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ETUDE DES RELATIONS ENTRE LA BRETAGNE ET LA CHINE DE 1534 À AUJOURD’HUI Opportunités et coopérations pour prospérer dans un monde incertain… L’Hermine et le Lotus Une contribution de l’Association des cadres bretons à Paris

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ETUDE DES RELATIONS ENTRE LA BRETAGNE ET LA CHINE DE 1534 À AUJOURD’HUI

O p p o r t u n i t é s e t c o o p é r a t i o n s p o u r p r o s p é r e r d a n s u n m o n d e i n c e r t a i n …

L’Hermine et le Lotus

Une contribution de l’Association des cadres bretons à Paris

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E D I T O

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Kevin LOGNONÉ, Vice-président de l’association des cadres bretons

500 ans après la découverte du golfe du fleuve Saint-Laurent par l’explorateur malouin Jacques Cartier, rappelons que ce dernier s’était vu confié par François Ier la mission de rechercher, au nord du Nouveau Monde, un passage vers la Chine, à l’instar de Vasco de Gama passant le Cap de Bonne-Espérance et coulant la puissance vénitienne car « d’un seul coup » les produits de Chine valaient – déjà - cinq fois moins cher à Lisbonne qu’à Venise.

Nomadisme, circulation… Echanges … Comment brancher …(?) A la croisée des rêves de Jules Verne, l’amiral Zheng He qui avait exploré le détroit d’Hormuz sur les traces de Marco Polo ou encore Ma Yun, fondateur d’Alibaba, leader chinois du commerce en ligne.

De retour de Chine, j’ai reçu un texte fort bien écrit et documenté d’un cabinet de conseil en investissement international basé à Hong Kong (Lazuli International). J’ai pensé qu’il

intéresserait tous ceux qui se demandent quelle transformation attend, de nos jours, le Céleste Empire. En voici la synthèse qui s’intitule : « La Route de la soie du 21ème siècle sur les rails » écrite par Edwige MURGUET :

Les voyages du président de la République Populaire de Chine, Xi Jinping à l’étranger se multiplient. Ils s’accompagnent souvent de signatures de mémorandums de coopérations avec les nations positionnées sur les voies terrestres et maritimes de la « Route de la soie » moderne. Sa renaissance n’est guère une fiction, comme en témoignent les multiples travaux d’infrastructures déjà programmés le long de son tracé. Parmi eux, l’on peut citer, par exemple, la ligne à grande vitesse, construite par un consortium de compagnies chinoises, qui reliera Belgrade à Budapest, et dont l’ouverture est prévue pour 2018.

Une zone de libre échange « inclusive »

Les briques fondatrices de ce maillage immense, traversant 65 pays et régions, représentant une population de 4,6 milliards, s’installent vite : Les premières fois que cette ambition chinoise a été révélée datent seulement de septembre et d’octobre 2013, lorsque le président chinois, en visite en Asie Centrale et en Asie du Sud-Est, a proposé au Kazakhstan puis à l’Indonésie de construire conjointement la « Ceinture économique de la route la soie » et la « Route maritime de la soie du 21ième siècle ».

Aux côtés de la série de réformes d’ouverture de l’Empire du Milieu, dont celle de l’internationalisation du Renminbi, ce mouvement d’envergure doit aboutir à la formation d’une nouvelle plate-forme mondiale de commerce et d’investissement, tout en emboîtant les complémentarités des pays reliés entre eux. Autrement dit, il s’agit de créer une gigantesque zone de libre échange et de régions interconnectées.

Quelle est sa différence avec les divers traités d’échanges commerciaux actuels, tels le TPP (accord de partenariat transpacifique) ou le TTIP (Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement) ? Son « inclusivité » : « N’importe quel pays intéressé peut y participer, lorsqu’il le souhaite, et sans date limite, sans calendrier imposé », observe Pansy Yau, directrice adjointe de HKTDC (Hong Kong Trade Development Council) Research.

Le numérique de la soie

L’autre modernité de cette initiative est d’insister sur les connexions entre les diverses régions et pays parties prenantes. Afin de remplir cette condition, le projet chinois s’appuie sur les nouvelles technologies et l’internet des objets (« internet of things »). Ce n’est pas un hasard si l’initiative de la «Route de la soie numérique» (« Digital silk road »), placée sous l’autorité chinoise du « virtuel » («Chinese cyberspace authority »), reliée au programme domestique « Internet Plus » de déploiement de l’électronique chinois, a été lancée concomitamment. Quelle est sa mission ? Permettre aux entreprises investies dans la Route de la soie de participer à la « numérisation », tout en renforçant les relations commerciales entre la Chine et l’Europe.

A cet égard, Luigi Gambardella, le président de ChinaEU (association internationale jouant le rôle d’incubateur pour les startups novatrices du numérique, développées en commun entre la Chine et l’Europe), estime que la Route de la soie numérique est « la route de l’avenir. La Chine et l’Europe doivent coopérer dans l’Internet. » Afin de faciliter les collaborations, il faudrait, selon lui, « qu’un traité de la « cyber route de la soie » soit établi : Nous devrions analyser les réglementations de chacun afin de discuter de la politique future. » Quoiqu’il en soit, plusieurs entreprises sont déjà passées à l’action. Des partenariats sont en train de se concrétiser, à l’image de celui entre Deutsche Telekom et Huawei, pour offrir une offre « nuage » (« cloud ») au marché chinois.

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Des besoins colossaux

Contrairement à ce que certains observateurs ont jugé aux premiers jours de l’annonce de la volonté de revitaliser la Route de la soie, le projet n’est pas seulement politique. Il répond à des besoins réels, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la Chine. Un chiffre pour s’en convaincre : Selon la Banque asiatique de développement, les investissements nécessaires en infrastructure en Asie sont d’en moyenne 730 milliards de dollars US par an jusqu’en 2020, dont 68 % dédiés à de nouvelles capacités et 32 % au maintien et au remplacement des facilités obsolètes.

La coopération ferroviaire qui vient d’être lancée entre la Chine et la Thaïlande, afin de construire une voie de 867 km, s’inscrit dans ce contexte. Il ne s’agit d’ailleurs que d’une « petite » section du projet chinois d’établir une ligne à grande vitesse reliant Kunming à Singapour, en passant par le Laos, la Thaïlande et la Malaisie. De même, en Indonésie, la Chine a remporté la construction (de 5,5 milliards de dollars) d’une ligne de 150 km de train à grande vitesse. Au grand dam des partenaires historiques indonésiens, dont les industriels japonais.

La Route de la soie est donc aussi en train de rebattre les cartes de la compétition mondiale, et dans de multiples secteurs. D’ailleurs, ce que les entreprises chinoises attendent le plus de l’OBOR : « One Belt, One Road » / « Une Ceinture, Une Route » (d’après une étude réalisée par le HKTDC), c’est de les aider à cibler directement de nouveaux marchés de consommation.

Le tracé de la Route de la soie du 21ème siècle

L’objectif de l’OBOR (« Une Ceinture, Une Route ») est de connecter l’Asie, l’Europe et l’Afrique grâce à cinq itinéraires.Source : HKTDC

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p.5L E S P A S S E U R S ( C E U X Q U I T R A N S M E T T E N T )

Dominique SALVERT, Maire de l’Ile-de-Sein

Pierre-Emmanuel MARAIS, Conseiller municipal de Nantes délégué à la diversité linguistique

Jocelyne BOUGEARD, Adjointe au maire de Rennes déléguée aux relations internationales

Jacques HUCHET, Conseiller municipal de Saint-Malo délégué aux relations internationales

L E S D É C L E N C H E U R S ( C E U X Q U I P R O P A G E N T )

Benoit LUCAS, Directeur général de la Caisse d’Assurances Mutuelles du Crédit Agricole

Geoffroy de LASSUS, Head of Heritage & Historical Archives for CIB and IS, BNP Paribas

Orianne CHENAIN, Directrice générale de la Chambre de commerce et d’industrie française à Hong Kong

Bastien LE COZ, Fondateur d’AstreaCo, porte-parole des bretons à Hong-Kong

Matthieu GAULOIS, Vice-président communication de l’Union des commerçants du Mont-Saint-Michel

L E S D É F R I C H E U R S ( C E U X Q U I O S E N T )

Bertrand GUIDON, Ancien urbaniste à la Ville de Rennes, coordinateur technique du projet Asia Urbs for Qufu

Alain GRAND GUILLOT, Expert sur les villes portuaires et laboratoires d’idées maritimes

Thierry LARNICOL, Fondateur et directeur de Seafood Fusion

Loïz FILY et Julien KERSALÉ, Co-fondateurs de Pen Ar Box

L E S C O N N E C T E U R S ( C E U X Q U I F O R M E N T L E S R É S E A U X )

Qingguo XUE, Directeur général du Bureau des Affaires étrangères de la Province du Shandong.

Zhang WEI, Directeur général du Bureau des Affaires étrangères de la ville de Tai’an

Blaise THIERREE, Directeur de l’Alliance française de Jinan, capitale du Shandong

Yvane ABIVEN, Evelyne OLLIVIER-LORPHELIN, Yannick et Benoît MORIN, Co-fondateurs de l’association

France Chine International

Marie CARO, Responsable de la commission internationale de l’association des cadres bretons

S O M M A I R E

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L E S P A S S E U R S

( C E U X Q U I D É P A S S E N T L E S F R O N T I È R E S T E C H N O L O G I Q U E S )

«Venir ensemble est un commencement ; rester ensemble est un progrès ;

travailler ensemble est un succès. »

Proverbe chinois

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L E 2 7 J A N V I E R 1 9 6 4 « C O U P D E T O N N E R R E D A N S L E C I E L D I P L O M A T I Q U E »

En reconnaissant la Chine populaire, le 27 janvier 1964, le général de Gaulle a ouvert la porte aux relations franco-chinoises contemporaines et gagné en retour une considération et une notoriété incontestables auprès du public chinois.

Le 27 janvier 1964, un bref communiqué était publié simultanément à Paris et à Pékin : « Le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République populaire de Chine ont décidé, d’un commun accord, d’établir des relations diplomatiques. Ils sont convenus à cet effet de désigner des ambassadeurs dans un délai de trois mois ».

Quarante ans plus tard, la sobriété de l’annonce tranche avec l’audace d’une telle décision, dans un monde alors divisé en deux blocs inconciliables et marqué par l’aggravation des tensions militaires en Asie du Sud-Est. Si sept États occidentaux avaient maintenu leurs relations avec le nouveau régime communiste au pouvoir à Pékin, aucun échange d’ambassadeurs ne pourra se faire avant 1972.

Dans ce sillon, la Bretagne n’a pas manqué à sa vocation de laboratoire des pratiques mémorielles.

« Donner un nouveau souffle au devoir de mémoire » : telle était l’ambition qu’entendait alors consolider une personnalité de la Côte

d’Emeraude : Yvon Bourges, ancien ministre, alors président de région Bretagne et ami dans les rangs du gaullisme d’Alain Peyreffite, auteur d’un ouvrage prémonitoire : « Quand la Chine s’éveillera…».

