres et piliers, ennoyage. ABSTRACT : In the framework of researches undertaken by GISOS in order to understand and quantify the phenomena related to the behavior of abandoned underground excavations, an in situ experiment aiming to study the effect of partial flooding on the stability of abandoned room and pillar mine, are initiated at the stot of Tressange. A preliminary hydro-mechanical modeling allows to study the impact of partial flooding on the local stability of room-pillars and immediate roof, by estimating the magnitudes of induced variations. The model equally allowed to optimize the design as well as the location of measurement system set up to follow the experiments. KEY-WORDS : Behavior, hydro-mechanics, porous medium, room and pillar, flooding.

1. Introduction

Des désordres importants ont eu lieu consécutivement à l’arrêt des exploitations dans le bassin ferrifère lorrain. Certains de ces désordres sont apparus à la suite de l’ennoyage induit par l’arrêt de pompages d’exhaure minière, et donc par la remontée du niveau des eaux, infiltrées en particulier le long des fractures induites par les travaux miniers. Ces événements ont justifié l’effort de recherche entrepris pour comprendre et quantifier les phénomènes caractérisant le devenir des ouvrages souterrains dans l’optique de gérer au mieux les conséquences sur la surface de l’arrêt des travaux miniers. A cette fin, des expérimentions in situ visant à étudier entre autres l’influence de l’ennoyage sur la stabilité des anciennes exploitations par chambres et piliers abandonnés, ont été entreprises dans le cadre du GISOS. Ces expérimentations sont localisées dans une partie du stot de Tressange (ou site pilote) au Nord du bassin ferrifère lorrain. Ce stot a été exploité entre 1968 et 1974 sur trois niveaux (couches brune, grise et jaune) séparés par des couches marneuses et calcaires. Le taux de défruitement varie de 23 à 43%. 1 GISOS (Groupement de recherche sur l’Impact et la Sécurité des Ouvrages Souterrains) réunissant l’INPL, le BRGM, l’INERIS et l’Ecole des Mines de Paris 2 appelé également stot de protection des villages et infrastructures. Cette zone exploitée par chambres et piliers abandonnés devrait en théorie rester stable à long terme (les piliers en place supportant l’ensemble du recouvrement) en opposition aux zones totalement dépilées qui induisent un affaissement au moment de l’exploitation

Page 2: MODELISATION HYDROMECANIQUE PRELIMINAIRE … 2002 B pp Souley.pdf · mars 1961 à juin 1962 par la société luxembourgeoise ARBED (exploitant) : l’un au mur de la couche jaune

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 2

Dans cet article, nous présentons les modélisations hydromécaniques préliminaires de la phase d’ennoyage du site pilote réalisées afin d’optimiser le dimensionnement du schéma d’expérimentation à partir d’une estimation des amplitudes attendues, mais également pour estimer les modifications du comportement local des piliers et des marnes intercalaires sous l’effet de l’eau. Ces modélisations ont été réalisées en se référant à la théorie de la poro-élasto-plasticité. Après avoir brièvement décrit la géologie du site et la zone d’expérimentation, l’approche numérique et la méthodologie adoptées, nous présentons une synthèse des résultats obtenus à l’issue de cette modélisation.

2. Géologie et description sommaire de la zone d’expérimentation

La formation ferrifère lorraine, d’origine sédimentaire et datée du Jurassique moyen, peut atteindre une puissance de 60 m. Les mines les plus profondes sont surmontées par une couverture de 250 m. D’une superficie de 115 000 ha, le gisement ferrifère lorrain s’étend sur 100 km de long et près de 50 km de large de la frontière luxembourgeoise, où le minerai affleure jusqu’au Sud de Nancy.

Le stot de Tressange, dans lequel des expérimentations sont en cours, concerne les communes de Tressange et de Ferdinand (Meurthe-et-Moselle). La zone d’expérimentation, longue de 100 m et large de 80 m, correspond à une partie limitée du stot située à 500 m environ du premier dépilage. Il est exploité sur trois couches : la couche brune, d’une ouverture variant entre 2,5 et 3 m ; la couche grise, d’une ouverture variant entre 3,6 et 4 m ; et enfin, la couche jaune sauvage, d’une ouverture d’environ 3 m. La hauteur de recouvrement à l’aplomb de l’agglomération de Tressange est environ 225 m au-dessus du mur de la couche inférieure exploitée (brune). Les épaisseurs des intercalaires entre les trois couches sont respectivement de 7,5 m entre les couches brune et grise, et 6,5 m entre les couches grise et jaune sauvage. Les piliers, de dimensions 28 m x 18 m, sont bien superposés avec un décalage maximal de 0,5 m. Le nombre de piliers dans la zone expérimentale ennoyée est de 12 (Fig. 1b). Dans cette zone du stot, trois sondages ont été réalisés dans la période allant de mars 1961 à juin 1962 par la société luxembourgeoise ARBED (exploitant) : l’un au mur de la couche jaune sauvage et les deux autres à partir de la couche grise. De ces sondages, on retiendra la forte hétérogénéité (verticale) des terrains surplombant les trois couches exploitées, avec une dominante calcaire. La figure 1a montre la coupe géologique simplifiée.

Des séries d’observations sur l’état de la fracturation du toit et des parements des galeries, la densité du soutènement et les zones de venues d’eau, ont permis de dresser une première cartographie de l’état du stot :

- Toit de la couche brune. Il a été observé, par endroits, un état de dégradation assez avancé, la présence de fractures avec des ouvertures atteignant parfois plusieurs millimètres (l’épaisseur du banc dit «dégradé» atteint 2 m dans certaines zones). La forte densité de boulonnage (1 boulon de 1,8 m de long par m2, dont plusieurs sont désancrés dans des zones de décrochement) atteste de l’existence d’une fracturation au moment de l’exploitation. Il a été noté des infiltrations de débits assez faibles au toit suite aux observations faites dans les périodes printemps-été 2000 et été 2001 ;

- Couche brune. Les piliers sont moins fracturés que le toit immédiat. Les quelques fractures rencontrées sont d’origine naturelle et souvent fermées par des matériaux de remplissage ;

- Couches grise et jaune. Les piliers et les toits de ces couches sont également très peu fracturés. Le mur de la couche jaune montre des fractures liées au soufflage du mur.

