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ARRAQUE

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rAs° 533. édition

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JEAN BARRAQUÉ

Le Temps restituépour soprano, choeur et orchestre(1957/1968)Texte de Hermann Broch,La Mort de Virgile, Livre 2Durée : 40 minutes

Entracte

...au-delà du hasardpour quatre formations instrumentaleset une formation vocale (1958/1959)Texte de Jean Barraquéd'après Hermann BrochDurée : 40 minutes

Rosemary Hardy, sopranoCatherine Dubosc, sopranoHilary Summers, contraltoNederlands KamerkoorChef de choeur, Klaas Stok

Orchestre Symphonique SWRBaden-Baden/FreiburgDirection, Sylvain Cambreling

Coréalisation Théâtre du Châtelet,Festival d'Automne à Paris

En collaboration avec le SüdwestrundfunkAvec le concours de la FondationPierre Bergé-Yves Saint Laurent

Partenaire du programme musical du Festivald'Automne, la Sacem s'associe à ce concert-hommage à Jean Barraqué inscrit dans L'AtelierMichel Foucault

Cette brochure a été établie par Laurent Feneyrou,

éditeur des Ecrits de Jean Barraqué, Paris,Publications de la Sorbonne, 2001.

,tl'Au7Omi;IE.

33. édition

Président André BénardDirecteur général : Alain Crombecque

Directrice artistique théâtre et danse Marie CollinDirectrice artistique musique

Joséphine Markovitswww.festival-automne.com

Jean Barraqué est né le 17 janvier1928 à Puteaux. Élève du LycéeCondorcet, il se destine adoles-cent à la prêtrise, découvre la Sym-phonie inachevée de Schubert dont lechoc émotionnel le décide à lacomposition. Après des étudesd'harmonie, de contrepoint et defugue avec Jean Langlais, il entre,en 1948, dans la classe d'OlivierMessiaen au Conservatoire deParis, en qualité d'auditeur libre.Suit en 1952-1953 un stage auGroupe de recherche de musiqueconcrète. Puis il collabore à uneémission mensuelle, Jeune Mu-sique, dont André Hodeir est lerédacteur en chef, écrit pour LeGuide du concert tout en donnant descours privés et, de 1956 à 1960,un cours collectif d'analyse. En1952, il achève Sonate et rencontreMichel Foucault. Après la créa-tion de Séquence en 1956, il rédigeet date, sur deux pages, un plangénéral de La Mort de Virgile, vastecycle d'après le roman deHermann Broch, duquel naîtrontLe Temps restitué, ...au-delà du hasard,Chant après chant, et plusieurs pro-jets : Discours, Iysanias, Portiques du feu,

Hymnes à Plotia et Arraché de... com-mentaire en forme de lecture du "Temps res-

titué". Il travaille, entre 1957 et1959, à deux projets de compo-sition dramatique avec JeanThibaudeau et Jacques Polieri. En1961, il est nommé au CNRS ensection de philosophie (directeur,Étienne Souriau), statut qu'ilconserve jusqu'au 30 septembre1970. L'année suivante paraîtson Debusy, traduit en plusieurslangues et pour lequel Varèse luifait transmettre son admiration.

Il achève Concerto en 1968et, à la suite d'un incen-die causant divers dé-ménagements, perd lamoitié de la partitionécrite des Portiques du feu.En 1969, il établit unprojet de drame lyriqueL'Homme couché toujoursd'après La Mort de Virgile.La maladie, la condam-nation du Tribunal degrande instance de Parisen réparation du dom-mage moral que consti-tuent, dans son Debus,les attaques contre Satie,et son échec au poste deprofesseur d'analyse auConservatoire nationalde musique de Paris s'ac-cumulent en 1971, avantsa nomination commeChevalier dans l'Ordrenational du mérite en1973. Frappé d'hémi-plégie, il meurt le 17 août1973 à la Salpêtrière etest inhumé au cimetièrede Trelevern.

Les uvres de Jean Barraquésont éditées par Bârenreiter.Les oeuvres complètes deJean Barraqué ont été

enregistrées par KlangforumWien, sous la direction deSylvain Cambreling, JürgWyttenbach et Peter Rundel(cpo 999 569-2,1998).L'Ensemble 2e2m, sous ladirection de Paul Méfano, aenregistré ...au-delà du hasard(LP, Astrée, AS 50), Concerto

et Le Temps restitué (CD,Harmonia mundi, HMC905 599).

Association Jean Barraqué

54, rue Monsieur le Prince75006 Paris

L'INACHEVEMENTSANS CESSE...Laurent Feneyrou

"L'un des musiciens lesplus géniaux et les plusméconnus de la généra-tion actuelle." Ces motsde Michel Foucault surJean Barraqué disentl'intensité de leur rela-tion, au milieu des an-nées cinquante. L'étudede Beethoven et du sé-rialisme, et les dialoguessur Heidegger ou Dos-toïevski se mêlèrent auxdiscours sur le rêve,indissociable de l'ivresseet de la déraison.

