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    LOUIS-CLAUDE DE SAINT-MARTIN

    ET LE

    - MARTINISME

    1

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    ROBERT AMADOU

    ~OUIS-CLAUDE DE SAINT-MARTIN

    ETLE

    MARTINISMEIntroduction ~ L~tude de la Vie, de 1Ordre

    et de la Doctrine dii Philosophe Inconnu

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    NA

    Monsieur HENRI-CHARLES DUPONT

    \qui conserve aujourdhui le d~p6t de

    cet ORDRE Universe II

    dont Saint-MartinA l r~v~Ia 1ampleur philo sophique

    1 sans en communiquer 1enti~re Initiation.

    En tr~s respectueux hornmage

    I ces pages sont d~di6es.

    R.A.

    II

    I I ? Droits de traduction et de reproduction

    Fr~sero~s pour toLls pays.Copyright 1946 by EnITIoNs no GRIFFON nOn.

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    AVELITISSEMENT

    On a souvent confondu sous lappellation deMartinistes, les disciples de Martiiu~s de Pas-

    qually et ceux de Louis-Claude de Saint-Martin.Bien que les th~ories fussent les n mes, une

    difft~rence profonde s~parait les deux ~coles.

    Ce lie de Martin~s restait dans le cadre -de laMa~onnerie Sup~rieure, celle de Saint-Martin

    sadressait aux profanes. La seconde enfin re-poussait les pratiques et les cert~nIonies aux-

    quelles la premiere attachait une importance

    I capitale. Cest exciusivement dans le sens dedoctrine et de disciples de Saint-Martin que lesn-zots Martinisn-ze et Martinistes seront employ~s

    au cours des pages qui suivent. Ainsi parle-t-on

    du Spinozisn-ze de Spinoza, de Bergsonisnie de

    Bergson. En patticulier lexpression ~ Ordre marti-

    niste ~, que lon~ lira une ou deux fois,niniplique aucune Mfdrence d lOrdre des Ems-

    Cohen fondt~ par Martin~s et qui sest perp~tuAjusqut~i nos jours; elle sFapplique au (/CercleIn time ~ des Amis de Saint-Martin.

    Le lecteur remarquera peut-~tre le grandnonzbre de citations de Saint-Martin produites

    (A

    en cet onurage. Peut-~tre sen t~tonnera-t-il. Nous

    I

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    1 0 ~ it

    ne croyons cependant pas devoir nous en excu-

    ser. Notre seul d~sir ~tait de donner lid~e la

    mOms infid~le quil se pourrait dii Martinisme.1 1 nous a sembl~ que les extraits textuels simpo-

    saient, chaque fois quune paraphrase risquait

    de trahir la pens~e du Philosophe lnconnu.Partois nous avons dd interpr~ter, de~duire cer-

    tames cons~quences des principes ~tablis. Decela non plus nous ne nous excuserons pas,

    nous essayerons mdme de nous en justifier. Carlid~e directrice qui fiit n6tre, celle dune doc-

    trine vivante rdpond 4 la pens~e dii philosophe.Mais le travail de d~veloppement quelle nous

    imposait a-t-il t~t~ toujours mend dans le sens

    oiz Saint-Martin laurait conduit? De cela,

    h~las! n ous ne pouvons nous vanter. . 1 1 eitt fallu, pouraccomplir une pareille tdche, lePhilosophe lnconnu lui-m~me, on, dii moms,

    quelque initi~ avanc~, quelque

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    QUEST- GE QUE LE MAR TINISME?

    Ii faut quun homme soit cach4, 4crivait

    Dostoie~vsky, pour quon puisse laimer. D~squil montre son visage, 1arnour dispa-

    rait. ~ (1)

    Ce nest certes pas it Louis-Claude de Saint-Martin, le Philosophe Inconriu s , que peuvent

    sappliquer ces paroles. Ignor4 sans doute dugrand public, Saint-Martin na jarnais dd~u ceux

    qui se sont pench4s sur sa personnalit4 si cu-

    rieuse et ont approfondi sa doctrine spirituelle.

    Maitre de vie spirituelle, ainsi se pr4serite celuique les histoires de la Philosophie rejettent

    parfois en notes, au has dune page. Et parceque son *euvre sadresse aux hommes de bonrie

    volont4 qui de nos jours comme en tous les

    temps cherchent la v4rit4 et le salut, ce modestetravail a 4t4 projet4. On aurait pu, si 1onn avait craint, de voir surestirner sa port4e,lintituler Initiation au Martinisme. Telle 4tait

    bien, en effet, la raison - de ces lignes. Etpuisque notre dessein dtait de presenter une

    introduction it l4tude et it la pratique dune

    doctrine, essayons dexpliquer la titche qui

    I

    (I) Les Fr~res Karamazov. Traduction Mongault (ed.Gallimard, N R.F.). Tome II, p. 250.

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    soffrait it nous. Ainsi saisira-t-on mieux, dl~s

    labord, ce quon peut cntendre par Marti-

    nisme ~.

    L i sagissait, en somme, de pr4senter uneesquisse de la pens~e du Philosophe lnconnu.Mais plus quaux amateurs de reconstitutions

    historiques ou aux curieux de debats m4ta-physiques, ii fallait songer it ceux pour qui le

    Martinisme est un ferment de vie spirituelle,

    et Saint-Martin un Guide Fraternel, un Maitreet un Ami. Pr4ciser pour les honimes de

    d4sir>, et de borin~ volont~ les enseignements

    m4mes dont us se nourrissent ou ]es faire

    connaitre it ceux quils rassasierajent, offrir in-

    tableau vivant dune doctrine vivante : telle de-vait ~tre et telle fut notre pr4occupation cons-

    tante en r4digeant ce travail. On ne trouvera

    donc pas ici, it proprement parler, le~pos~didactique de Ia philosophic de Saint-Mar-

    tin. Le Th4osophe dArnboise peut, certes, re-

    vendiquer une honorable place parmi lesphilosophes . Ii pourrait 4tre, it ce titre,

    lobjet dun travail d~tai1t~ (1). Son o~uvre sup-

    porterait l4preuve dun examen minuticux.D4terminer pr~cis~menit les influences quisexerc~rent sur Saint-Martini, en suivre les

    effets it travers ses dilThrents ouvrages. Retrou-ver dans cette page du Tableau Naturel uner4miniscence platonicienne, ou dans tel para-

    graphe dEcce Homo le souvenir dun entretien

    (I) Cf. pair exemple l~tude de Eranch, ofi Ia th~oriemartiniste du langage et des signes est expos~e commele serait celle de CondiHac ou de Darwin.

    15

    I avec Madame de B~ck]in, situer enfin, apr4sIavoir diss4qu4, le syst~me qu4labora au xviii

    siecle un penseur nomm~ Louis-Claude de Saint-

    Martini, autant de titches utiles, passionnantesmeme et propres it donner un 4clat nouveau itla figure dii Maitre. Mais ce niest pas unsquelette que nous voulons reconstituer, ni unestatue de pierre que iious voulons dresser. Les

    conditions que nous avons dites et dans les-

    quelles ce livre a ~ projet~ nous justifieront

    sans doute davoir abandonn4 tout appareil

    d~rudition. Seules figureront les indicationsn~cessaires pour comprendre la doctrine d~fini-

    five, car ii existe un aspect parfait ~ de Iapens4e martiniste. Il est au delit des mots et,

    it celui qui lentrevoit, permet de saisir la

    coh6rence et Ic bicn-fond4 des. applicationsquon en tire. Ce que lon~ appelle le Marti-

    nisme est it la fois une soci4t4 dhommcs

    poursuivant les ~tudcs mystiques du Maitre et un systi~mc philosophique et m4taphysiquc que certains ont appehi une th4ologic ~.

