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LA REINE DE L’ORIENT

Zénobie

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DU MÊME AUTEUR

Romans :La Grande Pâque russe, Éditions du Rocher, 2004Alexandra, en collaboration avec Vladimir Volkoff, Albin Michel, 1994,

Éditions du Rocher, 2003Ève, Presses de la Renaissance, 2002Les Falaises de Ravello, Albin Michel, 1991Lambert ou l’effet Compton, JC Lattès, 1988Ciel Rebelle, Éditions Maren Sell, 1987*Le Cœur de la nuit, JC Lattès, 1986Le Gardien de la mémoire, Julliard, 1973*

Romans historiques :Reines de légende, Néfertiti, La Reine de Saba, Cléopâtre, Messaline, Pygma-

lion, 2013La Métisse, Albin Michel, 1996Les Jupons de la Révolution, JC Lattès, 1989Cycle Les Héritiers des Lumières :1. Rocaïdour, Julliard, 1977*2. Les Blanches années, Stock, 1980*3. Le Soleil des loups, Stock, 1981*4. Le Hussard blond, Laffont, 1985*

Histoire et essais :Daniel encore un jour, Salvator, 2013La Route de la soie, d’Alexandre le Grand à Marco Polo, Éditions du Rocher,

2008Les plus belles histoires d’amour de la Bible, Presses de la Renaissance, 2006Médecin aux urgences, en collaboration avec le docteur Marc Andronikof,

Éditions du Rocher, 2005Anne de Kiev, Presses de la Renaissance, 2002Marie Madeleine, Pygmalion, 1998Rodolphe II de Habsbourg, l’empereur des alchimistes, JC Lattès, 1996Charlotte Corday, Albin Michel, 1989L’Exil est ma patrie, entretiens avec Vladimir Volkoff, Le Centurion, 1982*

Ouvrages en collaboration :Venise, sous la direction d’Alain Vircondelet, 3 volumes, Flammarion, 2006Hybris, sous la direction de Marc Andronikof, L’Âge d’Homme, 2002

Contes :

La Fleur et l’oiseau, G.P. Rouge et or, 1979*

* Publiés sous le nom de Jacqueline Bruller

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JACQUELINE DAUXOIS

LA REINEDE L’ORIENT

Zénobie

roman

Pygmalion

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© 2014, Pygmalion, département de FlammarionISBN 978-2-7564-1515-4

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À tous ceux qui, pendant sept ans,ont refusé de croire que je n’écrirai plus

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Les dieux font ce qu’ils veulent avec leshommes et nous tiennent en leurs mains.

Comment pourrait-on en douter ?

Sophocle

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PREMIÈRE PARTIE

Bathzabbai Zanoubia

Je vois là-bas quelqu’un, une femmequi vient vers nous. Elle est à cheval

et elle porte un chapeau thessalienpour se protéger du soleil…

Sophocle

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I

Un destin en marche

ÈS SA PETITE ENFANCE, Zénobie eut la convic-tion qu’en elle un destin s’était mis en marcheet qu’il s’accomplirait inéluctablement.

Cette certitude est à l’origine de la plus extraordinaireépopée qu’ait connue le monde, car jamais femme neconquit un empire.

Elle n’était pourtant pas née sur les marches du trône,Zénobie. Son père, Antiochos, puissant marchand cara-vanier de Palmyre, à qui sa fortune personnelle avaitouvert la carrière des honneurs dans l’administrationromaine, veillait de près sur l’éducation de son uniqueenfant. Avec l’aide des femmes de la famille et dematrones expérimentées, il lui choisit une nourrice, sansque la mère, semble-t-il, ait désiré intervenir sur le sujet.

Lorsqu’elle eut un peu grandi, et elle trottinait à

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peine, il songeait déjà à son avenir et, prenant cette foisconseil des notables, lui procura les meilleurs maîtresqu’il recruta en Grèce et à Alexandrie. Sous la directiondu professeur de grec et de latin, chargé d’organiserl’emploi du temps des cours, les doctes fort bien logés,

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La Reine de l’Orient

exquisément nourris et largement rétribués, attendirentque l’enfant fût en âge de tirer profit de leur enseigne-ment, cependant leur présence permit à Zénobie, dès sapetite enfance, de se familiariser en se jouant avec lapoésie, les langues étrangères et d’acquérir des rudimentsde mathématiques et d’astrologie.

Plus grande, elle découvrit la nécessité de l’effort dontelle acceptait volontiers les contraintes qui ne luipesaient guère, pour plaire à son père qu’elle aimait etjouir de libertés qui lui étaient largement accordées unefois les devoirs terminés, les leçons récitées.

Elle passait aisément du jeu au travail et du travailau jeu.

Les poupées, les osselets, les dés, le trictrac, la balle,les jeux de construction, les devinettes, la marelle, cache-cache ou chat perché, l’amusaient de temps en temps.Parfois, elle observait les oiseaux de la volière, écoutaitleur chant, admirait l’éventail merveilleux de leursplumes, nouait au cou des perdrix des rubans du bleuincomparable des émaux d’Égypte et, si elle étaitd’humeur explosive, elle provoquait une épouvantablepanique, lançant de grands cris sauvages en courant aumilieu des poules de Numidie tachetées et des faisansde Colchide qui s’égaillaient en caquetant de colère.Mais ce qu’elle aimait par-dessus tout, c’était monter àcheval ou à méhari. Pour une course dans le désert, ellerenonçait à n’importe quel divertissement, encouragéepar son père, grand chasseur de léopards, qui songea àl’emmener avec lui et lui offrit des bêtes magnifiques

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dès qu’elle sut tenir en selle – et elle y tint dès qu’ellesut marcher.

