350me de couverture SEBASTIEN JOCHMANS.doc)doxa.u-pec.fr/theses/th0232909.pdfdes ruptures d’une...
Transcript of 350me de couverture SEBASTIEN JOCHMANS.doc)doxa.u-pec.fr/theses/th0232909.pdfdes ruptures d’une...
-
UNIVERSITE PARIS VAL-DE-MARNE
FACULTE DE MEDECINE DE CRETEIL
******************
ANNEE 2004 N°
THESE
POUR LE DIPLOME D’ETAT
DE
DOCTEUR EN MEDECINE Discipline : Médecine Générale
________
Présentée et soutenue publiquement le
à CRETEIL (PARIS XII) ________
Par Sébastien JOCHMANS
Né le 24 Novembre 1976 à MELUN (Seine et Marne)
________
TITRE : RUPTURES CARDIAQUES ET TRAUMATISMES FERMES DU THORAX
Analyse d’un cas de rupture de l’oreillette droite, d’un cas de rupture de l’auricule droit et revue de la littérature
DIRECTEUR DE THESE : LE CONSERVATEUR DE LA Monsieur le Docteur BIBLIOTHEQUE UNIVERSITAIRE Karim Tazarourte Signature du Cachet de la bibliothèque
-
.UNIVERSITE PARIS VAL-DE-MARNE
FACULTE DE MEDECINE DE CRETEIL
******************
ANNEE 2004 N°
THESE
POUR LE DIPLOME D’ETAT
DE
DOCTEUR EN MEDECINE Discipline : Médecine Générale
________
Présentée et soutenue publiquement le
à CRETEIL (PARIS XII) ________
Par Sébastien JOCHMANS
Né le 24 Novembre 1976 à MELUN (Seine et Marne)
________
TITRE : RUPTURES CARDIAQUES ET TRAUMATISMES FERMES DU THORAX
Analyse d’un cas de rupture de l’oreillette droite, d’un cas de rupture de l’auricule droit et revue de la littérature
DIRECTEUR DE THESE : LE CONSERVATEUR DE LA Monsieur le Docteur BIBLIOTHEQUE UNIVERSITAIRE Karim Tazarourte Signature du Cachet de la bibliothèque Directeur de thèse universitaire
-
Tous mes remerciements au Docteur Karim Tazarourte qui a bien voulu être mon
Directeur de Thèse. Je le remercie aussi pour son enseignement rigoureux et sa
compréhension.
Un grand merci aux Docteurs Arnaud Delahaye, Christophe Fossay et Thierry Lherm
qui m’ont apportés des documents forts utiles ainsi que leurs expériences et leurs
connaissances et bien plus important encore leurs amitiés.
-
Je voudrais profondément remercier les médecins qui ont traversé mes études et que je
considère un peu comme mes Maîtres :
Professeur Laurent Brochard,
Professeur Christian Brun-Buisson,
Professeur Daniel Cattan,
Professeur Bertrand Godeau,
Professeur François Lemaire,
Docteur Marc Michel,
Professeur Annette Schaeffer.
-
Merci également à mes Maîtres de Stage et à ceux qui m’ont appris la Médecine.
D’une façon non exhaustive, je salue :
Docteur Thierry Badoual,
Docteur Didier Béguin,
Docteur Wahib Bendeddouche,
Docteur Patrick Bicharzon,
Docteur Nicolas Briole,
Professeur Marcel Bombard,
Professeur Jean-Claude Cachin,
Professeur Pierre Césaro,
Professeur Pierre-Denis Degos,
Professeur Jean-Charles Delchier,
Docteur Muriel Fartoukh,
Docteur Thierry Gamin,
Docteur Dominique Gizolme,
Docteur Laurent Goix,
Docteur Charlie Gozlan,
Docteur Robert Kitmacher,
Docteur Christian Legall,
Docteur François Lellouche,
Docteur Jean-Yves Le Tarnec,
Docteur Philippe Oberlin,
Docteur Bruno Pamar,
Professeur Bernard-Jean Paniel,
Docteur Jeanine Perennec,
Docteur Claude Pouges,
Docteur Lilia Soufir,
Docteur Gilles Tordjman,
Docteur Eric Vibert,
Docteur Stéphane Welschbillig,
Docteur Jean-Ralph Zahar.
-
Merci à ma famille et à mes parents qui m’ont soutenu pendant mes longues études.
Merci à mes amis qui ont été présents et qui m’ont aidés lors de mes études. Pour ne
citer que quelques uns :
Docteur Sébastien Abad,
Docteur Michaël Amzallag,
Docteur Benoît Bensaïd,
Docteur Fabrice Bienvenu,
Docteur Gonzague Bonnet-Eymard,
Docteur Edmond Bouchoucha,
Docteur Samuel Chartier,
Docteur Loïc Chimot,
Monsieur Patrice Corcos,
Docteur Maryline Deschouwer,
Docteur Arash Djavadian,
Docteur Stéphanie Gahinet-Dianteill,
Monsieur Xavier Hurtes,
Docteur Régis Lachkar,
Docteur Benjamin Langman,
Docteur Thibaud Liot,
Docteur Anne Menguy,
Docteur Bruno Michel,
Mademoiselle Dominique Monchain,
Docteur Milé Pavlovski,
Docteur Sandrine Pineau,
Mademoiselle Laure Ragonnet,
Docteur Samia Rettab,
Docteur David Sebag,
Docteur Peggy Taffin-Abad,
Docteur Sylvain Tassy,
Docteur Stéphane Vignes.
-
Et surtout un immense MERCI à Carole. Tu as réussi à nous supporter moi, mon
emploi du temps, mes sautes d’humeur, mes recherches bibliographiques en urgence, les
cartons de déménagement toujours pleins depuis 6 mois...
Je ne peux que t’en aimer d’avantage.
-
SOMMAIRE
REMERCIEMENTS………………………………………………...……………… 2
SOMMAIRE………………………………………………………………………… 7
TABLE DES ILLUSTRATIONS…………………………….……………………. 10
INTRODUCTION………………………………………………………….…..…… 12
I. CAS CLINIQUES……………………………………………………..… 14
1. DOSSIER MEDICAL N°1………………………… 14
2. DOSSIER MEDICAL N°2………………………… 23
3. EN QUOI CES DOSSIERS SONT-ILS
REMARQUABLES ?................................................ 28
II. ANATOMIE CARDIOPERICARDIQUE ET PHYSIOPATHOLOGIE DES
TRAUMATISMES FERMES DU THORAX…………………………. 30
A. RAPPELS D’ANATOMIE………………………………………….. 30
1. TRONCS ARTERIO-VEINEUX
SUPRACARDIAQUES……………………………… 30
2. PERICARDE…………………………………………. 31
3. CŒUR…………………………………………………. 33
-
B. TRAUMATISMES THORACIQUES FERMES : ASPECTS
BIOMECANIQUES ET PHYSIOPATHOLOGIQUES…………… 37
1. GENERALITES……………………………………… 38
2. CHOC DIRECT……………………………………… 39
3. DECELERATION…………………………………… 40
4. BLAST………………………………………………… 42
5. CONCLUSION……………………………………….. 45
III. RUPTURES CARDIAQUES LORS DES TRAUMATISMES FERMES DU
THORAX : EPIDEMIOLOGIE ET MECANISMES LESIONNELS… 46
A. EPIDEMIOLOGIE…………………………………………………… 46
B. PHYSIOPATHOLOGIE…………………………………………… 48
IV. ANALYSE DES PROCEDURES DIAGNOSTIQUES………………… 52
A. ORIENTATION ANAMNESIQUE ET CLINIQUE……………… 52
1. ORIENTATION……………………………………… 52
2. EPANCHEMENT PERICARDIQUE,
TAMPONNADE……………………………………… 54
3. INDICES ET SCORES DE GRAVITE……………… 56
B. EXAMENS BIOLOGIQUES SANGUINS…………………………… 64
C. ELECTROCARDIOGRAMME……………………………………… 66
-
D. RADIOGRAPHIE THORACIQUE…………………………………… 67
E. ECHOGRAPHIE TRANSTHORACIQUE, ECHOGRAPHIE
TRANSOESPHAGIENNE ET FAST………………………………… 67
F. EXAMEN TOMODENSITOMETRIQUE…………………………… 72
G. VIDEOTHORACOSCOPIE…………………………………………… 73
V. CONDUITE A TENIR THERAPEUTIQUE……………………………… 74
A. PRISE EN CHARGE PREHOSPITALIERE………………………… 75
B. PRISE EN CHARGE AUX URGENCES……………………………. 79
C. TAMPONNADE………………………………………………………. 83
D. HEMOTHORAX……………………………………………………… 85
E. PRISE EN CHARGE CHIRURGICALE…………………………… 86
CONCLUSION………………………………………………………………………… 89
BIBLIOGRAPHIE……………………………………………………………………. 92
-
TABLE DES ILLUSTRATIONS
Fig. 1. Radiographie thoracique de face, assis, réalisée aux urgences. (Collection
personnelle)…………………………………………………………………………… 15
Fig. 2. Tomodensitométrie thoracique sans injection de produit de contraste réalisée aux
urgences. (Collection personnelle)…………………………………………………… 16
Fig. 3. Electrocardiogramme réalisé aux urgences (Collection personnelle)………… 17
Fig. 4. Numération Formule sanguine et Hémostase à partir de H0 (début de prise en charge
hospitalière)…………………………………………………………………………… 18
Fig. 5. Examens biochimiques sanguins à partir de H0 (début de prise en charge
hospitalière)…………………………………………………………………………… 19
Fig. 6. Gazométrie sanguine à partir de H0 (début de prise en charge hospitalière)…. 20
Fig. 7. Radiographie pulmonaire de face, couché, réalisée à l’arrivée en réanimation.