U N P R E M I E R J U M E L A G E E N T R E L A P R O V I N C E C H I N O I S E D U S H A N D O N G E T L A B R E T A G N E Q U I F Ê T E S E S 3 0 A N S D ’ A N N I V E R S A I R E

Deuxième région française pour l’enseignement du chinois, la Bretagne a développé des relations depuis 1985 avec la province côtière du Shandong. Depuis, des capitales bretonnes se sont jumelées avec les grandes villes de cette province, ainsi Rennes avec Jinan, Quimper avec Yantai, Brest et Nantes avec Qingdao, Saint-Brieuc avec Weifang, et Lorient avec Rizhao.

De grands symboles, emblèmes ou signes distinctifs doivent nous encourager à poursuivre cette coopération avec la Chine. Les habitants de l’île de Sein, le « quart de la France », qui avaient été les premiers à rejoindre le général de Gaulle à Londres, constitue un bel exemple d’audace et de persévérance pour bâtir demain.

A travers ce livre blanc, l’association des cadres bretons (ACB) a souhaité donner la parole à tous ceux qui peuvent contribuer à réactiver cette diplomatie d’influence. Qu’ils soient remerciés pour leur témoignage.

Source : Fondation Charles de Gaulle

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D O M I N I Q U E S A L V E R T Maire de l’Ile-de-Sein

Les habitants de l’Ile de Sein furent parmi les premiers à rejoindre le Général de Gaulle après son appel du 18 juin 1940, refusant la capitulation et appelant à continuer le combat. Le Message d’avenir se trouve sur le monument des français libres, sur l’île au Men Ei et comporte comme inscription en français : « Le soldat qui ne reconnait pas vaincu a toujours raison » et en breton « Kentoc’h Mervel » (Plutôt Mourir).

« L’Ile de Sein, une des cinq villes Compagnon de la Libération, peut grâce à cette distinction, dialoguer avec la Chine, ce grand pays qui voue au Général de Gaulle une immense vénération. »

Le 11eme ambassadeur de Chine, Zhai Jun qui a déposé ses lettres de créance le 7 janvier 2014, est allé se recueillir sur la tombe du Général à Colombey-les-Deux-Eglises avant même de rencontrer le Président de la République, perpétrant ainsi une tradition ancienne.

Si ce furent d’abord les échanges commerciaux, qui ont développé des relations entre la France et la Chine; ce furent aussi les relations intellectuelles, et par exemple celle des célèbres 6 missionnaires «mathématiciens» du roi Louis XIV, qui partirent de Bretagne en 1685 et qui ont inauguré un véritable commerce des lumières. L’Ile-de Sein, en tant que laboratoire des énergies renouvelables, pourrait-elle réactiver aujourd’hui cette diplomatie d’influence ?

« A la pointe de l’Europe, Sein est devenue une figure emblématique des risques du réchauffement climatique qui pèseront dans le siècle à venir. »

Outre les protections réalisées ou confortées, le Conseil municipal s’est emparé depuis 2008 de la question de la transition énergétique avec réalisme mais sans sombrer dans le catastrophisme ambiant.

Avec l’appui de la grande majorité de la population, les modifications de l’ensemble de la chaîne énergétique continuent à être mises en place, de la diminution de la consommation des énergies à l’objectif de production 100% renouvelable. Mais cet objectif visant à réduire, puis supprimer le recours aux énergies fossiles doit être atteint de façon raisonnée et raisonnable en fonction des possibilités locales et des évolutions technologiques (photovoltaïque en cours d’installation et à l’étude : éolien, hydrolien, problématique du stockage).

« L’Ile s’est engagée dans un vaste processus général avec la signature d’accords de Boucle Energétique à Ouessant.»

Les partenaires signataires assurent un engagement total et fiable : l’Etat, la Région Bretagne, le Département du Finistère, l’AIP Association des Iles du Ponant, les opérateurs EDF, ERDF, SDEF Syndicat Départemental d’Energie et d’Equipement du Finistère, Société SABELLA.

« L’Ile de Sein, petit territoire maritime breton qui était, selon le Général de Gaulle en 1940 le quart de la France, est encore aujourd’hui Résistante en poursuivant activement ses réalisations dans le domaine de la transition énergétique.»

Elle ne baisse pas les bras face aux menaces, plus ou moins avérées, du réchauffement climatique.

Ses expériences de transition énergétique pourraient jouer un rôle de passeur, de pont interculturel avec la Chine, à l’instar de la démarche « lycée vert » du lycée international Charles-de-Gaulle de Pékin.

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P I E R R E - E M M A N U E L M A R A I SConseiller municipal de Nantes délégué à la diversité linguistique

Comme l’a rappelé l’exposition « La soie & le canon » organisée au château des ducs de Bretagne, en 2010, c’est à Nantes que les échanges commerciaux entre la Chine et la France ont pris un essor considérable. En octobre 1700, l’Amphitrite, premier navire français à commercer avec la Chine, revient en France et c’est à Nantes, grand port de commerce colonial, qu’il vend sa cargaison : thé, soie, porcelaine, nacre, ivoire, panneaux laqués... Naît alors un vrai goût pour la Chine, ses objets et sa culture. Le voyage de ce bateau a été un élément clé du développement des relations sino-françaises, et il représente également la place

importante que la Bretagne occupait dans le commerce mondial. Par ailleurs, le navire ayant été de retour à Lorient en 1700 mais ayant appareillé à Nantes pour vendre sa marchandise, cet épisode illustre la complémentarité que les villes bretonnes ont de tout temps entretenu entre elles. A Nantes, notamment, revient le rôle de grande place commerçante et négociante.

« C’est la dynamique entre les spécificités de chacune de nos villes qui a forgé, au fil des siècles, la singularité bretonne : un territoire décentralisé travaillant à la fois en réseau et vers l’extérieur. A l’avenir, nous devrons précisément continuer à faire vivre ce schéma pour amplifier notre vitalité politique et économique.»

Au XVIIIème siècle, marginaux sur le plan strictement économique, les échanges avec la Chine ont des répercussions profondes en Europe sur la consommation, le cadre de vie, la vie artistique et les échanges d’idées. Cette influence s’exerce notamment sur la littérature, la musique, les spectacles, l’art des jardins. Nantes a été à cette époque une grande plate-forme de vente d’objets chinois. Et c’est le nantais Thomas Dobrée, armateur et collectionneur, qui a fait la tentative de renouer avec la Chine, en armant un navire, le Fils-de-France.

Différents éléments concordants - à la fois culturels, économiques et diplomatiques- ont pu permettre de faire naître cette dynamique. Mais la spécificité bretonne est là encore à prendre en compte : si toute l’Europe versait à cette époque dans un « orientalisme » quelque peu superficiel, la Bretagne avait depuis des siècles tissé des liens plus profonds avec les comptoirs chinois. Et elle a su pleinement tirer profit de cette période d’importation commerciale, jusqu’à l’éclatement en 1840/1860 des guerres de l’opium, qui ouvriront un siècle de domination coloniale.

Forte de son histoire de négoce, la Bretagne doit se repositionner en tant que grande nation maritime. Mais pour cela, elle doit préalablement faire un profond travail sur elle-même : à la fois en reprenant confiance en elle, et en redevenant maîtresse de ses moyens. Comme autant de leviers, l’appropriation collective de sa langue, et la valorisation de son histoire, sa littérature, son architecture, ses arts visuels permettront d’actionner une nouvelle mise en mouvement de la péninsule. Les relations entre la Chine et l’Occident ont de tout temps mêlé curiosité et malentendus. La prospère période de négoce s’annonçait comme un enrichissement mutuel aux esprits éclairés de la Chine des Qing comme de l’Europe des Lumières. Toutefois, les prétentions coloniales occidentales briseront ce cercle vertueux.

Depuis quelques décennies, des ponts se reconstruisent entre nos nations. A Nantes, des jumelages et coopérations ont été noués avec Niigata (Japon), Suncheon (Corée) et Quingdao (Chine). Dans la démarche, ces échanges portent principalement sur la jeunesse, la culture, les industries créatives et culturelles, l’enseignement supérieur, la recherche et les relations économiques. Mais à l’image de la Bretagne, Nantes a tout à gagner en valorisant dans ces coopérations ce qui fait d’elle un territoire à la fois singulier et passionnant. La place du bilinguisme français/breton, son rôle de plus grande ville bretonne, son statut de grand port maritime, son effervescence artistique, son goût pour l’expérimentation sont autant d’éléments qui doivent la distinguer et faire d’elle -à nouveau- une ville ouverte sur le monde.

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J O C E L Y N E B O U G E A R DAdjointe au maire de Rennes déléguée aux relations internationales et aux relations publiques

L’expérience de réhabilitation du patrimoine de la ville de Qufu (ville de Confucius), financée par l’Union Européenne, la ville de Rennes et la ville de Saint-Jacques-de-Compostelle s’est constituée autour d’un noyau de trois villes d’histoires et de cultures, réunies autour d’une conviction : le patrimoine est autant un héritage à préserver qu’un outil à développer pour transmettre les savoirs et les savoir-faire dans des villes en perpétuelle mutation.

La force de ce dénominateur commun a permis de construire un partenariat élargi, à plusieurs niveaux, en mobilisant notamment pour l’élaboration technique et la diffusion du projet les universités et les réseaux de chaque ville (la Conférence des villes de l’Arc Atlantique par exemple).

La Ville de Rennes a également eu le souci d’associer la Ville de Jinan, sa ville jumelée, à la réflexion en matière de développement touristique. Cette coopération, en permettant une connaissance plus large de la Province du Shandong, elle-même jumelée avec la Région Bretagne, a permis de renforcer les liens entre les différents partenaires institutionnels dans cette partie de la Chine.

D’un point de vue technique, les équipes d’urbanistes ont, de part et d’autre, retenu l’importance de la formation pour la mise en œuvre d’une approche de développement urbain alors nouvelle : celle visant à intégrer le patrimoine, sa restauration et sa protection au projet de développement urbain. Au-delà des échanges de savoir-faire et des réalisations d’études, l’organisation de formations pour différents acteurs, tout au long du projet, a permis d’obtenir l’adhésion au projet des responsables, des acteurs de la ville et des habitants eux-mêmes. En outre, en multipliant les interactions et en permettant d’approfondir les échanges, elle a sans conteste favorisé la réciprocité des enseignements.

Plus encore depuis la formalisation de son jumelage avec la Ville de Jinan en 2002, la Ville de Rennes accompagne et soutient les initiatives locales qui démontrent une ouverture vers la Chine : les échanges et animations organisés par le comité de jumelage, les activités de l’Institut Confucius de Bretagne à Rennes, les liens avec l’Alliance Française à Jinan…

« C’est précisément le dynamisme de l’ensemble de ces acteurs qui fait vivre la sinophilie de la Ville de Rennes qui s’illustre d’ailleurs comme la première académie, hors Paris, pour le nombre d’étudiants qui apprennent cette langue. »

La coopération de Ville à Ville a quant à elle connu de nombreuses évolutions, toujours dans le sens d’un renforcement des partenariats et des projets sur des thématiques stratégiques pour nos deux collectivités. La déclaration conjointe de septembre 2015 a, en ce sens, engagé nos deux villes à renforcer le partenariat économique et technologique entre les acteurs de leurs territoires. Au-delà des échanges institutionnels qui permettront le croisement des intérêts, nous travaillerons à partir de 2016 avec notre ville partenaire pour favoriser les rencontres entre représentants des secteurs de l’agro-alimentaire, du numérique et de la recherche.