    Mais cest aussi unic m~thode permettant de

    retrouver it Ia lumhirc de cet enseignement m4mc ce qui dans tous les domaines est sp4cifiqucmcnt traditionnel et initiatiqtic (1). ~

    Sil est aussi tine sp~cu1ation abstraite, le mar-tinisme est dabord unic ambiance, un 6tat

    dcsprit, un esprit ~. 1 1 est une teinture, une

    lumii~rc qui donne sa coulcur aux objets qucl]c

    (I) GALI~HAUT Cahiers de la Fraternit~ Polaire~ 9 avrillt33, p. 22.

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    enveloppe, et qui, in4lant sa niuance it celle qui

    leur est propre, les fond sans ics confondre, enune douce harmonic. Puissent ces pages, ~crites

    dans la sympathie et le respect, inciter ceux

    qu unit une commune admiration pour Saint-Martin it partir de la lecture ppur retrouver

    lesprit. Le plus grand pcut-4trc des philo-

    sophes de lUnit4 a poursuivit sans cesse un

    effort dc synth~se. Ccst un excellent manage

    it faire, disait-il, que celui de notre premhire

    ~cole et de notre ami Bcehme. Cest cc it quoije travaille a (1). Dans cette aspiration r4sideIc v~rilable enseignement du th~osopbe. Lit se

    trouve exprim6e la grande id4e qui inspire sa

    vie enti~re. Et nest-ce pas se montrer un fidMe

    disciple de Saint-Martin que de rechercher

    dans ses livres lid4e qui les dicta ? Les livresque jai faits, d4clare-t-il lui-m~me, niont eu

    pour but que dengager les lecteurs it ]aisser lit

    tous les livres sans en excepter les miens a (2).La Bible, clle-m~me, le Livre des Livres ne

    suffit pas it fonder une verit4. Quelque avan- tageuses que soient les d4couverles que lon

    peut faire dans les livres h6breux, us ne

    doivent pas ~tre employ4s comme preuves

    d6rnonstratives des v6rit4s qul concernent la nature de lhomme et sa corresponidance avec

    son Prinicipe, car ces v4rit4s subsistent par

    ellcs-m4mes, le t4moignage des Livres ne dolt

    jamais leur servir que de confirmation (3). a

    (I) Lettre k I{irchherger, 11 juillet 1796, Matter, p. 272.(2) Portrait n 45.(8) Tableau Naturel, XIII, ~d. 1900, p. 169 et 170.

    17

    Aussi convions-nous bus les hommes, nosfr4res, it rejoindre par delit les formules et lesd4monslrations, lcxaltation mystique du th4o-

    sophe, it r~tablir le canon suivant lequel iljugeait lhomme et lUnivers, ~t, par-dessus

    toutes choses, it retrouver Ia sponitan4it4 de

    l6Ian qui 1entrainait vers Dieu.

    Telle est linvitation que voudrait lancer ce

    petit Iivre. Le but de lauteur serait pleinementatteint si, grAce it lui, un seul mineur a enten-dait lappcl des Maitres Pass4s, et reconnaissaitIc v4ritable Chemin de Ia R4int4gration; la

    Route [nt6rieure que lui trace le Philosophe

    Inconnu, par Ia voix aimable et grave de Louis-

    Claude de Saint-Mar,tin.

    2

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    I

    LOUIS-CLAUDE DE SAINT-MARTIN

    ET LE MARTINISME

    II (Bappel de quelques donn~es historiques)

    U

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    Un nouvel cxpos~ de Ia vie de Saint-Martin,

    pour pr~sentcr quclquc inhir~t, devrait sappuycrsur des documents in~dits, ~lucider certainesdifficulhis historiques quc pr~scnte encore lcxis-

    tence du Philosoplic Inconnu. Mais cette d4li-mitalion pr4cisc dans Ic temps et dans lespacc

    de Ia pcrsoninalit4 sociale de Saint-Martin, nestpas, on le sait, le but de cet ouvragc. 1 1 parait

    donc inutile de pr6s~enter, sous uric forme diff&rente, Ia biographic de Saint-Martin, telle qucllc

    a ~ ~critc par plusicurs auteurs. Cest it ceux-

    ci qiic nous rcnvoyons et en particulier aux

    ~tudcs de Matter et de Papus, ain~i quaux

    livres de Morcau, de Caro, et aux diversesnotices des cncyclop~dics et des journaux (1).Cependanit pour bien saisir Ia doctrine marti-niste, ii peut ~trc utile de poss~dcr les ~himentsessentiels de sa formation. Aussi donnerons-

    nous un aper~u des hommes et des livres dont

    Ic contact agit sur Saint-Mart~in. Mais aupara-vant, nous reverrons en un simple tableau les

    grandes ~poqucs de la vie du Th4osophc dAm-boise, les dates cruciales de son passage sur

    (1) Par exemple Ic court billet nCcrologique du Journal

    des Jde~bats du 14 Brumaire, An XII; Ia notice de Tourictdans le Moniteur reproduite dans les EEuvres Posthumesde Saint-Martin, Paris, 1807, t. 1, p. xxiv, et tiree A partla meme annee, sous Ic titre suivant

    ~Notice historique sur les. principaux ouvrages du

    Philosophe Inconna et sur leur auteur, L.-Cl. de Saint-Martin, Paris, s. d.

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    cette terre. Moms que pour aucun autre,

    semble-t-il, la destin~e et la pens~e dunhomme de d~sir ~, comme Ic fut Saint-Mar-

    tin, doivent avoir subi linfluence des circons-

    tances exhiricures. On a soulign~ le curicuxcontraste qui existe entre les preoccupations

    mystiques dont t~moigne la Correspondance

    avec Kirchberger et les tragiques episodes quiagitalent, dans le m~me temps, Ia France de la

    Terreur. Pourtant, il est hors de doute que Ia

    R~voIution fran~aise et le courant did~es quilaur~oIa furent loin de laisser indiff~rent lau-

    teur de lEclair sur lassociation humaine. Sonattitude it l~gard de Ia Franc-Ma von nierie

    sexplique sans doute par une ~voIution per-sonnelle, mais aussi par la d~gIn~rescence de

    Ia MaVonnerie eIIe-m~me. Et comment corn-prendre le syshime martiniste s~ins tenir compte

    des relations avec Martin~s et du voyage it

    Strasbourg?

    Nous croyons donc rester fid~Ie it notre sujet,

    qui est l~tude du martinisme, en rappelantsuccinctement ses fondements historiquesdune part en la personne m~me de Saint-Martin, dautre part dans la soci~t~ qui ser~clame directement de lui comme de soncr~ateur.

    1. TABLEAU CHRONOLOGIQUE

    DE LA VIE ET DES 1~CRITS

    DE LOUIS-CLAUDE DE SAINT-MARTIN

    II

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    ~AU

    C

    HRONOLOGIQ

    UE

    VIEE

    TDESI~CRITS

    DEL.-CI.DE

    SAINT-MART

    IN

    sprincipauxsynclironismes1itt~aires,politiquesetmartin~sistes

    Naissancek

    Amboise

    Martin.

    Lyon.NaissancedeWillermoz.

    Martinezde

    Pasquallyfonde~

    Montpellierles~

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    Philo-

    sophes.

    Qondillac:Traite

    desSensations.

    VIEDE

    SYNCHRONISMES

    SY

    NCHRONISMES

    SYNC

    HRON[SMES

    SAINT-MA

    RTIN

    MARTINESISTES

    LITTERAIRES

    PO

    LITIQUES

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    14/49Saint-Martin

    rejoint

    ournieA

    Bordeaux.

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    Saint-Martin-part

    ulouse.

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    Voltaire

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    I,

    2. LOUIS-CLAUDE DE SAINT-MARTIN

    ET, SES MALTRES

    Si je navais pas trouv~Dieu, jamais mon ~sprit nec&t

    pu se fixer k rien sur Ia krre. ~(Portrait n

    0 290, p. 37.)