(Collection personnelle)……………………………………………………………… 20
Fig. 8. Radiographie thoracique de face, couché, réalisée pendant la réanimation cardio-
pulmonaire. (Collection personnelle)………………………………………………… 22
Fig. 9. Tomodensitométrie thoracique avec injection de produit de contraste. (Collection
personnelle)…………………………………………………………………………… 24
Fig. 10. Electrocardiogrammes réalisés en préhospitalier et aux urgences. (Collection
personnelle)…………………………………………………………………………… 25
Fig. 11. Bilans biologiques de H0 (bilan préhospitalier) à H4……………………….. 26
Fig. 12. Troncs artério-veineux supra-cardiaques. A gauche vue antérieure. A droite vue
antéro-latérale gauche...……………………………………………………………….. 30
Fig. 13. Aorte Thoracique et ses branches proximales. Vue antérieure……………… 31
Fig. 14. Péricarde et ses ligaments suspenseurs. En haut coupe transversale. En bas vue
latérale droite…………………………………………………………………………… 32
Fig. 15. Schéma du cœur. En haut coupe longitudinale. En bas coupe axiale………… 34
Fig. 16. Système cardio-necteur. Vue latérale droite…………………………………… 36
Fig. 17. Système artériel coronaire. Face antérieure…………………………………… 36
Fig. 18. Evaluation des poids apparents (kg) de différents organes en fonction de la vitesse de
décélération (différentielle de vitesse par seconde)…………………………………… 42
-
Fig. 19. Algorithme de triage préhospitalier de l’American College of Surgeon’s Committee
on Trauma. Chicago 1989……………………………………………………………… 59
Fig. 20. Tableau descriptif des grades de l’Organ Injury Scale de l’American Association for
the Surgery of Trauma………………………………………………………………… 60
Fig. 21. Corrélation entre lactatémie et mortalité chez les patients de réanimation…… 62
Fig. 22. Corrélation entre lactatémie artérielle et mortalité chez les patients présentant une
affection hépatique sévère……………………………………………………………… 63
Fig. 23. Valeurs diagnostics comparées de la clinique, de l’échographie pulmonaire et de la
radiographie thoracique d’après Simon 2003 (70)……………………………………… 67
Fig. 24. Valeurs diagnostiques de l’échographie et de la radiographie pour les hémothorax
d’après Feliciano 1999 (24)……………………………………………………………… 68
Fig. 25. Schéma de prise en charge d’accueil d’après Senard (69)……………………… 82
Fig. 26. Schéma de prise en charge d’une hypotension d’origine cardiaque dans les suites
d’un traumatisme fermé du thorax d’après Malangoni 1994 (55)……………………… 87
-
INTRODUCTION
Les accidents sont la quatrième cause de mortalité en Europe et aux Etats-Unis, après
les maladies cardio-vasculaires, les cancers et les pathologies cérébro-vasculaires. Les
traumatismes représentent la première cause de mortalité chez les jeunes de 1 à 34 ans (la
deuxième étant le suicide), et entraînent 40% des décès chez l'enfant. Les accidents de la voie
publique sont, en Europe, le plus grand pourvoyeur de ces traumatismes et sont responsables,
en France, d'environ 9000 décès par an et de 200000 blessés nécessitant une hospitalisation
d'au moins 24 heures. Leur incidence annuelle est estimée à 363 pour 100000 habitants avec
15 décès immédiats pour 100000 habitants. Ils représentent ainsi la première cause d'années
de vie perdues pour les personnes de moins de 65 ans.
L'atteinte thoracique est retrouvée chez 33% des traumatisés, toutes causes
confondues, et chez 40 à 50% des conducteurs non ceinturés. Ils sont présents dans environ
50% des cas de décès par accident de la voie publique. Les traumatismes thoraciques
constituent la première cause de décès immédiats chez l'enfant et l'adulte jeune. Ils sont
également responsables de 25 à 50% des décès secondaires et les lésions thoraciques jouent
un rôle prépondérant dans le pronostic du traumatisé. Si 25% des traumatisés du thorax sont
graves d'emblée et menacent le pronostic vital immédiat, 25% peuvent encore s'aggraver
secondairement après une période de calme apparent. (73)
Des lésions cardiaques sont retrouvées chez un tiers des traumatisés graves du thorax.
Ces atteintes sont variées : ruptures des insertions des vaisseaux, contusions myocardiques,
infarctus du myocarde dû à une atteinte coronaire, lésions intracardiaques variées,
communications interauriculaires et interventriculaires, lésions valvulaires (19). En plus des
lésions liées au traumatisme, le cœur peut également subir des lésions indirectes, surtout liées
à un traumatisme crânien, une hémorragie ou un état de choc.(59)
-
Les ruptures cardiaques sont beaucoup moins souvent évoquées. Pourtant l’incidence
des ruptures d’une cavité cardiaque lors d’un traumatisme fermé du thorax est de 0,1 à 5%.
Elles représentent de 28 à 64% des causes de mortalité par traumatisme thoracique fermé (19).
Leur pronostic péjoratif n’est pas uniquement du à la brièveté de la survie puisqu’un quart des
victimes survivent au minimum 45 minutes. Les a priori font que ce diagnostic est trop
méconnu et trop peu évoqué, même dans la phase préopératoire des séries de cas de guérison.
(19)
Les améliorations en médecine préhospitalière, pendant le transport et aux urgences
augmentent le nombre de traumatismes thoraciques graves avec lésions cardiaques sévères
accessibles à un sauvetage dans les services d’accueil hospitaliers. Il nous est donc nécessaire
de mieux connaître ces traumatismes pour mieux les prendre en charge (46). D’autant que les
patients « vivants » présentant une rupture cardiaque diagnostiquée aux urgences des trauma
center américains ont des taux de survie compris allant de 70 à 80 % ! (67) Il y a là un enjeu
majeur.
D’après 2 cas cliniques documentés, nous discuterons de la prise en charge
diagnostique et thérapeutique des ruptures cardiaques lors des traumatismes thoraciques
fermés pouvant permettre un gain de mortalité.
L’échocardiographie aux urgences et mieux encore lors de la phase préhospitalière est
encore sous-utilisée au bénéfice principalement de la tomodensitométrie. Elle devrait pourtant
jouer un rôle majeur dans l’orientation et la prise en charge de ces traumatisés. Nous
essaierons ainsi d’établir la démarche diagnostique la plus efficiente que les connaissances
actuelles nous permettent de réaliser.
-
I. CAS CLINIQUES
1. DOSSIER MEDICAL N°1
Mr M., 26 ans, sans antécédent médical, est victime d'un accident de la voie publique
pendant la nuit. Conducteur, il tombe dans un fossé et n'est retrouvé que 8 à 10 heures plus
tard. Il arrive conscient aux urgences, après une perte de conscience immédiate de durée
impossible à estimer.
Aux urgences, après ramassage par les Pompiers en transport non médicalisé, la
tension artérielle est mesurée à 85/50 mm de mercure (mmHg) avec une fréquence cardiaque
à 125 bpm (battements par minute). La glycémie capillaire est mesurée à 1.54 g/L,
l'Hémocue® est retrouvé à 13.6 g/dL et la température s'élève à 37°C. L'examen clinique est
très pauvre, ne retrouvant qu'une douleur costale gauche. En particulier, l'abdomen est
parfaitement souple. Sur le plan cutané, ne sont notées que des dermabrasions à la tempe et à
la main gauches.
La radiographie de thorax (Fig.1) puis l’examen tomodensitométrique thoracique sans
injection de produit de contraste (Fig.2) mettent en évidence une contusion pulmonaire
gauche, un épanchement péricardique et une fracture de la 5ème côte gauche.
L'électrocardiogramme (Fig. 3) quant à lui est normal, excepté des ondes T hautes et pointues
dans les dérivations septo-apicales. Il n'y a notamment pas de microvoltage. Une échographie
trans-thoracique met en évidence un épanchement péricardique modéré (environ 1-2 cm) et
postérieur avec une cinétique du ventricule gauche correcte.
-
Fig.1. Radiographie thoracique de face, assis, réalisée aux urgences. (Collection personnelle)
-
Fig.2. Tomodensitométrie thoracique sans injection de produit de contraste réalisée aux urgences.
(Collection personnelle)
-
Fig. 3. Electrocardiogramme réalisé aux urgences.
Les examens biologiques effectués montrent une insuffisance rénale avec une natrémie
à 150 mmol/L, une kaliémie à 4.8 mmol/L, une créatininémie à 235 µmol/L pour une urée
conservée à 7 mmol/L, des CPK à 921 UI/L et une hémoglobine à 14 g/dL (Fig.4, 5, 6). Le
bilan toxicologique et l'alcoolémie sont négatifs. La tomodensitométrie cérébrale réalisée est
normale.
Devant la persistance d'une tension artérielle peu élevée (95-100 mmHg de Pression
artérielle systolique) associée à une tachycardie persistante à 125-130 bpm malgré un
remplissage vasculaire de 2000 mL, une échographie abdominale est réalisée. Celle-ci montre
un épanchement péritonéal abondant.
Le patient passe donc au bloc opératoire où il est découvert un hémopéritoine de 1.4
litre en rapport avec une plaie hépatique du segment VII. Il est réalisé une suture simple de la
plaie hépatique, un lavage péritonéal, et un drainage sous-diaphragmatique. Il n'est noté
aucune complication per-opératoire excepté un collapsus à 75mmHg de tension artérielle
systolique à l'induction de l’anesthésie générale. Le patient reste tachycarde entre 115 et 135
-
bpm malgré la perfusion de 2000mL d'Hydroxyéthylamidons et Ringer Lactate. Aucune
transfusion n'est réalisée. Une antibioprophylaxie per-opératoire est réalisée par
AUGMENTIN® 2g IV.
En post-opératoire, il est transféré dans le service de réanimation polyvalente (H+6 de
la prise en charge). A son arrivée, la pression artérielle est de 65/30 mmHg, la fréquence
cardiaque est à 130/min, la glycémie capillaire à 3.07 g/L, la saturation digitale à 100% sous
FiO2 50%. Le patient est intubé, ventilé, sédaté. L'auscultation cardio-pulmonaire ne retrouve
ni souffle audible, ni signe d'insuffisance ventriculaire droite ou gauche. On retrouve quelques
crépitants à la base gauche. L'abdomen est souple, le drain peu productif (100mL). Le patient
est oligurique.
Biologiquement:
H0 H+6 H+8
Hématies (T/l) 4.68 2.74 2.27
Hémoglobine (g/dL) 14.2 8.4 7
Hématocrite (%) 43.5 25.4 21
Leucocytes (M/L) 33100 17600 14500
Neutrophiles (M/L(%)) 29130 (88) 15490 (88) 10730 (74)
Eosinophiles (M/L(%)) 0 (0) 0 (0) 0 (0)
Basophiles (M/L(%)) 0 (0) 0 (0) 0 (0)
Lymphocytes (M/L%)) 2040 (6) 1580 (9) 2900 (20)
Monocytes (M/L(%)) 1660 (5) 530 (3) 870 (6)
Plaquettes (M/L) 252000 129000 97000
TP (%) 68 25 21
TCA Ratio 1.03 1.54 4.04
Fibrine (g/L) 1.15 0.93
Fig.4. Numération Formule sanguine et Hémostase à partir de H0 (début de prise en charge hospitalière).