Adolescente, alors que les filles des grands seigneurspalmyréniens se tartinaient le visage de céruse et se

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Un destin en marche

préservaient des ardeurs du soleil en restant confinéesdans leurs riches demeures pour conserver un teint clair,Zénobie ne redoutait pas de brunir sa radieuse carnationau cours de chevauchées enivrantes dont elle revenaitles yeux pleurants, les joues cuites et les lèvres gercées,radieuse et comblée. Au retour de ses équipées,lorsqu’elle mettait pied à terre dans la cour de la maisonde son père, elle jetait les rênes à un palefrenier et s’élan-çait à travers les péristyles de marbre aux enfilades destatues, déroulant son interminable turban qui semaitderrière elle du sable partout où elle passait, et criaitd’une voix éclatante :

— Un bain ! vite ! un bain bouillant !La vasque l’attendait, déjà remplie.Elle s’y précipitait, barbotait avec euphorie, et, pen-

dant qu’on la séchait et qu’elle remettait un semblantd’ordre dans la masse de sa chevelure ruisselante, sanourrice réparait les dégâts du soleil en étalant sur sesjoues des onguents aussi crémeux que la mousse du laitde chamelle :

— Tu es brûlée, mon colibri en pâte d’amandes,mon bonbon aux dattes du Nil ! Brûlée ! A-t-on jamaisvu teint pareil sur une noble petite fille romaine ?

— Et qu’ai-je à voir avec une noble petite filleromaine, nourrice ?

— Si ta mère t’entendait !— Que pourrait-elle dire ? C’est une sang-mêlé !

Nous sommes tous des sang-mêlé à Palmyre, hormis,

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bien sûr, ricanait-elle, le gouverneur romain, les légion-naires de la XVIe Flavia Firma et les Bédouins arriérésqui vivent sous leurs tentes noires comme du temps dupatriarche Abraham et obligent leurs femmes à se voiler.

— Que dis-tu ? une enfant élevée comme toi !

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La Reine de l’Orient

— Et comment suis-je élevée, nourrice ? Dis-moicomment ! grognait-elle, les sourcils froncés. On chercheà me dresser comme une Romaine que je ne suis pas !

Son nez se plissait et sa bouche, aux contours délicats,s’incurvait dans une grimace qu’elle ne cherchait pas àdissimuler.

— Comment parles-tu de nos protecteurs romains ?— Comme nous devrions en parler tous ! Mets-moi

encore de la crème ! Mes paupières cuisent et piquent,piquent, piquent !

— Évidemment, tu es brûlée ! Si seulement tu pre-nais exemple sur la reine Cléopâtre que tu prétendsadmirer ! Elle se baignait dans le lait de jument pourconserver son teint de rose.

— Nous y voilà, se moque Zénobie, je vais annoncerà mon Père qu’il me faut des bains de lait de jument !J’espère que la nouvelle va le mettre en joie ! Qu’ai-jeà faire des recettes de Cléopâtre ? Je n’ai pas la mêmecarnation ! Elle était grecque que je sache, tandis que jen’ai, moi, qu’une toute petite goutte de sang grec !

— Parce que tu as du sang grec, toi ? et d’où vient-il,ce sang ?

— Je sais ce que je dis !— Des bêtises !— Crois-tu ? raille Zénobie, consciente de l’igno-

rance de sa bonne nourrice en matière de généalogie.— Tu peux prendre tes airs supérieurs, et c’est cer-

tain que je ne suis pas de taille à discuter avec toi qui

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es remplie de plus de science que tu ne m’as jamais sucéde lait ; mais, je sais ce que je sais.

— Et que sais-tu ?— Ça, mon petit fennec des sables, ma douce

colombe roucoulante, ma biche aux yeux grands comme

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Un destin en marche

l’étoile du matin, ça, vois-tu, c’est mon secret à moi !Tu n’es pas la seule ici à faire des mystères.

— Parce que je fais des mystères, moi ?— Mais, ma tendre tourterelle couleur d’aurore au

cou cerclé d’un ruban noir, depuis que tu as quitté teslanges et que tu vis entourée des grands pédagoguesrecrutés par ton père, tu ne fais rien d’autre ! Seulement,ta vieille nourrice, crois-moi, c’est pas toi qui peux latromper. Allez, maintenant, va ! File te changer, tu res-sembles à un coureur des sables. On peut dire que tues bien arrangée ! Ton nez reluit comme un miroird’argent ! Enfin… dans un moment, tu pourras t’essuyeret tes rougeurs auront disparu. Je me demande si jen’aurais pas mieux fait de te laisser tes brûlures au lieude les soigner, ça t’aurait peut-être empêchée de recom-mencer !

— Tu crois ?

Comme elle aimait apprendre, ses maîtres se fâchaientrarement contre les incartades de Zénobie qui les entraî-nait vers d’autres sujets que ceux qu’ils avaient prévus.Elle parlait déjà plusieurs langues lorsqu’elle résolutd’étudier l’égyptien. Sans chercher à percer à quel obscurpressentiment il cédait, Antiochos tenta de l’en détour-ner :

— Pourquoi ne pas perfectionner plutôt ton persan ?Je t’ai entendue l’autre jour, ta traduction n’était pastrès brillante !

— Mais, Père, je traduisais un texte turc, pas du per-

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san ! J’ai un tel désir de savoir l’égyptien ! Je l’apprendraien plus des autres langues !

— L’égyptien ? quel égyptien ?— Mais, répondit-elle, souriante, ouvrant les mains

dans un geste qui semblait indiquer une évidence, le

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La Reine de l’Orient

classique pour lire Le Livre des morts dans le texte etpuis, évidemment, le populaire, le démotique !

— Le démotique ! pour être comprise par les embau-meurs et les portefaix !

Il était trop fier d’elle pour s’avouer qu’il la trouvaittout de même épuisante. Mais il ne traitait pas sarequête comme un caprice, car elle n’était pas capricieuseet il devinait là un secret qu’elle ne lui révélerait pas.Il aurait été grandement surpris de découvrir que Zéno-bie elle-même ignorait d’où lui venait cet irrépressibledésir d’Égypte.