    A

    V

    1

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    i/iIII

    I ,

    Bien que le Martinisme puisse se d~finircomme la doctrine conforme it lesprit et non

    seulement it Ia Iettre de Saint-Martin, la person-nalihi et Iieuvre du Philosophe Inconnu

    demeurent cependant it la base de cet enseigne-ment. Apr~s Iavoir approximativement situ~

    dans son ~poque et dans son pays, voyons quel

    homme ~tait Saint-Martin et comment se modelason esprit. 1 1 nous a 1aiss~ sur sa vie et sur sesaffections des pages d~Iicieuses et profondes.

    Micux quaucun commentaire, dIes sauront

    nous dessiner son visage bienveillant au sourire~nigmatique. La connaissance par sympa-

    thie > du Th~osophe permettra peut-~tr.e demicux percevoir son ressort profond qui est

    celui du Martinisme tout entier.

    Dans les premi~res pages de son Portrait,

    parmi ces esquisses si d~Iicatement pures destyle et de pens~e, Saint-Martin nous dit Iui-m~me quiI avait peu dastral >, et il ajoute

    La divinihi ne ma refuse tant dastral que

    parce queIIe voulait ~tre seule mon mobile,

    mon ~himent et mon terme universel (1). >, SonAme sensible et m~ditative, son corps m~me

    (1) Portrait a0 24, p. 5.

    27

    dont il navait re~u quun projet ~ (1) pr&.

    disposaient Saint-Martin it suivre Ia voic init&.ricure. Lui-m4me nous lassure. Dans mon

    enfance, je ne pouvais me persuader que les

    hommes qui connaissent les douceurs de la

    raison et de lesprit puissent soccuper un ins-tant des choses de hi mati~re (2). ~ Et, par-dessus tout, Saint-Martin cherchera Dieu. IIaura sans cesse en Iui cette soif du Bien, du

    Beau, du Vrai que Dieu seul peut ~tancher.Tous les hommes peuvent m~tre utiles,

    ~crira-t-iI un jour, ii ny en a aucun qui puisseme suffire II me faut Dieu (3). > A ces pen-chants naturels, sajouteront, pour les accen-

    tuer, la premiere education, Ics premieres lec-

    tures. Une belIe-mere intelligente et picuse,remplaVa aupr~s de Louis-Claude, Ia mere tr~s

    t6t disparue. Son fils dadoption, quelIe enfanta

    selon Iesprit,, a par1~ deIle en ces termes

    reconnaissants et tendres Jai une belle-xn~re it qui je dois peut-~tre tout mon bonheur

    puisque cest elle qui ma donna les premiers

    ~I~ments de cette ~ducation douce, attentive etpicuse qul ma, fait aimer Dieu et Ics

    hommes (4). > , Linfluence de cette femme sur

    Saint-Martin fut consid~rabIe. La religion intime

    queIle Iui enseigna demeurera touj ours grav~eau ceur du Philosophe lnconnu. A son exemple

    (I) Portrait

    (2) Portrait

    (3) Portrait

    (4) Portrait

    no 5, p. 3.

    n0 1035, p. 127-128.

    n0 2, p. 2.

    no 111, p. 15.

  • 8/14/2019 Amadou Martin is Me

    17/49

    28

    et it se,s paroles, la premi~re femme qui pesa

    dans la vie de Saint.Marti~ joignit le choixdes lectures. Ce fut grAce it elle sans doute que

    Saint-Martin put lire Abbadie. Les ouvrages de

    Jacques Nbbadie, ministre> protestant deGen~ve, ~clair~rent les longues heures du col-

    hige de Pontlevoi. Ils sadressaient it lhommetout entier ~- non au seul intellect et r~pon-

    daient ainsi aux aspirations du jeune Louis-

    Claude. LArt de se connaitre soi-m~me ren-

    forVa encore chez Saint-Martin Ic goett del~tude de soi, non de lanalyse dess~chantc et

    sterile mais de la r4flexion fructucuse, de la

    marche dans la voic du cieur. Par lheureuse

    inclination quil aida it ~veiller dans son itme,Abbadie m~rite bien d~tre appehi linitiateur

    de Saint-Martin (1). Pascal au~si, avec Abba-

    die, exer~a uric influence qui nut ~tre pr~coce

    sur le Philosophe Inconnu. Nous verrons ccdernier s6uligne~r lui-m~me leur accord moral et

    m~taphysique.

    Ainsi se constitue et fructifie chez Saint-Martin Ic tr~sor de -la v~rit~ qui dernehrera

    toujours en lul et dont jamais il ne mt~con-naitra, Ia valeur. A lAge de 18 ans il mest

    arrive de dire, au milieu des confessions phulo-

    sophiques que les Iivres moffraient il y a UnDieu, jai une itme, il ne faut den de plus pour

    ~tre sage et cest sur cette base-lit qua, ~ ~lev~

    tout mon edifice. (2) Le Vicaire savoyard,

    (1) St. de Gualta.

    (2) Portrait n0 28, p. 5.

    29

    dira-t-on, ne parlerait pas autrement. Rien neserait plus faux cependant que de voir dans

    cette phrase la profession de foi dun d4iste.Jen veux bien moms it un idolittre quit un

    d~iste, dit encore Saint-Martin, parce que celui-ci abjure et proscrit toute communication entre

    lhomme et Dieu et que lautre ne fait que setromper sur le mode et ]organe de Ia commu~

    nication. ~ (1)A cette ~poque, se conformant it la volont~

    de son pare qui le destine it la magistrature, II~tudie le droit. Cest ainsi quil prendra contact

    avec Ic milieu litt4raire et ~hilosoPhiqnie du

    temps. Et cc contact ne sera pas sans lui

    laisser quclques traces. Ii lit les auteurs it lamode. Et ceux-ci,,. comme la reIev~ Matter (2),

    se nomment Voltaire, Rousseau, Montesquieu,tous ~crivains fort peu mystiques. Mais Saint-Martin est devenu capable~ de penser par lui-

    m~me.

    Surtout la Providence veille sur lui, par cetteProtection dont U revendiqiiera ~ouvent Ia Pr6-

    sence et dont it c~lThrera La vertu. Saint-Martin

    connaitra 1Erreur mais ny adh~rera jarnais.1 1 ne c~dera pas it Ia s~duction de lEncyclop~-die ni au charme ironique du Dictionnaire

    (1) Portrait n0 631, p. 80. Saint-Martin r~pond peut4tre & Bayle, qui soutenait que lath~isme ~tait pr~tC-rable., & 1idolAfrie. ~Zf. Pensdes diverses ~crites 4 undocteur en Sorbonne 4 1occasion de Ia com&te qui paintan inois de dt~cembre 1680. Montesquieu r~futa cetteopinion au nom de ses principes politiques. De tEspritdes Lois. L xxiv, Ch. is.

    (2) Saint-Martin, le Philosophe Inconnu, p. 3.

    31

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    30

    Philosophique. Et il pourra se rappeler sans

    remords le temps de sa jeuniesse. Ii a travers4

    la corruption sans en subir les mortelles

    atteintes. Jai lu, vu, 4cout~ les philosophes

    de la mati~re et les docteurs qui ravagent le

    monde par leurs instructions et ii ny a pasune goutte de leur v~nin qui ait perc4 en mol

    ni un seul de ces s~erpents dont Ia morsure

    mait 4t4 prljudiciable a (1).

    Certes Saint-~V1artin ne partagea jamais lesid4es dHclvltius et Condillac demeurera tou- jours son irr~conciliabl,e adversaire. Mais ii

    apprit ainsi. it connialtre ses ennemis les

    Philosophes a. Leur familiarihi, maine quandelle ne fut que livrcsque, transparait dans ses

    propos. Le jugement quil portera sur eux

    trahit peut-~tre. une certaine indulgence et ren-ferme en tout cas, une juste compr4hensioti de

    leur doctrine. ~ (2).Des divergences pourtant s4arent les deuxauteurs. Saint-Martin le remarque dailleurs (3).