Peu avant, en 1952,Barraqué, lecteur atten-tif du Traité du désespoir deKierkegaard, achevait saSonate pour piano, oeuvredont les divers antago-nismes génèrent une ra-dicale "dualité structu-relle". Expérience d'unelimite, le son y affronteson ennemi, le silence,creusement insidieux,évidement menaçant,déclin et finalementanéantissement du dis-cours. Avec Foucault,Barraqué aborde en1953 l'ceuvre deNietzsche, dont il liranotamment Ainsi parlaitZarathoustra, et sur despoèmes duquel il créealors Séquence (1950 -1955). Puis, toujours àl'initiative de Foucault,Barraqué découvre en

1955 La Mort de Virgile de HermannBroch et l'admirable commen-taire qu'en donna la même annéeMaurice Blanchot : l'auteur deL'Énéide, à l'article de la mort,contemple les rochers et les ma-rées, et s'interroge sur la des-truction par le feu de son oeuvre.Samedi 24 mars 1956, dans lemouvement même de la ruptureavec Foucault, Barraqué rédige etdate, sur deux pages en vis-à-vis,un plan général pour un vastecycle auquel il pense vouer le res-tant de sa vie et auquel il oeuvraeffectivement jusqu'à sa mortbrutale en 1973. Du deuxièmelivre du roman de Broch, "Le Feu

La Descente", naquirent ainsiles austères et somptueux Tempsrestitué et ...au-delà du hasard, maisaussi Chant après chant (1965-1966).Le musicien rêvait encore àDiscours, à Iysanias ou aux Portiques du

feu, déclarant à propos de sa Mortde Virgile : " Je veux penser cetteoeuvre immense dans l'inachève-ment. Je dis bien l'inachèvement,cette oeuvre ne sera jamais ache-vée. Je veux qu'elle soit inache-vée, que ce soit la mort quil'achève ou qui inachève, plusexactement , mais qu'ensuite,d'autres oeuvres parallèles, mar-ginales, circulaires sortent duphénomène germinatif, autourde La Mort de Virgile." Barraqué ypuisa la plupart de ses thèmes,que devait réunir un projet dedrame lyrique, L'Homme couché :l'amour, la vengeance, la "révoltemoderne", la dignité, l'inceste,l'amitié, l'enfant, l'homosexua-lité, le sadisme, la soumission, ledon, l'offrande acceptée, la pos-session, la rigueur, la solitude, le

génie, le veilleur, le sommeil, la mélodie, lerefuge, la maladie mortelle, l'odeur délétère,le mysticisme, la sainteté, l'enfantement, lamaîtrise, la joie, la beauté, la métamorphose,la transmutation, les maléfices, les actesirresponsables ou manqués, les nostalgies,l'hypocondrie, le déterminisme, et la "folieinspirée et positive" selon Nietzsche.

"Brûlez L'Énéide !" , devait chanter Lysanias. Là,au plus près, à l'instant du trépas, s'ouvrel'étrange concorde de Fceuvre et de sa des-truction. S'approcher de cet instant, tenterde le circonscrire en un mouvement dontl'ampleur, la grandiloquence et les exhala-tions du sublime et du tragique solennisentle mot au-delà de toute mesure, telle est latâche d'une création promise à l'éparpille-ment, au morcellement angoissé, à la ruineou à la cendre. De l'inquiétude métaphysiqued'un dessein aussi désespéré, ultime exerciced'une vigilance et de la rigueur douloureused'une pensée très ancienne, Hermann Brochfut le veilleur. Poète d'une civilisation à sonterme, représentation symbolique del'Occident moderne, Virgile découvre, dansle roman, l'axe vertical, sur le faîte étroit del'instant discontinu et de la rupture. Car lemouvement tragique est toujours de l'ordrede l'ascension et de l'effondrement, celui-cid'autant plus rude que la volonté morale auraété haute. Le ler décembre 1952, Barraquéécrivit déjà au compositeur canadien SylvioLacharité. "Nous arrivons à un point de lasensibilité humaine où nous savons (car le jene peut plus exister, nous prenons connais-sance historiquement des états de fait) quel'histoire de Dieu n'a été que l'histoire del'oubli, de la lâcheté de l'homme. Sans undieu, aucun sens à la vie et nous allons pro-clamant que tout est absurde. Mais quelhomme peut d'une façon conséquente,accepter que ses actes soient sans aucun sens ?Alors chacun de nos actes, du fait qu'il estabsurde, est irréversible, il est oui et non, il

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contient son germe de destruction, jamais destabilité, d'assurance ih000 de seconde, lamort est aussi stupide que la vie. Quoi faire ?Si je dis "je ne peux plus rien faire", je saisque ce n'est pas très malin, mais je sais aussique c'est aussi malin que d'écrire de la mu-sique. Suicide ou création ? L'un, lâcheté ex-ceptée n'a pas plus de sens que l'autre. Etmoi, le malin, avec les autres des créateurs,ne sommes-nous pas, à la fin du compte, leshommes de la plus grande FOI ? les grandsmystiques de notre temps. Et si je répondsoui, je sais que nous n'avons pas avancé d'unpas. Il me semble que nous quittons, non pasune civilisation, mais une énième partie del'histoire de l'homme : l'histoire religieuse."L'acquisition de l'athéisme fut donc unecondition de la création sérielle.

Mise en demeure d'être ou de n'être pas,sacrifiant la continuité dans la déchirure etles silences, dans les failles et l'intervalle,Fceuvre de Barraqué énonce la crise. Sa di-mension est encore celle de la hauteur et dela profondeur où l'homme perd pied et, d'unmême mouvement, descend en soi-même ets'élève, où le sujet se remarque seulementlorsqu'il risque l'anéantissement. Il en estainsi de l'irruption d'incises intemporelles,de notes en dehors de l'ordre sériel ou demotifs percussifs étrangers aux générationsrythmiques, et dont le statisme résulte par-fois d'une hallucinante giration. Barraqué futun analyste admirable, notamment d'uneforme délétère, le développement parélimination dans la Cinquième Symphonie deBeethoven, à laquelle il consacra une longueétude. Dans le premier mouvement, ce dé-veloppement, inscrit dans une variation, en-veloppé selon un immense decrescendo, tientd'une coupure où se trouvent métamorpho-sées, sublimées, les qualités harmoniques,mélodiques, rythmiques, dynamiques ettimbriques de la cellule génératrice, ou "idéemusicale". Le motif perd peu à peu de sesnotes. L'orchestration austère, sinon