Ces observations ont également été confirmées par les premiers résultats de caractérisation diagraphique de l’état « 0 » (état avant l’ennoyage) réalisée dans le pilier G de la couche brune et dans le haut toit de la même couche (Balland, 2002).

Page 3: MODELISATION HYDROMECANIQUE PRELIMINAIRE … 2002 B pp Souley.pdf · mars 1961 à juin 1962 par la société luxembourgeoise ARBED (exploitant) : l’un au mur de la couche jaune

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 3

3. Méthodologie de modélisation et hypothèses adoptées

En général, les interactions hydromécaniques autour des zones sous-minées sont caractérisées par : (a) une modification locale de perméabilité du massif liée à la fracturation induite par le creusement et à la modification d’ouverture des fractures naturelles, (b) une modification des pressions hydrauliques dans le massif, liée au rabattement des nappes pendant l'exploitation, puis à la remontée des eaux après l'arrêt de pompages des exhaures minières, et (c) une modification des caractéristiques mécaniques de la roche et singulièrement les résistances mécaniques en compression et en traction, en fonction de sa saturation en eau (van Eeckhout 1976, Pineau 1978). La remontée des nappes peut donc s’accompagner d’une réduction des résistances mécaniques des terrains ; un exemple est donné dans les travaux de Vinkler et Piguet (1999).

Les modélisations menées reposent sur une approche continue du massif rocheux et ont été réalisées avec le code de calcul FLAC (Fast Lagrangian Analysis of Continua in two dimensions). Ici nous privilégions le caractère poreux des matériaux constituant le site pilote. Une approche discontinue, c’est-à-dire tenant compte explicitement de la fracturation du milieu, mais considérant la matrice imperméable a été également mise en œuvre.

3.1. Couplage hydromécanique dans FLAC

FLAC est un code de calcul utilisant la méthode des différences finies et permettant la modélisation de nombreux problèmes dans les domaines du génie civil et du génie minier. La solution statique d’un problème est déterminée à partir de la résolution par différences finies de l’équation fondamentale de la dynamique. La formulation incrémentale des processus couplés déformation-diffusion dans FLAC s’inscrit dans le cadre de la théorie de Biot. Nous avons volontairement utilisé le module standard partiellement saturé à une pression (liquide) et sans effets capillaires : la resaturation ou la désaturation du massif est entièrement gouvernée par la gravité. L’évaluation des effets capillaires sur la base de la courbe de rétention du minerai (Grgic et al., 2001) constituera la prochaine étape de cette étude. Le milieu poreux partiellement saturé à une pression est décrit par les variables : pression de pore, saturation et vecteur courant, liées entre elles à travers l’équation d’équilibre de la masse fluide, le transport de la masse fluide et l’équation constitutive spécifiant la réponse du fluide aux changements de pression, de saturation et de déformation volumique. L’équilibre de la masse fluide pour des petites déformations, s’exprime comme suit :

( )t

qqdiv v ∂∂ζ=+− v (1)

où ζ : la variation de la teneur en eau ou variation du volume fluide par unité de volume de pore (Biot, 1956) ; qr : vecteur courant (m/s) ; qv : la source fluide (1/s). En condition isotherme, les changements de la teneur en eau sont liés aux variations de pression, p, saturation, s, et déformation volumique, εv, par l’équation constitutive :

t

bts

1ts

sn

tp

M1 v

∂∂ε−

∂∂ζ=

∂∂+

∂∂ (2)

où b : coefficient de Biot (compris entre 0 et 1) ; M : module de Biot (Pa), dépendant du coefficient b et des modules de compressibilité drainé et non-drainé de la roche ; n : porosité de la roche. Finalement, le vecteur courant est lié à la pression de pore par la loi de Darcy :

( )[ ] ( ) ( )gxpdrag sk̂ K 1 q frrrr ρ−µ−= (3)

où [K] : tenseur de perméabilité intrinsèque (m2) ; ( )sk̂r : perméabilité relative au liquide qui dépend de la saturation ; ρf : masse volumique du fluide supposée constante ; xr : vecteur position ;

Page 4: MODELISATION HYDROMECANIQUE PRELIMINAIRE … 2002 B pp Souley.pdf · mars 1961 à juin 1962 par la société luxembourgeoise ARBED (exploitant) : l’un au mur de la couche jaune

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 4

gr : vecteur gravité ; et µ (Pa.s) : viscosité dynamique de l’eau (égale à 10-3 Pa.s à la température ambiante).

Dans ce module partiellement saturé à une pression (liquide), les effets capillaires sont négligés (pression capillaire, Pc = Pgz – p = 0 : la pression de fluide, p, est égale à la pression de gaz, Pgz). De plus dans les zones non-saturées (s < 1), la pression de fluide est nulle. L’évolution de la perméabilité relative avec la saturation est donnée par la loi cubique empirique suivante :

( ) ( )s23ssk̂ 2r −= (4)

La substitution des équations (1) et (3) dans (2) permet d’exprimer l’équation de continuité de la masse fluide qui est résolue par la suite, par un schéma numérique basé sur une formulation nodale de différences finies.

3.2. Hypothèses

Etat de contrainte initial. Ne disposant pas de la mesure in situ de l’état initial des contraintes dans le bassin ferrifère lorrain, nous avons considéré arbitrairement que les contraintes principales initiales sont horizontales et verticale. De plus, la contrainte verticale, σv, est égale au poids des terrains sus-jacents ; les contraintes horizontales sont supposées isotropes (σH = σh) et le rapport entre les contraintes horizontale et verticale égal à 0,8.