Rennes Métropole, dont la Ville de Rennes est la ville centre, est signataire de la charte verte numérique portée par le réseau Eurocities. Dans cette charte, qui s’inscrit pleinement dans la promotion des smart cities, les signataires s’engagent à réduire leurs émissions par l’utilisation innovante des technologies numériques dans les villes.

L’ensemble des villes signataires (une cinquantaine de villes européennes, dont plus de dix capitales) partage la problématique de progresser rapidement dans la lutte contre le changement climatique. Cet enjeu résonne dans le cadre de nos partenariats internationaux et, il est vrai, de manière encore plus forte pour les villes chinoises qui font face à une situation d’urgence en matière de lutte contre la pollution atmosphérique.

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J A C Q U E S H U C H E TConseiller municipal de Saint-Malo délégué aux relations internationales, européennes et aux jumelages, ancien diplomate

Riche d’un héritage archéologique millénaire de fours de goémoniers, Saint-Malo a toujours entretenu une longue tradition de valorisation des nouvelles énergies du futur (algues, biotechnologies marines, stockage de l’énergie verte…). Le principe même de l’efficacité énergétique – innover et investir pour consommer moins et dépenser moins – veut que de tels investissements soient - dans leur principe - rentables avec un temps plus ou moins long de retour sur investissement.

Répondre aux défis de la transition énergétique exige de bâtir une industrie financière spécifique permettant d’accompagner les nouvelles industries

de l’efficacité énergétique. Ainsi, était formulée la préconisation d’un ami de Saint-Malo, Alain Madelin, ancien ministre des finances, dans son ouvrage « Unir pour agir ». Pour créer l’industrie financière de l’efficacité énergétique, il faut pouvoir sécuriser juridiquement les économies d’énergie, et standardiser les différents types d’efficacité énergétique afin de les titriser et de les transformer en produits financiers. La Bank of China a annoncé, il y a un an, l’ouverture d’une branche à Jersey.

« Terre de banquiers nomades, Saint-Malo pourrait tout à fait s’inscrire dans un axe d’attractivité avec les îles anglo-normandes : Jersey et Guernesey pour promouvoir une Grande Muraille Verte : modèle franco-chinois d’ingénierie financière en faveur de la transition énergétique. »

En s’inspirant des mécanismes mis en place à l’étranger, il est possible de financer des travaux considérables en matière d’efficacité énergétique à condition de donner une valeur sûre aux économies d’énergie réalisées. Il existe en effet dans de nombreux pays des sociétés de services énergétiques qui se rémunèrent sur l’économie réalisée (autrefois les Sofergies en France).Un fonds de garantie (permanent ou éphémère) pourrait être créé pour favoriser l’émergence de ce nouveau marché en Chine, grâce à l’appui de groupes mutualistes bretons reconnus dans le paysage bancaire européen et international. Un mécanisme viable de financement des économies d’énergie pourrait consister à adosser des sociétés de financement à des Sociétés de Services d’Efficacité Énergétique qui pourraient s’implanter sur l’axe Saint-Malo Jersey.

La Côte d’Emeraude est aussi une terre de richesses historiques et culturelles. Après le jade, l’Emeraude est une pierre précieuse très symbolique en Extrême-Orient. Le long de la route de la Soie, on en évoque déjà la présence à Babylone, au IIe millénaire av. J.C., où elle servait de monnaie d’échange. Les émeraudes sont rares, car leur formation nécessite des conditions géologiques exceptionnelles. Son système cristallin est hexagonal, à l’image à des fortifications portuaires qu’a léguées Vauban à Saint-Malo. Parce-que la mondialisation nous conduit à imaginer de nouvelles échelles territoriales, la Cité corsaire se situe au carrefour de formidables gisements pour stimuler son potentiel créatif.

Dans un monde où les talents sont nomades, les capitaux voyageurs et les emplois mobiles, Saint-Malo dispose de véritables atouts pour devenir pionnier dans l’économie immatérielle, et tout particulièrement en matière de décentralisation de production de sens et de paradigmes, locomotive des industries créatives et numériques de demain. Prenez l’exemple du big data. En visitant le Mont-Saint-Michel, des touristes chinois pourraient ainsi acheter des secondes d’animation personnalisées pour faire, par exemple, une demande en mariage grâce à une application mobile.

« Un circuit de noces romantiques pourrait s’imaginer autour de neuf portes (la porte du Mont-Saint-Michel et les 8 portes des remparts de Saint-Malo). Le chiffre “9” est un chiffre sacré en Chine. Les 9900 pièces de la Cité interdite. Les 9 ferrures horizontales et 9 ferrures verticales de nombreux temples. Signer un contrat le 9 du mois en Chine est un signe de longévité... »

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L E S D É C L E N C H E U R S

( C E U X Q U I P R O P A G E N T )

« Avec le temps et la patience,le mûrier devient soie »

Proverbe chinois

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B E N O I T L U C A S Directeur général de la Caisse d’Assurances Mutuelles du Crédit Agricole

Le concept de Village by CA repose sur la création d’un écosystème favorable aux start-up en phase de développement. Après une 1ère expérience réussie dans le 8eme arrondissement de Paris une douzaine de Villages devraient voir le jour en région

permettant ainsi de tisser des liens entre chacune des entités. Parallèlement le concept de Village va progressivement s’étendre dans le monde en s’appuyant sur les implantations du Groupe Crédit agricole et notamment celles de CACIB, la banque de financement et d’investissement du Groupe.

« L’Extrême-Orient a une place de choix dans la stratégie du Groupe Crédit agricole du fait de la présence plus que centenaire (1894) de la banque d’Indochine devenue Indosuez dans cette région, qui est depuis 1996 dans le giron de la Banque verte. »

Ainsi des start-up française pourront s’attaquer aux importants marchés asiatiques et nord américains en profitant d’une infrastructure dédiée (bureaux, conseils juridiques) et en bénéficiant de la bienveillance et des conseils avisés des parrains des Villages by CA (Sanofi, HP, Philips, Microsoft, Bearing Point, etc...). Après la route de la soie une nouvelle page de l’histoire économique va s’ouvrir sous l’impulsion d’entreprises innovantes dont certaines deviendront peut être des Licornes (1) à l’image de Criteo, jeune pousse française désormais cotée au NASDAQ.

L’économie numérique est en train de révolutionner les règles financières qui prévalaient jusque là. Il n’est plus nécessaire de disposer d’importants capitaux pour pénétrer des marchés et s’imposer à l’échelle mondiale. L’innovation numérique peut en effet rencontrer un rapide succès quel que soit le domaine d’activité sans toujours disposer d’usines de production ni même de réseaux de distribution traditionnels. Basée sur les services l’économie 3.0 donne la part belle à des start-up innovantes qui bouleversent les usages et désarçonnent parfois les Blue chips bien établis (Airbnb, Blablacar, Uber, Ouicar, etc...). L’open Data, la co-création, la démarche de test & learn et l’accès à une communauté d’intérêt priment sur le capital qui lui même devient une ressource abondante et accessible via tous les outils existants (capital création, capital développement, business Angels, BPI, fonds privés) et en devenir (crowdfunding). À partir du vaisseau amiral de la rue la Boetie à Paris, le réseau mondial des Villages permettra demain à une start-up bretonne de prendre son envol et d’accéder aux fabuleux marchés Asiatiques au premier rang desquels l’Empire du Milieu.

Le Crédit agricole est l’une des 1ères banques mondiales à avoir pris des engagements concrets en faveur des énergies renouvelables en renonçant par exemple à financer les mines de charbon et en signant avec EDF une convention portant sur une consommation électrique de l’ensemble des entités du Groupe à 92% d’origine renouvelable. Renouant avec l’excellence de l’ingénierie française on peut imaginer des coopérations plus étroites entre nos 2 pays à la faveur du financement de la transition énergétique. Parmi les nombreux domaines possibles 2 correspondent à un vrai savoir faire breton : les centrales de Méthanisation et l’exploitation des ressources maritimes.La taille des exploitations agricoles chinoises et l’impérieuse nécessité de réduire les émissions de CO2 impliquent la construction d’un grand nombre unités de Méthanisation pour lesquelles des entreprises bretonnes disposent d’un réel savoir faire. De même, la valorisation des innombrables ressources maritimes, tant pour répondre à des besoins de consommation (pisciculture) qu’en matière de recherche médicale (algues, vers) ou de production d’énergie (hydrolien, éolien, etc...) est un des axes prioritaires de la région Bretagne qui se structure et investit dans ces pôles d’excellence. Là encore, les initiales privées et publiques doivent se conjuguer pour ouvrir une nouvelle voie de développement durable entre la France et la Chine, de Brest à Shanghai.

(1) : les Licornes sont des entreprises innovantes parvenant à atteindre le seuil du milliard de $ de capitalisation boursière (2) : Polytechnicien, constructeur du canal de Suez à l’origine du développement de Pléneuf-Val-André (22) en tant que cité balnéaire.

Entre tradition et modernisme

Penser mondial et agir local

Sur les pas de Charles Cotard (2)

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G E O F F R O Y D E L A S S U S Head of Heritage & Historical Archives for CIB and IS, BNP Paribas

« Au tournant des XIXème et XXème siècles, trois banques ancêtres du Groupe BNP Paribas ont organisé le financement d’un des plus grands chantiers de travaux publics de l’époque, la construction du chemin de fer de Pékin à Hankou (aujourd’hui Wuhan), d’une longueur de 1200 km. »

La réalisation de ce projet a été un événement important, ne serait-ce que par le montant de l’opération (112 millions de francs de l’époque soit environ 600 millions d’euros). Mais cette opération est surtout remarquable car elle n’aurait jamais pu voir le jour tant les négociations ont été difficiles. Finalement, cette ligne Pékin-Hankou a été la ligne ferroviaire la plus rentable du monde.

Pourtant, depuis le début du XIXème siècle, les relations entre Chine et Occident sont difficiles. Les Chinois se méfient des visées colonialistes des Occidentaux, qui se manifestent notamment lors des guerres de l’opium et après ce que les Chinois ont qualifié de « traités inégaux ».

A la fin du siècle, plusieurs hauts-fonctionnaires chinois prennent conscience de l’insuffisance des moyens de communication à travers l’empire et de la nécessité d’ouvrir une liaison ferroviaire sur l’axe Pékin-Hankou afin de transporter vers le nord le riz et le sorgho produits dans le centre du pays.

Pour eux, ce projet est d’abord justifié par des raisons économiques, mais il s’agit aussi de restaurer le pouvoir impérial ébranlé par la révolte des Taïping (1851-1864).