    (1) Pens6es n0 75, tEzwres Posthuines, I, p. 250.

    (~ ) Porirait n 60. p. 9.(3) ibid.

    A ,

    7]

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    19/49

    ] 32

    II est bien certain quiI netit jamais accord~

    it Rousseau linnocence de lhomme it sa nais-

    sance, lui qui avait de la chute un sentiment

    si aigu. Et les id~cs politiqucs du Con tratsocial furent balanic4cs dans lcsprit du jeune

    juriste par la d4couvcrte de Montesquicu etsurtout de Burlamaqui Sage Burlamaqui,s~criera Ic th4osophe errant dans Le Cimethire

    dAmboise

    - Sage Burlamaqui, cest non~loin de ces lieux

    Que tu sanctifias laurore de mon dge,

    Quun feu sacr~, sorti de ton ps.ofond ouvrage,

    Agitant tout mon corps de saints frisonnements,

    De la justice en moi jeta les fondements... (1)

    Tefles 4taient les dispositions de Saint-Martiniquand il fit me renconire qui devait marqucr

    sa vocation la rencontre de Martin~s de

    Pasqually, son premier maitre >~ .Ii ne connut pas tout de suite Martin~s, mais

    ii entra dabord dans son rayonncmcnt. Celui-

    ci se manifestait dans in groupe de disciples,

    constitu4s en obedience dont Martin~s 4tait Icgrand Souverain LOrdre d~s Chevaliers

    Ma~ons Elus Cohen de lUnivcrs.

    Apr~s avoir souri Iongtemps de tout cc qui tenait itlO (rdre) ~ (2), Saint-Martin fut initi4 au rite

    des Elus Cohen en 1768.

    Les tr~s puissants Maitres > ~ Grainville et

    (1) Le Cimetii~re dAmboise, p. 2 .

    (2) Lettre de J. A. Pont, 7 septembse 1929. V. Rijnberk,I, p. 143.

    1 1

    33

    l3alzac, officiers eux aussi du r~gimenit de Foix,proc4d~rent A sa r4ception au sc m de leur fra-

    ternihi. Pendant qucique temps, ii en fut Ic

    partisan zA I4> ~ (1) et lann4e suivante, it Bor-

    deaux, Saint-Martin se pr~sentait it Martini~sde Pasqually.

    Quc dire de cette 4t.raQge figure de thauma-turge > ~ au xviir siAcle ? Un m~t~que i rk, juif

    espagnol croit-on, qui dAfigure Ic fran~ais dansses ]ettres ou dans son Trait4, au carachire

    irritable et inconstant, retient autour de lul,

    par sa s4duction et ses promesses, Ics descen-dants de quelqucs-unes des grandes Lamilles de

    France. Quc dire de cc kabbaliste dont les~lucubrations th~osophiques enchantaicnt uni

    groupe de jeunes hommes mondains et culti-v4s ? Que dire enfin de cc proph~te dont Ic

    Verbe subjuguait un marchand lyonnais?Saint-Martin fut lui aussi enveloppA par lecharme qui 4manait de Martin~s. Son attache~nient, n~ du jour de leur rencontre, ne devait

    pas cesser. Ses rapports avec IOrdre des Cohen

    purent rcfi4tcr une lvolutidn inhirieure qui.l~loignait des operations thlurgiques. Mais

    Saint-Martin nabandonna jamais les prineipes

    de la R~intdgration des ~tres. A la fin de savie, Saint-Martin rendait hommage it sa pre-

    miAre ~cole ~ Martin~s de Pasqually avait Ia

    clef active... mais ii ne nous croyait pas en4tat de porter ces hautes v~rihis>~ (2).

    (1) Ibid.

    (2) Correspondance avec Rirebberger, 11 juillet 1796.

    S

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    34

    Lorsquil discute de la Vierge avec Licbisdorf,il fait de nouveau allusion au Maitre de sa

    jeunesse. Quant it Sophie et au roi du monde,

    il (don Martin~s) ne nous a rien d~voihi sur

    cela... Mais je nassurerais pas pour cela quiln~en eut pas Ia connaissance et je suis bienpcrsuad~ quc nous aurions fini par y arriver

    si nous lavions conscrv~ plus longtcinps (1).

    Converti au Martin~sismc, Saint-Martin sydonna pleinement. Non sculement Ia doctrine

    qui restera la sienne, au moms dans sesgrandes lignes, mais encore les applications

    magiqucs et th~urgiques reVurent ladh~sion

    totale du philosophe. P~rissc du Luc se sou-

    viendra de cette p~riodc quand ii ~crira it

    WiI]ermoz, apr~s la lecture de LHomme deD~sir Jy ai vu de belles choses, de tr~s

    obscures, et mystique-po~tiquc (sic) quc lautcurd ~tcstait grandement autrefois ~ (2). Pas pluscependant que Voltaire o, u Diderot navaicnt

    Ii ne faut pas oublier que le livre Des Erreurs er t de LaV~rif~ n~tait originairement pas destine au grand public,mais seulement & Ia secte des Martinistes. V. Rijnberk,1, p 163 .(en 1775 ii nest pas question du Martinisme deSaint-Martin). Louvrage dailleurs fut projet~, m&ri,

    discut~ et ~crit & Lyon aupr~s de Willermoz (A. JolyUn mystique Lyonnais, p. 58) et, dun mot, on pent direquil expose, reprise par la lucide intelligence de SaintMartin, Ia doctrine de Martin~s. Cependant on y Irouvepen de choses k changer, et encore ces changementsportent-us sur des points de detail, pour avoir lexpres-slon achev~e de L a pens~e de Saint-Martin.

    (1) Corespondance. Cf. Matter, p. 271.

    (2) Lettre du 23 n~ars 1790 k Willermoz (V. Rijnberk,I, p. 180).

    35

    rendu Saint-Martin incr~dule, lcxp~rimen-

    tation de Martin~s ne lui fit pcrdrc de vucla v~ritablc voic qui est int~ricurc. Alors quc

    son compagnon, labb~ Fourni~, oscillait entre

    Swcdcnborg et Madame Guyon, Saint-Martin

    sut se maintenir dans Ia route m~dianc.Puisquc les noins de Swcdcnborg et de Madame

    Guyon viennent de nous apparaItre, comme les

    symboles de deux cxc~s, relisons lappr6ciation

    qucn donnait Saint-Martin : Jamais je nai IuMadame Guyon s, d~clarc-t-il en 1792; et apr~savoir ~tudi& ses ouvragcs Jai ~prouv~ ~

    cette lecture, dit-il, combien linspiration f~mi-nine est vague et faible en comparaison de

    linspiration masculine s (1).

    Pour Swcdcnbor~, ii convient de rejeter dansle domaine de la higende, Ia pr~tcndue forma-tion quil aurait do:nn~e it Saint-Martin. L~ r6lc

    du mystique su~dois fut pcu important dans lacarri~rc du Philosophe Ineonniu. Alors quil

    ltait th~urgc le vrai but des th~urgistcs estmoms Ia science de l~Amc quc celle desesprits s (4) Saint-Martin reprochait it

    Swcdcborg davoir e plus de cc quon appelle

    la science des Ames quc la science des esprits s .

    La phrase est dure pour Ic conqu~rant desmondes ang~liques, Ic confident nes bong et

    des mauvais g~nics. Elle montre quau moms

    Saint-Martin ne se laissait pas impressionner

    par toute l~Ioqucncc, toute limagiiiation et

    (1) Correspondance, 25 ao&t 1792, p. 29.