-
H0 H+6 H+8
Sodium (mmol/L) 150 142 156
Potassium (mmol/L) 4.8 7.3 5.1
Chlorures (mmol/L) 108 113 110
Réserve Alcaline (mmol/L) 16.6 13.5 27.1
Protides (g/L) 74 33 24
Créatinine (µµµµmol/L) 235 201 216
Glucose (mmol/L) 8.03 15.25 20.07
Lactates (mmol/L) 8.9 15.7
Urée (mmol/L) 7 7
Magnésium (mmol/L) 0.69 0.73
Calcium (mmol/L) 1.74 2.08
Phosphore (mmol/L) 2.31 2.61
ASAT/ALAT (UI/L) 707/516
Phosphatases Alcalines (UI/L) 43
γγγγGT (UI/L) 45
CPK (UI/L) 921 397 322
Myoglobine (µµµµg/L) 3915 1109 1022
Troponine (µµµµg/L) 1.75 1.51 1.47
CRP (mg/L) 19.4
Fig.5. Examens biochimiques sanguins à partir de H0 (début de prise en charge hospitalière).
-
H+2 H+6 H+8
Mode ventilatoire Masque à haute concentration Ventilation Assistée Contrôlée Ventilation Assistée Contrôlée Paramètres ventilatoires 13 L/min FR 15 Vt 600 PEEP 0 FiO2 0.5 FR 15 Vt 600 PEEP 0 FiO2 1 pH 7.31 7.23 7.23
pCO2 (mmHg) 29.7 37.5 65.7
pO2 (mmHg) 247.4 159.1 26.4
HCO3- (mmol/L) 14.6 15.8 26.7
CO2 Total (mmol/L) 15.5 16.9 28.7
Excès de bases (mmol/L) -10.1 -11 -2.5
SaO2 (%) 99.5 98.7 37.4
Fig.6. Gazométrie sanguine à partir de H0 (début de prise en charge hospitalière). FR : fréquence
respiratoire. Vt : volume courant. PEEP : Pression positive de fin d’expiration. FiO2 : fraction inspirée en
oxygène.
Radiographie pulmonaire: cardiomégalie avec élargissement du médiastin supérieur
et opacités alvéolaires du champ pulmonaire gauche (Fig.7).
Fig.7. Radiographie pulmonaire de face, couché, réalisée à l’arrivée en réanimation.
-
ECG: tachycardie sinusale sans trouble de repolarisation
Attitude thérapeutique initiale en réanimation:
. Poursuite de la sédation et de la ventilation (Ventilation Assistée Cotrôlée
15 x 600, PEP 0, FiO2 0.5)
. Remplissage vasculaire par 2 flacons d'Albumine 20% et 1000mL de
gélatines.
. Alcalinisation par Bicarbonates 4,2% 500mL
. Mise sous Dopamine 5 γ/kg/min
L'évolution initiale est marquée par une stabilisation de l'état hémodynamique après
remplissage vasculaire et augmentation de la Dopamine à 10 µg/kg/min en dehors de la
persistance d'une tachycardie sinusale à 130/min. Sur le plan métabolique, alcalinisation
rapide en raison de l'hyperkaliémie associée à une acidose métabolique lactique.
A H+8 de la prise en charge, survenue d'un arrêt cardio-respiratoire en asystolie non
récupéré malgré:
. Adrénaline IVD 50mg au total puis relais à la seringue électrique à 5mg/h majoré par
la suite à 10mg/h
. Bicarbonates 8.4% 500mL
. Gluconate de calcium IVD 5g au total
. Massage cardiaque externe
. Chocs électriques externes (6 au total)
. Transfusion d'un culot globulaire
. Majoration de la FiO2 à 100%
Pendant la Réanimation, une Radiographie thoracique (Fig.8) et une échographie
transthoracique sont réalisées (par le réanimateur). L'échographie cardiaque montrait une
majoration de l'épanchement ne semblant cependant pas compressif.
-
Fig. 8. Radiographie thoracique de face, couché, réalisée pendant la réanimation cardio-pulmonaire.
Le patient est déclaré mort après une heure de réanimation (H+9).
Une autopsie est demandée. Celle-ci retrouve principalement :
- Région céphalique : sans particularité sous réserve d’un examen
anatomopathologique du cerveau.
- Région cervicale : sans particularité.
- Région thoracique : fracture médio-sternale transversale, fractures des 2ème, 3ème,
4ème, 5ème et 6ème côtes droites, hémothorax de 100mL, petites plaies du lobe
pulmonaire inférieur droit, hémopéricarde abondant de 400mL, désinsertion de
l’oreillette droite sur sa face postérieure au niveau de la jonction avec le ventricule
droit sur 2 cm de long.
- Abdomen et petit bassin : hémopéritoine minime de 100mL, plaie suturée de 4
cm du bord droit, présence à la coupe d’une zone de dilacération du lobe hépatique
droit sur 6 à 7 cm.
-
- Membres : sans particularité.
Conclusion : Décès dû à une plaie de l’oreillette droite responsable d’un
hémopéricarde.
2. DOSSIER MEDICAL N°2
Monsieur C., 45 ans sans antécédent ni traitement actuel, est victime d’un accident de
la voie publique vers 8 heures 30. Il était conducteur ceinturé et a heurté frontalement à forte
vitesse un véhicule à l’arrêt. Une équipe du SMUR rapidement sur place retrouve un patient
initialement obnubilé suite à un traumatisme crânien avec perte de connaissance brève.
A l’arrivée du SMUR :
Pression artérielle 110/60 mmHg
Fréquence cardiaque 130 par minute
Saturation en O2 digitale 96 % en air ambiant
Fréquence respiratoire 30 par minute
Hémocue® 15,8 g/dL
Glasgow coma Scale 14 (Y4, V4, M6)
Cliniquement, la symptomatologie neurologique régresse rapidement sans déficit.
L’auscultation pleuro-pulmonaire met en évidence une diminution nette du murmure
vésiculaire à droite. Les bruits du cœur sont réguliers et rapides sans souffle cardiaque ni
frottement péricardique audible. Les pouls périphériques sont tous présents et symétriques.
L’examen abdominal est sans particularité. Il n’existe pas de point d’appel douloureux
rachidien. On retrouve une probable fracture ouverte de la rotule droite. Le reste de l’examen
clinique est sans particularité.
Sur le terrain, deux voies veineuses périphériques sont posées. Une antalgie par
Paracetamol IV et par Morphine IV est débutée. Le genou droit est immobilisé par une attelle.
Le patient est transporté à l’hôpital du secteur.
-
Le bilan morphologique retrouve :
- fracture ouverte de la rotule droite
- tomodensitométrie cérébrale sans anomalie
- radiographies rachidiennes sans anomalie
- tomodensitométrie et échographie abdominales sans anomalie
- volumineux hémothorax droit avec une petite bulle de pneumothorax, une
contusion pulmonaire droite. On ne retrouve pas de fracture costale ou sternale. A
noter un aspect suspect au niveau du hile droit. (Fig.9)
Fig.9. Tomodensitométrie thoracique avec injection de produit de contraste.
-
L’électrocardiogramme s’inscrit en rythme sinusal rapide avec de troubles de
repolarisation initialement à type d’ondes T amples dans le secteur antéro-septo-apical avec
rabotage de l’onde R. Secondairement, négativation des ondes T avec apparition d’un courant
d’ischémie sous-endocardique dans le secteur antérolatéral (Fig.10).
Fig.10. Electrocardiogrammes réalisés en préhospitalier et aux urgences.
Le patient est drainé aux urgences. Le drainage thoracique rapporte immédiatement
500 mL de sang frais non cailloté. Le drain est alors clampé. Parallèlement, à partir de la
troisième heure de prise en charge, une hypotension artérielle à 70-80 mmHg de systolique
apparaît associée à une tachycardie sinusale à 130 bpm. Le taux d’hémoglobine passe de 15.8
g/dL à 9.2 g/dL en moins de 4 heures (Fig. 11). Devant l’absence d’amélioration malgré
-
remplissage par 2 concentrés globulaires, 1000 mL de solution macromoléculaire et 1000 mL
de sérum physiologique, le patient est mis sous Noradrénaline IVSE à 0.2 mg/h.
H0 H3 H4 Leucocytes (M/mL) 13100 24900 19900 Hématies (MM/mm3) 5.09 4.25 3.11 Hémoglobine (g/dL) 15.2 12.8 9.4 Hématocrite (%) 45.7 38.3 27.6 Plaquettes (M/mL) 390000 325000 274000 Glycémie (mmol/L) 12.68 Urée (mmol/L) 6.8 Créatinine (�mol/L) 111 Sodium (mmol/L) 138 Potassium (mmol/L) 4.3 Protides (g/L) 71 Bilirubine Totale (�mol/L) 26.1 Phosphatases Alcalines (UI/L) 55 Gamma GT (UI/L) 20 ASAT/ALAT (UI/L) 111/118 LDH (UI/L) 1068 CPK (UI/L) 427 Troponine Ic (�g/L) 1.1 Amylase (UI/L) 99 Lipase (UI/L) 99 pH 7.32 pCO2 (mmHg) 37 pO2 (mmHg) 187 HCO3- (mmol/L) 18.7 SaO2 (%) 99
Fig. 11. Bilans biologiques de H0 (bilan préhospitalier) à H4.
On obtient une relative stabilité hémodynamique avec une Pression artérielle
systolique à 100 mmHg et une fréquence cardiaque à 130 /min. Une antibioprophylaxie par
AUGMENTIN® ainsi qu’un contrôle de l’immunocompétence antitétanique sont par ailleurs
réalisés.
Le patient est alors transféré dans le service de chirurgie cardio-thoracique du Centre
Hospitalier Marie Lannelongue pour la prise en charge chirurgicale de l’hémothorax massif.
Une exploration y est effectuée par thoracotomie droite permettant de retrouver :
- 1500 mL de sang frais non coagulé
- rupture péricardique sur environ 10 cm de hauteur
- rupture de l’auricule droit au niveau de sa base sur 4 cm
-
Un contrôle très rapide du saignement par un clamp de type Statinski est effectué.