Il demanda :— Est-ce à cause de ton admiration pour Cléopâtre ?Elle haussa une épaule, rien qu’une :— Pourquoi admirerais-je une reine qui s’est suici-

dée ?Il fit une nouvelle tentative :— En souvenir d’Alexandre qui a consulté l’oracle

de Memphis ?— Un conquérant qui s’est laissé empoisonner par

ses généraux !Tout le monde, à cette époque, jusqu’au plus ignare

conducteur de chameaux, avait un avis sur la find’Alexandre et de Cléopâtre qui alimentait les leçons desmaîtres de rhétorique et, dans la mesure où l’on estacteur de son suicide, certains soutenaient que Cléopâtreaurait pu affronter les conséquences de sa défaite mili-taire, s’enfuir au désert et tenter de rassembler une armée

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pour reconquérir son trône, mais on tombait générale-ment d’accord pour admettre que celui qui est assassiné– c’était le sort de la plupart des empereurs romains –n’est pas responsable de sa mort. Sans compter quel’empoisonnement d’Alexandre n’était pas prouvé.

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Or, Zénobie ne manifestait aucune compassion pourla fin tragique du héros qu’elle admirait.

— Alexandre n’a pas choisi d’être empoisonné, à sup-poser qu’il l’ait été, observa son père et on dirait quetu lui reproches sa fin !

— Exactement comme tu reproches à Cléopâtre sonsuicide.

— Je ne…— Mais si, Père chéri, tu désapprouves qu’elle ait mis

un point final par sa mort à une histoire fabuleuse qui,peut-être, aurait pu se poursuivre.

— Je ne sais pas…— Nous en reparlerons quand j’aurai grandi !Elle riait, contente de retourner la formule avec

laquelle on congédie d’ordinaire les enfants.

Parce qu’elle était fille unique et exceptionnellementdouée, son père lui donna une éducation idéale dontelle tira tous les bénéfices possibles, car elle aimait s’ins-truire et ne voulait laisser en friche aucun domaine dusavoir.

Son grec classique, appris dans les tragédies d’Eschylequ’elle avait lues avant d’y être autorisée, était d’une rarepureté. Elle s’exprimait avec une parfaite aisance enkoinè, le grec populaire utilisé sur le pourtour du bassinméditerranéen ; elle parlait couramment l’araméen et lesyriaque, se débrouillait passablement en hébreu et enéthiopien.

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Et voici que cette adolescente qui comprenait l’écri-ture de l’ancienne Mésopotamie et projetait de déchiffrerles hiéroglyphes, se prétendit incapable de retenir lesdéclinaisons latines, prétendait que rosa, la rose, présen-tait d’insurmontables difficultés, butait sur les mots les

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plus simples, massacrait laborieusement prose et vers, etdéclarait à son maître atterré :

— La langue de l’occupant ne passe pas !— L’ennui est que tout le monde la parle !— Tout le monde parle aussi l’araméen et le koinè,

je n’ai pas besoin du latin !Le malheureux professeur tourmentait sa chevelure

plus immaculée que sa toge en cherchant de nouveauxarguments et Zénobie, riant de lui intérieurement, sedemandait s’il allait en arracher une poignée. Mais unjour de printemps, où les oiseaux pépiaient avec plusd’entrain que d’habitude, il lui annonça qu’elle offensaitles mânes de Virgile et d’Ovide à réciter leur poésie decette manière barbare.

— Barbare ? se moqua-t-elle. Barbare me convient !Ne sommes-nous pas tous des barbares aux yeux desarrogants vainqueurs qui nous cajolent jusqu’à nous faireporter leurs titres, leurs insignes et nous faire singer leursinstitutions pour nous soumettre, nous tenir, nousréduire à merci ! Mais qu’avons-nous à faire d’un sénatcopié sur leur Sénat ? Et quel pitoyable spectacle don-nent les grands personnages de Palmyre ! Ces hommesrespectables qui intriguent pour obtenir le laticlave, etse pavanent ensuite comme s’ils étaient vraiment dessénateurs romains lorsque la fameuse bande pourpreorne leur tunique ! Quelle bêtise et quelle honte !

Elle enrageait de devoir admettre à quel point la poli-tique de Rome était habile. Même son père convoitaitla fameuse bande pourpre, ses riches et puissants amis

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aussi, et le noble Odenath, son oncle, dont l’ascensionfulgurante portait ombrage à celle d’Antiochos. Tousceux qui comptaient dans les grandes familles finiraientsénateurs au lieu de se battre pour reconquérir la libertéde la plus belle oasis qui fut jamais sous le soleil, Palmyre,

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sa Palmyre ! la plus belle ville au monde, l’unique,l’incomparable Palmyre !

Inutile de lui répéter que la Syrie était intégrée, entiè-rement, complètement assimilée à l’empire depuis plu-sieurs générations, que cela remontait au règne deTibère, deux cent cinquante ans auparavant, que laromanisation était irréversible, et qu’elle était souhai-table, puisqu’elle assurait la pax romana dans le monde.

Son professeur lui avait expliqué et réexpliqué quec’était le fondement même de la civilisation ; il espéraitqu’elle avait assimilé cette notion élémentaire, mais, cejour-là, peut-être à cause des oiseaux qui se déchaînaienten tourbillonnant dans le ciel d’un bleu impavide, lecalame à la main, elle se leva de sa table, se dressa devantlui de toute sa taille encore bien petite, qui ne seraitd’ailleurs jamais très élevée, et, les yeux flamboyant, pourla première fois, elle l’affronta :

— La pax romana, qu’est-ce que c’est ? sinon lemoyen d’asservir des peuples qui étaient libres, d’installerchez eux des légions et de leur imposer une civilisationqui leur est étrangère ! Nous ne méritons d’ailleurs pasmieux que d’être des esclaves, puisque nous consentonsà l’être ! Et si nous ne faisions que consentir ! Mais nousnous précipitons dans la servitude dorée que nous pro-cure la citoyenneté romaine dont nous n’avons que faireau fond, et qui est le moyen pour Rome de nous utiliserà tout ! Jusqu’à la guerre où servilement nous devenonsles auxiliaires de nos maîtres ! Mais leurs combats ne sont

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pas les nôtres ! Leurs conquêtes n’enrichissent qu’eux !À nous, elles nous prennent des guerriers !