    (2) Matteir, p. 63.

    p

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    36

    tout, 1apparcil swedenborgien. Ii aurait plut6t

    souscrit au jugement de V.-E. Mich.clct Swe-dcnborg n~tait pas un philosophe, c~tait un~ngenieur distingu~ s (I).M~mc en cette science

    de litinc qui allait plus tard rcv~tir pour lui

    line telle importance, Saint-Martin estime pcuSwcdcnborg. Sous cc rapport, ~crit-il, bien

    quil ne soit pas digne d~trc compart~ it B.[B6hmc] pour les vraics connaissances, ii est

    possible quil convienne it un plus grand

    nombic de gels s (2). Cc ncst pas tr~s ~lo~

    gicux. Le th~osophc dAmboisc marcha donc

    quciquc temps dans I la voic cxt~ricure etf~.conde s (3). II la suivit avec succ~s et y

    recucillit en pcu dann~cs les manifestations

    quun Willcrmoz attendra ouze ans.Cependant, Saint-Martin sentait renaItre en

    lui Ics ~lans de son enfance, le d~sir d~pan-

    cheinents mystiqucs~ Le c~r~monial Cohen luiparut vain, ses r~sultats d~cevants : Maitre,

    dit-il un jour it Martin~s, faut-il tant de choses

    pour prier Dicu ? > ~ (4). Cette tendance devintde plus en plus forte. Bient6t, dIe Icmporta.

    Ccst alors quc se produisit la r~lation qui

    transforma sa vie Saint-Martin d~couvrit

    Jacob B6hmc. II nous a narr~ lui-m~mc sonvoyage it Strasbourg et les relations quil y

    noua avec Rodolphc de Salzmann. Cclui-ci lui

    (1) Les Portes dAirain, xLIx, p 201.

    (2) Portrait n0 789, p. 102.

    (3) Corespondance, p. 15.

    (4) Correspondance.

    37

    conficra plus tard in clef de Bohme ~ (1)quil poss~dait. Mais cc fut par Mm Charlotte

    de Bo3cklin quil connut dabord leuvrc du

    cordonnier allemand illumine, tandis quiI rece-vait dcllc Iappui dunc Ame qui comprenait

    son iimc. Jai par le monde, ~crira-t-il ensuite,

    quand ii en scra slparl, jai par Ic nionde une

    amic comme il ny en a point, je ne connais

    qucltc avec qui mon iimc puisse s~panchcrtout it son aise et scntrctcnir sur les grands

    objets qui moccupcnt parce quc je ne connaisquelIc, qui se soit placlc dans Ia mesure

    je d~sirc que Ion soit pour n~~tr~ utile s (2).

    On entrevoit 1aidc pr~icicuse quapportait it

    Saint-Martin lamour pur coinme celul deDicus de sa ch6rissimc B. Quant it Jacob

    B6hme, ii est impossible de micux d6crire qucn

    cette phrase Ia dlcouvcrtc quil rcpr~scnta pourIc .th~osophc franVais : Cc ne sont pas me~

    ouvragcs qui mc font le plus g~mir stir cette

    insouciance tide ceux qui lisent sans com-

    prendreil, cc sont ceux dun horume dont je ne

    suis pas digne de d~noucr Ics cordons des

    souliers, mon charisimme (sic) Bmhmc. II faut

    quc lhomme soit cnti~rcmcnt dcvenu roc oudemon pour navoir pas profibi de cc tr~sor

    cnvoy~ au monde il y a 180 ans s (3).

    Ces expressions enthousiastes Sc retrouvent

    dans les livrcs de Saint-Martin. Chaquc page

    (1) C(. Un Chevalier de la Rose Naissante. Notice his-torique sur le Martinisme.

    (2) Portrait n0 103, p. 14

    (3) Portrait n0 334, p. 42.

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    38

    de Ia correspondance avec Kirchbcrgcr est un

    cri de reconnaissance et de louange it Ia gloirede Jacob, B6hmc~

    Nh~sitons pas dans cc chapitre oti nousavons laiss~ parler Saint-Martin, nh~sitons pas

    it revoir son itin~rairc philosophique comme illa lui-m~me re~sum~ Ccst ~. louvragc

    dAbbadic intituI~ lArt de se connaitre quc jedois mon d~tachcmcnt des choses de cc monde...

    Cest it Burlan]aqui que je dois mon goat pourles bases naturelles de la raison et de Ia justice

    de lhommc. Ccst it Martin~s de Pasquallyqu~ je dois mon cntr~e dans les v6riI~s sup&.ricurcs~ Ccst it Jacob B6hme quc je dois les

    pas les plus importants quc jaie faits dans

    Saint-Martin a d~sormais trouv~ Ia Voic Int&

    ricure. Ii est cntrd sur Ic sentier quil devinaitmais dont it ne foulait quc le scuil. II marche

    maintenant vers lUnit~ par le Chemini de1Esprit et du Cceur. II dlcouvrc le v~iritabIe

    sens des traditions Cohen. Conciliant it Ia fois

    les dons de sa naissance, les enscignenients deMartin~s et ceux de B6hmc, si proches de sa

    pcns~c, Saint-Martin a constitu~ le Martinisme.Et cette doctrine philosophique et mystique, itIa v~cut, rcpli6 sur Iui-m~me mais au milieu

    du monde. II s~duisit Ia haute soci~t~ pan-sienne, ~crit un historien moderne, par la dou-

    ceur de ses mceurs~ Iaust~rit~ de sa vie et la

    39

    gravitl de sa parole (I). II resta dans le

    monde et poursuivit sa grande aventure spin-tuelle. (Ii) abborre lesprit du monde mais(il) aime le monde et Ia soci~t~ s . (2). Scion le

    mot magnifique de Saint-Paul, il est

    dans le monde comme ny ltant pas (3).

    La devise quun vicillard inspire lui attribuc,

    dirige sa conduite Terrena reliquit (4).Par Ia sagesse quil enscigne et quil vit, par

    son existence m~me, Saint-Martin tend vers Ia

    Supreme Unite et ne vise quit la R~int~gration

    universelle. Le masque de sa douccur, de sa

    gritcc timide et de sa bicnv~iIlancc ne parvientpas it dissimuler le Maitre. Le plus ~hlgant

    des thilosophes modcrn~s s (5) est aussi le

    Philosophe Inconnu.En 1795, un correspondant du Professeur

    K6ster, qui s~tait li & damitPl avec Saint-

    Martin, Ic d~pcint ainsi II poss~dait une

    (1) E LAVISSE, Histoire de France depuis lea Ortgtnesjusque~l inR~volution, t. ix, I, p. 299.

    (2) Portrait n0 776 p. 101.(3) C f Portrait n0 1086, p. 128. ,Ordinairement lesauteurs font leurs livres comme ne faisant que cola etmoi jai ~ obligcl de faire les miens comme no les faisantpas ~.

    (4) En 1787 jai vu un vieillard nomm~ Best qui avait

    Ia propri~t~ de citer & chacun tr~s ~ propos des passagesde lEcriiure, sans quil vous e&t jamais connu. En mevoyant ii commen~a par dire de moi II a je1~ le mondederriere mi . (Portrait n0 59, p. 8.)(5) J. na MAISTRE Les Soirdes de Saint-P~tersboiir~u,

    XP entretien.(1) Portrait n0 418, p. 58.59.

    (I

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    40

    Illumination et une Connaissance tellernentsup&icunes qucllcs mauraient presque ~pou-

    vant~ si elles nicusscnt ~ planl~cs dans un

    &eun p 1 c m dhumilit~ et damour>~ (1).

    Nest-cc pas lit, r~alis~ en son V~n~n~ Maitrele Philosophe Jnconnu, tout lid~al du Manti-nisme ?