Propriétés mécaniques des matériaux. Les caractéristiques mécaniques utilisées proviennent d’une synthèse bibliographique des données géotechniques issues des différentes mines du bassin ferrifère lorrain : il s’agit de caractéristiques moyennes (Al Heib, 2002). Ce choix sera ultérieurement affiné sur la base des nouveaux résultats de caractérisations de laboratoire (Grgic, 2001, Grgic et al., 2002) ou de la caractérisation de l’état « 0 » du site pilote en cours d’exploitation. En relation avec la forte fracturation observée au toit immédiat de la couche brune et mentionnée au § 2, un banc de marne « dégradée » de 2 m d’épaisseur a été introduit dans le modèle. Pour les caractéristiques de ce banc, on a considéré une réduction de 65% du module de Young, de la cohésion, de l’angle de frottement et de la résistance à la traction par rapport aux caractéristiques de la marne intercalaire au haut toit des couches brune et grise. L’ensemble des caractéristiques utilisées est résumé dans le tableau 1.

Perméabilités et paramètres de couplages des matériaux. Les mesures de perméabilité faites en laboratoire sur des échantillons (couche grise, marne intercalaire du toit de la couche grise et mur de la couche brune) provenant de sondages verticaux de Joeuf ont donné des valeurs de l’ordre de 10-19 m2 (Grgic 2001). C’est également le même ordre de grandeur qui a été récemment mesuré dans les piliers de la couche brune et l’intercalaire situé dans le haut toit de la couche brune (caractérisation de l’état « 0 » du site pilote).

Conformément à la bibliographie (Goodman 1980) et dans le but de tenir compte de la présence des fractures naturelles à l’échelle du terrain, il nous a semblé raisonnable de considérer que les perméabilités in situ étaient de 3 ordres de grandeurs supérieures aux perméabilités mesurées en laboratoire (~10-16 m2). Les valeurs de perméabilité utilisées sont données dans le tableau 1.

Pour la perméabilité du banc de marne dégradée, notre approche s’inspire des travaux de Doolin et Mauldon (2001) exprimant le tenseur de perméabilité équivalente d’un milieu stratifié comprenant des fractures normales à la stratification sur la base du modèle classique de Snow (1969), et sur le principe de conservation de masse pour un écoulement perpendiculairement à la stratification (pas de perte de charge aux intersections de fractures). Leur formulation diffère des approches classiques d’homogénéisation dans le sens où les fractures confinées dans les bancs ont une extension limitée et non infinie d’une part, et les effets de la connectivité des fractures perpendiculaires et parallèles à la stratification sont pris en compte par le biais des ouvertures de fractures, d’autre part. En

Page 5: MODELISATION HYDROMECANIQUE PRELIMINAIRE … 2002 B pp Souley.pdf · mars 1961 à juin 1962 par la société luxembourgeoise ARBED (exploitant) : l’un au mur de la couche jaune

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 5

supposant dans la marne dégradée un espacement entre fractures parallèlement et perpendiculairement à la couche brune de 0,25 et 0,5 m, respectivement, et une ouverture de fractures de 0,1 mm, nous obtenons une perméabilité équivalente du milieu poreux de 10-13 m2. C’est aussi cet ordre de grandeur qui a été récemment mesuré dans le cadre de la caractérisation de l’état « 0 ». Le temps caractéristique (~ au carré de la plus petite dimension) correspondant est très faible, c’est la valeur de 10-15 m2 qui a été utilisée pour la marne dégradée (compromis entre le pas de temps assurant la stabilité et le temps réel de diffusion). Nous pensons que cette diminution (locale dans la marne dégradée) de la perméabilité n’induira pas de modifications qualitatives en transitoire. Le régime permanent (atteint plus tardivement dans le cas d’une faible perméabilité) devrait être quantitativement peu sensible à cette variation.

On néglige la compressibilité du solide matriciel comparée aux modules drainés des matériaux : ce qui revient à considérer le coefficient de Biot, b, égal à 1. Dans ce cas, le module de Biot, M, qui représente le rapport entre le module de compressibilité de l’eau, kw (égal à 2000 MPa) et la porosité, est calculé pour chaque matériau.

Comportement des matériaux. Les essais mécaniques et hydromécaniques réalisés sur la couche grise (Grgic, 2001, par exemple) ont montré un comportement, à court terme, fortement non-linéaire (dû essentiellement à la plasticité) en pré-pic et un comportement post-pic allant du fragile à la plasticité parfaite dépendant de la pression de confinement appliquée. Une loi de comportement plus spécifique, tenant compte de ces observations a été développée (Hoxha et al. 2001) ; son implantation et les tests de vérification sont en cours. Nous avons utilisé le modèle élastoplastique avec double écrouissage (positif en pré-pic et négatif en post-pic) existant dans FLAC, mais qui ne prend pas en compte l’influence du confinement sur le comportement post-pic. C’est un modèle élastoplastique avec une règle d’écoulement non-associée dans lequel la fonction de charge et le potentiel plastique sont donnés par le critère Mohr-Coulomb dans le plan (σ1, σ3). Toutefois un calcul sera réalisé en considérant une règle d’écoulement associée ; ce qui reviendrait à considérer un angle de dilatance égal à l’angle de frottement. Les paramètres d’écrouissage calés à partir des courbes expérimentales de la marne intercalaire, ont été adoptés pour les autres matériaux.

Tableau 1. Caractéristiques hydromécaniques des matériaux (* issues de la base de données, Al Heib 2002)

Eo* (MPa) νννν* c* (MPa) φφφφ* (°) k (m2) n (%)

Marne micacée 3460 0,2 2,6 49 2,82*10-16 20

Couche jaune 13000 0,23 3 45 2,02*10-16 32

Couche grise 10300 0,23 2,6 55 2,02*10-16 32

Calcaire 23940 0,24 3,3 55 2,82*10-16 20

Marne intercalaire 6000 0,25 3,75 36 2,82*10-16 20

Marne dégradée 2100 0,25 1,3 12,6 2,22*10-15 20

Couche brune 26700 0,2 2,35 54 2,02*10-16 32

Marne mur 7970 0,25 4,6 42 6,16*10-16 15

Marne inférieure 7970 0,25 4,6 42 6,16*10-16 15 Eo : module de Young drainé ; ν : coefficient de Poisson ; c et φ cohésion et frottement au pic ; k : perméabilité intrinsèque ; n : porosité

3.3. Méthodologie adoptée

La modélisation est réalisée en deux étapes : 1°) - Calcul de l’état initial après exploitation. Pour cause de pompage pendant l’exploitation entraînant le rabattement de la nappe, le niveau piézométrique de la nappe est alors fixé en-dessous