Il écoutait avec étonnement cette petite fille quiretournait contre lui tout ce qu’il lui avait enseigné, etavec quel toupet, quelle aisance et quelle maturité. Où

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avait-elle entendu pareils propos ? Certainement pasdans son entourage. Son père, qui deviendrait sénateurun jour ou l’autre, professait publiquement le plus grandrespect et la plus grande dévotion (oui, on pouvait allerjusque-là) pour les institutions romaines. Ses amis et lesnobles patriciens qui fréquentaient la maison, tous lancésdans la carrière consulaire ou sénatoriale, partageaientl’avis d’Antiochos.

Si ces idées venaient d’une conviction personnelle,alors, malgré sa jeunesse, cette enfant se révélait un êtred’exception. Bien qu’il s’en défendît, il éprouvait del’admiration pour cette petite rebelle et, sans songer queles riches émoluments que lui versait le père pourraientbien se tarir si ce dernier découvrait les pensées de safille, il se hasarda à pousser le débat en objectant :

— Sans Rome, que serait Palmyre ?Il ne s’attendait pas à la suite.Zénobie, le regard étincelant et les joues en feu,

s’élança, comme une cavale fougueuse, dans une tiradeéchevelée d’un niveau littéraire hésitant, mais qui nemanquait pas de grandeur :

— Je sais ce que serait Palmyre ! Une oasis dans ledésert, des palmiers, des trous d’eau, la plaque tournantede caravanes de milliers de chameaux sillonnant lesroutes du monde vers l’Orient, toujours plus loin, pourrapporter des denrées qui se vendront ensuite plus cherque l’or sur les marchés d’Alexandrie, Byzance et Rome !Je sais à quoi ressemblerait la ville ! Cette Palmyre,aujourd’hui couverte de marbre et d’or, de monuments

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qui surpassent ceux de Rome, de colonnades comme iln’en existe pas de pareilles au monde bordant l’intermi-nable decumanus ; cette Palmyre avec ses arcs detriomphe, les thermes de Dioclétien, la merveille destétrapyles, ces quatre fois quatre colonnes qui émer-

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veillent les visiteurs au croisement du cardo ; cette Pal-myre avec ses rues pavées et ses places ornées defontaines d’où l’eau s’écoule même en période de séche-resse, ses dizaines de temples servis par des myriades deprêtres où tous les dieux du monde se peuvent adorer,l’amphithéâtre, couvert d’un velum qui protège les spec-tateurs des rayons ardents du soleil, et où on répand,pendant les jeux qui se donnent ici comme à Rome,d’ineffables parfums, l’agora flanquée d’une profusion deboutiques où se négocient les plus beaux objets de laterre ; cette Palmyre avec ses édifices administratifs pres-tigieux où les nobles d’ici copient les manières romaines,les mœurs romaines, la justice romaine, où siègent lesreprésentants du peuple dans leurs vêtements romains,sous la protection des armes romaines, cette Palmyreavec son quartier aristocratique où se dressentd’orgueilleux palais rutilants, et des maisons patriciennesaussi belles que des palais, comme notre demeure avecses péristyles, ses cours, ses piscines, ses serres, sesvolières, ses galeries de statues, ses œuvres d’art, sesriches tentures, ses précieux tapis ; cette Palmyre neserait pas !

Sans prendre ni le temps de souffler après cetteimpressionnante déclaration ni celui de se demander s’ilne manquait pas à son discours quelques ponctuationsbienvenues, quelques élégantes coupures, quelques res-pirations, elle enchaîna avec l’impétuosité de la jeunesse :

— Tout cela est romain, si l’on excepte les tapis !

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précisa-t-elle d’une voix moqueuse, accompagnant laraillerie d’un geste désinvolte de la main. Tout cela, nousle devons à Rome ! Je le sais.

Il ne désirait pas l’interrompre ; elle ne lui en auraitpas laissé le temps :

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La Reine de l’Orient

— Je sais, martela-t-elle, que, sans Rome, nos ruesseraient informes, en terre battue, nous n’aurions jamaiseu l’idée de les paver ni de les tracer au cordeau ! Maisnous n’avons eu besoin de personne pour édifier nosorgueilleuses tours funéraires qui se dressent devant lesremparts, avec leurs formidables entrées hypogées, simagnifiques, si vastes, si saisissantes qu’en les voyant oncroit déjà avoir le pied dans l’éternité et que les défuntsqui descendent par là, entourés de tous les honneurs,pénètrent avec une immense solennité dans la grandeurterrifiante du monde du dessous ! Besoin de personnenon plus pour bâtir nos murailles invincibles, hautescomme des montagnes, larges comme des boulevards quienserrent notre antique Tadmor, qu’on appelle Palmyre,dont le nom est attesté, bien avant la naissance de Rome,dix-huit siècles avant la naissance de Jésus-Christ, Pal-myre, fondée par le roi Salomon1 !

Elle en rutilait de fierté et le docte, de ses longs doigtsmaigres caressant sa crinière blanche sur sa nuque, selaissait gagner par la pensée que, quelques centaines desiècles auparavant, cette petite fille aurait été une trèsextraordinaire reine de Saba.

Elle continuait :— Sans Rome, nos chefs nomades dresseraient leurs

tentes noires sur les places poussiéreuses, les troupeauxgambaderaient autour, souillant les rues de leurs déjec-tions, le piétinement des chèvres et les sons de la flûteà trois trous des bergers retentiraient à nos oreilles, lesharas s’étendraient en désordre de tous les côtés. Les

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maisons, ignorant le marbre et les ornements, ressem-bleraient à celles des bas quartiers faites de brique, deterre, de paille et de palmes, petites, étriquées, les unes

1. II Chroniques VIII, 4.

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sur les autres, sans fenêtre, avec une porte en roseaux,les murs en argile séchée, les toits couverts de bran-chages, sans chauffage, sans étage, sans tout-à-l’égout.Elles borderaient des rues aux caniveaux putrides. Desordures s’entasseraient devant les porches ; des poulespicorant jusque dans les intérieurs y laisseraient leursdéjections et de violentes odeurs stagneraient dans l’airempuanti jour et nuit. Palmyre, sans Rome, ressemble-rait à n’importe quel caravansérail miteux où les cha-meliers font escale la nuit, je le sais !