LE TEMPS RESTITUÉ

pour soprano, choeuret orchestre (1956-1968)Texte de HermannBroch (La Mort de Virgile,Deuxième Livre,traduction d'AlbertKohn)La loi et le tempsSymbole de la nuitPortail de la terreurL'inachèvement sanscessseCar ce n'est que parl'erreurEffectif soprano ; choeur (3,

3, 3, 3) ; piccolo, flûte, haut-bois, cor anglais, clarinettepiccolo, clarinette, clarinettebasse, basson, xylorimba,vibraphone, glockenspiel,célesta, clavecin, harpe, gui-tare, quatre percussionnistes,

quatre violons, deux altos,deux violoncelles, contrebasse

Création 4 avril 1968,Royan, Helga Pilarczyk

(soprano), Solistes des

choeurs de l'ORTF (Jean-Paul

Kréder, direction), Ensembledu Domaine musical, sous ladirection de Gilbert Amy

Le Temps restitué en France

Paris en 1968 (Ensemble duDomaine musical, sous la di-rection de Gilbert Arny), en1973 (Ensemble Ars Nova,sous la direction de Jean-Paul Kréder) et en 1987 (En-

semble 2e2m, sous la direc-tion de Paul Méfano)Strasbourg en 1995 (Kiang-forum Wien, sous la direction

de Sylvain Cambreling)

"Le Temps restitué, comme Chant après

chant, fait partie du DeuxièmeLivre [de La Mort de Virgile] auquell'auteur travaille. Intitulé, selonBroch, Le Feu La Descente, il relatel'angoisse nocturne qui décide uncréateur au seuil de la mort à

détruire son oeuvre [...].Contrairement à certaines autressections de La Mort de Virgile, le textedu Temps restitué est entièrement deBroch. Les subdivisions [des]cinq mouvements font alterner,en les juxtaposant, en les mélan-geant ou en les superposant,parfois de façon sporadique, despassages d'orchestre et des solosinstrumentaux ou vocaux, brefsou longs. Le choeur est utilisé soità quatre voix mixtes, soit en dif-férents groupes de solistes, soit àdouze voix. Soutenant ou s'op-posant au soprano solo, il sup-pose, comme ce dernier, l'arti-culation linéaire et continue ainsiqu'un style haché, où la syllabeisolée sert à des fins structurellesaussi bien phonétiquement quemusicalement. Plusieurs textessont souvent employés en imbri-cation ou en superposition. Àl'image du style d'écriture tech-nique pratiqué par HermannBroch (un mot du texte versifiéou non provoquant de longscommentaires prosodiques ounon), l'orchestre, écrit en style degrand orchestre, en groupes dechambre, ou de solistes, souligneou commente certains mots ouidées clés. Le Temps restitué se jouesans interruption", écrivait JeanBarraqué de son oeuvre.

Commencé en mars 1956, dansle mouvement de la découverte deLa Mort de Virgile, et achevé le 8 fé-vrier 1968, Le Temps restitué exposenon seulement un matériau sériel

riche de tierces consonantes, auquel puise-ront toutes les partitions ultérieures deBarraqué, mais aussi des configurationssonores chères au musicien, dont la suite"silence son silence", reprise dans ...au-delà du hasard. L'oeuvre décrit un immense cyclede "séries de série" simultanées et démulti-pliées dans l'instrumentation. D'après lesesquisses étudiées par Heribert Henrich,dans une première version, la soprano soloreprenait à la fin le geste inaugural, rendantévident le caractère cyclique de l'ensemble,lequel reste dorénavant en deçà du seuil deperception. Le Temps restitué avoisine la lectured'Ainsi parlait Zurathoustra. Sur des montagnestoujours plus hautes, fermant autour de luides cercles et des frontières sacrées, à la li-sière de la raison, Zarathoustra exposel'abyssale pensée de l'éternel retour : le passéet le futur se contredisent, se heurtent deplein front, se rencontrent en la métaphoredu portique à deux faces, comme instant,entre le chemin de l'accompli et celui de l'ou-verture devant nous. Divergentes, ces deuxéternités, en cet instant, créent un cercle,une roue, et constituent une seule éternité,ce cercle du devenir retournant sans fin surlui-même en sa "grande année" non,certes, la vision cauchemardesque du retourdu tout, de l'identique, du même, du sem-blable, de l'analogue, mais, l'affirmation dela différence, de la dissemblance, du multipleet du devenir : car, comme l'écrivait GillesDeleuze, ceux qui répètent négativement etceux qui répètent à l'identique seront éli-minés. Ce qui sera fut déjà, et inversementle maintenant, l'"Instant de grâce" du Tempsrestitué, absorbe le temps tout entier en des"cercles déformés et contradictoires et invi-sibles parce qu'effacés" (...au-delà du hasard,XII) . Zarathoustra, saisi d'effroi, entendalors un chien hurler. Rêve-t-il ou non ?"Mais là gisait un homme" (aber da lag einMensch), le pâtre dévorant la tête d'un serpent,avant de rire comme personne, le gisant, ceque Zarathoustra, pris de nausées, sera, septjours durant, comme celui dont Barraqué rê-vait de faire un drame lyrique, l'homme cou-ché, Virgile moribond. La musique entendsupprimer l'inexorable écoulement et

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convulsion dernière. Si-gnant une adhésion in-transigeante aux règles,aux valeurs et aux prin-cipes de la série, sesoeuvres visaient unetransformation de soi-