Les négociations ont été longues et difficiles en raison de la situation de la Chine ; en effet, pour des raisons politiques, la Chine ne voulait pas négocier officiellement avec la plupart des pays occidentaux toujours suspects de visées colonialistes.

Seule la Belgique trouvait grâce à ses yeux et les négociations s’engagèrent avec la Société générale de Belgique (banque ancêtre de BNP Paribas Fortis). Cette dernière considérait cependant l’opération comme risquée et fit alliance avec la Banque de Paris et des Pays-Bas (Paribas), ce qui lui permettait aussi d’avoir accès à l’épargne française.

Un emprunt obligataire fut organisé et placé sans difficulté à Paris et à Bruxelles ; Paribas fit appel au Comptoir national d’escompte de Paris (banque ancêtre de BNP Paribas) qui disposait d’une grande capacité de placement de ce type d’emprunt auprès des épargnants français.

« Il faut se rappeler que Paris est alors la deuxième plus importante place financière du monde après Londres et que les banques françaises financent beaucoup de projets à l’étranger. »

C’est un ingénieur belge, Jean Jadot, qui diriga la construction de cette ligne ferroviaire de 1899 à 1905. Ce vaste chantier est parfaitement mené ; cependant, en juin 1900 éclate la révolte des Boxers. Ce mouvement insurrectionnel xénophobe fait des victimes au sein du personnel employé dans la construction de la voie. Par ailleurs, la construction du pont sur le Huang he, seule véritable difficulté technique du tracé, est achevée en juin 1905. Compte tenu du contexte géopolitique de l’époque, cette opération avait peu de chances de voir le jour.

« Il a fallu beaucoup de persévérance de la part de tous les acteurs belges, français et chinois pour parvenir à un accord. Cet accord a finalement été trouvé car le projet avait un sens économique fort et qu’il était nécessaire et utile à l’économie de la Chine impériale. »

Celle-ci rachètera d’ailleurs la concession de la ligne en 1909.

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O R I A N N E C H E N A I N Directrice générale de la Chambre de commerce et d’industrie française à Hong Kong

La communauté d’affaires française de Hong Kong peut jouer un rôle de fer de lance de notre diplomatie économique de différentes façons.

Tout d’abord, Hong Kong a la spécificité d’avoir une communauté d’affaires qui est une photographie du PIB de Hong Kong (et nous sommes les seuls, au sein des communautés d’affaires étrangères à avoir cette spécificité et à couvrir tous les secteurs qui font le PIB de Hong Kong). En outre, nous avons les premières places ; cela est vrai et connu pour le Luxe bien sûr, mais aussi dans la finance (produits dérivés d’une grande banque française par exemple), dans le secteur des infrastructures (avec de très nombreux grands projets du gouvernement construits par Bouygues Dragages : le premier aéroport, Pacific Place, Kai Tak Ferry Terminal, le pont Hong Kong Macau sans parler de très nombreux tunnels), dans le secteur du développement durable (Suez et Veolia se repartissent 80% du marches des eaux et des déchets), mais oublier dans le secteur de l’agro-alimentaire… Cela

donne une notoriété au « Made in France » unique et soutient les nouveaux arrivants qui peuvent ici plus qu’ailleurs se prévaloir de leur ADN français.

« La communauté d’affaires française est très visible à Hong Kong et constitue un relais de notre diplomatie économique. »

Nous nous implantons en amenant ce qui fait notre ADN, notre savoir vivre, nos boulangeries, galeries d’arts, rôtisseries… Pourtant, la communauté d’affaire française à Hong Kong est loin d’être la plus nombreuse, elle jouit cependant d’un rayonnement bien supérieur à sa taille car elle a su s’intégrer au tissu social et apporter un savoir vivre auquel les hongkongais ont adhéré. Le French May, Festival culturel de grande qualité et de renom qui permet de tisser ces relations. En outre, nous souhaitons en permanence, notamment à la chambre, rester au cœur de l’actualité et être certains d’attirer les sociétés qui correspondent aux nouveaux secteurs prioritaires à Hong Kong. C’est le cas des Fin Tech. La chambre a créé un comité sur ce thème et constitue un lieu de ressources en pointe sur tout ce qui évolue avec les start-up du secteur...

Nous avons également, pendant deux ans, travaillé avec le gouvernement hongkongais sur le projet Wise City, l’idée étant de travailler très en amont avec le gouvernement hongkongais sur le type de technologies qui pourrait être mise en œuvre pour faire de Hong Kong une ville Smart, une « Wise City ». Nous avons organisé à cet égard le déplacement d’une délégation de hauts fonctionnaires hongkongais en France pour leur faire découvrir nos technologies et remis au gouvernement hongkongais un rapport riche intitulé : « Creative solutions » mettant en avant pour cinq secteurs (Building, Waste, Water, Mobility et City Platform) les technologies françaises à même de répondre aux besoins du futur.

« Les grands chantiers qui jouent un rôle de pont interculturel sont au premier plan ceux du secteur de la construction avec des projets emblématiques ambassadeurs du savoir-faire français : Bouygues Dragages est par exemple en train de construire le tunnel le plus profond jamais construit, en faisant appel à des technologies et un savoir-faire hors-normes. »

Nous sommes aujourd’hui l’une des nationalités les plus présentes au sein du Cyber Port, grand hub des start-up technologiques. En étant très présents dans les grands incubateurs de la baie de Hong Kong, nous véhiculons un message fort sur la qualité de l’expertise française en matière de nouvelles technologies. La France est soignée par le gouvernement de Hong Kong qui cherche à attirer ses start-up.

Pour conclure, le festival « French May » qui se tient désormais sur plus de deux mois entre avril et juin et chaque année renouvelle une programmation de grande valeur. C’est l’un des éléments les plus visibles de ce pont interculturel entre la France et Hong Kong, étant largement financé, outre par les grands groupes français mais par de grands noms hongkongais à commencer par l’institution phare qu’est le Jockey club de Hong Kong.

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B A S T I E N L E C O Z Fondateur d’AstreaCo, porte-parole des bretons à Hong-Kong

Située à l’embouchure du delta de la rivière des Perles – 50 millions d’habitants et un PIB de 55 milliards de US$ -, la ville de Hong Kong rayonne sur le sud de la Chine. Cette situation géographique privilégiée est mise en valeur par un statut particulier, celui de Région Administrative Spéciale (RAS) de la République Populaire de Chine – la rétrocession de 1997 n’a en effet aucunement altéré le cadre institutionnel, juridique et économique du territoire. La gouvernance – économique et monétaire notamment – se montre exemplaire en intervenant de façon mesurée et efficace dans l’économie tout en veillant au fameux « laisser-faire », véritable force d’attractivité pour les acteurs économiques.

Troisième port de conteneurs après Singapour et Shanghai, place financière de premier ordre, classée deuxième place asiatique (hors

Japon), Hong Kong est la douzième puissance commerciale du monde (source : Consulat général de France à Hong Kong). Aujourd’hui Hong Kong est sans conteste un des centres majeurs de la finance à l’échelle mondiale. C’est la septième place boursière dans le monde, et la troisième en Asie en ce qui concerne la capitalisation boursière. Les métiers liés aux services financiers représentent ainsi 16,1% du PIB tout en n’employant que 5,9% de la population active.Le marché Hongkongais répond à une dynamique particulière de combinaison d’un pouvoir d’achat relativement élevé de sa population, qui favorise les dépenses en produits de luxe et d’un flux de touristes en constant essor (42 millions en 2011). Parmi ces 42 millions de touristes, 67% viennent de la Chine Continentale.

La gastronomie bretonne est une carte de visite à explorer. Aujourd’hui, la communauté française à Hong Kong, les institutions, associations et entreprises qui la composent, peuvent se réunir dans un lieu mythique de Hong-Kong : la crêperie « Fleur de sel », née à l’initiative de l’ancien cuisinier du consul de France à Hong-Kong.

« Des start-up bretonnes sont en pointe dans des initiatives ingénieuses d’immersion de bouteille de vin dans des caves sous-marines. Or, la Chine est devenue, en trente ans, le 7e pays producteur de vin au niveau mondial. »

Selon Business France, la production y a plus que doublé depuis 2006, passant de 5 millions d’hectolitres à 11,6 millions en 2014.

Deux raisons principales expliquent cette évolution exceptionnelle. Le premier facteur tient à une volonté gouvernementale forte : la Chine a voulu préserver ses cultures céréalières (notamment de riz) pour l’alimentation, en limitant la production des alcools blancs et jaunes. Ceci a profité aux vins, alors même que le gouvernement a incité des agriculteurs à produire des raisins de cuve là où il n’y avait que peu ou pas de culture. Huit grandes régions vinicoles, ont ainsi émergé. Dans les années 80, le gouvernement a aussi favorisé des investissements conjoints franco-chinois pour établir des sociétés de production viticole, les capitaux français ayant été ensuite rachetés. Cinq champions nationaux réalisaient encore actuellement plus de 70% de la production vinicole chinoise. La seconde raison vient du fait que depuis 10 ans, le vin est devenu la boisson à la mode en Chine. Les jeunes consommateurs urbains plébiscitent le produit, essentiellement via les importations. Celles-ci viennent principalement de France, pays qui reste le leader incontesté sur ce segment avec 44% des parts du marché des vins en bouteille importés en Chine en 2014. Avec la récente politique anticorruption, le marché chinois est devenu assez tendu depuis 2014, en particulier pour les vins haut-de-gamme. Les vins d’entrée de gamme restent cependant très demandés par les consommateurs chinois, et le marché devient plus mature et rationnel.

Yantai, ville du vin en Chine, bénéficie d’une proximité immédiate avec Qindgao, grand port de la Péninsule du Shandong. Dans le cadre de la coopération entre la Bretagne et la province côtière du Shandong, il serait original de permettre des entrepreneurs et des porteurs de projets innovants bretons d’exporter leur savoir-faire pour développer de l’immersion de bouteilles de vin dans des caves sous-marines, à l’instar des initiatives dans l’île de Cézembre au large de Saint-Malo ou dans le bassin technopolitain de Brest.

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M A T T H I E U G A U L O I S Vice-président communication de l’Union des commerçants du Mont-Saint-Michel

« Au Mont-Saint-Michel, le professeur Yoshiyuki Sankai, et sa firme, Cyberdyne ont investi dans la cybernétique et la robotisation. »

Seiji Uchida, un Japonais paralysé des jambes, a réalisé son rêve de gravir les ruelles sinueuses du site, grâce à un robot à assistance musculaire : le robot HAL (Hybrid assistive limb). Alimentée par une batterie, sa structure était bardée de capteurs détectant le signal d’activation des muscles humains émanant du cerveau. Grâce à des micromoteurs, l’ensemble prenait en charge le travail musculaire requis pour porter une masse, marcher ou monter des escaliers. Arrivé au sommet après une lente ascension d’une heure trente, rythmée par quelque pauses, ce robot blanc de 25 kilos a savouré la vue sur la baie, en riant. « C’est l’homme bionique, c’est Robocop » s’exclamaient les passants. Nous voudrions que le Mont Saint-Michel

reste comme il est et que les personnes handicapées puissent le visiter. C’est important qu’ils puissent regarder le monde à notre hauteur.