À ce moment, elle reprit sa respiration ; ce n’était pasqu’elle en manquât pour poursuivre, mais elle tenait àce que sa conclusion fût un coup de cymbale.

Elle la fit claquer :— Mais on n’entendrait pas, en ville, le pas cadencé

de la XVIe Flavia Firma !Il ne s’attendait certes pas à un pareil éclat. Mais

Zénobie non plus. Elle était presque plus étonnée quelui par ce qu’elle venait de dire.

Entraînée par une passion qui se révélait au grandjour pour la première fois, elle avait hésité à lui citer lesréférences des versets bibliques attestant la fondation deTadmor par le grand Salomon, car elle savait tout ce quiconcernait sa ville pour laquelle elle éprouvait un amoursans partage. Comme ses propos étaient éloignés des dis-cours puérilement anti-romains qu’elle avait tenusjusque-là à sa nourrice pour la faire enrager ! Ils deve-naient politiques et se charpentaient ; sa pensée se struc-turait en toute indépendance, intégrant et transmutant

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l’enseignement que ses maîtres lui dispensaient et les opi-nions que sa famille professait. Dans sa longue vie, sonprofesseur n’avait jamais eu d’élève qui réagît de la sorteà un âge si tendre. Sans cesser de l’observer, il enroulamachinalement une mèche autour de son index tandis

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que Zénobie découvrait avec émerveillement commentla parole éclaircit le raisonnement, rend nettes des idéesfloues, donne de beaux contours, amples et précis, à despensées restées désordonnées tant qu’elles ne sont pasexprimées. Cette révélation l’exaltait ; les joues empour-prées d’émotion, les doigts tremblants, son cœur battait.

Maître et élève savaient que ces propos enflammés res-teraient secrets, car Zénobie y mettait en cause son père– un père totalement romanisé, qu’elle adorait.

Embarrassés tous les deux, l’un tortillant une mèchel’air pensif, l’autre sautillant d’un pied sur l’autre en semordant la lèvre, ils ne savaient comment sortir d’unesituation gênante. C’est elle qui trouva l’issue en formede pirouette. Elle porta les mains à ses joues, les sentitbrûlantes, reposa son calame avec beaucoup de soin pourse calmer et, avec un sourire ironique, déclara d’une voixenfantine :

— Et voilà, maintenant, je vais boire et me changer.Lui aussi avait soif.

Il gagna la bataille du latin le jour où, renonçant àrépéter une fois de plus les règles que Zénobie connais-sait très bien depuis qu’il les lui serinait, il déclara quela poésie étant un don de la divinité, scander à contre-temps blessait l’harmonie du monde, à laquelle participela création artistique.

Comprenant que l’homme à la crinière blanche dépla-çait les enjeux d’une manière radicale, Zénobie écarquillases grands yeux ronds d’enfant :

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— Je fais affront à l’harmonie du monde lorsque jescande Virgile de travers ?

La question était posée sur un ton d’extrême sérieux.— Certes, oui, dit-il, retenant un sourire, d’autant

plus gravement qu’il s’agit de fautes qui semblent volon-

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taires. Cette insulte en soi n’est pas décisive et ne causerade tort à personne, sauf peut-être à celle qui s’en rendcoupable, mais nous sommes néanmoins en présenced’un détournement de la beauté au profit du laid qui,pour être infime, n’en constitue pas moins une victoiredu chaos sur l’ordre.

— C’est triste, si c’est vrai.— C’est vrai, bien entendu. Et c’est triste… comme

un splendide étalon affligé de… claudication.Cette fois, ce fut elle qui s’empêcha de sourire :— Vous comparez un poème à un cheval de race ?— Naturellement ! Et ma comparaison est tellement

au-dessous de la réalité ! Sans le ciseau de Lysippe, dequel cheval garderions-nous la mémoire ?

— Bucéphale, dit-elle sobrement.— Admettons… cependant il y aurait beaucoup à

dire, car je ne sache pas que, sans Alexandre qui ledompta, nous connaîtrions encore le nom de cet équidé,tandis que les poètes que nous étudions ont crééd’immortels chefs-d’œuvre que les générations futuresréciteront encore lorsque nos os auront été dispersés.

Elle fronça des sourcils mécontents à l’idée de ses oséparpillés aux quatre vents, ce qui était contraire à tousles rituels civilisés, et remua son pied nerveusement, agi-tant les plis de sa robe car aucune critique n’aurait pula toucher davantage que la double allusion à un étalonboiteux et à l’immortalité. À partir de ce jour, l’imaged’un cheval qu’elle risquait d’estropier s’interposachaque fois qu’elle s’apprêtait à massacrer des vers latins.

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Elle n’éprouvait d’ailleurs aucune détestation envers lapoésie latine ; ce qu’elle ne supportait pas, c’était la pré-sence de la légion à Palmyre, dont elle se serait peut-être mieux accommodée si son entourage s’en était indi-gné avec elle. Mais ses proches s’en offusquaient si peu

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que, dès l’enfance, elle dut cacher ses sentiments anti-romains.

Ayant percé son élève à jour, le professeur ne s’empê-cha plus d’admirer ce jeune courage en train de se for-mer et chercha à l’aider, car ce n’est certainement pasdans le seul but de l’encourager à apprendre ses leçonsqu’il lui déclara un jour :

— Qui veut vaincre son ennemi doit le connaître,mais le connaître à fond, de l’intérieur, rien de tel quede parler sa langue.

— Vous essayez de m’expliquer que connaître lagrammaire de l’ennemi aide à le vaincre ?

— Sans aucun doute ! Voyez Alexandre, il voulaittout apprendre des pays soumis, les comprendre, lesconserver, les aimer, il expédiait aux Grecs des chariotsremplis de trésors inconnus en Macédoine, non paresprit de pillage, mais pour échanger des richesses. Ah !ne vous moquez pas, dit-il. C’était chez lui un authen-tique désir d’union, très profond. Il voulait beaucoupplus qu’une conquête ordinaire : un partage, comprenez-vous ?