Page 6: MODELISATION HYDROMECANIQUE PRELIMINAIRE … 2002 B pp Souley.pdf · mars 1961 à juin 1962 par la société luxembourgeoise ARBED (exploitant) : l’un au mur de la couche jaune

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 6

du mur de la couche brune (à la base du modèle). Le degré de saturation des terrains au-dessus de ce niveau piézométrique de la nappe est fixé à 95% (compromis entre la saturation des mines abandonnées ~80% et celle du minerai vieilli mesurée en laboratoire et comprise entre 93 et 100% ; Grgic, 2001), afin de tenir compte de la quasi-saturation des terrains par capillarité. La géométrie et les conditions aux limites de cette phase sont montrées sur la figure 1c. Le calcul suppose une excavation instantanée des chambres des trois couches sans tenir compte du phasage de l’exploitation. Par suite, le niveau piézométrique de la nappe est ramené à 5 m en-dessous de la couche brune : ce qui correspond à la situation précédant l’expérimentation. Il s’agit ici d’initialiser les pressions de pore, d’ajuster les contraintes totales à partir de ces pressions de pore et de réaliser un calcul hydromécanique en régime permanent.

2°) - Calcul des perturbations induites par l’ennoyage des chambres centrales isolées par une barrière étanche. Il s’agit de mettre en place le chargement hydraulique simulant l’ennoyage aux parois des trois chambres centrales (H-G; G-F et F-E) de la couche brune, comme cela est illustré sur la figure 1d. Ceci est réalisé en appliquant un champ de pression aux parois : (a) une pression de 0,03 MPa (soit 3 m d’eau) au toit des chambres ; (b) aux parements des chambres, un gradient de pression sur toute la hauteur qui est de 3 m ; soit une pression de pore variant de 0,03 à 0,06 MPa ; (c) une pression de 0,06 MPa (soit 6 m d’eau) aux murs des chambres. Aux parois des chambres non-ennoyées, nous imposons une condition de flux nul (parois imperméables). Nous reconnaissons le caractère fort de cette hypothèse comparée à une condition de pression imposée qui supposerait connues les pressions aux parois à chaque instant ! Les calculs transitoires ont été effectués sur une période de 24 mois pour le cas de référence.

Nous avons travaillé en 2D en modélisant une coupe verticale de la zone d’expérimentation traversant le milieu de la partie ennoyée (en conditions de déformations planes). Le modèle géométrique considéré est montré sur la figure 1c. Le maillage est constitué d’éléments rectangulaires de dimensions variables en fonction de la région. La zone d’intérêt (vis-à-vis de l’expérimentation) entourant les chambres-piliers et représentée par la région 5, comprend 23256 éléments carrés de 50 cm de côté. Dans les autres régions, la taille des éléments augmente lorsqu’on s’éloigne de la région 5.

On suppose des déplacements horizontaux nuls sur les limites latérales du modèle, situées à 70 m de part et d’autre des galeries. D’un point de vue hydraulique, c’est le flux (nul) qui est imposé aux limites latérales. Tout se passe comme si les chambres se répétaient de part et d’autres des limites latérales.

Marnesmur/inférieure

Couche brune

Marnesintercalaires

Calcaire

Couche grise

Couche jaune

Marnes micacées

85

70

20

15

10342,543,543

65

(a)

16 m131 m70 m 70 m

recouvrement

24 m

65 m

200 m

H G F E

5

région 5

(piliers)

(c)

p = 0,03 MPa

H-G

p = 0,06 MPa

G-F

p = 0,03 MPa

F-E

5 m Marne mur

Marne dégradée(d)

Couche brune

Intercalaire marneuxCouche grise

Marnes barrières

7 m

18 m

28 m FG EH

JK IL

B AD(b)

Marnesmur/inférieure

Couche brune

Marnesintercalaires

Calcaire

Couche grise

Couche jaune

Marnes micacées

85

70

20

15

10342,543,543

65

(a)

16 m131 m70 m 70 m

recouvrement

24 m

65 m

200 m

H G F E

5

région 5

(piliers)

(c)

p = 0,03 MPa

H-G

p = 0,06 MPa

G-F

p = 0,03 MPa

F-E

5 m Marne mur

Marne dégradée(d)

Couche brune

Intercalaire marneuxCouche grise

Marnes barrières

7 mCouche brune

Intercalaire marneuxCouche grise

Marnes barrières

7 m

18 m

28 m FG EH

JK IL

B AD 18 m

28 m FG EH

JK IL

B AD(b)

Figure 1. Géologie et géométrie : (a) Log géologique simplifié ; (b) schématisation de la manip d’ennoyage (c) géométrie

et conditions aux limites mécaniques ; (d) conditions aux limites hydrauliques, phase d’ennoyage

Page 7: MODELISATION HYDROMECANIQUE PRELIMINAIRE … 2002 B pp Souley.pdf · mars 1961 à juin 1962 par la société luxembourgeoise ARBED (exploitant) : l’un au mur de la couche jaune

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 7

4. Modélisations

4.1. Phase de creusement des chambres des trois couches

L’examen de l’extension des zones plastiques autour des chambres montre que la plastification est essentiellement limitée aux toits immédiats et aux parements des chambres situées dans les couches inférieure et supérieure (brune et jaune). Seules les premières mailles localisées aux coins des chambres de la couche grise (lieu privilégié de concentration de contraintes de par la géométrie rectangulaire) se plastifient. Aux parements et toit immédiat des chambres de la couche jaune, la répartition des points plastiques est uniforme avec une extension de 50 cm. En revanche, dans la couche brune, la plastification s’étend à l’aplomb des chambres uniquement dans la marne dégradée avec une extension de 2 m. Dans les piliers de la couche brune, l’extension des zones plastiques augmente de 0,5 m dans la partie inférieure (mur) jusqu’à 2 m dans la partie supérieure (toit). L’examen des déformations plastiques a montré que seuls les coins situés au toit des chambres de la couche brune ont atteint la rupture (c’est-à-dire que la résistance au pic est atteinte), et toutes les autres zones plastiques se trouvent au début du seuil plastique en pré-pic. En conséquence, la convergence verticale maximale (14,4 mm) est localisée non pas au centre des chambres de la couche brune, mais à proximité des coins.