Après le rétablissement du caractère maritime, le Mont pourrait devenir un laboratoire. Les nouvelles technologies permettraient d’avoir une approche plus adaptée aux différentes populations touristiques de par le développement de logiciels et de programmes ciblés. Les opérateurs internet et téléphonie mobile pourraient proposer aux Tour-operators des services personnalisés aux visiteurs.

« Le Mont-Saint-Michel a été jumelé en Chine avec le Mont-Taishan. »

Son point culminant, le pic de l’Empereur de jade, a une altitude de 1 545 m. Il est particulièrement important par son histoire et sa signification culturelle, car c’est l’une des cinq montagnes sacrées de la Chine. C’est le Mont de l’Est, associé à l’aurore, à la naissance et au renouveau, et la plus vénérée des cinq montagnes sacrées. « Si le mont Taishan tient debout, mon pays l’est aussi » avaient l’habitude de dire les empereurs chinois. Les temples qui y sont perchés sont une destination de choix pour les pèlerins depuis 3 000 ans. C’est le théâtre d’un pèlerinage unique : l’ascension nocturne vers le pic sacré de l’Empereur de jade. Au sommet du dernier temple, se trouve une vue extraordinaire : l’avenue du ciel.

« Le Mont-Saint-Michel, souvent qualifié Merveille de l’Occident, pourrait tisser une toile en Orient, via un partage d’expérience avec le Mont Taishan mais aussi la réhabilitation du patrimoine de la ville de Qufu (ville de Confucius) financée par l’Union européenne, la ville de Rennes et la ville de Saint-Jacques-de-Compostelle. »

Je me déplace au Mont-Saint-Michel en Vectrix, un scooter électrique qui vient de Californie. Nous aimerions que le Mont soit doté d’un système Vélib et Autolib, comme à Paris. Relier les villes les unes aux autres par un moyen de transport écologique et ultra-rapide... Un rêve d’auteur de science-fiction ? Peut-être plus pour longtemps. Conçu par une équipe de 10 000 personnes, l’Hyperloop verra ses huit premiers kilomètres de ligne installés en 2016 en Californie. Un moyen de locomotion (en théorie) capable d’atteindre 1 200 km/h, qui pourrait, estiment ses concepteurs, remplacer le métro, le train, et même l’avion. La conception de ce train supersonique initié par Elon Musk - fondateur de Tesla, SolarCity et SpaceX - a été confiée à l’entrepreneur allemand Dirk Ahlborn. Après avoir fondé JumpstartFund, un incubateur d’entreprises technologiques financé par la NASA, ce quadragénaire berlinois est à la tête de l’entreprise Hyperloop Transportation Technologies.

Pourquoi ne pas imaginer un prototype semblable au Mont-Saint-Michel relié aux grands axes européens ? En matière de gestion des déchets, nous souhaitons que le Mont devienne un site exemplaire. En faisant appel aux nouvelles technologies normandes et bretonnes, cette baie millénaire peut devenir un laboratoire avancé des énergies alternatives. Les biotechnologies vertes, le développement d’une filière de biocarburants seraient des pistes à creuser pour réduire la pollution et l’empreinte énergétique.

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L E S D É F R I C H E U R S

( C E U X Q U I O S E N T )

« Il n’y a que les fous et les Européens qui voyagent ! »

Proverbe chinois

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B E R T R A N D G U I D O N Ancien urbaniste à la Ville de Rennes, coordinateur technique du projet Asia Urbs for Qufu, Membre de France Chine International

Malgré sa petite taille, Qufu est une ville connue de tous les Chinois du fait de Confucius. On y trouve le Temple de Confucius, qui est l’ensemble monumental le plus important de Chine après la Cité Interdite (700 m de longueur), la Résidence de la famille Kong (450 pièces sur 14ha, datant du XIVème siècle) et la « Forêt » de Confucius, gigantesque cimetière «familial» de 200 ha où se trouvent les tombes de Confucius et de son fils, mais aussi de milliers de descendants, la ville comptant toujours de très nombreux membres de la famille. Le Temple et la Résidence sont au cœur de la « Cité Ming », entourés de ruelles et de maisons basses souvent cependant reconstruites et rehaussées. La Cité Ming est ceinturée par des remparts. Temple, Résidence et Forêt ont été classés au patrimoine mondial de l’humanité en 1994.

La coopération entre Rennes et Qufu prit place dans un programme partiellement financé par l’Union européenne dans les années 2000, du nom de Asia Urbs, qui visait à développer des relations directes de coopération entre des villes européennes et des villes d ‘Asie. Il y avait deux programmes pour la Chine, dont le projet qui associait Rennes et Saint-Jacques de Compostelle (Espagne) pour coopérer avec Qufu. Le budget de notre projet s’est élevé à 1 Million d’euros.

L’objectif était de faire profiter Qufu de l’expérience de villes françaises dans deux domaines pour lesquels Rennes et Saint Jacques de Compostelle étaient connues pour leurs politiques novatrices et efficaces en vue d’assurer :

• la protection et la mise en valeur du patrimoine urbain ordinaire environnant Temple et Résidence, par opposition à une pratique alors fréquente de démolition trop systématique des quartiers d’habitat anciens• le développement d’un tourisme de qualité, en évitant la « ville-musée » et les dérives commerciales non respectueuses du patrimoine, Qufu accueillant déjà plus de 5 millions de touristes en 2005, Chinois essentiellement.

Les trois années de coopération (2005-2007) furent marquées par des échanges de visites de responsables politiques, à Qufu et dans les deux villes européennes, mais surtout par une relation directe de travail entre les services des trois villes, avec notamment une dizaine de mission de 10 à 15 jours à Qufu, impliquant des architectes, urbanistes, ingénieurs, renforcés par des experts internationaux qui furent associés au projet, ainsi que par une équipe de la prestigieuse Université Tonhgji de Shanghaï. En outre un jeune architecte français avait été recruté pour une présence sur place permanente aux côtés de l’équipe chinoise. Au travers d’inventaires et de cartographie, de réunions de travail, de visites de terrain, de discussions de projets, avec également trois séminaires internationaux (dont un à Rennes), un cadre et une méthodologie furent ainsi établis pour le développement de la ville. Les services de Qufu bénéficièrent aussi d’une véritable formation aux approches occidentales de la question du patrimoine.

Une des leçons de cette passionnante expérience est, dans le cas d’un travail avec des Chinois, de bénéficier de médiateurs culturels de qualité. Une coopération effective entre équipes appartenant à des pays de langues et de cultures aussi différentes ne peut être efficace, au-delà de la bonne volonté réciproque, sans l’aide de médiateurs culturels ayant une bonne connaissance des deux cultures. Ceci passe par le recours à un interprète francophone de haut niveau, si possible y compris dans le domaine de la mission car il ne s’agit pas seulement de traduire des propos de table... Ceci est passé aussi, dans notre cas par le recours à des experts ayant déjà une longue expérience professionnelle en Chine, dont un Chinois vivant à Paris. Ce dernier, notamment, fut plusieurs fois en mesure de réduire des situations d’incompréhension entre les deux parties, ce qui permit d’avancer rapidement et efficacement. Il s’agit là d’une expérience de coopération institutionnelle, certes. Mais cette nécessité de médiation culturelle est aussi, à mon avis, un facteur de succès essentiel pour des opérations commerciales en Chine, ou pour travailler efficacement avec des fournisseurs ou des sous-traitants chinois. Il y a là un débouché intéressant pour les nombreux étudiants chinois en France, qui sont nombreux à Rennes, dont pourraient bénéficier les entreprises bretonnes désireuses de travailler en Chine. Quelques jeunes sociétés de services existent déjà pour cela. Il serait intéressant de les encourager à se développer en y recrutant ces jeunes Chinois ou d’autres plus expérimentés.

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A L A I N G R A N D G U I L L O T Expert sur les villes portuaires et laboratoires d’idées maritimes

« Neptune sourira à des aventuriers des territoires océaniques de notre planète. »

Les océans et la conservation de leur patrimoine constituent le lieu de la survie de notre civilisation et de la paix qu’elle impose. La Bretagne est la terre des marins, celtes ou pas, qui ont construit un récit géo-poétique unique et qui sont allés sur toutes les mers du monde depuis la plus haute antiquité ; baladin des mers lointaines, ils sont les futurs navigateurs de passages entre nous de l’Atlantique et les pays de l’Asie du Pacifique pour donner une voie à une nouvelle fraternité mondiale et de coopérations matérielles et immatérielles.

Ces peuples de la mer possèdent un vaste patrimoine culturel qui les différencie des autres peuples du monde. Les bretons et leur diaspora ont développé ce patrimoine universel en le propulsant dans les domaines technologiques les plus variés proposant le lien le plus moderne entre les Villes-Ports de l’Asie et de la Bretagne historique, adapter les besoins de navires aux usages des peuples et à leurs bassins de navigation ; mixant techniques millénaires et innovations les plus récentes : du catamaran (issu des peuples marins du Pacifique) aux navires à foils (Hydroptère) en passant par la modernisation des navires hauturiers à voile comme le cargo solidaire de la Maison des Hommes et techniques de Nantes. Il est nécessaire que les peuples aiment les mers et les océans pour les respecter dans toute leur dimension, ainsi les peuples les plus continentaux comprendront ce qu’ils doivent au cycle de l’eau, ici et là-bas. Les peuples de Chine doivent partir à la conquête des océans en coopérant avec l’ensemble des autres peuples riverains, la Chine est l’élément incontournable de la lutte contre le changement brutal du climat.

« Les bretons ont constitué la majeure partie des équipes d’exploration de terres lointaines, est-ce un hasard s’ils comptent parmi les plus grands sinologues ? »

N’est ce pas aussi des porteurs d’une culture très ancienne, capable de trouver des ponts avec celle de la Chine et pour découvrir ensemble un vivre ensemble. Les bretons habitent un pays qui a construit une culture nautique populaire et ils entretiennent un sentiment océanique prêt à se transformer au moindre zéphir politique en une activité riche de promesses de vie meilleure.

« Les bretons sont les passeurs pour découvrir les richesses ancestrales et futures du monde, reprenant le flambeau poétique de Jules Verne. »

On les appelle les anciens de Dubigeon sur les quais de Nantes, anciens de la navale mais aussi compagnons de route des dockers et des marins depuis des siècles, voire des millénaires quand Naoned s’appelait Corbilo, proche d’une île où vivaient des druidesses selon les récits de Phythéas ; plus de deux milles ans après ils n’ont pas voulu mourir et ont laissé un témoignage de leur savoir-faire éternel : en 2005, ils ont donné aux marins et armateurs, dans ses moindres détails un cargo à voiles, le cargo solidaire (100 m, 50 passagers dont 15 passagers handicapés, équipage de 15 marins, 1 hôpital, un fret de 25 conteneurs) capables de circumnavigation. Dans ce cargo voilier, héritier des cap-horniers et précurseur de la révolution vélique en matière de navires ; créer des embarquements de futurs actifs qui feraient leur service civil et interculturel pour œuvrer ensemble à des missions humanitaires de commerce solidaire, en bien et en services, telle serait la mission des audacieux bretons et chinois ! Partir un trimestre pour découvrir ensemble la langue de l’autre et sa culture, échanger ses points de vue sur la découverte de régions visitées et réaliser des actions bénévoles auprès des populations lors des escales. Le partage des cultures pourrait s’appuyer par l’image ; celle du design, celle du dessin dont la Bande Dessinée, celle de la peinture avec des époques-clef comme l’attrait de la peinture chinoise par les impressionnistes et les inspirations de l’Ecole de Pont-Aven qui renvoie à l’imaginaire du Pacifique ou celle des Seiz breur qui renvoi à l’art du XX ème siècle. Créer une flotte internationale de la Croissance Bleue à partir d’une initiative sino-bretonne s’inspirant des plans du cargo-solidaire.