— Je comprends Alexandre mieux que je ne vouscomprends, dit-elle, un dédaigneux sourire aux lèvres.

Lorsqu’elle estima avoir suffisamment scandé sansfaute Les Géorgiques, s’être suffisamment ennuyée auxélégies, avoir suffisamment raillé Les Métamorphoses desdieux, elle déclara qu’elle allait lire, désormais, l’Épopéede Gilgamesh, La Guerre des Gaules de César et l’intégraledes tragédies grecques pour lesquelles elle éprouva pen-

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dant sa vie entière la plus ardente admiration, la déme-sure étant exactement à sa mesure.

Plus tard, elle étudia la littérature, la miniature et lamusique persanes, et, afin de compenser ce qu’elle appelait

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le bazar de la mythologie gréco-romaine, demanda às’instruire sur les grands textes sacrés : le Livre des Mortségyptien, l’Épopée de Gilgamesh, la Bible, Ancien et Nou-veau Testament, les écrits de Zoroastre et de Mani.

N’ayant aucune objection à ce qu’elle s’instruisedavantage, son père continuait de lui procurer lesmeilleurs maîtres. Il précisait toutefois que la seule reli-gion acceptable étant la romaine, qui ne saurait êtreremise en question, l’étude des autres croyances devaitêtre exclusivement considérée comme une incursion pas-sagère dans des univers exotiques.

Lui-même se comportait en bon païen, même s’il pra-tiquait par conformisme et obligation sociale plus quepar conviction, sans chercher, contrairement à sa fille,une signification aux cultes.

Un jour, ayant pris conscience de la complexité dumonde et de la situation charnière de Palmyre dansl’univers, elle demanda au maître de latin qui supervisaitses études :

— Nous vivons ici dans un prodigieux creuset. Ai-jenégligé des apprentissages essentiels pour déchiffrer lescivilisations qui se rencontrent dans notre oasis, au car-refour des pistes caravanières de l’Orient et de l’Occi-dent ?

La question naïve le toucha, et, lissant sur sa tempeune indocile virgule, il la rassura.

Elle précisa :— En histoire, en géographie, en philosophie, en

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géométrie, en astrologie, je ne rencontre pas de difficul-tés, mais dans les domaines qui m’ennuient, arithmé-tique et pâtisserie, suis-je tout de même parvenue à unniveau suffisant ? Ai-je assimilé les chiffres romains aussibien que les arabes ? Ma cassate sicilienne est-elle aussi

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comestible que mes cornes de gazelle ? Est-ce que je vauxles étudiants de Byzance et d’Alexandrie dans tous lesdomaines ?

Il ne répondit pas qu’elle les valait largement, maisil était si fier d’elle qu’elle comprit son silence confuset le langage de la main qui jamais n’avait aussi éner-giquement tourmenté la chevelure de chlore.

Son père avait donc pleinement réussi l’éducation desa fille.

Elle était une perle, une créature unique.Encore quelques années et elle resplendirait comme

une étoile au firmament. Des princes du désert tombe-raient à genoux devant elle, des chefs de grande tentesupplieraient qu’on la leur donne en mariage, les gou-verneurs romains perdraient la tête en la voyant, l’aris-tocratie romanisée du Moyen-Orient se battrait pourobtenir la faveur de sa main.

Elle qui, parvenue à la fin de sa courte vie, disait :« On ne change pas, on s’approfondit », dès sa plustendre jeunesse, elle donna des signes de ce qu’elle était,signes dans lesquels les vieillards prétendirent ensuiteavoir discerné à la fois ce qu’elle deviendrait et ce qu’elleaccomplirait, alors que pas un d’entre eux n’était douéd’un tel don et qu’elle défricha des routes jusqu’alorsinconnues, totalement imprévisibles, sur lesquelles nullefemme ne s’était aventurée, et des hommes, fort peu.

Parmi les indices les plus clairs qu’elle donna de cequ’elle deviendrait un jour, il y eut le choix de son nom.

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On peut objecter que son père étant citoyen romain etconsul de Rome, le sien était romanisé en BathzabbaiZénobia ; les formes arabes, Zanoubia, Zoubbida ouZéïnab, dont son père interdisait l’usage, n’étaient pasemployées.

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Sa nourrice, lorsqu’elle ne la couvrait pas de toutessortes de tendres surnoms, mais tentait d’imposer uneillusoire autorité, ordonnait :

— Bathzabbai, obéis ! Bethsabée ! Pour une fois, obéis-moi ! Protège-toi ! Il fait une canicule à sécher un palmier,couvre ton visage, ma gazelle blanche, mon rossignol quifait lever l’aurore avec ses trilles, mets de l’onguent etprends ce voile, ma nourrissonne, mon petit agneau blanc,Bathzabbai, ou tu vas attraper une insolation !

— Je ne veux pas être appelée Bathzabbai !— Et comment voudrais-tu qu’on t’appelle : Prin-

cesse ?— Princesse m’irait déjà mieux !— Bethsabée est un très beau nom. Toi qui es si

savante, tu devrais être contente de porter celui de lafemme du roi David, mère du grand Salomon.

— Je ne veux pas être connue dans les siècles commefemme et mère de rois !

— Tiens donc ! s’amusa la nourrice, et commentveux-tu être connue dans les siècles ?

— Une femme peut régner en son propre nom !— Ça s’est pas vu souvent !— Peut-être que les temps n’étaient pas mûrs ! En

tout cas Bethsabée n’est pas un nom pour moi. C’estun nom juif, est-ce que j’ai du sang juif ? J’en ai peut-être, ce serait un beau mélange ; mais rien n’est sûr.

— J’imagine que tu préférerais t’appeler Cléopâtre.— Tu pourrais bien te tromper, nourrice ! Ce qu’elle

a le mieux réussi, c’est sa mort, là elle fut sublime.

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Zénobie soupira, imaginant l’aspic rampant sur le brasde la pharaonne déchue1.