L’auricule est ensuite suturé simplement. Le péricarde est rapproché par trois points séparés
permettant un drainage dans la grande cavité pleurale.
Après réparation, on retrouve une hémodynamique stable permettant un sevrage
complet de la noradrénaline qui avait du être majorée à 0.5 mg/h pour le geste chirurgical.
Le patient est ensuite transféré à l’hôpital du Kremlin Bicêtre pour la poursuite de la
prise en charge.
Devant le rétablissement de la stabilité hémodynamique, l’ostéosynthèse de la fracture
de rotule droite est effectuée par deux broches.
Sur le plan ventilatoire, l’évolution est satisfaisante avec une extubation le 4ème jour et
le clampage du drain thoracique droit le 5ème jour.
Sur le plan hémodynamique, on retrouve une tachycardie sinusale à 130 bpm.
L’échographie cardiaque trans-thoracique met en évidence un épanchement péricardique en
apical, latéral et en inférieur sans retentissement sur le remplissage des cavités cardiaques et
sans argument pour une tamponnade.
Progressivement apparaît une insuffisance cardiaque droite associée à une ascension
du taux de troponine conduisant à réaliser une coronarographie le 7ème jour. Celle-ci retrouve
une lésion coronaire droite en amont de la naissance de d’artère interventriculaire postérieure
avec un probable infarctus ventriculaire droit au dessous du plancher des valves tricuspides
mis sur le compte de la suture. L’examen angiographique se complique d’un passage en bloc
auriculo-ventriculaire de 3ème degré nécessitant la mise en place d’une sonde d’entraînement
électrosystolique.
Le patient est retransféré au Centre Hospitalier Marie Lannelongue où son état évolue
progressivement vers une amélioration clinique. Le patient ressort quelques semaines plus
tard sans séquelle majeure cardiaque.
-
3. EN QUOI CES DOSSIERS SONT-ILS REMARQUABLES ?
Tout d’abord le fait d’avoir rencontré ces deux cas dans notre courte expérience de
médecine d’urgence pourrait amener à supposer que ce type de pathologie n’est pas
exceptionnel mais surtout que l’on peut y survivre assez longtemps pour qu’une prise en
charge hospitalière chirurgicale soit possible. Bien évidemment un tel raisonnement n’a aucun
fondement scientifique.
Ce qui semble plus intéressant de noter c’est que dans les deux cas le diagnostic n’a, à
aucun moment, été évoqué. Même dans le premier dossier médical où pourtant une
échographie et une tomodensitométrie avaient retrouvé un épanchement péricardique. De
plus, le patient, à l’occasion de la laparotomie, n’a pas pour autant bénéficié d’une exploration
du péricarde, pourtant techniquement aisée une fois l’abord abdominal réalisé.
Ce dossier est à rapprocher de celui de Williams (78) dont le patient était mort d’une
tamponnade à la 12ème heure de prise en charge d’un accident de la voie publique, après avoir
bénéficié d’une laparotomie revenue « blanche ».
De fait, si la prise en charge est rationnelle dans le 2ème cas clinique, plusieurs écueils
dans le premier permettent d’expliquer le décès du patient : on note une absence de prise en
charge préhospitalière médicalisée, l’absence d’exploration cardiopéricardique chirurgicale
devant un épanchement post-traumatique et l’absence de remise en question d’un diagnostic
étiologique, malgré la persistance d’un état hémodynamique médiocre après une prise en
charge adaptée au diagnostic suspecté.
Il faut remarquer par ailleurs que l’électrocardiogramme ne montrait absolument
aucune anomalie spécifique. Le taux de troponine n’était que faiblement augmenté. La
radiographie thoracique n’était pas franchement évocatrice à l’arrivée aux urgences.
Notons enfin que dans le 2ème dossier la nécrose du ventricule droit était probablement
due soit à une contusion étendue non vue, soit à une lésion de la coronaire droite lors de la
suture due à la localisation de la plaie. En tout état de cause, le geste chirurgical de sauvetage
s’avérait être techniquement simple et ne nécessita pas de circulation extracorporelle.
-
En conclusion, on peut évoquer comme pistes de réflexion, à l’occasion de ces
dossiers :
- les ruptures cardiaques sont probablement plus fréquentes qu’on le suppose
- le temps de survie peut parfois permettre une chirurgie salvatrice
- le diagnostic est rarement évoqué en préopératoire
- l’existence d’un épanchement péricardique post-traumatique devrait conduire à
son exploration chirurgicale (diagnostic rapide par échographie)
- l’électrocardiogramme ne semble pas spécifique
- la tomodensitométrie n’apporterait pas plus d’éléments que l’échocardiographie
Nous verrons ensuite quelles réponses la littérature médicale peut nous apporter dans
la prise en charge de ce type de pathologie.
-
II. ANATOMIE CARDIO-PERICARDIQUE ET PHYSIOPATHOLOGIE DES
TRAUMATISMES FERMES DU THORAX
A. RAPPELS D’ANATOMIE
1. TRONCS ARTERIO-VEINEUX SUPRA-CARDIAQUES
Ils comprennent la veine cave supérieure provenant de l’union des troncs brachio-
céphaliques droit et gauche. Elle se jette dans l’oreillette droite. Du ventricule droit part le
tronc de l’artère pulmonaire se divisant rapidement en artères pulmonaires droite et gauche.
Le sang oxygéné provenant des poumons revient dans le cœur par les quatre artères
pulmonaires se jetant dans l’oreillette gauche. Le sang quitte finalement le cœur par l’aorte
ascendante. Au niveau de la crosse aortique naissent le tronc brachiocéphalique droit, l’artère
thyroïdienne, la carotide commune gauche et l’artère sous-clavière gauche. L’aorte se poursuit
par une portion descendante qui passe derrière l’oreillette gauche.
Fig.12. Troncs artério-veineux supra-cardiaques. A gauche vue antérieure. A droite vue antéro-latérale
gauche. OD : oreillette droite. VD : ventricule droit. VG : ventricule gauche.
-
Fig.13. Aorte Thoracique et ses branches proximales. Vue antérieure. T : vertèbre thoracique. d : droit. g :
gauche.
2. PERICARDE
Le cœur est constitué de trois tuniques : le péricarde, qui est une sorte de sac
enveloppant la totalité du cœur, le myocarde, principale tunique cardiaque, et l’endocarde,
tunique la plus interne, directement en contact avec le sang. Le péricarde est formé de deux
structures de nature différente : le péricarde séreux, vers l’intérieur, et le péricarde fibreux
vers l’extérieur. Le péricarde séreux comprend lui-même deux feuillets accolés : le plus
profond adhère au myocarde, le plus superficiel est séparé du précédent par une cavité
virtuelle et adhère au péricarde fibreux. Il protège et facilite les mouvements rythmiques de
contraction et de relaxation du cœur.
-
Le péricarde enveloppe ainsi hermétiquement le cœur. L’ensemble est mobile dans la
cage thoracique, relié aux parois par des ligaments suspenseurs plus ou moins solides et épais
(Fig.12).
Fig.14. Péricarde et ses ligaments suspenseurs. En haut coupe transversale. En bas vue latérale droite.
VD : ventricule droit. VG : ventricule gauche.
-
3. CŒUR (16)
Le cœur est assimilable à une pyramide triangulaire couchée sur le côté. La base est en
arrière avec un grand axe passant par le sommet (apex), oblique en bas, en avant et à gauche.
Il occupe la partie inférieure du médiastin antérieur et se projette sur les vertèbres D6 à D8
selon la respiration. On note deux oreillettes (droite et gauche) et deux ventricules (droit et
gauche). Les limites entre oreillettes et ventricules sont marquées à la surface du cœur par des
sillons : les sillons inter-atriaux, interventriculaires et atrioventriculaires.
L’oreillette droite (atrium droit) reçoit en haut la veine cave supérieure par un orifice
avalvulaire et en bas la veine cave inférieure par un orifice partiellement recouvert d’un repli
falciforme, la valvule d’Eustachi. Au niveau de la cloison inter-atriale, on trouve la fosse
ovale, vestige du canal atrial fœtal. A la jonction entre paroi septale et paroi inférieure se
trouve l’orifice du sinus veineux coronaire partiellement limité par un repli en croissant
(valvule de Thébésius).
La cavité du ventricule droit est couverte de colonnes musculaires charnues formées
de replis myocardiques et des muscles papillaires (piliers). Le septum interventriculaire est en
grande partie musculaire sauf à son origine en haut près des oreillettes où il est fibreux. C’est
à ce niveau que s’insèrent la grande valve mitrale et la valve septale tricuspide. Au dessus de
la cavité ventriculaire s’ouvre le cône artériel d’éjection vers le tronc pulmonaire. La frontière
entre ces 2 zones est réalisée par la crête supraventriculaire ou éperon de Wolff.
-
Fig.15. Schéma du cœur. En haut coupe longitudinale. En bas coupe axiale. A/V : atrio-ventriculaire. OD :
oreillette droite. VG : ventricule gauche.
L’oreillette gauche est la cavité la plus postérieure du cœur. Elle reçoit les 4 veines
pulmonaires à ses extrémités droites et gauches. Le repli semi-lunaire y est le vestige gauche
du canal atrial fœtal.
-
La paroi musculaire du ventricule gauche est beaucoup plus épaisse que celle du
ventricule droit. L’apex du cœur est entièrement compris dans la paroi ventriculaire gauche.
Les quatre valves cardiaques sont fixées sur le squelette fibreux du cœur, tissu
conjonctif dense séparant la musculature des oreillettes de celle des ventricules. Ce squelette
forme deux anneaux fibreux reliés à l’adventice de l’aorte et du tronc pulmonaire. Les deux
valves artérielles (tricuspide et aortique) sont chacune constituées de trois valvules semi-
lunaires. Lors de la contraction ventriculaire (systole), les valvules s’écartent pour laisser
passer le flux sanguin puis, quand la pression de l’artère devient supérieure à celle du
ventricule (diastole), les valvules se redéploient. C’est au dessus des valvules aortiques droite
et gauche que naissent les artères coronaires, dans les sinus de Valsalva. Ainsi les deux artères
coronaires se remplissent quand les valvules sont déployées (donc en diastole).