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T H I E R R Y L A R N I C O L Fondateur et directeur de Seafood Fusion

« Plongée dans la mondialisation, la cité du Ponant et son grand port maritime ont été les premiers à regarder l’Extrême Orient. »

La rue de Siam, artère principale du centre-ville reconstruit de Brest, doit son nom actuel au débarquement de trois ambassadeurs du roi de Siam Narai, menés par Kosa Pan, dans ce port, le 18 juin 1686. Accompagnés de six mandarins, trois interprètes, deux secrétaires et une vingtaine de domestiques, chargés de nombreux présents, ils venaient rendre visite au roi Louis XIV à Versailles. Venus par mer, ils avaient voyagé à bord des navires l’Oiseau et la Maligne. Empruntant à pied la rue Saint-Pierre pour se rendre à l’hôtel du même nom, ils émerveillèrent les Brestois qui rebaptisèrent leur rue.

Près de 670 ans après ce premier contact, nous devons garder ce goût pour l’inventivité et l’émerveillement. SEA FOOD FUSION puise

son âme singulière dans cet ADN collaboratif. En réinventant un nouveau récit qui valorise les savoir-faire de l’aquaculture bretonne, nous récréons une boussole pour parler au monde. SEA FOOD FUSION joue ce rôle de belvédère en agglomérant les talents du monde entier désireux d’inventer de nouveaux défis culinaires autour des algues et les coquillages. De cette première édition, nous avons décomplexé les possibles et imaginé de nouveaux paradigmes. Mais fondamentalement, nous avons voulu exprimer les valeurs d’engagement et d’esprit pionnier des hommes de la mer, c’est-à-dire les amoureux du monde. Sans nul doute que les portes maritimes de la Chine seront propices à développer de nouveaux échanges à l’avenir.

Forte de son esprit inventif, la gastronomie en France représente de 61,8 milliards d’euros de chiffre d’affaires. C’est le 5e secteur pourvoyeur d’emplois. Partie intégrante de notre patrimoine culturel et de notre identité, la gastronomie est vivante. Elle participe au dynamisme économique de nos régions ainsi qu’au rayonnement de la France à l’international. Or, la cuisine française accorde peu de place aux coquillages alors qu’ils peuvent jouer un rôle de vitrine de notre créativité, de notre passion pour l’innovation culinaire et gastronomique. C’est en partant de ce constat qu’est né SEA FOOD FUSION. Hormis les huitres, présentés brutes, les coquilles St Jacques poêlées, et, dans une autre démarche d’utilisation, les moules, toujours escortées de frites, les coquillages sont peu ou pas assez cuisinés par nos chefs. Nous souhaitions désacraliser, les coquillages, les démocratiser et ainsi mettre en avant, un patrimoine d’une richesse extraordinaire. Nous souhaitions montrer à tous que nous sommes au cœur de la plus belle région productrice de coquillages de France, et faire découvrir à chacun tout un monde de saveurs et de plaisirs simples. Dans un principe collaboratif proche de celui des pôles de compétitivité, nous souhaitions associer les talents et les meilleures idées qui intègrent les défis posés par la biodiversité, la recherche des océans. Face à ces enjeux, notre Pointe Bretagne, péninsule de l’Occident dispose de belles ressources intellectuelles et créatives pour tisser une toile en Orient. C’est d’ailleurs vraisemblablement là que se joue l’export de nos savoir-faire.

Je repense à cette formule empruntée au bord de la Méditerranée par le prince-savant au musée océanographique de Monaco : « Ici, messieurs, la terre monégasque a fait surgir un temple fier et inviolable dédié à la divinité nouvelle qui règne sur les intelligences ». Malgré leurs géographies aux ponants de l’Europe, il faut considérer les Bretons non comme des êtres de crépuscule mais comme des êtres du commencement, des hommes du matin, écrivait Xavier Grall. Avec son Palais des Mers : Océanopolis, Brest, cité marine par excellence, s’avance largement dans l’océan. Depuis le Siècle des Lumières, la ville a concentré une grande partie des compétences nationales, européennes et internationales en matière d’océanographie et de technologie marine. Elle est au centre d’un des plus beaux ensembles d’écosystèmes marins tempérés, offrant une gamme de coquillages de pêche et d’élevage parmi la plus variée au monde. Des Glénan à Camaret, de la Baie d’Audierne aux Abers, de la rade de Brest à la Baie de Morlaix nous sommes au cœur de la plus belle région de production de coquillages de pêche et d’élevage. Il était donc logique que le premier Festival Seafood Fusion se tienne dans cette ville, face à l’Atlantique, annonçant également Brest 2016 et ses fêtes maritimes. Dans un monde où les talents sont nomades, les capitaux voyageurs et les emplois mobiles, Brest peut bel et bien jouer un rôle de passeur, de pont interculturel avec la Chine, et ainsi répandre une approche planétaire responsable de Croissance bleue (Lotus Bleu).

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L O Ï Z F I L Y E T J U L I E N K E R S A L É Co-fondateurs de Pen Ar Box

Penn ar Box est une jeune start-up bretonne dont l’objectif est d’envoyer du bonheur à l’ensemble des bretons et des terriens du monde. Pour ce faire, deux box de produits bretons ont été créés.

La première, la Plij Box, composée de six produits surprenants et innovants issus des artisans de la région Bretagne. Cette box change tous les mois de façon à faire découvrir le plus grand nombre d’acteurs de la région à cinq départements. La

deuxième, la Buhez Box, composée de dix produits phare bretons, pour l’ensemble estampillés Produit en Bretagne. Cette box fixe est un véritable kit de survie pour l’ensemble des bretons du monde. C’est aussi un excellent moyen pour faire découvrir les produits bretons au monde entier.

« La mission de Penn ar Box est simple : faire rayonner le savoir-faire breton dans le monde entier ! »

Penn ar Box a un excellent outil pour y parvenir : une box découverte de produits phare bretons.

Afin de faire rayonner plus efficacement le savoir-faire culinaires bretons en Asie, il nous faut trouver des relais sur place : pour étudier la perception des produits bretons de nos box dans les pays concernés, pour obtenir des facilités douanières et pour développer de manières efficaces notre offre auprès des bons réseaux. Ce travail de recherche de prescripteurs est à mener en commun avec d’autres acteurs bretons qui partagent une mission identique à la notre.

Aujourd’hui, un très bel outil est mis à disposition des entreprises dont l’objectif est de faire rayonner la Bretagne à l’international : la Marque Bretagne. Ce rassemblement d’entreprises bretonnes sous une même marque apporte de la certification et de la notoriété aux entreprises exportatrices. Il apparaît donc comme primordial de fonctionner ensemble, en réseau, pour parvenir à bâtir une image de marque forte au niveau mondial. La puissance des entreprises gastronomiques bretonnes, de part leur qualité certaine et approuvée, couplée à la diaspora bretonne, 6ème département breton, sont des facteurs déterminants pour la propulsion d’une image commune.

De nombreuses jeunes pousses participent d’ores et déjà activement à cette réunion et ce rassemblement. On peut notamment penser à Stag et son application mobile de géolocalisation et d’interactions entre bretons, et Penn ar Box, et ses box découvertes du terroir et savoir-faire breton.

Aussi, différentes associations vont aussi dans ce sens. Enfin, La Région Bretagne participe aussi au rayonnement et au déploiement de notre terroir.

« L’ensemble des facteurs semblent être réunis pour parvenir à bâtir une marque au niveau mondial : un marketing territorial fort, des entreprises gastronomiques bretonnes reconnues, de start-up bretonnes tournées vers l’international et des organismes publics engagés. »

Il ne manque plus qu’un rassemblement et une organisation commune. Il faut tisser un fil rouge et développer ensemble des synergies. Créer l’entreprise Bretagne.

Penn ar Box est un moyen pour faire découvrir le pouvoir gastronomique breton dans le monde entier. La Chine est un de nos principaux objectifs. Cependant pour être efficace, ce travail doit être réalisé en commun et de manière collaborative. Ce n’est pas une entité au bout du monde qui y parviendra seule. Le vivier d’acteurs ayant cette mission commune est conséquent. Il faut que ces acteurs se rassemblent pour créer des ponts et ainsi faciliter les échanges culturels ou d’exportation de produits. Penn ar Box apportera sa connaissance du métier de boxeur et des produits bretons.

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L E S C O N N E C T E U R S

( C E U X Q U I F O R M E N T L E S R É S E A U X )

« Pour connaître la route devant toi, demande à ceux qui en reviennent. »

Proverbe chinois

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Q I N G G U O X U E Directeur général du Bureau des Affaires étrangères de la Province du Shandong, jumelée avec la Région Bretagne

« Notre grand projet actuel visant à attirer des entreprises européennes est un Eco-Parc sino-allemand, situé à Qingdao, grand port chinois, qui couvre en ce moment une superficie de 11,6 km2 et dans l’avenir 66 km2. »

Les entreprises européennes dans les domaines suivants sont les bienvenues : la protection de l’environnement, les énergies renouvelables, les équipements mécaniques de haut niveau, les technologies numériques, les filières basées sur la formation et l’éducation, la finance, la médecine, la culture et les sports.

Lors de son dernier déplacement à Paris, le Premier Ministre Li Keqiang appellait à se faire des Penseurs dans la coopération innovante sino-française. La Province du Shandong entend contribuer à cette diplomatie d’influence en travaillant en amont avec ses partenaires français territoriaux, notamment avec les régions et

les villes jumelles du Shandong : la Région Bretagne, la Région des Pays de la Loire, les villes de Rennes, Brest, Nantes, Angers, etc.

« La coopération décentralisée sino-française est une base solide et un moteur important pour la relation entre les deux pays. Nous allons choisi des domaines tels que l’agroalimentaire, la protection de l’environnement, le tourisme comme des nouvelles pistes de coopération avec nos régions partenaires françaises.»

Les Vices-Gouverneurs à l’international, les directeurs du Bureau des affaires étrangères du Gouvernement du Shandong sont prêts à jouer un rôle de passeur, de pont interculturel entre la Chine et l’Europe. Surtout, notre Bureau des Affaires étrangères qui accompagne les acteurs du Shandong dans les recherches de partenaires européens.