De par le faible taux de défruitement et les caractéristiques élastiques et de résistance des matériaux constituant le stot, l’amplitude des déplacements induits par le creusement reste relativement faible : les déplacements maximums verticaux sont centimétriques (max=1,5 cm) et localisés aux toits immédiats des couches brune et jaune constitués de marnes dégradées et micacées; et dont les valeurs des caractéristiques mécaniques sont beaucoup moins importantes comparées à celles des autres matériaux, dont les deux bancs de calcaires situés au toit et mur immédiats de la couche grise. Les déplacements horizontaux sont globalement 3 à 4 fois moins importants que les déplacements verticaux ; leur valeurs maximales ne dépassent pas 3 mm et représentent la valeur des expansions prédites au cœur des piliers de la couche brune. Les déformations, contrairement au champ de déplacement, sont strictement limitées dans les intercalaires entre les couches, exactement à l’aplomb des chambres. La déformation maximale est atteinte au toit immédiat de la couche brune (valeur voisine de 0,5 %).

Les contraintes horizontales initiales (avant creusement) sont de 4,38, 4,14 et 3,93 MPa, respectivement dans les couches brune, grise et jaune. Dans les mêmes couches, les contraintes verticales initiales sont respectivement de 5,5, 5,2 et 4,9 MPa. L’évolution des contraintes (totales) verticales et horizontales le long d’un profil horizontal traversant le cœur des piliers est donnée sur la figure 2 ; les compressions étant négatives. Nous notons que les contraintes horizontales sont maximales aux droits des parois verticales des chambres : ces contraintes sont dues aux moments fléchissants au droit des appuis et aux modifications de contraintes suite au creusement. Aussi, comparé à l’état de contraintes initial, on note une augmentation des contraintes verticales dans les piliers (c’est-à-dire report des contraintes horizontales) avec de fortes valeurs en parois. Plus précisément une augmentation de 50 et 70% par rapport aux contraintes verticales initiales en parois des chambres des couches brune et jaune, respectivement. Cette montée de contrainte verticale se réduit à moins de 20% de la contrainte initiale au cœur des piliers. Contrairement aux contraintes verticales, les contraintes horizontales diminuent (détente des parois droites des chambres) par rapport à leurs valeurs initiales. Cette diminution atteint 98% en parois indépendamment de la couche ; et de 15 à 30% au cœur des piliers. Sachant que le taux de défruitement est de 0,23 ; un calcul basé sur la théorie de l’aire tributaire donne des valeurs de contrainte verticale moyenne dans les piliers de : 7,2, 6,8 et 6,4 MPa, respectivement dans les couches brune, grise et jaune. Ces valeurs de contraintes correspondent aux contraintes verticales dans les piliers à 2,5 m des parois des chambres prédites par le modèle. Comparées aux valeurs estimées par l’aire tributaire, nos

Page 8: MODELISATION HYDROMECANIQUE PRELIMINAIRE … 2002 B pp Souley.pdf · mars 1961 à juin 1962 par la société luxembourgeoise ARBED (exploitant) : l’un au mur de la couche jaune

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 8

prédictions sous-estiment les contraintes verticales au cœur des piliers F et G de 12, 7 et 13%, respectivement aux couches brune, grise et jaune. Toutefois, la comparaison entre les valeurs données par l’aire tributaire et la moyenne (le long d’un profil horizontal passant par le cœur des piliers) des contraintes verticales prédites montre que la différence n’excède pas 3%.

Toutes les contraintes sont compressives, à l’exception de quelques zones dans le toit immédiat de la couche brune constitué de marne dégradée où nous avons noté de très faibles tractions dont le maximum est de 0,9 MPa (valeur 2 fois plus faible que la résistance à la traction en condition drainée de la marne dégradée). Au regard de ces très faibles contraintes de traction au toit immédiat de la couche brune, il ne nous a pas été possible d’établir une corrélation vis-à-vis de la fracturation observée au toit immédiat des chambres de la couche brune.

-5

-4

-3

-2

-1

00 25 50 75 100 125 150 175

D istan ce (m )

Cont

rain

te h

oriz

onta

le (M

Pa)

brunegr isejaune

G F EH

- 9

- 8

- 7

- 6

- 5

- 4

- 30 2 5 5 0 7 5 1 0 0 1 2 5 1 5 0 1 7 5

D is ta n c e (m )

Con

trai

nte

vert

ical

e (M

Pa)

b r u n eg r iseja u n eG F EH

Figure 2. Contraintes verticale et horizontale dans les piliers : excavation des chambres

4.2. Phase d’ennoyage partiel

La simulation de l’ennoyage montre que le processus de diffusion de la masse fluide est très lent. La saturation en eau des piliers délimités par les chambres ennoyées apparaît à partir du 5ème mois (Fig. 3) : ce qui n’est pas le cas des autres piliers de la couche brune dont la saturation intervient au 12 ème mois. On notera que le front de pression se propage tout d’abord dans le banc constitué de marne dégradée épaisse de 2 m et située au toit immédiat de la couche brune et qui représente le matériau le plus perméable dès les quinze premiers jours. Le second front de diffusion de fluide (gravitaire) est situé au mur. En effet, le mur étant initialement désaturé (saturation initiale de 95% par hypothèse), l’écoulement est uniquement gouverné par gravité (§3.1) ; auquel il faut ajouter le fort gradient hydraulique imposé aux parois inférieures des chambres ennoyées (comparé à celui imposé aux autres parois supérieures et latérales). A ces deux fronts de propagation, s’ajoutent ceux dont la vitesse est beaucoup moins importante s’initiant dans les piliers à travers les parois droites des chambres mais également l’extension horizontale du front de pression au mur, et dans une certaine mesure l’écoulement gravitaire du banc de la marne dégradée vers les piliers.