Les valves atrioventriculaires sont des replis de l’endocarde reliés aux muscles
papillaires de la cavité ventriculaire par des cordages tendineux qui amarrent la valve et
l’empêchent de faire irruption dans l’oreillette. La valve tricuspide, mesurant entre 35 et 38
mm de diamètre est l’ostium atrioventriculaire droit. Elle comporte trois valves (ou cuspides).
La valve mitrale à gauche mesure de 30 à 35 mm de diamètre. Elle ne comporte qu’une
grande valve insérée sur le septum en avant et une petite postérieure. Celles-ci sont amarrées à
des muscles papillaires plus puissants que ceux du ventricule droit et comportant plusieurs
racines.
Le système cardionecteur responsable de l’automatisme cardiaque débute au nœud
sinusal (ou sino-atrial) de Keith et Flack, situé sur la paroi antérieure de l’oreillette droite,
entre l’abouchement de la veine cave inférieure et le bord supérieur de l’auricule droit.
Ensuite, l’excitation traverse l’oreillette et rejoint le nœud atrioventriculaire d’Aschoff-
Tawara situé à la partie basse de la cloison inter-atriale, juste au dessus de l’orifice du sinus
veineux coronaire et en arrière de l’insertion de la cuspide septale. Il se prolonge par le tronc
du faisceau de His traversant le septum interventriculaire où il se divise en deux branches : la
branche droite gagne la cloison septo-marginale vers le muscle papillaire antérieur du
ventricule droit, la branche gauche se ramifie en éventail à la base des muscles papillaires du
ventricule gauche. Le faisceau de His s’éteint vers l’apex en constituant les fibres de Purkinje.
La fréquence du nœud sinusal est de 70/min et celle du nœud atrioventriculaire de 40/min.
-
Fig.16. Système cardio-necteur. Vue latérale droite. VCS/I : veine cave supérieure/ inférieure.
Fig.17. Système artériel coronaire. Face antérieure. R : rameau. VD : ventricule droit. VG : ventricule
gauche.
-
B. TRAUMATISMES THORACIQUES FERMES : ASPECTS
BIOMECANIQUES ET PHYSIOPATHOLOGIQUES
La compréhension des mécanismes à l'origine des différentes lésions traumatiques du
thorax doit permettre d'améliorer les prises en charge tant diagnostique que thérapeutique des
traumatisés graves. Ainsi elle doit surtout guider le clinicien dans l'évaluation des lésions et
dans l'anticipation des complications éventuelles. Elle doit enfin contribuer à la prise en
compte de mesures de prévention.
En France, le taux de mortalité total des décès par traumatisme est d’environ
46/100000 habitants. Toutes les études mettent en évidence une prépondérance masculine
(70-75%). (74)
Il est à noter que les lésions secondaires aux accidents de la voie publique ont changé :
le choc direct grâce à la ceinture est maintenant remplacé par la décélération (11).
En 1998, le taux de mortalité par accident de la voie publique en France était de
14.3/100000 habitants (l’un des plus élevé d’Europe). Le taux global des victimes est de
300/100000. 696/100000 de 15 à 24 ans, 133/100000 pour les moins de15 ans et 165/100000
pour les plus de 65 ans. On note d’ailleurs une disparité selon les véhicules concernés :
- 4006 blessés et 210 décès pour 1 million de véhicules de tourisme.
- 4036 blessés et 381 décès pour 1 million de voiturettes
- 12477 blessés et 254 décès pour 1 million de cyclomoteurs
- 18181 blessés et 869 décès pour 1 million de motocyclettes (74)
-
1. GENERALITES (11,12,17,73)
La particularité des traumatismes thoraciques fermés repose sur la difficulté
diagnostique et pronostique. En effet, il est facile de diagnostiquer un volet thoracique, un
pneumothorax ou un hémothorax; ces lésions n'engagent que rarement le pronostic vital
immédiat. Leur traitement est aisé, rapide le plus souvent, et bien codifié. Mais il est
beaucoup plus difficile de faire un diagnostic précoce de contusion pulmonaire ou cardiaque
dont le diagnostic suspecté sur l'évolution et les examens complémentaires ne pourrait être
affirmé que par l'histologie. De même les lésions vasculaires sont souvent latentes et peuvent
se décompenser brutalement.
Parmi les traumatismes fermés, trois mécanismes lésionnels sont en cause seuls ou
associés:
- La compression ou l'écrasement est à l'origine des fractures (côtes, sternum),
des contusions pulmonaires, des atteintes cardiaques ou aortiques (aorte thoracique
descendante distale).
- La décélération est responsable de déchirures ou de sections de l'aorte
thoracique, ainsi que de contusions pulmonaires.
- Le blast (onde de choc) entraîne un phénomène d'éclatement lorsqu'il
rencontre un changement de densité du milieu. Les lésions rencontrées sont alors
essentiellement pulmonaires.
Il est très difficile d'établir des chiffres globalement représentatifs de la répartition
épidémiologique des traumatismes fermés du thorax. En effet, ceux-ci sont très dépendants
des conditions socio-économiques et géographiques des différentes études. Ainsi, si
l'immense majorité des traumas de décélération se partagent entre accidents de la circulation
et chutes d'un lieu élevé, la proportion de chaque étiologie est extrêmement variable. On
comprend parfaitement que la probabilité d'être victime d'un accident de la route en France
soit supérieure à celle que l'on pourrait estimer dans un pays du tiers monde. De même entre
les villes d'un même pays voire d'un même département.
-
Il ressort cependant qu’en France, si le traumatisme fermé reste le cas le plus fréquent,
sa cause a évolué ces dernières années. Les lésions dues aux accidents de la voie publique se
sont modifiées avec l’apparition de mesures de protection : le choc direct grâce à la ceinture
de sécurité est maintenant remplacé par la décélération dont les conséquences sont plus
insidieuses. Par contre, les accidents de sport (équitation, alpinisme, deltaplane…) et de loisirs
violents ou risqués (chutes d’escalier, échelle, toit, arbres…) entrant dans le cadre du
syndrome du « tarzan du dimanche » laissent présager une recrudescence importante des
blessés thoraciques classiques. Malheureusement, beaucoup de ces blessés sont des
polytraumatisés (deux fois sur trois) pour lesquels il est clair que les conséquences des
lésions ne s’additionnent pas mais se multiplient.
2. CHOC DIRECT (32,36,73)
Ils représentent 20 % des traumatismes cardiaques (contusion myocardique, lésions
valvulaires, hémo/pneumopéricarde, commotio cordis, rupture pariétales…).
Lors d'une incarcération ou d'un ensevelissement (éboulement, séisme), l'écrasement
peut être à l'origine d'un traumatisme thoracique. Les lésions s'observent en regard du point
d'impact. De nombreux facteurs sont en jeu : la force appliquée lors de l’impact, sa vitesse,
l’importance de la décélération, la durée et direction de l’impact, la zone d’application de la
force… Ce qui fait surtout la gravité du traumatisme est l'énergie cinétique de l'agent
vulnérant et le siège de son application. Principalement responsable de lésions pariétales, il
génère aussi des atteintes des organes sous-jacents.
La transmission de l’onde de choc est plus importante sur le thorax souple et
déformable du sujet jeune que chez le patient d’âge mûr dont les fractures de la cage
thoracique absorbent une partie de l’énergie cinétique. Cette absorption variable de l'énergie
cinétique explique les lésions différentes selon l'âge: le volet thoracique est plus fréquent chez
le sujet âgé au thorax rigide; une contusion pulmonaire ou une rupture diaphragmatique
s'observera plus volontiers chez le sujet jeune au thorax souple; une torsion pulmonaire chez
le jeune enfant.
Il existe également des traumatismes thoraciques non pénétrants iatrogènes dont le
principal est le massage cardiaque externe sur lequel nous reviendrons.
-
3. DECELERATION (32,36,37,54,73,79)
La plupart des traumatismes à thorax fermé procèdent de ce type de mécanisme lié au
choc entre deux mobiles en mouvement ou bien entre un mobile en mouvement et un obstacle
fixe. L'impact est responsable d'un phénomène de compression directe associée à une
décélération, qu'il s'agisse d'un mouvement de translation horizontal (accident de circulation)
ou vertical (chute d'un lieu élevé). Les caractéristiques de la force appliquée à la zone
d'impact ou celles de l'énergie cinétique transférée expliquent la sévérité des lésions. Cette
force est d'autant plus grande que l'accélération est élevée et donc que les lésions sont sévères.
De plus, lors d'un choc, l'énergie cinétique ( ½ mv2 ) transférée à l'obstacle par le corps
brutalement arrêté est restituée par l'obstacle à l'organisme.
Le corps arrêté brutalement par un obstacle est soumis à une décélération qui génère
une force gravitationnelle négative dépendant de la vitesse initiale et de la durée de la
décélération.
���� = ( 0.05 x v2 ) / t
Ainsi, une variation de vitesse inférieure à 20 km/h produit généralement peu de
lésions. Au dessus de 35 km/h les lésions sont de gravité moyenne et au delà de 50 km/h, le
risque de lésions sévères est important. Il est à noter que les seuils de tolérance envers ces
variations de force diffèrent selon l'axe du corps sur lequel elles sont appliquées: on estime
que la tolérance est maximale pour une décélération exercée d'avant en arrière (80 �),
intermédiaire d'arrière en avant (40 �), faible dans un axe vertical (20 �) et minimale pour
une décélération latérale (10 �).
Lors d'une chute, l'énergie potentielle de pesanteur est convertie en énergie cinétique
sous l'influence de la gravité (avec de nombreux facteurs de correction comme la résistance de
l'air, la vitesse du vent, la surface de prise d'air...). La sévérité des lésions est donc directement
influencée par la vitesse à l'impact, reflet de l'accélération gravitationnelle. Les
caractéristiques physiques de la zone de réception qui peut être un sol dur ou une surface plus
ou moins déformable, influent beaucoup sur l'étendue des traumatismes. L'existence d'un plan
-
de réception déformable allonge le temps pendant lequel la force est appliquée à la zone de
contact, d'où une libération d'énergie cinétique plus lente et par conséquent une décélération
moindre.
FORCE de réaction du sol sur le corps = masse du corps x accélération
Ainsi la chute d'une hauteur d'un étage sur une surface dure (béton) génère une
décélération de 720 � alors qu'une chute d'une hauteur de 3 étages sur une surface souple
(boue) se traduit par une décélération de 67 �.