Pour la période du XIIe plan quinquennal (2011-2015), le gouvernement chinois a fixé à la province un objectif de croissance de 9 %, contre 10 % lors de la période du XIe plan. La priorité est donnée à la restructuration économique de la province (et, notamment, la mise en oeuvre du programme intitulé Efficient Eco-Economic Zone in the Yellow River Delta). En 2013, le PIB du Shandong a toutefois progressé de 9,6 % en glissement annuel. Troisième plus riche province de Chine et troisième marché du pays, le Shandong compte plus de dix villes de plus de cinq millions d’habitants qui formeront une conurbation majeure à l’horizon 2016, date à laquelle la population touchant un revenu supérieur à 30 000 CNY/an devrait dépasser le seuil de 50 %. D’importantes réformes sont en cours, qui visent à rééquilibrer l’économie provinciale en faveur de la vaste agglomération

urbaine organisée autour de la capitale, Jinan. Mais le développement des industries marines à Qingdao, Yantai, Weihai et Rizhao notamment est également au programme ; et ces mutations tous azimuts offrent d’importantes opportunités aux entreprises françaises, dans des secteurs aussi divers que les nouvelles technologies, le nucléaire, la construction navale et les fibres artificielles… Source : ambassade de France à Pékin

La Province du Shandong en quelques mots

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Z H A N G W E I Directeur général du Bureau des Affaires étrangères de la ville de Tai’an

Tai’an est une ville située dans la province du Shandong en Chine. Sa population est de 615 300 habitants. C’est une cité riche en ressources touristiques naturelles et doté d’un fort patrimoine culturel. Elle a remporté de nombreux titres de distinction. La principale destination touristique de la ville est le mont Tai (Tàishān / 泰泰). Elle possède également d’anciennes fortifications en son centre.

Le mont Tai est situé juste au nord de la ville de Tai’an, au sud de la capitale provinciale Jinan. Le dénivelé est imposant puisqu’au cours de l’ascension, on passe de 150 à 1 545 m d’altitude. La base du mont a une superficie de 426 km². Haut lieu de dévotion sous la dynastie Han, cette montagne taoïste héberge temples et sanctuaires. Son point culminant, le pic de l’Empereur de jade a une altitude de 1545 m. Il est particulièrement important par son histoire et sa signification culturelle, car c’est l’une des cinq montagnes sacrées de la Chine.

Depuis 1987, le mont Tai est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. En 2003, environ 6 millions de visiteurs s’y sont rendus, de Chine et d’ailleurs. Un projet de rénovation pour restaurer les

reliques culturelles et reconstruire les bâtiments importants est en voie d’achèvement. Parallèlement, des constructions modernes doivent être démolies pour préserver le paysage historique du site. Le coût total du projet est estimé à 15 millions de yuan.

Le tourisme est devenu un moteur économique de plus en plus fort pour Tai’an. Le taux de contribution du tourisme à Tai’an atteint 35,1%.

Avec la France et ses sites emblématiques touristiques, comme le Mont-Saint-Michel, nous souhaitons engager des coopérations dans le secteur du tourisme. Nous tenons également à réfléchir aux modalités d’un travail partenarial dans l’éducation, mais aussi viser des échanges économiques.

Les premières traces d’une présence humaine sur le mont Tai remontent au paléolithique, mais ce n’est qu’à partir du néolithique que l’on peut trouver des traces d’établissement durable. Ces vestiges sont contemporains de deux cultures qui ont émergé non loin de là, la culture de Dawenkou au nord et celle de Longshan au sud. Pendant l’époque des Printemps et des Automnes, le mont Tai marquait la frontière entre les États rivaux de Qi (au nord du mont) et de Lu (au sud). Puis, pendant la période des Royaumes combattants, l’État de Qi a construit une muraille de 500 km de long pour se protéger d’une invasion. Des ruines de ces murailles sont encore visibles aujourd’hui. Le nom de Tai’an attribué à la ville voisine tirerait son origine du proverbe « Si le mont Tai est stable, alors tout le pays l’est aussi ».

Les pratiques religieuses autour du mont Tai sont anciennes, environ 3 000 ans de pratique depuis les Shang jusqu’aux Qing. Avec le temps, s’est établi un culte impérial officiel qui a fait du mont Tai l’un des principaux lieux où l’empereur rendait hommage au Ciel (sur le sommet) et à la Terre (au pied de la montagne) lors des sacrifices dits Fengshan. En 219 av. J.-C., l’empereur Qin Shi Huang présida une cérémonie au sommet de la montagne et proclama l’unité de son empire sur une inscription restée célèbre. D’autres empereurs, par la suite, honoreront le lieu d’une visite et d’inscriptions, en particulier Kangxi et Qianlong.

L’histoire de Tai’an et sa Montagne sacrée

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B L A I S E T H I E R R E E Directeur de l’Alliance française de Jinan, capitale du Shandong, ancien directeur de l’Institut Confucius de Bretagne

Cette idée de se fédérer autour d’un berceau régional existe et est déjà relativement active, mais elle se concentre en général autour d’un folklore idéalisé – crêpes, cidre, et éventuellement biniou quand l’occasion se présente. Rien donc qui ne se voit véritablement comme une diplomatie économique. Pourtant les enjeux sont présents, actuels, et cruciaux pour l’économie régionale bretonne, et certainement, au-delà, nationale. Il existe heureusement des hommes, des réseaux, et surtout des organismes comme Bretagne commerce international, des associations comme l’ACB qui œuvrent dans ce sens.

Alors, ce qu’il faudrait, c’est peut-être deux choses : quitter le folklore régionaliste pour une vision de soutien et d’entraide entre les membres de cette « diaspora » dans des objectifs économiques, ce qui constitue parfois (souvent ?) une contradiction dans les termes ; et un soutien « politique », c’est-à-dire un investissement du politique régional dans les relations économiques avec l’Asie, pas nécessairement directement d’ailleurs, mais via des corps intermédiaires auxquels est apporté un soutien clair.

Des initiatives remarquables existent, comme l’idée d’une représentation du conseil Régional de Bretagne en Chine, les jumelages entre plusieurs villes de la Région et des villes asiatiques, des déplacements d’élus, mais il manque peut-être une volonté politique forte, un suivi et une attention fédératrice - « diaspora » vient du grec « dispersion », ce qui implique éparpillement, délitement, épuisement…

En la sollicitant, la valorisant, la rencontrant et la fédérant autour d’objectifs clairement établis et soutenus par le pouvoir politique, cette communauté pourrait probablement contribuer à cette diplomatie économique.

La France dispose du premier réseau de diplomatie d’influence – ambassades, instituts français, alliances françaises en sont les principaux mais pas uniques institutions – au monde. Pour autant je ne vois pas de contradiction, d’une part le tout est aussi la somme des parties, et d’autre part rien n’empêche, bien au contraire, de s’appuyer sur ce réseau pour développer une diplomatie d’influence régionale.

Plusieurs collectivités françaises ont d’ailleurs tissé des liens privilégiés avec tel ou tel acteur de cette diplomatie pour être aidé dans la promotion de la collectivité dans le territoire en question. Car c’est bien dans ce lien-là, local et localisé, que se tissent les relations durables, et non en bombardant des projets à distance.

Et c’est d’autant plus aisé de promouvoir une identité régionale que celle-ci est forte, ce qui est bien entendu le cas en Bretagne. Ce n’est cependant pas une condition nécessaire, ni même suffisante, là encore la vision stratégique et l’engagement politique sont nécessaires pour développer des projets de long terme, en fonction de priorités définies.

Pour conclure, je citerai simplement Victor Segalen qui a permis de connaître beaucoup de choses sur la Chine par des biais détournés : la poésie, le roman, l’étude historique. Son héritage est riche et toujours actuel. A noter que c’est bien parce qu’il était médecin militaire de la marine nationale que cela a été possible…

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Y V A N E A B I V E N , E V E L Y N E O L L I V I E R - L O R P H E L I N , B E N O Î T E T Y A N N I C K M O R I N Co-fondateurs de l’association France Chine International

La diaspora bretonne rassemble les populations issues de Bretagne qui ont migré hors des frontières de la région, pour une durée déterminée ou de manière permanente, dont le lien avec la terre d’origine est permanent, voire renforcé malgré la distance. Elle est riche en nombre, mais aussi dans la diversité de ses formations et dans leur force d’influence. En Chine, la société s’articule selon un système de ‘relations’, les泰泰(Guānxì), reposant sur des liens de confiance établis dans la sphère professionnelle et personnelle entre partenaires. Dans ce contexte, le réseau fort et solide de la diaspora bretonne constitue un outil intéressant d’intégration au sein de la société chinoise. La diplomatie économique régionale bretonne permettra de renforcer l’attractivité de la diaspora bretonne et la fiabilité du « réseau breton » aux yeux de ses parties prenantes actuelles et potentielles. Mécènes, bénévoles et autres verront plus clairement les différents avantages à faire partie de ce réseau breton étendu et diversifié. La création d’espaces physiques favorisera la matérialisation de la diplomatie économique de la région Bretagne. France Chine International oeuvre en ce sens avec la mise en place de lieux de rencontre éphémères de grande qualité avec des partenaires locaux chinois, d’interactions Web en direct entre la Chine et la Bretagne avec les Business Brunchs Bretons et le projet de Centres Culturels Économiques Bretons (CCEB) en Chine, qui seront des espaces favorisant les interactions entre Bretons et Chinois sur place. Ils constitueront une vitrine et un outil au service d’une stratégie d’influence.

Pour en savoir plus : http://france-chine-international.eu/la-diaspora-bretonne-fer-de-lance-dune-diplomatie-economique-regionale/

« Au XVIIe, six pères jésuites français partent pour la Chine, sous l’égide de l’Académie des

Sciences et du mécénat royal de Louis XIV. Ils sont porteurs d’un savoir récent, d’un niveau scientifique élevé et d’un matériel de précision. »

Pour les jésuites missionnaires l’intérêt de la mission d’évangélisation se superpose à l’intérêt des sciences. Ils appliquent 4 principes, adaptation à la culture chinoise, évangélisation par les élites chinoises, utilisation de la science comme facteurs de séduction et ouverture aux valeurs chinoises et à la tolérance.

« Colbert veut posséder des cartes exactes, facilitant la navigation et le commerce vers l’Extrême-Orient et se positionner par les sciences auprès de l’empereur chinois Kang Xi. »

Une querelle « des rites » dirigée par Rome contre les jésuites mettra fin à plus d’un siècle d’intégration et de reconnaissance en Chine. Leurs écrits et traductions, passeurs de savoir entre l’Occident et l’Orient, vont contribuer, à nourrir la réflexion des philosophes des lumières…

Pour en savoir plus : http://france-chine-international.eu/les-mathematiciens-du-roy-premiere-mission-scientifique-et-de-connaissance-de-la-chine/

Quelle stratégie d’influence adopter dans un monde moderne ? Nous nous basons sur le concept «des piliers d’influences », à savoir :

Le principe d’autorité, nous ramène naturellement à une approche du pouvoir en place, qu’il soit politique, économique, culturel et spirituel. Le plus important pour conclure des affaires entre les chinois et les Français est d’avoir les mêmes niveaux d’interlocuteurs.