Il est intéressant de noter qu’à partir de 8 mois, la pression semble se stabiliser dans la partie surplombant les chambres ennoyées (E-F ; F-G et G-H) vis-à-vis du champ de pression imposé en parois, contrairement aux quatre autres chambres situées de part et d’autre des chambres ennoyées où nous remarquons la remontée du fluide vers la couche grise. Ceci est lié aux conditions de flux nul aux parois des chambres non ennoyées. C’est d’autant plus vrai pour de longues durées (supérieures à 180 jours) et pour lesquelles un équilibre hydraulique est déjà atteint au-dessus des chambres ennoyées vis-à-vis de la condition de pressions imposées aux parois des chambres ennoyées. Ceci est clairement illustré sur l’évolution de la pression interstitielle le long d’un profil horizontal situé dans l’intercalaire à 1 m de la couche brune (figure 4a).

La figure 4b montre les variations des contraintes totales induites par l’ennoyage (différence des contraintes entre l’ennoyage et le creusement) dans les piliers F et G (profil horizontal passant par le

Page 9: MODELISATION HYDROMECANIQUE PRELIMINAIRE … 2002 B pp Souley.pdf · mars 1961 à juin 1962 par la société luxembourgeoise ARBED (exploitant) : l’un au mur de la couche jaune

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 9

cœur des piliers). L’ennoyage augmente les contraintes totales horizontales et verticales dans les piliers F et G à proximité des chambres et diminue très légèrement ces mêmes contraintes au cœur des piliers de la couche brune : cette diminution est de 0,032 et 0,016 MPa pour la contrainte horizontale et verticale, respectivement ; soit une réduction de 3 et 1% de contraintes effectives horizontale et verticale au cœur des piliers. Les maximums des variations des contraintes horizontale et verticale dans les piliers F et G sont respectivement de 0,22 et 0,7 MPa. Alors que ce maximum est atteint en parois pour la contrainte verticale (soit une augmentation de contrainte effective verticale en parois de 0,65 MPa par rapport au creusement) ; c’est à 1,5 m des chambres que les variations maximales des contraintes horizontales sont significatives.

Les variations de contraintes totales induites par l’ennoyage dans les intercalaires ont été examinées le long des profils verticaux BB, CC et DD, du centre des chambres vers les côtés droits (Fig. 5a). C’est dans la marne dégradée au toit immédiat où l’influence de l’ennoyage est la plus importante avec des variations de contraintes atteignant 0,9 MPa (Fig. 5d) ; avec des valeurs de pression inférieures à 0,03 MPa ; soit une augmentation de la contrainte effective verticale de 0,87 MPa à proximité de l’interface marne intercalaire et marne dégradée, dans la partie surplombant les appuis. L’examen des figures 5b et d montre que le maximum de variations de contraintes induites est attendu le long de DD. Enfin l’ennoyage induit également une augmentation des contraintes verticale et horizontale dans les terrains surplombant les couches grise et jaune. C’est dans l’intercalaire entre les couches brune et grise que le maximum de variations est attendu. La figure 5c synthétise la localisation des variations maximales attendues prédites, les valeurs maximales sont associées aux points situés au bout des flèches. Du fait du gradient hydraulique dans les chambres ennoyées augmentant du haut vers le bas, la convergence maximale attendue est localisée à proximité du mur, alors que la convergence verticale maximale est située au centre des chambres. Les maximums de variations de contraintes et d’expansions au toit-mur attendues sont situés à proximité des coins, exactement le long du profil DD où les déformations maximales induites par l’excavation ont été atteintes.

30 jours

60 jours

120 jours

150 jours

8 mois

12 mois

18 mois

24 mois

(MPa)

5 m

5 m

30 jours

60 jours

120 jours

150 jours

8 mois

12 mois

18 mois

24 mois

(MPa)(MPa)

5 m

5 m

5 m

5 m

5 m

5 m

Figure 3. Isovaleurs de pression de pore autour des chambres ennoyées

0

0.01

0.02

0.03

0.04

0.05

0 25 50 75 100 125 150 175Profil (intercalaire) à 1 m de la couche brune (m)

Pres

sion

de

pore

(MPa

)

30 j120 j150 j8 mois12 mois24 mois

H EFG

(a)

-0.2

-0.1

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

65 75 85 95 105

Profil au coeur des piliers de la brune (m)

Con

train

tes

(MPa

)

30 j - h120 j - h24 mois - h30 j - v120 j - v24 mois - v

(b)

Pilier G Pilier F

Figure 4. Profil de pression de pore et des contraintes : (a) – pression de pore dans l’intercalaire à 1 m de la couche brune ; (b) variations de contraintes horizontale (h) et verticale (v) dans les piliers F et G

Page 10: MODELISATION HYDROMECANIQUE PRELIMINAIRE … 2002 B pp Souley.pdf · mars 1961 à juin 1962 par la société luxembourgeoise ARBED (exploitant) : l’un au mur de la couche jaune

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 10

0

58

15,519,5

2629

34

(m)

pilier F

grise

jaune

BB DDCC

BB DD

2,5mBB DD

CC

1,5

0,5

(a)

0

58

15,519,5

2629

34

(m)

pilier F

grise

jaune

BB DDCC

BB DD

2,5mBB DD

CC

1,5

0,52,5m

BB DD

CC

1,5

0,5

(a)

-0.05

0

0.05

0.1

0.15

0.2

0.25

0 5 10 15 20 25 30 35

Profil (BB) : mur brune - toit jaune (m)

Cont

rain

tes

indu

ites

(MPa

)

30 j - h12 mois - h24 mois - h30 j - v12 mois - v24 mois - v

(b)

Brune Grise Jaune

Cv H

Cv V Expansion

Expansion

Expansion∆σ∆σ∆σ∆σxx

AAIntercalaireDégradée

Marne mur ∆σ∆σ∆σ∆σyy

∆σ∆σ∆σ∆σxx∆σ∆σ∆σ∆σyy

G-F

Cv : convergence (V : verticale, H : horizontale)∆σ : variations de contraintes totales induitesxx : horizontale, yy : verticale

(c)