La transmission des forces de décélération et la sévérité des lésions sont influencées
par la surface de contact du corps (position du corps lors du choc) et par les propriétés visco-
élastiques des organes qui subissent le choc (viscères pleins ou creux, os, muscles, "ressort"
articulaire...).
Il est à noter que, dans les chocs à très haute vélocité, les pics de pression observés se
rapprochent des pressions mesurées expliquant ainsi la production de lésions évocatrices de
blast pulmonaire (pneumothorax, rupture diaphragmatique...).
Le mécanisme de décélération est la plupart du temps ajouté à un mécanisme de
compression directe où l'énergie cinétique libérée lors du choc est en partie transférée à
l'organisme au niveau de la zone d'impact. Cela dépend ensuite des capacités de déformabilité
et donc d'élasticité propres à chaque organe, les tissus visco-élastiques (muscles par exemple)
pouvant absorber une quantité d'énergie important sans se rompre à l'instar des tissus rigides
(os).
Cette notion d'inégalité de tolérance des différents organes pour une même force
exercée est importante à retenir. Elle explique l'absence de parallélisme entre l'importance des
lésions pariétales et celles des lésions intrathoraciques.
Lors de l'arrêt brutal du corps, chaque organe poursuit son mouvement de translation à
la vitesse initiale. Ces mouvements d'organes intrathoraciques peuvent être abordés plus
simplement en utilisant la notion dite de poids apparent.
-
Poids apparent = Poids réel de l'organe x nombre de ���� de décélération
ORGANES 0 km/h (1 ����) 36 km/h (10 ����) 72 km/h (40��������) 108 km/h (90 ����)
Cerveau 1,5 15 60 135
Cœur 0,35 3,5 14 31,5
Rate 0,25 2,5 10 22,5
Foie 1,8 18 72 162
Corps entier 70 700 2800 6300
Fig. 18. Evaluation des poids apparents (kg) de différents organes en fonction de la vitesse de décélération
(différentielle de vitesse par seconde).
Ainsi, les organes intrathoraciques ayant des densités, des volumes et des poids
apparents différents, sont soumis à des déplacements dont l'importance et la vitesse varient.
Des phénomènes de tiraillement, de cisaillement ou d'écrasement sont constatés au niveau des
zones de jonction entre les structures de densité différentes. Cette biomécanique interne
devient encore plus complexe lorsque l'on prend en compte les "attaches" fibreuses et/ou
viscoélastiques des différents organes ce qui modifie leurs déplacements propres, d'autant que
ces mouvements modifiés se répercutent sur d'autres organes. C'est le cas du coeur
principalement qui est relié à la paroi thoracique par plusieurs ligaments suspenseurs plus ou
moins permissifs pour certains mouvements dans l'espace, mouvement se répercutant sur les
système des gros vaisseaux supra-cardiaques, eux mêmes fixés à des organes de mobilité
différente et dont les déplacement propres se répercuteront sur le coeur...
4. BLAST (11,36,73)
Le blast ou effet de souffle est « l’ensemble des conséquences sur l’organisme des
changements brutaux de la pression atmosphérique déterminés par une explosion » (Hill
1989). Elles désignent donc des lésions liées à la transmission dans l’organisme des ondes de
surpression et de température créées par une explosion violente. Lors d’une explosion dans
l’air, la vague de pression a une forme radiante depuis la source et perd en intensité quand on
s’en écarte. Elle est suivie par une onde de dépression qui peut également induire des lésions.
-
Les lésions observées sont rarement « pures ». Il s’y associe en effet des lésions dues à la
projection de particules éjectées lors de l’explosion, à de brûlures, à l’inhalation de gaz
chauds, fumées ou débris, à la chute lorsque la victime a été soufflée par l’explosion.
Les lésions dites primaires sont liées à la transmission des ondes de surpression créées
par une explosion violente. On retrouve deux types d’onde :
- L’onde de pression statique (onde de Friedlander) traduite par une augmentation
très brutale de la pression ambiante sans déplacement gazeux
- L’onde de pression dynamique avec déplacement gazeux.
On note une augmentation de la pression presque instantanée suivie d’une
décroissance exponentielle puis une onde de pression négative de moindre amplitude et
rapidement amortie. En milieu aérien, l’onde de choc à proximité de sa source se déplace à
vitesse supersonique (365 m/s) mais son amortissement est rapide et proportionnel au cube de
la distance. En milieu liquide, non seulement la surpression est plus importante mais la vitesse
de propagation est plus grande (1500 m/s).
Dans un espace plus ou moins clos, l’onde de choc sera réverbérée par les parois et les
obstacles. Dans ces cas l’onde est amplifiée plusieurs fois et il y a plusieurs pics de pression
successifs. L’onde de choc est donc le plus souvent complexe et comporte une série d’ondes
successives qui se surimposent à une montée plus lente de pression.
Les facteurs lésionnels sont : la puissance de l’engin explosif, la survenue dans un
milieu ouvert ou fermé et la position du sujet par rapport à l’épicentre de l’explosion. Le
pouvoir lésionnel dépend de la valeur du pic d’hyperpression et de sa durée. Plus le temps de
montée en pression est bref plus l’onde est nocive.
L’angle d’incidence (position du sujet) joue un rôle essentiel. Lorsqu’une onde heurte
la surface de l’organisme, une partie est réfléchie mais la fraction la plus importante est
absorbée et se propage dans l’organisme comme une onde de pression. On observe une mise
en mouvement brusque de la paroi thoracique et des organes intrathoraciques. Soumis à une
onde, le thorax a un comportement viscoélastique amorti.
-
La paroi subit un déplacement de haute vélocité et celui-ci est transmis aux organes
intra-thoraciques. De plus lorsque l’onde de surpression est de durée élevée, elle peut
présenter des oscillations et les organes peuvent entrer en résonance, susceptible d’entraîner
ou d’aggraver les lésions. Les différents organes en raison de densités différentes sont soumis
à des accélérations variables entraînant lors de la décélération des lésions par collision,
cisaillement et arrachement.
L’implosion est le deuxième mécanisme impliqué. Lors du passage de l’onde positive,
les variations de pression induisent des variations de volume des cavités gazeuses (diminution
puis brusque expansion pouvant entraîner les ruptures des parois de l’organe).
La pulvérisation ou fragmentation de l’onde (spalling) est un phénomène survenant au
niveau de l’interface de tissus de densité différentes. Lorsque l’onde de choc atteint une
interface organe plein/organe creux, la différence de vitesse entre les deux tissus crée des
turbulences, d’où des lésions par cavitation ou par éclatement.
Si les lésions primaires sont dues au passage de l’onde de choc dans l’organisme, les
lésions secondaires sont dues à des projectiles contenus dans l’engin explosif ou à des objets
environnants mis en mouvement et qui viennent heurter la victime. Enfin, les lésions
tertiaires sont secondaires au déplacement du sujet par le souffle et sa projection sur un
obstacle ainsi qu’aux lésions thermiques.
Au niveau de l’oreille, la rupture du tympan témoigne que l’organisme a été soumis à
un blast. A l’inverse, il est possible d’observer des lésions pulmonaires sans rupture
tympanique. C’est au niveau thoracique que l’on retrouve les lésions les plus sévères avec des
lésions pulmonaires à type de rupture alvéolaire avec hémorragies intra-alvéolaires, des
ruptures péribronchiques et périvasculaires avec œdème interstitiel. De graves embolies
gazeuses peuvent exister, elles sont dues à des fistules entre les voies aériennes et les veines
pulmonaires.
-
5. CONCLUSION
Ainsi il faut donc devant un traumatisme fermé du thorax garder à l'esprit trois notions
fondamentales:
. IL N'Y A AUCUN PARALLELISME ENTRE L'IMPORTANCE DES
LESIONS PARIETALES ET CELLES DES LESIONS INTRATHORACIQUES.
. TOUT TRAUMATISME PEUT, APRES UNE PERIODE PLUS OU
MOINS LONGUE DE BONNE TOLERANCE, SE DECOMPENSER
BRUTALEMENT.
. UNE TARE PREALABLE, SURTOUT RESPIRATOIRE, AGGRAVE
CONSIDERABLEMENT LE PRONOSTIC.
C'est dire l'importance de la surveillance de ces blessés. Un traumatisme fermé du
thorax doit être considéré comme un malade en danger jusqu'à preuve du contraire et donc
nécessite une surveillance en réanimation. Et ce d'autant plus que les traumatismes
apparaissent bénins alors que les mécanismes d'apparition font évoquer des lésions sévères
potentielles. Il va donc sans dire que l'interrogatoire qui apprécie le terrain et la cinétique de
l'accident permet de moduler la conduite à tenir.
-
III. RUPTURES CARDIAQUES LORS DES TRAUMATISMES FERMES DU
THORAX : MECANISMES LESIONNELS ET EPIDEMIOLOGIE
A. EPIDEMIOLOGIE
Les données épidémiologiques sont paradoxalement nombreuses. Cependant elles
divergent beaucoup entre elles rendant leur analyse difficile. Il est en effet impossible de
comparer des statistiques avec d’aussi importants biais de sélection. Les systèmes de prise en
charge évoluent en une trentaine d’années ; les systèmes de soins français, anglo-saxons,
japonais sont différents ; la mortalité tous traumatisés confondus est différente de celle dans
les services hospitaliers ; il arrive plus de cas arrivant vivants mais moribonds dans les
hôpitaux français que dans les hôpitaux américains car ils ne disposent pas de réanimation
préhospitalière….
Le premier cas de rupture cardiaque dans les suites d’un traumatisme thoracique fermé
a été décrit par Bérard en 1826. Le patient était mort de tamponnade 2 heures 30 après une
chute d’une fenêtre.
Il est à noter que le 1er drainage péricardique pour tamponnade a été réalisé par
l’ancien chirurgien de Napoléon, Larrey, en 1829. La première réparation avec succès d’une
rupture cardiaque dans les suites d’un traumatisme fermé du thorax date de 1955. Elle a été
réalisée par Desforges chez un patient souffrant d’une plaie de la jonction oreillette droite-
veine cave supérieure dans les suites d’un accident de la route.