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Le principe de pression sociale permet de déduire les intérêts des populations chinoises. Les chinois sont dans un principe de mimétisme des catégories sociales supérieures. Il est important de comprendre les mouvements et la direction de la pression sociale pour maximiser le résultat des actions menées pour faire rayonner la culture française parmi le peuple Chinois.

Le principe de réciprocité se concentre sur la nature de nos relations avec nos partenaires chinois. Trop souvent, les échanges commerciaux ou politiques sont de nature gagnant-perdant. Ils induisent un sentiment de défiance vis-à-vis des Occidentaux. Il est essentiel de se positionner dans un principe gagnant-gagnant et pas uniquement sur un plan strictement contractuel, mais aussi empathique.

Le principe de rareté est largement compréhensible. Il s’agit de proposer des solutions uniques et considérer ses interlocuteurs comme importants.

Le principe de la sympathie est de l’ordre de la bienveillance. Il faut que toute relation avec la Chine soit sous cet axe. Ce qui aujourd’hui n’est pas toujours le cas, nous sommes plus dans des considérations mercantiles ou politiques.

Mais le principe le plus important c’est la cohérence. Nous faisons ce que nous disons. Malheureusement la plupart des actions entamées restent lettres mortes du fait de démotivation de l’une ou l’autre des parties. Souvent du fait d’incompréhension culturelle.

Chaque partie, les politiques, les entités économiques, la société civile ne peut y arriver à elles seules. Il faut des actions transversales, regroupées et permettant d’avoir des retombés à court ou moyen terme. Dans ce sens, plusieurs actions sont à prévoir. Commençons par utiliser les réseaux (Guanxi en chinois) que nous avons et démarrons des relations bienveillantes avec notre partenaire Chinois. Une multitude d’actions est envisageable dans les domaines sportifs, culturels et économiques. Nous avons en France des champions dans l’IT, les biotechnologies, l’énergie, la robotique, les nouveaux modèles agricoles, l’économie et l’environnement. Justement ce sont les besoins de la Chine. Ça ne sera pas nos grands groupes qui pourront nous aider à avoir une influence en Chine mais notre tissu de formidables PME, associations ou simples citoyens. Ce sont eux qui seront les plus souples, les plus transversaux pour permettre à la France de s’implanter durablement en Chine. Les verrous socio-techniques sont moindres en Chine, il est possible de participer à la mutation de ce géant grâce à nos innovations qui mettront beaucoup

plus de temps à se déployer en France. Il suffit pour certaines actions d’un coup de pouce des politiques pour faire un effet de levier significatif et arriver à des retours concrets et rapides en France et pour les régions.

Parmi les grands personnages bretons qui ont marqué la Chine, n’oublions jamais : Victor Segalen (1878-1919) à la fois, médecin, romancier, poète, ethnographe, archéologue et sinologue a participé à plusieurs missions en Chine de nature différente, à chaque fois (humanitaire, archéologique, recherche de renfort chinois lors de la guerre 1914-1918) ; son intérêt pour ce pays et sa culture a contribué à faire connaître cette grande civilisation, tout en s’efforçant de s’émanciper des influences et des préjugés de son temps. Ses dons infiniment variés et son importante curiosité, lui ont permis d’avoir une lecture du Monde de l’époque et ce fût, sans doute, l’un des Bretons ayant laissé de très nombreux écrits sur la Chine du début du XXe siècle. Sa connaissance de la langue chinoise a été, pour lui, un atout indéniable dans cette quête de l’Orient, mais également dans les échanges permanents qu’il a su entretenir, notamment lors de son enseignement en physiologie à l’impérial « Medical College » de Tianjin.

Pour en savoir plus : http://france-chine-international.eu/victor-segalen-ou-le-fabuleux-destin-dun-breton/

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M A R I E C A R O Responsable de la commission internationale de l’association des cadres bretons

Comme le rappelait l’un de nos fondateurs, Loïc Hénaff, directeur général du groupe Hénaff, forte de son histoire et de son positionnement affirmé à la croisée des réseaux, l’ACB est aujourd’hui clairement un point d’appui et d’ancrage pour les entreprises bretonnes.

« Paris n’est pas seulement le sixième département breton (après la Loire-Atlantique). Paris est et restera toujours une place internationale de premier choix pour projeter les entreprises bretonnes. »

L’ACB y a joué un rôle important ces dernières années et ne pourra que poursuivre cette belle ambition en conjuguant ses forces avec les grands projets bretons d’aujourd’hui.

Jean-Guy Le Floch, président du groupe Armor Lux ajoutait lors de la célébration de ses 50 ans d’existence que l’Association des cadres

bretons fête constitue aujourd’hui un formidable réseau d’expertise et de compétences. À l’origine, elle était composée essentiellement d’ingénieurs et de cadres bretons, implantés dans la région parisienne, qui souhaitaient participer au renouveau de la Bretagne, proposer aux acteurs publics des mesures concrètes de décentralisation, apporter aux organismes consulaires bretons et aux autorités locales, leurs relations, leurs expériences, leurs connaissances des marchés étrangers. Avec le temps, ce mouvement de coopération s’est progressivement amplifié pour associer les cadres bretons de l’ensemble des départements français et de l’étranger. Il s’est diversifié en intéressant des personnalités de toutes les professions pouvant contribuer au développement de la Bretagne entrepreneurs, professions libérales, médecins, avocats, juristes, économistes, écrivains et peintres… L’Association agit désormais comme un relais de communication et d’échanges en mettant en relation les entrepreneurs entre eux. L’ACB dispose aujourd’hui d’une expertise dans la plupart des secteurs de l’économie qui bénéficie aux Bretons comme aux autres. Le développement de la Bretagne mérite d’être soutenu, l’Association des cadres bretons aussi. En regardant la Chine, nous poursuivons, depuis nos fondateurs de 1962, notre mission de participer au développement économique et social ainsi qu’au rayonnement de la Bretagne, en mobilisant, en Bretagne, à Paris et à l’international, les énergies des Bretons, d’origine ou de cœur, de toute génération, de tout secteur et de toute sensibilité. Notre association regroupe en son sein des personnalités du monde de l’économie, de la finance, de la culture, des médias et de la vie publique.

« Le monde bouge, faites bouger la Bretagne. Les réseaux qui fonctionnent le mieux en Asie sont ceux où l’entrepreneur parle à l’entrepreneur »

Les opérations de notre Commission internationale et notamment la visite très réussie, en partenariat avec le «Club des entreprises du pays de Rance»et Saint-Malo Agglomération d’une délégation de dix-huit entreprises chinoises du 17 au 19 août 2015 à Saint Malo, Dinan et Rennes, illustrent le croisement efficace des réseaux bretons. L’Eductour a été aussi un succès en partenariat avec les acteurs touristiques des Côtes-d’Armor.

Grâce à cette opération, des délégations chinoises sont prêtes à revenir en Bretagne et rencontrer nos fleurons régionaux. Les trois secteurs phares de l’économie régionale : agroalimentaire, biotechnologies marines et numériques les intéressent particulièrement. Nous avons aussi des sollicitations venant d’Amérique du sud, du Moyen-Orient et de l’Afrique subsaharienne.

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Pour conclure, je citerai volontiers Prosper Marie Gicquel, ingénieur naval breton, qui a participé à l’élaboration de l’arsenal impérial chinois et est devenu l’ami du souverain de l’empire du Milieu.

Souvenirs de son excellence, Shu King Chen, ambassadeur de Chine, dans son discours traduit en français par M. Tching-Tchang, secrétaire de la légation de Chine à Paris :

«Il est de mon devoir, comme représentant de la Chine et comme ami personnel de lui rendre hommage, car il est des nôtres par les services qu’il a rendus à notre pays durant de longues années

Je me bornerai à dire que sa brillante conduite lui attira l’admiration générale. A l’arsenal de Fou-Tcheou, dont il était le directeur, il entreprit de grands travaux pour la construction de navires de guerre, et le Gouvernement pour reconnaître ses mérites, lui conféra la pélisse de mandarin en soie jaune impérial.»

M. Dunoyer de Segonzac, ancien officier de Marine, sous-directeur de la mission chinoise d’instruction.

«Arrivé en Chine en 1857, ses relations avec les hauts fonctionnaires de la province de Canton l’amenèrent à se demander quelle transformation attend, de nos jours, le Céleste Empire. Son intelligence pénétrante ne tarda pas à lui montrer que les peuples de l’Extrême Orient tendent à sortir de leur isolement, à secouer leur immobilité, et à s’agréger au faisceau de la grande famille humaine.

Mais, à cette époque, la Chine était en proie à la rébellion des Taïpings, ses provinces étaient ravagées. Il importait de relever les finances qui étaient épuisées ; il fallait combattre les rebelles qui compromettaient jusqu’à la sécurité des ports ouverts au commerce extérieur. Giquel fut nommé Commissaire des douanes impériales à Ning-po, et plus tard à Hankeou. Dans ces deux postes, il sut se montrer, non seulement administrateur éclairé, mais surtout homme d’action. Il organisa à Ning-po, un corps franco-chinois à la tête duquel, avec le concours de ses collègues de la guerre et de la marine, il chassa successivement les Taïpings des deux villes de Yu-Yao, de Shang-Yu, de Chao-Ching. En dix mois, le contingent franco-chinois qui dans son fort développement comptait 2500 hommes, avait enlevé trois villes murées, amené l’évacuation de quatre autres et dégagé 60 lieux de territoire.

A la fin de 1864, le vice-roi Tso qui avait vu Giquel à l’œuvre dans la campagne du Tché-Kiang, lui demanda un projet pour la création d’un arsenal maritime, projet qui fut sanctionné à la fin de 1866.

Le fait de créer en Europe un arsenal militaire ne présente pas de difficultés exceptionnelles avec les ressources nombreuses qu’on a sous la main; mais faire surgir des ateliers considérables et puissants d’une rizière nue, dans un pays où la grande industrie est inconnue, avec des approvisionnements difficiles et des ouvriers inexpérimentés, c’est là une tâche d’une réalisation beaucoup plus laborieuse, et pour l’accomplissement de laquelle Giquel fit preuve, pendant sept années, d’une intelligence et d’une énergie peu communes.

« Rien ne le rebuta dans la tâche qu’il avait assumée, ni les difficultés matérielles, ni celles qui étaient le fait des hommes. Il s’était engagé à construire, dans une période relativement courte, 15 navires de guerre à vapeur de type variés, et dès la fin de 1873 il pouvait montrer aux chinois qu’il avait su remplir sa promesse. »

C’est que le commissaire impérial Shên-Pro-Tchen se faisait un devoir de reconnaître dans le rapport qu’il adressait à cette époque à l’Empereur, et où il était dit : «M Giquel a créé, dirigé, et mené à bien toute l’entreprise avec un zèle et un dévouement que mille difficultés n’ont pas découragés; il est acquis des titres extraordinaires à notre reconnaissance.»