Cv H

Cv V Expansion

Expansion

Expansion∆σ∆σ∆σ∆σxx∆σ∆σ∆σ∆σxx

AAIntercalaireDégradée

Marne mur ∆σ∆σ∆σ∆σyy∆σ∆σ∆σ∆σyy

∆σ∆σ∆σ∆σxx∆σ∆σ∆σ∆σxx∆σ∆σ∆σ∆σyy∆σ∆σ∆σ∆σyy

G-F

Cv : convergence (V : verticale, H : horizontale)∆σ : variations de contraintes totales induitesxx : horizontale, yy : verticale

(c)

-0.2

0

0.2

0.4

0.6

0.8

1

0 5 10 15 20 25 30 35

Profil (DD) : mur brune - toit jaune (m)

Cont

rain

tes

indu

ites

(MPa

)

30 j - h12 mois - h24 mois - h30 j - v12 mois - v24 mois - v

Brune Grise Jaune

(d)

Figure 5. Contraintes totales induites horizontale (h) et verticale (v) : (a) localisation des profils ; (b) contraintes induites

le long de BB ; (c) localisations des variations maximales ; (d) contraintes induites le long de DD

5. Synthèse de l’étude de sensibilité

Afin d’évaluer l’importance de certaines hypothèses adoptées, nous avons étudié la sensibilité des résultats du modèle à la saturation initiale (S1), au pendage réel des couches (S2), à la loi de comportement (S3) et au degré d’ennoyage (S4). (S1) Contrairement au cas de référence où la saturation initiale était de 95%, nous considérons les terrains, au-dessus de la nappe avant l’ennoyage partiel, saturés mais sans pression de pore. (S2) En réalité, le pendage de la couche brune varie entre 3 et 5°. Nous considérons une géométrie identique au cas de référence ; en revanche l’ennoyage partiel sera simulé en appliquant des pressions d’eau sur la base d’un pendage de 5° ; soit de pressions de 3, 5 et 7 m aux parois supérieures des chambres H-G, G-F et F-E, respectivement. (S3) Dans le cas de référence, nous avons utilisé une loi de comportement élastoplastique non-associée et sans dilatance. Ici nous proposons d’étudier le cas où la loi est associée (l’angle de dilatance égal à l’angle de frottement). (S4) Il s’agit de simuler une remontée de la nappe à 5 m au-dessus de la couche jaune. Dans les différents cas, nous avons examiné l’impact de l’ennoyage partiel (S1-S3) et total (S4) au 150ème jour. Les résultats sont synthétisés dans le tableau 2 en terme de maxima de variations de contraintes induites et d’expansions dans le pilier G de la couche brune et dans les intercalaires. Nous pouvons tout d’abord remarquer que les variations maximales attendues sont localisées aux mêmes endroits que le cas de référence (Fig. 5c). Sauf pour l’ennoyage total (S4), l’ensemble des variations reste voisin de celui obtenu dans le cas de référence.

Ainsi, l’hypothèse (S1) diminue les valeurs des expansions et augmente les variations totales des contraintes horizontales, particulièrement dans les piliers de la couche brune et l’intercalaire. Sachant que la pression (imposée) en bordure du pilier est de 0,045 MPa, cette augmentation est de 0,4 MPa ; soit une diminution (de même valeur) de contrainte effective par rapport au cas de référence et de 0,355 MPa par rapport à l’état après creusement. Par contre, il n’y a pratiquement pas de variations par rapport au cas de référence sur les contraintes verticales. En conséquence, compte tenu de l’accélération du processus de diffusion de la masse d’eau dans l’hypothèse saturée

Page 11: MODELISATION HYDROMECANIQUE PRELIMINAIRE … 2002 B pp Souley.pdf · mars 1961 à juin 1962 par la société luxembourgeoise ARBED (exploitant) : l’un au mur de la couche jaune

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 11

(c’est-à-dire une augmentation de la pression interstitielle à un instant donné par rapport au cas de référence), on doit s’attendre à une diminution des contraintes effectives verticales dans les piliers.

L’hypothèse (S2) augmente les valeurs d’expansions aux mur et toit de la couche brune et dans les piliers, sans affecter les variations des contraintes induites par rapport au cas de référence. Comme la pression appliquée aux parois des chambres est supérieure à celle du cas de référence, les contraintes effectives aux murs et dans les piliers de la couche brune sont diminuées par rapport au cas de référence.

L’influence de la dilatance (S3) est marquée sur les variations des contraintes induites aux mur et toit de la couche brune et dans l’intercalaire brune/grise. En particulier, nous notons une augmentation dépassant 0,7 MPa de variation des contraintes totales verticales par rapport au cas de référence. Sachant que les profils de pression dans les piliers et l’intercalaire brune/grise sont identiques (avec et sans dilatance), il en résulte une diminution des contraintes effectives par rapport au cas de référence. L’influence de la pression d’eau est clairement illustrée dans ce tableau.

Enfin, l’hypothèse (S4) entraîne une amplification des expansions, particulièrement dans l’intercalaire (~9 mm au 150ème jour) et une réduction importante des variations des contraintes totales induites par rapport à l’ennoyage partiel ; soit une augmentation significative des contraintes effectives. En conséquence, des zones plastiques supplémentaires se sont développées sur le pourtour de celles déjà induites par le creusement et ceci dans les trois couches exploitées avec une extension variant de 0,5 à 1 m ; contrairement aux autres simulations où l’ennoyage partiel ne provoque pratiquement pas de zones plastiques supplémentaires par rapport au creusement.