    (I) Leltre du 20 dulcembre 1794. Van Rijnberk, I, p. 162Sur Ia vie spirituelle et mondaine tout & la fois deL.-C. do Saint-Marlin, on go&tera les pages si fines et sicharmantes de Ren~e de Brimont, dans son r~cit Belle-

    Rose (Paris, les Gahiers Libres, 1931. Cest limage mbmede Saint-Martin qu,e nous restitne, merveilleusementproche et sympathique, une pure intuition feminine.

    3. EXISTENCE HISTOBIQUE

    DE IJORDRE MARTINISTE

    Los Initiations individuelles

    de Saint-Martin sont bien uner~aIit~ .

    G. van RsJ1~aEnx: Mortin~.sde Pasquall~, t. II, p. 33.

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    Lexistence dun Ondre Martiniste ~ fonde~par Saint-Martin est ni~e par tons Ics

    auteurs s6nieux , (1). Telle est Ia conclusion

    des recherches philosophiques effecttuies par

    M. Van Rijnberk. On ne sanrait taxer cet an-teur de partiaiit~ puisque lni-m~me se declare

    enclin it achnettre , Ic fait controvers~. Mais

    il fant rcconnaitre labsence de toute e~tude

    approfondie de Ia question, faule peut-~tredune documentation suffisante. M. Van Rijn-

    berk a combl~ cette lacune et cbs la discussion.En effet, dans une deu,d~me etude, M. Van

    Rijuberk se r~sume ainsi Les initiations

    inidividuelies de Saint-Martin, consid6r~es parbeaucoup comme une pure Pigende, sont bien

    une r&ilit~ > (2).

    Nous renverrons pour toutes les discussions

    de documents, les critiques de timoignages, etc.,

    aux exposes de M ~ Van Rijnberk, conduits scionIa pius same m~thode histonique. Indiquons

    scuiement les textes auxquels il se r~f~re pour,~tabIir Iexistence dun ondre niartiniste, dunl

    ondre de Saint-Martin.

    10 Parmi les documents que Ion pourraitqualifier dexte~nieurs, nous trouvons

    1. Un texte des Souvenirs du Comte de

    43

    Gleichen qui rapporte que Saint-Martin avaitconstitu~ it Paris une petite 6cole (1).

    2. Un article de Varuhagen von Ense, dabi

    de 1821, oti on ut Ii (Saint-Martin) d~cida...de fonder lni-n~me une soci~t~ (communion)dont le but ne serait que Ia spinitualibi Ia pluspure et pour iaqueile il commen~a d~laborer

    it s ~ i guise ics doctrines de son maitre Mar-

    tines > (2).

    3. Une lettre, dont Iauteur est inconnn et

    qui fut adress~e Ic 20 d~cembre 1794 an Pro-fesseur K6ster. II y est pani~ de Saint-Martin

    et des membres de son cercle intime ~ (3). Iiy est, ~en propres termes, question dune

    ~ soci~bi de Saint-Martin , et dune fihiaie stras-bourgeoise de cette socbibi.

    Ajoutons it ces documents, sonvent inexacts

    dans le de~taii, mais unanimes it affirmer Iexis-tence dune soci~bi de. Saint-Martin, la courte

    notice n6crologique dn Journal des Dc~bats. Elie

    est ainsi r~dig6e Paris 13 Brumaire... M. deSaint-Martin, qni avait fonde~ en Allemagne unesecte religieuse connue sons le nom de marti-

    nistes, vient de mounir it Aulnay pros de Paris,chez le S~natcur Lenoir Laroche. II s~taitacquis queiqne ce~hibnite~ pour ses opinions

    bizarres, son attachement aux r~venies des ilin-

    (1) Souvenirs. Ed. Lechener Fils, Paris 1868, p. 155.

    (2) V. von ENSE (K. A.) Saint-Martin, 1821.

    (3) Die non esten Religionsbegebenlseiten fOr das Jahr1795. Jahrgang 18, Stuck 1, p. 39-62. Cett~ r~f~rence et lesdeux pr~c~dentes sont donn~es dans V. Rijnberk, I,112-~-4

    (1) V. RIJNBERI, I, p. 112.

    (2) Id., II, p. 33.

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    45

    44

    minds et son Iivrc inintelligible Des Erreurs

    et de Ia Writ~~ (1). On remarqnera qnil estfait allusion it une secte religicuse et non

    mavonniquc. La Soci~ti dont le ridactcur dn

    Journal des Ddbats pr~tc Ia fondation anPhilosophe Inconnu na donc nien de commun

    avec le pr~tendn rite ma~onuiquc de Saint-

    Martin (2). Aucun des documents invoqu~s plushant ne sngg~re, dailleurs, cette identification.

    Citons enfin Ia cunicuse bistoire du Chevalier

    dArson. Elle se trouve rapporbie en son

    onvrage Appel ~ lhumanihi. Pr6cicusc pourcomprendre .lcsprit de lOrdre Martiniste, elle

    apporte aussi un document histoniquc snr la

    Socicit6 dc Saint-Martin en 1818. On y voit, eneffet, quit cette ~p

    6que des disciples du th~o-

    sophe lis~icnt ses ouvragcs, en conseillaicut lalecture et agissaient antour dcux en v~nitablcs

    Sup6nienrs Inconuns ( s ) .20, Mais M. Von Ri,jnbcrk a rc~u de M. An-

    gnstin Chaboscau dautres informations; cesinformations, jusquc-lit in~dites, oni ~te~publi~cs

    dans Ic tome II de Martin~s de Pasqually. Elles~tablis sent lcxistcncc dunc initiation trans-

    (1) Journal des D~bats, 14 Brumaire an XII (6 nov 1803).

    (2) Thory, Annales Magni 0 .. Gallioruin; et aussi L.Blanc (Histoire de la R~volution Irangaise, Paris, 1869,

    t. I, p 215) Enti~e sur la Franc-Ma~onnerie, la doctrinenouvelle (Le Martinisme) constitua un rite qui fut c~n1-pos6 de dix grades en degr~s dinstruction par lesquelsdevaient successivement passer los adeptes. n

    (3) Cest, k notre connaissance, Papus qui signala le

    Iwemier lintbr~t de ce texte. Cf. Saint-Mart?n, p 246Martin lame, Martindsisme et Witlermozisine, p. 42, note 1.

    misc par Saint-Martin, distincte de linitiation

    Cohen. Nous reprodnisons le tablean de Iafiliation martiniste de Saint-Martin it 1105 jOurs

    Louis-CLAUDE DE SAINT-MARTIN

    4

    Anud DE LA NOIJE

    ANTOINE-MARIE HENNEQUIN

    HENRI DE LA TOUCHE

    ADOLPISE DESBAROLLES

    AMIlLIE DE BoIssE-MoIImsaAnT

    JEAN-ANTOINE CIIAETAL

    IIENIU DELAAGE

    AUGTJSTIN CfiAnosEAu G. ENcAussE (PArus)

    II r~sultc de cc tablean quc Ia filiation desMartinistes actuels fniti~s par M. A. Chaboscan

    est incontestable, et daillcurs inconitesbic. Celle

    des Martinistes de Papus, dans Ia mesure

    dIe se re[i~ au seal rameau Chaptal-Dclaagc etdans la mesure oji Papus lni-in~mc se rattache

    it c c senl ramcau, est enta~ht~c dun dotite.Chaptal mourut en effet en 1832 et ne putinitier lui-m~ine lIcnri Delaagc qui, n~ en

    1825, avait alors sept ans. Papus dit Ini-m~mc

    qunn des il~ves directs (de Saint-Martin),

    M. de Chaptal, fnt grand-p~re de Dclaage (1)

    (1) PAPUS 8aint~Marlin, p, 248.

    4

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    46

    mais il ne precise pas qui tint Ic rang dnp~re (1).

    En fait Ia rigularibi martiniste de Papus estcertaine parce quc Papus ne poss~dait pas

    seulement lhypoth~tique filiation de Delaage.