1. Voir, du même auteur, Cléopâtre dans Reines de légende,Pygmalion, 2013.

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La Reine de l’Orient

— Quoi qu’il en soit, conclut-elle, Bethsabée n’estpas un nom pour entrer dans l’Histoire.

— Parce que tu vas entrer dans l’Histoire ?— Si l’occasion s’offre à moi, je la prendrai, tu peux

me croire !— Tu veux dire que tu la provoquerais ?— Nourrice, qui le sait ?— Mais, malheureuse enfant, entrer dans l’Histoire,

c’est entrer dans le malheur ! Vois comment ont fini teshéros d’épopée, tes rois, tes conquérants, tes reines delégende ! En est-il un seul parmi eux, une seule qui aitconnu une vie de bonheur ?

— Et les autres, tous ceux qui ne font rien, dontl’existence est ennuyeuse comme la syntaxe latine, indi-geste comme une fève sèche, désolante et stérile commeun oued tari, morne comme la mort, où vois-tu qu’ilsmènent une vie de bonheur comme tu dis ?

— Du moins, ils coulent des jours paisibles, tandisqu’Alexandre le Grand assassiné à trente ans…

— Trente-trois !— César percé de je ne sais combien de coups…— Vingt-trois !— … y compris par son propre fils, Antoine et Cléo-

pâtre, suicidés…— Leurs vies valaient la peine ! et dans une vie qui

vaut la peine, je ne porterai pas le nom de Bethsabéequi a déjà servi. J’ai un nom double : Bathzabbai Zéno-bia, j’élimine Bethsabée qui serait pour moi comme

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une cage, il reste le second : Zénobia ! Il sonne bien,tendre et farouche, il me plaît ! C’est celui que je vaisporter ! Un si beau nom pour entrer dans l’Histoire,acheva-t-elle avec une de ces pirouettes désinvoltesdont elle devenait coutumière lorsqu’elle ne savait plus

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elle-même si elle devait prendre ses propres paroles ausérieux.

Depuis son âge le plus tendre, Zénobie circulait sansentraves de l’univers féminin au masculin, de l’apparte-ment des femmes au bureau de son père, jamais fermépour elle.

Le gynécée, où elle rendait visite à sa mère qui y vivaitconfinée, était un lieu feutré, moite et sirupeux. On yrespirait un air douceâtre filtré par de pesantes tenturesqui masquaient les ouvertures, étouffaient les bruits,apaisaient la touffeur de l’été et réchauffaient les rudesjournées hivernales. Des pétales flottaient paresseuse-ment à la surface de vasques à l’eau odorante ; desvapeurs montaient des piscines pavées de lapis-lazuli,tandis que des femmes, de toutes les couleurs de peau,vêtues d’amples robes flottantes qui leur traînaient surles talons, circulaient sans bruit, se livraient à des travauxsilencieux, chuchotant, riant doucement, sans éclat, dansune atmosphère calfeutrée.

Dans une pièce plongée dans la pénombre, près dulit où sa mère passait le plus clair de son temps, soutenuepar des coussins rembourrés, dans une atmosphère ren-due plus étouffante par les herbes odorantes qui seconsumaient continuellement dans des cassolettes, loinde se sentir protégée, Zénobie pressentait un dangersournois qui la guettait. Tous ses sens en alerte, elle flai-rait le piège, redoutant de glisser jusqu’à s’engloutir dansce cocon de douceur écœurante qui enveloppait sa mère,

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l’absorbait, la retenait prisonnière dans d’invisibles rets.Zénobie avait une mère incapable de sortir de chez

elle sans s’évanouir au soleil, à qui l’idée de se mettreen selle donnait le vertige, qui caressait les joues ver-meilles de sa fille d’une main aux doigts épuisés, une

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mère à qui l’enfant ne pouvait rien raconter de sa vieet de ses rêves, avec laquelle elle ne pouvait rien partager.Au bout d’un moment dans cette chambre obscure oùpas un rayon de jour ne filtrait, où les voix étoufféesdes servantes chuchotaient imperceptiblement, où leursdémarches silencieuses et leurs allures fantomatiquesaggravaient une atmosphère irrespirable, Zénobie s’empê-chait d’arracher les lourds rideaux qui interceptaient lalumière, de renverser les brûle-parfums et de hurler sapeur au lieu de murmurer.

Elle s’enfuyait alors, loin de cet univers suffocant etpoisseux, cherchant pour antidotes l’éclat de foudre dusoleil, la réverbération de la lumière sur les dalles, l’airdu dehors happé à pleins poumons, les courses follesdans le désert.

Longtemps, elle crut que toutes les mères ressem-blaient à la sienne, créatures au teint d’olive, aux yeuxtristes, soulignés de cernes profonds, vivant allongées,remuant faiblement un membre, soulevant une mainmolle comme une tige moisie. Elle remarqua, sous lessoieries qui recouvraient le corps étendu, que le ventrematernel s’arrondissait. Elle n’interrogeait pas, pas mêmedu regard, sachant d’instinct le sujet interdit. Or, au fildu temps, le ventre grossissait, puis il se dégonflait ; maisaucun enfant n’en sortait jamais. Elle scruta cette énigmeet chercha confirmation de ses soupçons auprès de sanourrice. La malheureuse se défendit, prétextant que lesenfants n’avaient pas à connaître les secrets de leursparents.

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Devant l’obstination de Zénobie, elle dut lâcher lavérité :

— Tu vois bien les autres autour de toi. Tu es seulealors que le frère de ton père, Odenath, a plusieurs fils.

— On dit même qu’il ne sait pas combien !

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Un destin en marche

— Petite tourterelle, n’écoute pas les mauvais racon-tars ! Donc, tu vois des familles avec plusieurs enfantsalors que tu n’as ni frères ni sœurs.

— Je n’en ai pas besoin !— Mais les hommes aiment avoir des fils, des mâles,

tu comprends ?— Rien du tout ! Je ne comprends rien ! répondit

une voix inquiète et jalouse montant dans les aigus.— Ta mère voudrait donner un fils à ton père, au

moins un !— Et pourquoi ? Est-ce que je compte moins qu’un

garçon ? Je fais tout ce que mon père demande, je luiobéis en tout, quel fils pourrait m’égaler ?