Tableau 2. Synthèse des résultats de l’étude de sensibilité à l’instant 150 jours

Référence S1 S2 S3 S4 Mur de la couche brune 0,04(DD) 0,043(DD) 0,045(DD) 0,04(DD) 0,15(BB) Piliers brune (centre) 0,01 0,008 0,02 0,01 0,4 Intercalaire brune/grise 0,05(DD) 0,035(DD) 0,07(DD) 0,052(DD) 8,5(DD) Intercalaire grise/jaune 0,006(DD) 0,006(DD) 0,005(DD) 0,006(DD) 0,15(BB)

Expansion maximale (mm) et localisation

Toit de la couche jaune 0,017(DD) 0,014(DD) 0,013(DD) 0,018(DD) -0,3(DD) Mur de la couche brune -0,1(CC) -0,15(CC) -0,1(CC) -0,04(CC) -1(DD) Piliers brune 0,2(*) 0,6(**) 0,2(*) 0,4(*) -0,6(***) Intercalaire brune/grise 0,35(DD) 0,4(DD) 0,3(DD) 0,1(DD) -0,9(DD) Intercalaire grise/jaune -0,03(CC) -0,04(BB) -0,03(BB) 0,02(DD) -1(CC)

∆σ∆σ∆σ∆σxx (MPa) et localisation

Toit de la couche jaune 0,02(DD) 0,03(CC) 0,016(DD) 0,006(DD) -0,9(DD) Mur de la couche brune 0,14(DD) 0,13(DD) 0,13(DD) 0,025(CC) -0,6(DD) Piliers brune 0,7(**) 0,8(**) 0,7(**) 0,125(**) -2(****) Intercalaire brune/grise 0,9(DD) 0,9(DD) 0,9(DD) 0,13(DD) 1,5(DD) Intercalaire grise/jaune 0,03(DD) 0,025(DD) 0,025(DD) 0,025(DD) -0,7(DD)

∆σ∆σ∆σ∆σyy (MPa) et localisation

Toit de la couche jaune 0,02(DD) 0,02(DD) 0,016(DD) 0,01(DD) -0,8(DD) (*) : à 1,5 m des parois ; (**) : parois ; (***) au cœur ; (****) à 2,5 m des parois

6. Conclusion et perspectives

De ces modélisations hydromécaniques préliminaires de l’ennoyage partiel du stot de Tressange, nous retiendrons les points essentiels.

(a) De par le faible taux de défruitement, les fortes caractéristiques mécaniques des matériaux constituant le stot et les faibles sollicitations hydrauliques de l’ennoyage, les amplitudes de déplacements et déformations induites sont faibles. Le creusement induit des déplacements maximums verticaux centimétriques et localisés aux toits immédiats des couches brune et jaune, et des déplacements horizontaux globalement 3 à 4 fois moins importants. Les très faibles contraintes de traction au toit immédiat de la couche brune ne permettent pas d’établir une corrélation avec la

Page 12: MODELISATION HYDROMECANIQUE PRELIMINAIRE … 2002 B pp Souley.pdf · mars 1961 à juin 1962 par la société luxembourgeoise ARBED (exploitant) : l’un au mur de la couche jaune

JNGG 2002, 8 et 9 Octobre 2002, Nancy 12

fissuration naturelle ou induite observée. S’agissant de l’ennoyage partiel, il a été noté que le processus de diffusion de la masse fluide est très lent en général (faibles perméabilités !). De la répartition de pression interstitielle, nous retiendrons que la saturation des piliers intervient à partir du 5ème mois. En revanche le processus de saturation du massif surplombant les autres chambres continue dans le temps. Les déformations dues à l’ennoyage sont de 2 à 3 ordres de grandeur plus petites que celles induites par le creusement.

(b) Bien que les variations induites restent faibles, la sensibilité choisie pour les appareils de mesures devrait être suffisante. Ces modélisations ont permis de proposer la localisation des endroits où le maximum de variations est attendu et donc d’optimiser le positionnement des appareils de mesures.

La seconde étape de ce travail serait : (a) la prise en compte de la rhéologie plus spécifique des matériaux en jeu sur la base des caractérisations in situ et de laboratoire, (b) la rétro-analyse de l’état « 0 » sur la base des données du site en cours d’exploitation, (c) la prise en compte des effets capillaires et de l’évolution des résistances mécaniques avec la teneur en eau, (d) l’utilisation de ces modélisations pour l’interprétation de l’expérimentation en cours.

Remerciements Les auteurs remercient la société ARBED et l’ensemble de ses collaborateurs, en particulier MM Martin et Rovinalti, pour la mise à notre disposition du site de Tressange et l’aide à la logistique liée à la conduite des expérimentations menées dans le cadre du programme scientifique du GISOS.

7. Bibliographie

Al Heib M. Programme EAT-DRS-03 – Base de données géotechniques relative aux mines de fer de Lorraine. INERIS DRS-02-25300/RN08, 22p, 2002

Balland C. Programme EAT-DRS-03 – Technique de diagraphies ultrasoniques appliquées à l’auscultation d’ouvrages miniers (Site de Tressange). INERIS DRS-02-25303/RN09, 22p, 2002

Biot M. A. General Solutions of the Equations of Elasticity and Consolidation for a Porous Material. J. Appl. Mech., Trans. ASME, 78, 91-96, 1956

Doolin D.M., Mauldon M. Fracture permeability normal to bedding in layered rock masses. Int. J. Rock Mech. Min. Sci. & Geomech. Abstr., 38(2), 199-210, 2001

Goodman R.E. Introduction to rock mechanics. John Wiley & Sons, 1980 Grgic D., Homand F., Hoxha D. Influence du vieillissement et de l’eau sur le comportement

mécanique des mines de fer abandonnées de Lorraine. Revue française de génie civil, 6(6), 2002 Grgic D. Modélisation du comportement à court et à long terme des roches de la formation ferrifère

lorraine. Thèse Doct. INPL, Nancy, 2001 Hoxha D., Grgic D., Homand F., Souley M. A coupled H-M constitutive model to study stability of

Lorraine abandoned iron mines. Ed. Elsworth D., Tinucci J. and Heasley K.A., Rock Mechanics in the national interest, A.A. Balkema publishers, 1, 637-644, 2001

Pineau J.L. Contribution à la caractérisation géomécanique des roches. Application au minerai de fer lorrain. Thèse Doct. INPL, Nancy, 1978

van Eeckhout, E. M. The Mechanisms of Strength Reduction due to Moisture in Coal Mine Shales. Int. J. Rock Mech. Min. Sci. & Geomech. Abstr., 13, 61-67, 1976

Vinkler F., Piguet J. P. Numerical analysis of the long-term stability of an abandoned mine – Impact of the groundwater level rise. Proc. FLAC Symp. on numerical modeling in Geomech., Ed. Detournay C. and Hart R., A.A. Balkema publishers, 245-253, 1999

Snow D. Anisotropic permeability of fractured media. Water Resour. Res., 5, 1273¯1289, 1969