Aux États-unis, on compte 900 000 traumatismes mortels pour 2 000 000 de blessés
par accident de la voie publique. Les traumatismes thoraciques mortels représentent 56,4 %
des morts (7). En 1989, les victimes décédées dans les suites d’un accident de la route
présentaient dans 68 % des cas des lésions thoraciques (67 % de lésions abdominales, 61 % de
lésions crâniennes) (77). La mortalité par traumatisme thoracique est évaluée en moyenne à
33 % soit 25 % de mortalité immédiate et 25 % de comortalité.(27,29,75)
La mortalité des ruptures cardiaques varie en fait de 15 à 85 %, dépendant entre autre
du taux de mortalité élevé sur le site et pendant le transport. La comparaison de la mortalité
dans différentes séries est difficile du fait de la sélection des patients, du type de mécanisme,
de la cavité touchée et de l’efficacité du système de transport. Ainsi les patients qui meurent
-
sur la scène ou pendant le transport peuvent être sauvés par des soins médicaux
préhospitaliers et un transport rapide. Les taux de survie aux USA supérieurs aux taux de
survie en France sont en grande partie dus au biais de sélection des patients : certes ils
meurent plus dans les hôpitaux français, cependant aux USA, du fait de l’absence de
réanimation médicale préhospitalière, on retrouve 32 % de décès sur place et 57 % de décès
pendant le transport. Seuls 11 % arrivent vivants à l’hôpital ! (43) Il a été démontré que la
survie était augmentée s’il y avait une prise en charge préhospitalière médicalisée tout
simplement par une augmentation des patients arrivés vivants dans les services hospitaliers
(20).
Les ruptures cardiaques seraient à l’origine de 4 % des décès par accidents de la voie
publique en 1945 aux États-unis (62) et de 15 % en 1986 (29). Les chutes, quant à elles, ont
une mortalité de 26.5 %. Parmi elles, un traumatisme thoracique est retrouvé dans 17 à 65 %
des morts (54).
Les chiffres de mortalité les plus consensuels retrouvent :
- Une médiane de mortalité à 85 % (20,56)
- Près de 100 % de mortalité en cas de survenue d’un arrêt cardio-respiratoire ou en
cas d’atteinte de deux chambres cardiaques (20,56)
- Une survie lors des atteintes de l’oreillette droite supérieure aux atteintes du
ventricule droit (50). Les atteintes du ventricule gauche sont de plus mauvais
pronostic. Ainsi les régimes de pression bas du cœur droit vont avec des taux de
mortalité plus faibles (41,43). Les morts par atteinte du ventricule gauche sont bien
plus élevées du fait des pressions artérielles intracavitaires systoliques conduisant
à une exsanguination ou une tamponnade rapides. (43)
- Il s’agirait de la première ou de la deuxième cause de mortalité au décours d’un
traumatisme thoracique (19)
- On retrouve des survies dépassant les 50 % en cas d’atteinte isolée de l’oreillette
droite ou si l’on exclue du calcul les patients présentant un arrêt cardio-respiratoire
avant l’arrivée aux urgences (26,40,44)
- Enfin, les ruptures cardiaques diagnostiqués vivants aux urgences des trauma
center américains ont des taux de survie compris entre 70 à 80 % ! (24)
-
L’incidence des ruptures cardiaques dans les traumatismes du thorax vivants ou
décédés est relativement constant dans la littérature et varie entre 0.1 et 5 %
(19,20,26,29,41,44,56,62,64,72). L’atteinte cardiaque lors des traumatismes thoraciques est
retrouvée entre 15 et 75 % et une rupture cardiaque est retrouvée chez 5 à 75 % des morts par
traumatisme thoracique (10,20,29,67).
Il semblerait que ces chiffres soient en voie d’augmentation, probablement à cause de
l’amélioration dans la prise en charge préhospitalière et à cause des transports plus rapides.
Par ailleurs, il est à noter que le massage cardiaque externe augmente la fréquence des
ruptures cardiaques (31).
Il ne se dégage pas vraiment de prédominance nette d’un site de rupture. Les auricules
de part leur finesse sont les plus vulnérables et représentent ainsi le site de rupture atrial le
plus fréquent (4). Il semblerait que l’atteinte des cavités droites soit la plus fréquente de part
leur finesse et leur position (19,20,35,50,67,72).
B. PHYSIOPATHOLOGIE
Les lésions dépendent de la vitesse de décélération, du degré d’écrasement initial du
sternum et de la vitesse d’épuisement de l’énergie cinétique résiduelle dans le cœur.
L’application des forces anormales sur le cœur est médiée par le couple résistance/élasticité
de la paroi et par la durée de pression qui entraîne rapidement une incapacité ventilatoire. La
déformation brusque et l’augmentation des pressions intracavitaires peuvent conduire à la
rupture des parois cavitaires et notamment de la structure la plus faible : les oreillettes. La
Vulnérabilité de l’oreillette s’explique par cette fragilité pariétale théoriquement augmentée
en fin de systole ventriculaire (donc remplie et avec les valves auriculo-ventriculaires
fermées) et maximum en fin d’inspiration. (75)
-
De nombreuses études sont consensuelles sur les mécanismes mis en cause dans la
genèse des ruptures cardiaques (5,20,40,46,52,56,59,78). On y retrouve en fait les principaux
grands mécanismes biomécaniques vus plus haut :
- Choc direct (donc transfert d’énergie direct) sur la face antérieure du sternum en
fin de diastole pour les lésions ventriculaires et en fin de systole pour les lésions
atriales. Les chambres cardiaques remplies sont plus vulnérables. La compression
(augmentation de pression) provoque un transfert d’énergie cinétique entraînant
une tension d’expansion des masses de fluides d’où ruptures aux points faibles :
auricules et jonctions atrio-veineuses (72). Les fractures multiples costales
absorbent l’énergie cinétique dissipant les forces. Beaucoup des lésions cardiaques
surviennent à la jonction ventricule droit/septum interventriculaire (zone de
faiblesse myocardique). Le traumatisme induit une onde de choc avec résonance
pendant 500 microsecondes suivie d’une augmentation sur 2 à 3 ms de la pression
statique en rapport avec le déplacement maximum de la paroi thoracique. C’est le
2ème pic qui semble le plus délétère. Le facteur de gravité de lésions cardiaques est
le degré de déplacement de la paroi thoracique (étudié chez des cochons). Ce
déplacement est corrélé à l’augmentation de pression interne du ventricule droit.
Le degré de déplacement dépend de l’énergie cinétique, de la zone d’impact et des
caractères physiques du thorax de la victime (18).
- Écrasement de l’abdomen et des membres augmentant la pression intra-thoracique,
intracardiaque et donc la précharge (phénomène de piston hydraulique). Cependant
il semblerait que ce mécanisme induise plutôt des ruptures de l’aorte.
- Écrasement entre le sternum et les vertèbres.
- Accélérations ou décélérations intenses. Une décélération rapide provoque
volontiers des désinsertions des oreillettes. Au Japon, la première cause de rupture
cardiaque est la chute de grande hauteur avant les accidents de la route. On
-
retrouve une vitesse moyenne de 39 km/h. il s’agit souvent d’une décélération
brutale avec un arrêt brusque du corps mais poursuite du déplacement des viscères
et en particulier du cœur touchant surtout le ventricule droit qui vient s’impacter
dans le sternum. Par ce mécanisme, des lésions sévères sont possibles avec peu ou
pas de lésion pariétale
- Rupture secondaire à une contusion ou une lacération endocavitaire.
- Massage cardiaque externe : il a été décrit des ruptures de l’oreillette droite, de
l’aorte, du ventricule droit, du ventricule gauche, de l’oreillette gauche, des lésions
pariétales thoraciques, du foie, des intestins et des lésions coronaires. La rupture se
produirait lors de l’augmentation de la pression quand les cavités sont pleines, les
valves fermées et en cas de gêne à l’expulsion due à un obstacle ou à la
compression elle-même. Il est recommandé par certains de débuter le massage
cardiaque externe par un coup de poing sternal ayant 2 rôles : la réduction d’une
possible tachycardie ventriculaire voire d’une fibrillation ventriculaire et
l’induction d’une contraction cardiaque pouvant vider les ventricules. Toutefois,
l’utilisation du coup de poing sternal n’a de fondement que théorique (6,25,31).
- Blast.
- Rotation cardiaque rapide avec fixité des gros troncs supra-aortiques.
Ainsi, une rupture cardiaque doit être suspectée chez les patients présentant un
accident avec décélération ou un traumatisme précordial sévère.
Il a été noté à plusieurs reprises que les atteintes atriales ou du cœur droit permettaient
des durées de survie significatives (4,19,29,41,44,50,51,72). Dès 1935, Bright et Beck
observaient que si le diagnostic avait été posé, tous les patients de leur série auraient eu le
temps d’être sauvés, d’autant plus que la réparation de sauvetage ne semblait pas complexe.
Ainsi au moins 20 % des patients présentant une rupture cardiaque ont une survie supérieure à
45 minutes.
-
Ce délai dépend du nombre, de la taille et du siège des lésions. Une petite plaie
myocardique associée à une brèche péricardique semblent être la situation de choix pour une
survie prolongée vu qu’à la fois une tamponnade et une exsanguination rapide sont évitées.
De plus, l’épanchement péricardique permet dans ce cas un certain degré d’hémostase.
Plus récemment, Fulda (26) fait le même constat en évaluant à au moins 1/3 le nombre
de patients « soignables » au niveau temps. Il a même été dit que si les plaies cardio-
péricardiques sont petites, les lésions peuvent passer inaperçues et soit guérissent
spontanément, soit se décompensent secondairement. C’est surtout le cas pour des petites
lésions de l’oreillette droite où les régimes de pression sont tels qu’une tamponnade ou un
hémothorax peuvent évoluer longuement à bas bruit.
-
IV. ANALYSE DES PROCEDURES DIAGNOSTIQUES
En l’absence de définition diagnostique pratique clairement établie, les lésions
myocardiques sont retrouvées chez 0 à 63 % des patients ayant subit un traumatisme
thoracique fermé. Une douleur thoracique associée à une dyspnée et à des modifications
électrocardiographiques sont fréquentes chez les traumatisés thoraciques même en dehors de
toute lésion cardiaque. (2)
Une prise en charge efficiente des ruptures cardiaques nécessite un diagnostic rapide
suivi d’un transfert primaire dans un centre de chirurgie cardio-thoracique permettant une
intervention chirurgicale en urgence. Cependant, la première phase, essentielle, celle du
diagnostic fait bien souvent défaut, parce que cette pathologie est méconnue et parce qu’elle
est beaucoup trop rarement évoquée. Ainsi le diagnostic n’est que rarement posé ou même
évoqué en préopératoire (41). Dans la série de Parmley, il n’a été évoqué qu’une seule fois
dans les 13 cas de survie temporaire et que deux fois chez les 24 patients opérés avec succès !