La voix vibrant de désespoir, elle acheva dans ce quiétait à la fois un sanglot et un cri :

— Je ne lui suffis pas ?— Oh, ma douce colombe, bien sûr que tu lui suffis,

c’est ta mère, vois-tu, qui voudrait lui offrir ce cadeau.— Mais pourquoi ?— C’est son rôle de femme !— Si c’est vrai, c’est affreux ! Le rôle d’une femme

n’est pas de pondre !— S’il te plaît, ma colombe au bec rose, aux gentilles

petites pattes rouges, calme-toi ! Ne te mets pas dansun état pareil.

— Et chaque fois, maman, maman… (elle suffo-quait, hoquetait, échappait à sa nourrice qui voulaitl’attirer dans ses bras pour la consoler) maman perd sonenfant. Je suis sa fille vivante et elle met au monde des

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enfants morts parce que je ne lui suffis pas !— Mais pas du tout !Zénobie n’écoutait plus.— Et c’est pour ça que les médecins défilent ici, et

les mages de Perse, et les vieilles femmes avec leurs

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magies, et les filles du désert qui connaissent les secretsdes plantes, et qu’on envoie chercher des mandragores…et maman va continuer à enfler, à désenfler (Zénobieposa ses mains sur son ventre les éloigna comme si elletenait une balle, les rapprocha, recommença)… mamanva essayer encore et encore jusqu’à… jusqu’à ce qu’elleait donné un fils à papa ?

En quelques années, la jeune femme devint si maigreet décharnée, ses cernes creusaient si profondément sesjoues cendreuses qu’aucun des médicastres qui faisaientfortune en lui prescrivant d’inutiles médicaments n’osaitplus conseiller de nouveaux traitements. Ils recomman-daient la plus grande prudence et l’arrêt de toute nou-velle tentative.

Mais elle, avec son doux sourire, en fit une encore,en dépit d’Antiochos.

— Encore une fois, la dernière, mon cher époux,disait-elle avec un irrésistible sourire alangui, s’étant lon-guement préparée, belle en dépit de sa maigreur, ayantusé des khôls, fards, maquillages, mettant en valeur labeauté d’une chevelure luxuriante, usant des parfumsqu’elle faisait venir d’Arabie, portant des bijoux anciensinestimables, faisant palpiter dans l’ombre doucementdes lumières colorées qui avivaient son teint, servant aumaître de ses mains les viandes grasses d’un festin,l’abreuvant de prestigieux vins de Chio dans un cratèred’or.

Antiochos, largement informé du délabrement de la

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santé de sa femme et du risque mortel que lui feraitcourir une nouvelle grossesse, se croyait assez fort pourrésister. Il savait boire sans s’enivrer et accepta la coupedébordante qu’elle lui tendait. Il l’avait achetée, pour lalui offrir, le prix d’un palais à un Libanais qui assurait

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Un destin en marche

que c’était celle-là même dans laquelle Cléopâtre avaitfait fondre la perle légendaire qu’elle avait bue avecAntoine. Une perle de dix millions de sesterces, pourgagner contre Antoine le pari d’un festin au coût pha-raonique.

Aucun d’eux ne pouvait oublier cette histoire que lavue de la coupe leur remettait en mémoire, et cepen-dant, tandis qu’il buvait, elle raconta les amours de lareine d’Égypte avec Marc Antoine, leur escalade de pas-sion et de folie ; elle en fit un récit merveilleux, trèstendrement, très savamment, très sensuellement avec savoix aux accents las mais si charmeurs.

Et, lorsqu’il eut achevé de boire, elle remplit de nou-veau la coupe légendaire. Il avala une gorgée et la luitendit. Elle choisit la place exacte où il avait posé leslèvres, leurs yeux ne cessaient de se parler par-dessus lerebord de ce trop célèbre objet qui évoquait d’irrésis-tibles étreintes royales et allumait en eux les feux dudésir charnel.

Elle cessa de boire et lui remit la coupe dans la main.Il la prit, la posa et se leva. Elle avait prévu de n’avoir

qu’un geste à faire : elle dégrafa sa fibule d’épaule, sarobe s’affala sur ses pieds ; nue devant lui, elle lui saisitles mains et les posa sur elle, se lovant contre lui pourl’enivrer des parfums dont elle avait enduit son corpset ses cheveux, le caressant comme l’amante qu’elle vou-lait être encore.

Sa grossesse fut aussi scrupuleusement surveillée que

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celle d’une impératrice. Pour mettre toutes les chancesde son côté, elle vécut neuf mois allongée. Lorsqu’elle selevait, c’était en s’appuyant sur deux servantes pour évi-ter un faux pas, quittant le lit pour le divan, le divan pourdes coussins et retournant au lit. Les mois s’écoulaient.

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Table

PREMIÈRE PARTIE

Bathzabbai Zanoubia

I. Un destin en marche .............................................. 13II. Le léopard des sables............................................... 43

III. L’argument irréfutable ............................................ 61IV. La chair des dieux ................................................... 81

DEUXIÈME PARTIE

Zénobie et la confrontation des mondes

I. Le mariage ne tue pas ............................................. 99II. Une ville rasée au sol............................................... 107

III. Une caravane pour Antioche................................... 127

371

IV. Le sanctuaire des dévotions licencieuses .................. 141

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La Reine de l’Orient

TROISIÈME PARTIE

Princesse de Palmyre

I. Où tu seras Gaius, je serai Gaia............................... 163II. Le dialogue amoureux............................................. 181

III. Une volée de flèches contre les portes de Ctésiphon.... 205IV. Chasses royales ....................................................... 231V. Régicide.................................................................. 245

QUATRIÈME PARTIE

La Reine de l’Orient

I. Une impératrice de vingt-sept ans........................... 261II. Rendez-vous en Égypte........................................... 277

III. Un paysan d’Illyrie ................................................. 299IV. La reine aux outrages .............................................. 329

Remerciements ............................................................... 369

No d’édition : L.01EUCN000575.N001Dépôt légal : avril 2014