    Augustin Chaboseau a pr~cisi, dans un articlein~dit, cc point dhistoirc dn martinisme

    contemporain. II rapporte quc Gerard Encausse

    et Ini-m~mc ~chang~rcnt leurs initiations, seconf~rant lun Iautrc cc que chacun dcux avait

    rc~u (2). On pent donc dire quc si Papus ~taitvalidement dcitentcnr de liniliation de Saint-Martin, il Ic devait it Augustin Chaboscau.

    Certaines traditions, dautrcs faits rattaclient

    Saint-Martin et lOrdre Martiniste it la Coin-

    pagnie des Philosophes Inconnus (3). Saint-Martin serait ainsi rclii par le canal dnneinitiation ce~r~rnoniellc Ii Salzmann, it B6hme,

    it Sethon, it Khiinrath. Quc penser de cettege~n~alogic? II ne nous appartient pas dcnfaire la critique; ccst li t Ic travail dun histo-

    rien. An reste, la question nous importe pen.

    Si Saint-Martin a cr~l de toutes pi~ccs lini-

    tiation martiniste, nut ne pent Iui en discuter

    (1) II est bien entendu quo nous parlons seulement delinitiation martiniste, cest-&-dire d~rivant do Saint-Mar.tin. La r~gularit~ cohen du martinismo do Papus et dumartinisme lyonnais nest pas en cause.

    (2) Comment roconnaltral-je BI.. pour Grand-Maitre,moi qul ai initi~ Papus en 1888 ? o (Extrait dun ma-

    nuscrit dA. Chabosean. Coil, do lauteui-.)

    (3) Un Ordre des Sup~rieurs Inconnus figure en 1646sur une liste do ddinonciations adress~o an Livutonant dePolice par la Compagnie du Saint-Sacrement.

    47

    Ic droit et Ic ponvoir. Si Iinitiation de Saint-Martin porte en dIe linflnx de Martini~s on

    dn Cosmopolite, cela est bien accessoire. Carloriginalit~ de Saint-Martin est telle, et telle

    est Ia force de sa personnalibi qncllcs recou-vriraient et renouvclleraient lapport anbiricur.

    Saint-Martin a pn se servir dunc initiation

    dijit pratiqu6e pour initier ses disciples, commeii a nomns~ ceux-ci Su~~irieurs Inconnus, sansleur donner aucune des pr~rogativcs adminis-

    tratives et honorifiques pr imiLivement attach~cs

    it cc Litre. Mais Ia conception que Saint-Martinavait de Iinitiation, mais Ia conception quil

    ~avait dn Snp6rienr Inconnn, voilit cc que leth~osophc a transinis et qui est essentiel.

    Quel qncn soit Ic vihiculc, linitiation marti-niste est toute p~ne~tr~e de Icsprit de Saint-

    Martin. II est nlccssairc et suffisant d~tablir

    quclle remonte cffcctiycmcnt it m i.Tels sont les faits les plus assur~s touchant

    Ia question si longtemps chibattuc de IOrdre

    Martiniste. Ii reste, apr~s la preuv~ de son

    existence it rechercher sa nature, son organi-

    sation, son esprit, bref Ic s rapports du Marti-nisme, conime nous lavons d~fini, et de lOrdre

    Martiniste qni pr~tcnd en avoir Ic d~p6t.

    M

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    27/49

    4. - ESPRIT DE LORDRE MARTINISTE

    Saint-Martin fut amend &

    former une sortc do gi-oupementpurement spiritualiste, dlgag~des c~rbmonies ritu~Iique~ etdes operations magiques.

    J. BRIcAun Notice historiquesur le Martinisine. Nouvelle bdi-tion, Lyon, 1934, p. 7.

    I

    4

    I

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    Saint-Martin fut franc-ma~on. Saint-Martin

    fut Elu-Cohcn. Saint-Martin adh~ra au mesm&risme. II se pr~ta de bonne grAce aux rites et

    aux u~agcs de ces soci~t~s. II se conduisit enmembre irr~prochable de fratcrnit6s initia-

    tiqucs. Mais cette attitude ne rcprisente quunc

    ~poquc de sa vie. Nous avons vu coniment Ictemperament de Saint-Martin, toute sa fornia-

    tion, I6loignaicnt de la voie exPiricure. Et on

    pent entendre par lit aussi bien les operations

    th~nrgiques ou magiques visant it des r~sultats

    sensibIes, que les associations ma~onniqucs on

    occultistes au scm desquelles dIes se pratiquent.Lorsquc Saint-Martin demanda it ~trc ray~ mat&

    rieliement des registres de la Franc-Mavonnericoii il ne figurait pfus quc de nom, ii exprirna

    son d~sir et sa conviction de conserver ses

    grades cohen. Mai s lid~c quil se faisait alors

    des Elus-Cohen semble bien proche de sa

    conception personnelle de lOrdrc initiatique.

    Le v~ritablc lien entre Ics Fr~rcs est un lienmoral, spiritnel.

    Aussi, voyons-nons Saint-Martin r~pudicr Ics

    soci~bis, se d&cndrc den avoir fonda. .Masecte cest Ia providence, mes prosilytcs ccst

    moi, mon culte cest la juslice (1).

    Mais le th~osophe savait aussi quc ses hautes

    connaissances lui imposaicnt une mission. II

    51

    savait aider Jes hommes qni Icntonraicnl, Icurprodigner ses conseils, tenter de Icur insufiler

    JEsprit. II possidait Ia bccqu~c spirituelle ,

    les petits poulets vinrent it Ini.

    Ainsi se constitna, de disciples choisis etdamis fid~lcs, Ic cerclc intime de Saint-Martin.

    Scule Ia valeur morale et intellectuelle, Icz~lc pour Ia recherche de Ia V~rit~, pcrmettaicntdcntrer dans cette sociit~. Ni Illgc, ni Ia situa-

    tion ny importaient, Ics femmes ~taicnt admisesit y participer. L~tmc f~mininc ne sort-dIe

    pas de I a m~mc source quc celle qni ~st rcv~tnc

    dun corps masculin ? Na-t-clle pas Ia m~me

    o~uvrc it faire, Ic rn~me esprit it combattrc, Ics

    in~ines fruits it cspe~rcr ? (1). Cependant,recommande Saint-Martin, je persiste dans

    Iopinion quc les femmes doivent ~tre en petitnombre chcz ndns et surtont scrupuleusement

    cxamin~es > ~ (2). Pcut-~trc faut-il en che~chcrIa raison dans cet aphorisme du Portrait: La

    femme ma pam ~trc meilleure quc IJjomnic,

    mais Ihommc ma paru plus vrai quc Iafemme > ~ (3). Cucillons enfin, sun Ic chapitre

    (1) Lettre & Wiflormox, 1~ mai 1773. PAPUS Saint-Martin, p. 116.

    (2) Id.. 23 mars 1777 P.&ous Saint-Martin, p. 146-147.Cette instruction concerne lOrdro des Elus Cohcn et vise1entr~e do Mine Proven~al, smur do Willerniox. Mais elicenfes-me Ia pens~e constante do Saint-Martin. On poutm~me croire quo lexamen scrupuleux simpose encoredavantage dans lo Martinis me quand on connalt la d&fiance du th~osophe pour los dc~bordements mystiquesf~minins.

    (3) Portrait n~ 206, p. 30.(1) Portrait n0 488, p. 68.