"volontairement maladroite, même et la conversionmalhabile", accentue la neutra- de sa vie à certaines va-lité. Puis intervient une seconde leurs esthétiques, la findissociation, esquissant la nudité principale étant ende la troisième élimination, la- somme de revenir à soiquelle réduit la cellule à une "de soi à soi", selonsimple valeur longue. Le déve- l'énigme formulée dansloppement tonal, cyclique, surie- les Portiques du feu. "Maisquel reposait l'ensemble du mou- avant d'être un buste, jevement, atteint une limite. "Tout voudrais aussi êtreest fini. La cellule n'existe plus. un homme ; presqueC'est la mort complète. Il était comme les autres", écri-impossible de continuer." vait Barraqué dans uneL'oeuvre s'est détruite. Là, l'idée lettre du 7 octobre 1969.musicale affronte une tâche ter- Démiurge d'une révolterifiante, la suppression de sa non politique, mais uni-forme finie. S'y ouvrent les an- verselle, le musicien,goisses, les défaillances, les ca- tout entier dans sontastrophes motrices, les fureurs et oeuvre, incarnait "leles déchaînements, ou les désespoir de l'infini-silences, les paralysies et les tude, ou le manque deprostrations dont rceuvre barra- fini" de Kierkegaard, laquéenne est trouée, la dissolution grande angoisse du voya-d'une réalité dans le chaos, le ver- geur, sa Terreur. Barra-tige, la faiblesse ou la douleur. qué fit de sa vie unMais des trois éliminations de la drame aux exigencessymphonie renaîtra le discours. surhumaines, dont leOù le développement par élimi- Jean Genet des Bonnes etnation apparaît, dynamiquement, du Journal du voleur fut uncomme le chas au travers duquel frère en désespoir. Sonl'écoute découvre l'ouverture ou isolement, irrévocable,comme le portail d'où surgira un éveilla la fierté de sasujet renouvelé, dans un autre quête. Lui, "obligé d'êtremonde. Du silence comme ins- le plus grand", donna àtant de la rupture et point de l'histoire un sens à soncontact. usage, s'effaçant dans

l'acte créateur en lequelBarraqué recherchait une ascèse, il se manifestait.une éthique et une esthétique del'existence : "Je crois que la mu-sique... enfin je vais employer unterme très âpre : empêche d'êtreun salaud." La violence de son art,éruptive, paroxystique, inacces-sible au réconfort et à la conso-lation, tendait au spasme et à la

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retenir ces moments "traversés par l'éclair".Ainsi se dévoile, dans La Mort de Virgile deBroch, l'origine de cette oeuvre "Le tempscoulait en haut, le temps coulait en bas, letemps coulait au-dessous, le temps occulte dela nuit ré-injecté dans ses artères, ré-injectédans les orbites des astres, joignant sansintervalles les secondes aux secondes, letemps restitué, réveillé, supérieur au destin,abolissant le hasard, loi immuable du tempssoustraite à l'écoulement, instant perpétueldans lequel il se sentait maintenu." D'un ly-risme immuable, immobile dans l'alternancede lumière et d'obscurité, et indissociable durêve, La Mort de Virgile en appelle à la créationsolaire et nocturne, toute vouée à la connais-sance où l'homme s'écoute chanceler.

... AU-DELÀ DU HASARDpour quatre formations instrumentales etune formation vocale (premier "commen-taire" d'Affranchi de hasard et du Temps restitué)(1958-1959)

Texte de Jean Barraqué autour d'une citationde Hermann Broch : "Mais où tes courantsmultiples se croisent et vers un but conver-gent / - un courant étant déterminé parl'autre -, c'est là seulement que tu manifestesla stabilité, /l'objet et le nom d'une vérité ter-restre, entr'unis, / appelés à l'unité, pourqu'ils soient ton miroir"

La nuit sans rayonsIncapables d'évolutions et de retoursQuelles marques éphémères ?La démesure abusive

V Dans la multitude erréeInstrumental I et vocalPour la lisière inconnue des hasardsInstrumental 2

Avant la citationAveuglé par le rêve (La Mort de Virgile)Instrumental 3

XII ...au-delà des droites lignes du regardXIII. D'une pensée sans nuit

Effectif I deux trompettes, trombone,saxophone alto, saxophone ténor, saxo-

phone baryton, vibraphone ; II: célesta,glockenspiel, xylophone, harpe, vibra-phone, piano solo ; III trois percus-sionnistes ; IV quatre clarinettes ; Vdeux sopranos, contralto

Dédié à André Hodeir : "Mon cher An-dré, il me faudrait vous demander excuse

de vous offrir ces pages arrachées à la Nuit

sans Rayons du Soleil. Mais cette oeuvre

vous appartient de droit, vous qui avezassisté à sa genèse et encore plus avez sup-

porté de vous tenir droit dans un silencerectiligne à côté des folles titubations qui

sont ma vérité mais qu'il vous appartient,

dès lors, de métamorphoser au gré devotre rigueur, de votre amitié silencieuse,

mais surtout par les directions créatrices,

qu'il vous est loisible de donner à cettemusique d'inachèvement.... au-delà du ha-

sard est maintenant légué, à vous, et par

vous, comme par procuration, à l'avenirinsensé et au recommencement. Merci.Recevez, à travers les chants nocturnes et

prolongés de la Musique, mon indéfec-tible amitié."