(50)
Si l’anamnèse du traumatisme et l’examen clinique ont un rôle important, il faut
garder à l’esprit que l’imagerie est l’élément essentiel du bilan et qu’elle doit être réalisée
dans le même temps que les gestes thérapeutiques urgents. En effet, l’examen clinique n’est
fiable que chez 50 % des polytraumatisés conscients avec 56 % de faux positifs et 40 % de
faux négatifs (49).
A. ORIENTATION ANAMNESIQUE ET CLINIQUE
1. ORIENTATION
Le diagnostic de lésion cardiaque post-traumatique est cliniquement difficile car le
tableau présente une multitude de signes inconstants et non spécifiques.
Grossièrement, le tableau clinique dépend de l’intégrité du sac péricardique. S’il est
intact, on se retrouve devant un tableau de tamponnade ou de choc cardiogénique chez un
patient volontiers jeune et souvent sans antécédent cardiologique. Si le péricarde est lésé, on
se retrouve en présence d’un hémothorax abondant, récidivant, de sang frais et incoagulable
menant à une exsanguination rapide en l’absence de chirurgie d’hémostase urgente.
-
La répartition des deux tableaux entre eux est plutôt en faveur de la tamponnade
puisqu’elle est retrouvée dans 60 à 90 % des cas contre 10 à 40 % d’hémothorax. Cependant,
ces valeurs sont à relativiser. En effet, dans bien des cas, l’examen clinique est sans
particularité, une tamponnade franche n’étant pas classique chez un polytraumatisé. La
clinique est donc loin de faire seule le diagnostic et il faut utiliser un faisceau d’arguments
pour avancer dans le diagnostic (5,7,10,20,26,38,50,56,65).
En dehors des signes de détresse patente respiratoire ou cardiovasculaire, la gravité du
traumatisme thoracique devra être soupçonné sur des critères liés : au mécanisme du
traumatisme (notion de décélération importante, notion de compression thoracique aigue et
brutale ou prolongée, existence d’une éjection de la victime ou d’une chute de grande hauteur,
notion d’explosion ou d’exposition à une onde de choc), au patient traumatisés (âge,
terrain,tares associées), au délai écoulé avant la prise en charge médicale, à l’importance des
lésions associées.
Chez les patients à risque qui ne sont pas stabilisés avec un remplissage semblant
suffisant aux vues de la perte sanguine, l’hypothèse de rupture cardiaque doit être posée.
Ainsi Getz en 1986 (29) a essayé de trouver différents signes en faveur du diagnostic. La
triade de Beck (baisse des bruits du coeur, hypotension artérielle, augmentation de la pression
veineuse centrale) est souvent absente. Pour Goarin (32), elle ne serait présente que dans 10 %
des cas. De plus l’auscultation cardiaque est difficile dans le contexte préhospitalier ou même
dans les services d’urgences. L’hypotension est masquée par les autres traumatismes et la
pression veineuse centrale est abaissée par l’hypovolémie. Donc, le diagnostic pourrait être
suggéré par :
1. Hypotension et/ou hypovolémie hors de proportion par rapport aux lésions
suspectées
2. Hypotension et/ou hypovolémie ne répondant pas à un remplissage important
3. Hémothorax massif ou récidivant ne se tarissant pas au drain de Joly et ne répondant
pas au remplissage
4. Acidose métabolique persistante malgré remplissage
5. Augmentation de la pression veineuse centrale avec turgescence jugulaire et
hypotension malgré remplissage. Donc un état de choc cardiogénique.
-
On s’aperçoit bien vite des limites de ces items : le drainage thoracique est rarement
réalisé en préhospitalier ; la pression veineuse centrale non plus ; une acidose est difficilement
dosable sur le terrain (quelques exceptionnelles Unités Mobiles Hospitalières sont dotées d’un
appareil permettant la mesure des gaz du sang).
Plusieurs études ont recherché des signes cliniques fréquents et évocateurs
(44,48,64,71) :
- hypotension artérielle avec pression artérielle systolique < 80 mmHg (70 à 100 %)
- pression veineuse centrale supérieure ou égale à 20 cmH2O (78 à 95 %)
- tachycardie (89 %)
- turgescence jugulaire (20 à 80 %)
- cyanose du territoire cave supérieur (76 %)
- diminution des bruits du cœur (10 à 61 %)
- lésions pariétales associées (20 à 60 %)
Ainsi, les signes les plus fréquents sont inconstants et loin d’être spécifiques, surtout
chez un polytraumatisé. Cependant une hypotension persistante chez une victime d’un
traumatisme thoracique sévère est en général le résultat d’une rupture d’un organe plein
abdominal. Un remplissage vasculaire rapide restaure une pression artérielle satisfaisante dans
la plupart des cas d’hémorragie intra-abdominale. Une turgescence jugulaire importante est
inhabituelle dans ce cadre et la persistance d’une hypotension est prédictive d’une lésion
cardiaque.
De ce fait, la découverte chez un patient d’une hypotension artérielle inexpliquée dans
un contexte de traumatisme thoracique doit faire rechercher une plaie cardio-péricardique.
2. EPANCHEMENT PERICARDIQUE, TAMPONNADE
(3,32,50,61,68,72)
La tamponnade est une véritable urgence diagnostique et thérapeutique. Elle est
parfois révélatrice et s’explique en général par la constitution rapide d’un épanchement
d’importance moyenne. Elle entraîne une gêne brutale au remplissage ventriculaire par
augmentation de la pression intra-péricardique entraînant au maximum une adiastolie aiguë.
-
Les tamponnades sont soit :
- secondaires à une péricardite aiguë (bactérienne, tuberculeuse, virale,
rhumatismale, collagénose).
- dues à un hémopéricarde compressif retrouvé lors des traumatismes et plaies du
cœur, des dissections ou des fissurations d’anévrismes de l’aorte et parfois dans les
tumeurs cardiaques ou péricardiques.
- iatrogènes (traitement anticoagulant mal équilibré, infarctus du myocarde étendus,
cathétérisme cardiaque, sonde de stimulation intracavitaire et chirurgie cardiaque).
Les signes fonctionnels se résument à une douleur thoracique et une orthopnée. Les
signes physiques, plus ou moins nets et complets sont nombreux :
- des signes droits : turgescence jugulaire, reflux hépato-jugulaire, parfois ascite et
oedèmes des membres inférieurs en cas de constitution lente, cyanose thoraco-
faciale, agitation, orthopnée
- des signes auscultatoires : tachycardie, galop, bruits du cœur assourdis, frottement
péricardique parfois présent malgré l’abondance de l’épanchement.
- des signes de choc : tachycardie, baisse de la pression artérielle systolique et
différentielle pincée.
- le signe principal est l’apparition d’un pouls paradoxal de Küssmaul. Il est défini
comme une réduction inspiratoire de la pression artérielle systolique d’au moins 10
mmHg par rapport à l’expiration. Ce phénomène faussement appelé « pouls
paradoxal » s’explique par l’augmentation importante du retour veineux à
l’inspiration (où les pressions intra-thoraciques sont négatives), entraînant une
dilatation du ventricule droit. Comme l’épanchement péricardique est important et
compressif, il empêche toute distension de la paroi libre du ventricule droit. La
dilatation de ce dernier s’exerce donc aux dépens du ventricule gauche dont les
dimensions sont réduites par le bombement du septum interventriculaire. Il y a
donc une diminution inspiratoire du volume sanguin éjecté dans l’aorte et une
diminution inspiratoire de la pression artérielle. En expiration, le retour veineux
cave est diminué : le ventricule gauche reçoit alors le retour veineux pulmonaire
augmenté de l’inspiration précédents et donc accroît le volume d’éjection
systolique, la pression artérielle systolique augmente.
-
Il est à noter que le bombement du septum interventriculaire dans le ventricule gauche
provoque au maximum le contact des deux feuillets endocardiques induisant le passage en
tachycardie ventriculaire puis en fibrillation ventriculaire. C’est d’ailleurs ce mécanisme qui
explique les arrêts circulatoires brutaux au cours des asthmes suraigus et des embolies
pulmonaires massives.
Une tamponnade doit être évoquée chez des patients hypotendus ayant eu un
traumatisme thoracique avec ou sans cause évidente d’hypotension d’autant que les signes
sont inconstants, surtout au début. Il est important de noter que les épanchements
péricardiques post-traumatiques sont volontiers de faible abondance et souvent localisés en
regard d’une cavité cardiaque (62). C’est surtout sa rapidité de constitution qui est
responsable de la mauvaise tolérance. Bien souvent, le remplissage vasculaire est le premier
geste à effectuer.
3. INDICES ET SCORES DE GRAVITE (13,45,46)
Les indices et scores de gravité peuvent-ils être dans ce cadre utiles, si ce n’est pour le
diagnostic mais au moins pour leur intérêt de triage ?
Le RTS (Revised Trauma Score) a spécialement été conçu et expérimenté pour
permettre l’évaluation préhospitalière des polytraumatisés. Les paramètres mesurés, codés et
multipliés par un facteur de pondération, sont calculés à partir de la base de données nord-
américaine qui traduit leur influence relative sur le pronostic. Le RTS permet ainsi une
évaluation précise de la probabilité de survie.
Le CRAMS (Circulation Respiration Abdomen Motor Speech) est voisin du RTS.
Comme lui, il prend en compte des paramètres portant sur la respiration, la circulation, la
réponse motrice et la parole. En revanche il s’en distingue par l’introduction de l’examen de
l’abdomen et du thorax.
-
L’AIS (Abbreviated Injury Scale) repose sur un dictionnaire de lésions cotées de 1
(mineure) à 6 (constamment mortelle). L’appréciation des lésions est statique à un moment
donné, empêchant ainsi d’intégrer le potentiel évolutif d’une lésion qui s’aggrave et
compromet le pronostic vital. L’AIS ne décrit qu’une seule lésion à la fois et en conséquence
n’est pas adapté à un polytraumatisé dont plusieurs lésions s’aggravent mutuellement.