Création 26 janvier 1960, Paris, Simone

Codinas et Ethel Semser (sopranos),Marie-Thérèse Cahn (contralto), Yvonne

Loriod (piano), Hubert Rostaing (clari-nette), Jean-Pierre Drouet (vibraphone),Jazz Groupe de Paris (André Hodeir,direction), Ensemble du Domaine musi-

cal, sous la direction de Pierre Boulez

...au-delà du hasard en France Paris en 1977

(Ensemble 2e2m, sous la direction dePaul Méfano) ; Strasbourg en 1996(Klangforum Wien, sous la direction deJürg Wyttenbach)

Lors de la création dansle cadre du Domainemusical, André Hodeirécrivait : "L'orchestra-tion de ...au-delà du hasardest l'élément le plusspectaculaire de cettepartition. Elle opposecinq groupes différents,voire - le compositeur l'avoulu ainsi - hétéro-gènes. Le groupe desclaviers et harpes pos-sède un soliste : lepiano ; celui des voix(soprano, soprano dra-matique solo, contralto)et celui des clarinetteségalement. Ce dernier,en apparence le plus ho-mogène (quatre clari-nettes et une clarinettebasse) est en réalité leplus disparate, puisqueen lui se heurtent la so-norité classique du groupeet la sonorité jazz dusoliste. Jean Barraqué aspécialement écrit cettepartie pour le virtuosede jazz Hubert Rostaing ;de même, il a fait appelaux timbres plus inhabi-tuels encore du JazzGroup de Paris. Troisbatteries, disposées sté-réophoniquement, for-ment le dernier groupe.Si Fceuvre, sur le planmusical, comprendtreize parties, le texte,écrit par Barraqué au-tour d'une citation deBroch, se limite à septchants. Le compositeura tenté d'intégrer le texteà la conception poly-

phonique de la parti-tion : chaque syllabe,traitée ici en fonction desa substance phonétique,trouve un prolongementharmonique dans ses com-binaisons avec d'autressyllabes assonantes, ve-nues d'autres mots etentendues dans d'autresparties. De grandes in-terjections ponctuent ledéroulement discon-tinu, parfois diagonal dudiscours. Les neuf pre-mières parties, et no-tamment la neuvième(silence-son-silence,souvenir du Temps restitué)préparent et annoncentla dixième, dans laquelleapparaît la citation deBroch, point d'équilibrede cette oeuvre où toutest déséquilibre calculé."

4 z rç

...au-delà du hasard ne serait ni uneoeuvre en soi, ni même un frag-ment, mais un commentaire,traversé de citations et de rappels,du Temps restitué et d'Affranchi de ha-sard (auquel Barraqué renonça fi-nalement). La musique dit, sur lemode onirique, "ce qui était ar-ticulé silencieusement là-bas",selon la formule de L'Ordre dudiscours. "Il y a là, comme dans lerêve - où les hantises et les ob-sessions et les images de la viesont reprises non textuelles maissur un autre mode -, le mêmegenre de mimétisme involontaire

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et voulu, inconscient et recherché" : le rêvefut l'un des thèmes de l'oeuvre de Barraqué,lecteur du Rêve et l'existence du psychiatre suisseLudwig Binswanger, auquel Michel Foucaultavait consacré en 1954 une longue intro-duction. "Dôme" dans Chant après chant, ils'écoute ici comme balancement ou "zig-zag",essentiellement ambivalent, et se décline se-lon deux axes : celui de la lumière et de l'obs-curité, de l'intuition et de la nuit de l'in-conscient, et celui de l'eau, du déferlementdes vagues sur les brisants, et du feu, où l'êtres'embrase à la subtilité de la flamme et ausecret du monde. Chez Barraqué, le rêve meten crise l'Un. Suivant Debussy, son oeuvre,discontinue, éloignée de tout archétype, detout schéma formel légué par la tradition,retrouve comme l'écho d'un ressac. Émue,troublée, elle s'invente et se détruit au fur età mesure. Le musicien donna ainsi naissanceà une forme ouverte, s'achevant exclusive-ment, et organiquement, par l'épuisementde ses facultés internes, et non selon le vou-loir de son créateur. À cet effet, ...au-delà duhasard inventa la technique des séries proli-férantes, séries en série, s'engendrant à l'in-fini à partir de deux ordres initiaux ou serefermant cycliquement, et ouvrant la voieà un délire combinatoire, à ce que Barraquénommait l'inanalysable, la complexité inta-rissable de l'imaginaire sonore.Par les séries proliférantes, Barraqué adétruit l'essence de l'idée sérielle. La sérieexiste en tant que telle, en tant qu'issue desordres qui la créent et en tant qu'elle-mêmeest en devenir. Enfin, dans le rêve, l'hommereconnaît son destin, la donation originaireet libre de son monde propre : "Aveuglé parle rêve et rendu voyant par le rêve, je connaista mort, je connais la limite qui t'est fixée,la limite du rêve, que tu nies. Le sais-tu toi-même ? Le veux-tu ainsi ?'', interroge...au-delà du hasard. Depuis l'Antiquité,l'homme sait dans le rêve, il rencontre la to-talité de son existence, ce qu'il fut, ce qu'ilest et ce qu'il sera, découvrant ce noeud quilie sa liberté à la nécessité du monde. Le rêveannonce à l'homme sa solitude et contrarieson sommeil, désormais vigilant, enl'éveillant à la lumière de la mort, sensabsolu du rêve. Barraqué évoquait volontiersle Veilleur de l' Agamemnon eschyléen, celui,apeuré, auquel la visite des songes est déniée.

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TEMOIGNAGES

Michel FoucaultVous me demandez ce que ça a été d'avoiraperçu, par le hasard et le privilège d'uneamitié rencontrée, un peu de ce qui se pas-sait dans la musique, il y a maintenantpresque trente ans ?Je n'étais là qu'un pas-sant retenu par l'affection, un certaintrouble, de la curiosité, le sentiment étranged'assister à ce dont je n'étais guère capabled'être le contemporain. C'était une chancela musique était alors désertée par les discoursde l'extérieur.

L'écran traversé, 1982,Festival d'Automne/Temps actuels.

Si mes souvenirs sont exacts, je dois la pre-mière grande secousse culturelle à des mu-siciens sériels et dodécaphonistes françaiscomme Boulez et Barraqué auxquels j'étaislié par des rapports d'amitié. Ils ont repré-senté pour moi le premier "accroc" à cet uni-vers dialectique dans lequel j'avais vécu.

Qui êtes-vous, professeur Foucault ? 1967.

Luigi NonoYeux perçants, non imprégnés par les grosseslentilles des lunettes, qui exprimaient la vio-lence raisonnée d'arguments sainementpolémiques, la gaîté improvisée pour laréception d'une amitié immédiate, et aussisouvent, en d'autres conditions, la barrièred'une solitude causée par d'autres person-nalismes musicaux, organisateurs, inhu-mains dans leur arrogance. Une rigueur depensée, de théorie, de pratique musicale,ayant énormément contribué au développe-ment de la situation musicale française.

Écrit en français pour le programmedu concert du 9 mars 1974, Ensemble 2e2m.

Gilbert AmyLorsque Le Temps restitué de Jean Barraqué futcréé, sous ma direction, le 4 avril 1968, onétait à quelques semaines du déclenchementdes événements de mai 6 8 . Même la paisiblecité balnéaire de Royan, qui accueillait leFestival d'art contemporain, bruissait derumeurs, se peuplait de sit-in, se décorait debanderoles et autres affichages sauvages.Uceuvre de Barraqué n'eut pas à souffrir decette agitation sous-jacente : sa création fut

un grand succès ! Le Festivaln'avait pas ménagé ses effortsl'ensemble du Domaine musicalau grand complet, les Percussionsde Strasbourg, les solistes del'ORTF et la grande Helga Pi-larczyk, qui s'était illustrée au Pa-lais Garnier dans la créationfrançaise de Wozzeck.Barraqué lui-même s'amusait decette ambiance, partagé entre lasympathie et l'irritation. Les pho-tos de presse le montre souriant,presque hébété devant le succès deson oeuvre. Quant au travail derépétition, il ne fut pas facilel'écriture de Barraqué, commec'était la mode à l'époque, re-gorgeait de signes spécifiques, dechangements de mesures abrupts,d'équivalences de tempos com-pliquées. Mais c'était le lot de laplupart des oeuvres ! La difficultéprincipale résidait peut-être enceci : arriver à donner un souffle,une passion même, au curd'une écriture souvent hachée,afin de se rapprocher de l'espritde l'auteur, pour qui techniqueet inspiration formaient un seulbloc.

Octobre 2004

Michel FanoOctobre 1950. Après dix ansd'un enseignement musical pas-séiste subi au Conservatoire,j'entrais pour la première foisdans une de ces salles poussié-reuses de la Rue de Madrid oùtrônaient les bustes de Gounodet de Massenet, et dans laquelleOlivier Messiaen dispensait sonlumineux enseignement.C'était, ce jour-là Pelléas. Je m'as-seyais à la seule place libre, à côté

de Jean Barraqué ; etc'est de ce jour que na-quit une profonde ami-tié.Je lui dois la découverted'un univers culturel(tant littéraire que mu-sical) qui a totalementréorienté ma vie. Sa ri-gueur et son inflexibilité(parfois excessive !) sontrestées pour moi un mo-dèle d'existence.L'écoute de son CEuvreest toujours là pour mele rappeler.

Septembre 2004

Hugues DufourtFigure de Jean BarraquéBarraqué, qui fut l'undes premiers inventeursde la série, n'inaugurapas une autre méthodede composition musi-cale, mais se mit à par-ler une autre langue.Retournant l'idée tradi-tionnelle, il soutint quela méthode précède lapratique et que l'espritd'invention doit désor-mais prévaloir sur larègle d'usage. Barraquétire de Descartes (Règle VI)l'idée que "toutes leschoses peuvent se dispo-ser sous forme de sé-ries". C'est sa façon depenser le temps, la pro-gression temporelle,donc l'articulation dusensible. Instituant lasérie comme la catégoriefondamentale de l'écri-ture musicale, Barraquéaffirme que composerne consiste pas à énu-mérer, agréger, juxta-poser, sommer ni suivre

un parcours. La compo-sition est pour lui unacte de synthèse, unesynthèse délicate et en-chevêtrée qui s'effectueau fil et au péril dutemps. Ainsi l'intuitiondu tout n'est-elle jamaisdonnée mais conquise.La musique ne s'insinuepas aisément dans letemps et lorsqu'elle croitle faire spontanément,elle reste extérieure àelle-même. Il lui faut lamédiation de l'espace.Barraqué, qui avait desvues originales sur laphilosophie de l'histoirede la musique, rappelleavec insistance que c'estle propre de la musique

occidentale que d'avoir prisconscience de la continuité fon-damentale de l'espace qui, seule,permet l'effort totalisateur etsynoptique en quoi consistel'essentiel de la création musicale.Composer, c'est, de manièretoute réfractée et oblique, insti-tuer une totalité synthétique.La langue que parle Barraqué estcelle du sublime. Sa musiquenous apprend avec quelle diffi-culté nous unifions la multipli-cité. Elle nous fait renoncer auplaisir illusoire d'un accès directà la totalité. La musique,d'ailleurs, ne peut plus pro-mettre de plaisir insolite. Elle seferme même au sentiment esthé-tique. La musique, et avec elle, auplus haut chef, celle de Barraqué,est entrée désormais dans un

monde d'exigences sans pathos. Les formesvacillent et s'apprêtent à s'abolir. Le tempsn'est plus qu' instant critique et fracture. Pourautant, la musique de Barraqué n'ouvre passur l'abîme ni le chaos. Elle réaffirme, aussiténue qu'en soit la manière, l'autonomie del'entreprise humaine face à l'immensité quinous écrase.La geste musicale de Jean Barraqué forme unemême constellation avec la geste philoso-phique de Michel Foucault. Il ne s'agit pasde deux aspects d'une même uvre de l'es-prit mais de deux uvres de l'esprit tenduesvers les mêmes limites : déserts, interdits,stridences, illuminations. Virgile sans doute,Tacite non moins. Ces deux hommes ontrecherché une vision de l'homme délivrée dece qu'ils considéraient la présomptionhumaniste. Une autre façon de dire, sanspour autant admettre le discours religieux,que l'homme n'est pas la mesure de l'homme.

4 novembre 2004

Jean Barraqué (à gauche), Michel Fano (au fond), Michel Foucault ( à droite) et deux amies. Paris, 1956

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Page 6: ARRAQUE - festival-automne.com · Maurice Blanchot: l'auteur de ... 1973 (Ensemble Ars Nova, sous la direction de Jean-Paul Kréder) et en 1987 (En-semble 2e2m, sous la direc-tion

HERMANN BROCH (1886-1951)La Mort de VirgileCommencée en Autriche et achevée en exil,l'oeuvre magistrale de Broch, La Mort de Virgileparaît en 1945. Roman difficile d'accès,puisque ne respectant aucune loi du genrelong monologue intérieur qui raconte lesdernières heures du poète latin. L'intrigueest mince : Virgile détruira-t-il, avant demourir, le manuscrit de l'Enéide ? Broch,au moment où il compose son livre, a

reconnu les limites de l'écriture narrativetraditionnelle, en particulier son impuissanceà saisir la totalité de l'instant, la "simulta-néité" de l'expérience, soumise qu'elle est àla linéarité d'une syntaxe. Il lui préfère cequ'on appelle "l'attitude lyrique", seulesusceptible de résoudre le problème de lasimultanéité. Raison pour laquelle La Mort deVirgile obéit à une organisation rythmique :quatre parties, placées respectivement sousle signe de l'Eau, du Feu, de la Terre et del'Éther, se répondent par la variation desmêmes motifs. L'ensemble compose une mé-ditation, une interrogation sur le temps, lamort, le salut. Aucune action dramatique,aucune évolution psychologique ne faitprogresser le récit : nous suivons seulementles "épiphanies" successives du poète, "cesinstants ouverts sur l'infini" avant-coureursde la révélation ultime, saisis en larges pé-riodes d'une extension presque démesurée.Les moyens stylistiques nouveaux inventés parBroch répondent au projet ambitieux dedonner une forme littéraire à l'expérienceindividuelle de la mort. En même temps, LaMort de Virgile livre le diagnostic d'une époque :la situation historique du poète Virgile, à lafrontière entre deux cultures, prophètepaïen du christianisme, reflet le désarroi mo-ral et religieux vécu par Broch et certains écri-vains de sa génération.

In Dictionnaire des auteurs,

Éditions Robert Laffont (1990).

Outre les éditions française et alle-

mande de La Mort de Virgile, ce "commen-

taire onirique de la mort de Virgile" dé-couvert avec l'étude de Maurice Blanchot

très annotée par ses soins, figuraient dans

la bibliothèque de Barraqué les traduc-tions ultérieures des Somnambules (1956 -

1957) , des Irresponsables (1961), de la cor-

respondance (1961), de La Grandeur Inconnue

(1968) et surtout de Création littéraire et

connaissance (1966). Dans ses écrits, Jean

Barraqué en cite les articles "L'héritagemythique de la littérature" et "Le style del'âge mythique", dont la conception du"style de vieillesse" trouverait un écho,selon lui, chez Beethoven.

BIOGRAPHIES

Sylvain CambrelingNé en 1948 à Amiens, SylvainCambreling étudie au Conserva-toire de Paris. En 1971, il esttromboniste à l'Orchestre sym-phonique de Lyon et à l'Opéra deLyon ; il y devient l'adjoint dudirecteur musical de 1975 à 1981.En 1976, Pierre Boulez l'engageà l'Ensemble Intercontemporaincomme premier chef invité.Gérard Mortier le nomme en1981 directeur musical du ThéâtreRoyal de La Monnaie où, dix an-nées durant, il participe à desproductions signées Luc Bondy,Patrice Chéreau, Karl-ErnstHerrmann, Peter Mussbach etHerbert Wernicke. En 1992, ildirige à l'Opéra de Paris-BastilleSaint François d'Assise d'OlivierMessiaen, mis en scène par PeterSellars. Il dirige depuis 1985 auFestival de Salzbourg Pelléas et

Mélisande, Katia Kabanova, La Damna-

tion de Faust et Les Troyens, Cronaca del

Luogo de Luciano Berio. En 2002,il dirige Don Giovanni au Metropo-

litan Opera. SylvainCambreling dirige denombreux orchestres(Orchestres philharmo-niques de Vienne, Ber-lin et Los Angeles, Or-chestres symphoniquesde Cincinnati, Mont-réal, de la BBC, de laNDR et de la Radiobavaroise, Orchestres deCleveland et de Paris,Ensemble Modern). De1993 à 1997, SylvainCambreling a été inten-dant et directeur musi-cal de l'Opéra de Franc-fort. Il engage alors unecollaboration avec lemetteur en scène Chris-toph Marthaler. SylvainCambreling est chefinvité du KlangforumWien, chef principal del'Orchestre sympho-nique SWR, Baden-Baden / Freiburg et di-rige plusieurs opéras àl'Opéra National deParis à partir de 2004Il est lauréat du GrandPrix européen des chefsd'orchestre.

Orchestresymphonique SWR,Baden-Baden /FreiburgFondé le fer février1946, l'Orchestre sym-phonique du Südwes-tr un d fu nk , Baden-Baden / Freiburg, a pourmission principale defaire connaître au publicla musique contempo-raine, outre le répertoiretraditionnel. En attestela création de presque400 oeuvres au coursdes 57 dernières années.Quatre chefs perma-nents ont contribué à lui

donner son style HansRosbaud (1948-1962),Ernest Bour (1964-1979), Kazimierz Kord(1980-1986) et MichaelGielen (1986-1999).Ernest Ansermet,Ferenc Fricsay, NikolausHarnoncourt, les com-positeurs Igor Stra-vinsk-y, Paul Hindemith,Bruno Maderna etPierre Boulez ont été,entre autres, chefs invi-tés. Depuis 1999, SylvainCambreling, commepremier chef d'or-chestre, Michael Gielenet Hans Zender, commechefs invités perma-nents, dirigent en com-mun cette formation.Récemment, l'orchestrea participé à des pro-ductions d'opéraL'Amour de loin de KaijaSaariaho, Dos Màdchen mitden Schwefelhôlzern de Hel-mut Lachenmann auFestival de Salzbourg, età la Ruhrtriennale, Saint-François d'Assise d'OlivierMessiaen ainsi que LaDamnation de Faust deBerlioz.

Catherine Dubosc,sopranoC'est en 1979 que Ca-therine Dubosc abordele chant. Elle étudie àl'École d'art lyrique del'Opéra de Paris, puis àl'Atelier d'interprétationde l'Opéra de Lyon quil'engage pour les sai-sons 1985 et 1987. Elleconstruit son répertoireautour de Mozart et de lamusique baroque. Maisc'est dans l'interpréta-tion de la musique

française qu'elle se révèle (Dialoguesdes carmélites de Poulenc avec KentNagano, Lyon 1992). Elle parti-cipe à de nombreux festivals etenregistrements ; dans le do-maine de la musique contempo-raine, elle crée les Liturgies del'ombre de Connesson qui lui sontdédiées, enregistre avec SylvainCambreling Quatre Chants pour

franchir le seuil ainsi que L'icône para-doxale de Gérard Grisey.

Rosemary Hardy, sopranoRosemary Hardy a commencé sacarrière en Grande-Bretagneaprès des études à Londres et àBudapest. Dès ses débuts, elle tra-vaille avec Sir Roger Norrington,Sir John Eliot Gardiner, PeterPears, elle est membre du DellerConsort avec lequel elle part entournée. Dans le domaine du ré-pertoire d'aujourd'hui, RosemaryHardy se fait connaitre pour sesinterprétations des oeuvres deGyôrgy Kurtag et de GyôrgyLigeti. Ses enregistrements ob-tiennent de nombreuses récom-penses. On l'a vue dans unedizaine de villes d'Europe dansLa Belle Meunière, spectacle deChristoph Marthaler avec quielle collabore régulièrement.

Hilary Summers, contraltoNée à Newport, en Cornouaillesdu Sud, Hilary Summers a étu-dié à l'Université de Reading puisà la Royal Acamedy of Music et auNational Opera Studio. Àl'époque, elle démontre des ta-lents divers, allant de la scène decabaret à celle de l'oratorio. Savoix de contralto attire l'attentiondes compositeurs. En 1999, ellecrée le rôle de Stella dans What Next

d'Elliott Carter à Berlin. On la retrouve au-près de Peter Eôtvôs, Oliver Knussen, KentNagano. En 2002/03, elle participe à la tour-née de l'Ensemble Intercontemporain et in-terprète Le Marteau sans maître sous la directionde Pierre Boulez. Dans le domaine de la mu-sique baroque, Hilary Summers chante au-près des chefs et des ensembles les plusréputés dans ce répertoire.

Nederlands KamerkoorFondé en 1937 par Felix de Nobel, l'ensemblevocal est devenu l'un des choeurs européenspermanents les plus recherchés. Les sub-ventions du gouvernement néerlandais per-mettent à vingt-quatre solistes vocaux detravailler leur répertoire a cappella à pleintemps. Cet ensemble rejoint régulierementle Concertgebouw Orchestra, l'Orchestre duXVIIIe siècle, le Schoenberg Ensemble ou leCombattimento Consort. Au cours de la der-nière saison, le Nederlands Kamerkoor a par-ticipé à La Création de Haydn sous la directionde Philippe Herreweghe, à la création deMemories ofLake Taiping de XuShuya comman-dée par le Nieuw Ensemble, et à une créa-tion de Sofia Gubaidulina. En Europe, sousla direction de son chef permanent StephenLayton, il a participé à Laborintus de LucianoBerio, et travaille actuellement à des oeuvresde Aaron Jay Kernis, John Tavener, GerardBeljon et Edith Canat de Chizy.

Klaas StokKlaas Stok a étudié l'orgue, le clavecin et ladirection de choeur dans les conservatoiresd'Arnheim, de La Haye et de Rotterdam. Àpartir de 1993, il est répétiteur attaché auNederlands Kamerkoor puis, dès 1999, auCollegium Vocale de Gand. En 2004, il afondé, en collaboration avec le conservatoiredes Flandres, un nouveau chur qui s'estproduit avec la Philharmonie d'Anvers.Klaas Stok a reçu de nombreux prix natio-naux et internationaux. Organiste de la villede Zutphen, il joue sur le célèbre orguebaroque de l'église Saint-Walburgis.

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