    53

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    ~ 52

    des femmes, une fine et plaisante remarque de

    Saint-Ma~rtin. Elle aidera aussi ~i r~constituer

    Latmosph~re du martinisme, selon la volont6 deson fondateur., ~ Les grandles v~rit~s ne sen-

    seignent bien que dans le silence, tandi,s quetout le besoin des femmes en question est que

    1on pane et quelles parlent et alors tout se

    d~sorganise, comme je lai ~prouv6 plusieurs

    fois > (1).La personnalit6 du Philosophe Inconnu, telle

    qaelIe apparait dans ses ouvrages et dans ses

    actes, interdit de pr~ter ~i sa soci~t~, un aspectrigide, solidement organis~ et hi6rarchis6. Per-

    sonne ne croit plus ~i lauthenticit6 du rite

    ma~onniqu~e dit de Saiht-Martin. Et Ia seuleaction iimportante du th6osophe au cceur de Ia

    Ma~onnerie fut des sayer de briser, larmature

    des Loges r6guli~res, de disperser ses meinbres

    et de les er~tra~ner daris sa course vers 1Absolu,en dehors des cadres et des groupements.

    Adinettons donc que les ~1~ves de Saint-

    Martin formajent une sorte de ~ club > plut6t

    quune v6ritable soci6t6 initiatique. Admettons

    que le lien qui r~unissait ces 6I~ves au Maitre

    et entre eux ~tait de nature spirituelle. Ii reste

    (1) Portrait n0 145, p. 21. Saint-Martin devait, nijeux

    que tout autre, pe~ccvoir le charine ~trange qui ~manede certaines femmes, et dont Baizac a si bien parl~

    Ah Nath~Iie, oui, certajnes feninies partagent ici-basles privileges des esprits ang~liqnes et r~pander~t coninleeux cette luini~re quo Saint-Martin Ic Phulosophe Inconnudisait ~tre intelligible, ni~1odieuse et tout inn~e. (Le Lysdans la Vailde, p. 206) La th~orie niartiniste de Ialumi~re A laquelle Baizac fait ici allusion est expos~enotaminent dans Le Crocodile.

    53

    ~i savoir ce quon faisait dans cette 6cole et

    comment on y travaillait, ce quy communi-

    quait le Maitre et comment on entrait dans lachaine. Ces deux derni~res phrases r~sument,

    semble-t-iI, le hut et le principe de Ia soci6t~

    de Saint-Martin. Saint-Martin y enseignait, mais

    c9nf6rait aussi, au sens plein du terme, une

    initiation.

    Stir Ia mani~re denseigner propre & Saint-

    Martin, nous poss~dons un t~moignage de pre-mi~re main. Ce sont les explications donn~es

    par Saint-Martin ~i un 6l~ve qui linterroge. Ce

    sont les inappr6ciables lettres ~ Kirchberger,

    baron de Liebisdorf. La premi~re lettre deKirchberger sollicitait quelques ~clairci ss~m~ents

    sur lauteur et le fond Des Erreurs et de laV~rit~. Le Phulosophe dAmboise y r~pondit

    avec obligeance et ainsi naquit un ~change depens~esqui dura quatre ans. Nous trouvons au

    f l u des pages n6mbre de pr~cisions doctrinales.A quelles d~coiwertes invite Ia tr~s belle para-

    bole du jardinier Et queues r~v~lations Saint-Martin nh~site-t-iI pas ~i communiquer Le

    Phulosophe Inconnu, dans son plerpier ouvrage,

    avait peint ail~goriquement l~tat de lhomme

    avant Ia chute. Lhomme originel, y lisait-on,tirait toute sa puissance de la possession dunelance merveilleuse, compos6e de quatre m~taux

    diff~rents. Saint-Martin ne cache pas ~t quel

    poieit ii importe de d~couvrir Ia vraie naturede cette lance symbolique. Et & Kirchberger

    qui lui r~c1ame ce secret, ii r~pond ~ La lancecompos~e de quatre m~taux nest autre que le

    54 55

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    54

    grand nom de Dieu, compos6 de quatre

    lettres (1). Peut-on rien exiger de plus clair ?

    Et ne comprend-on pas Ia f~coiidit~ des rap-ports du Maitre et des 6l~ves quand tine telle

    volont~ dinstruire anime celul qui saiL La suitede Ia r~v~lation ainsi faite ~i Kirchberger sur

    1 ~ signification mdtaphysique de Ia lance, mon-trera encore Saint-Martin guidant ceux qui

    sadressent ~i lui. Liebisdorf, en effet, tira de ce

    symbole des conclusions assez arbitraires. [I

    rapprocha, par exemple, 1alliage des ql~atremdtaux et les quatre ~vang61istes (2). Saint-

    Martin jugea ces exercices < conventionnels et~crivit A Kirchberger que les quatre ~vang~listessont ~ peut-~tre cinquante (8).

    Ainsi s~exerce le premier rninist~re du Philo-sophe Inconnu parmi les membres de son

    Ordre; ii redresse et enrichit leur intelligence.

    II leur e~pose sa v~ritab1e doctrine. Ajoutons

    aussi ? ~ ces d6monstrations, les techniques mys-tiques, les clefs cabalistiques de meditations,

    voire de respirations, que Saint-Martin coinmu-niquait ~i son entourage. Le baron de Turkheim

    croyait que plusieurs passages des Erreurs et

    de la V~rih~ ~taient ~ tires Jitt~ralement des

    Partlies, ouvrage classique des Cahalistes (4).Ny a-t-il pas toute une part de la Kabbale

    (1) Correspondance, p. 45.

    (Z Correspondance, p. 48.(8) Correspondance, p. 52.

    (4) Lettre ~ Willernioz, 4 ao~it 1821, in DernienghenLes Sommeils, p. 144.

    55

    quon a pu appeler ?Tels ~taient quelques-uns des enseignements

    transmis par Saint-Martin aux inembres de sa

    Soci~t~. Ce que nous avons dit de la conception

    martiniste de 1 < Ordre initiatique, laisse, bien

    entendu, Ia possibiIit~ d~tre Martiniste, s~*ns

    Saint-Martin. Certes, ii est ais6 de se montrer

    martiniste, coinme ces hommes superficiels qued6crit Mercier dans son Tableau de Paris et qui

    font~ une mode du Philosophe Inconnu. Point

    nest alors besoin de se rattacher h P . Mais on peut avoir adh~r~ ~i Ia

    doctrine instaur~e par Je th~osophe dAniboise,

    la mettre en pratique, sefforcer de suivre Ia

    voie quil d~signe, sans avoir pour cela revu1initiation par lop~ration dun autre Initi~. Ou

    bien, ~1argissons Ia notion dOrdre Martiniste.La religion chr~tienne juge sauv6s ceux qui sesont incorpor~s ~i elle par le . Faudra-t-il voir le martinisme refuser

    linitiation dHomme Esprit ~i tout ( ? Reconnaisspns toutefois que 1initia-

    tion rituelle est le moyen le plus ordinaire etle plus ais~ dentrer dansl < Ordre Martiniste ~.

    Elle procure h celui qui la re~oit une aidepuissante. Aide mystique dabord des Fr~res

    passes ou presents dans la conimunaut6 des-

    quelles elle nous permet dentrer le plus facile-ment. Aide morale, voire mat~rielle, des mem-

    bres contemporains. Aide intel1ect~elIe par le se-

    cours quelle apporte dans l~tude de la doctrine,soit par les travaux en commun, soit par la voix

    56 57

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    56 57

    des adeptes plus avanc~s, soit, surtout, lar les

    traditions dont ces adeptes sont l6cho et quisommeillent au sein de lOrdre, nattendant que

    le Prince dont 1amoar viendra des r~veil[er.

    Mais 1initiation poss~de en elle-m~me unevaleur certaine. Saint-Martin instruisait les

    Membres de sa Soci~t~, de cette Soci~t6 dont

    IHistoire nous a attest6 la survivance au cours

    des si~cles. Mais le Philosophe Inconnu leurdonnait aussi un myst~rieux viatique, une clefplus ~trange que les clavicules linitiation.

    Extraordinaire prestige du Divin influx quis~chappe des mains, qui fait le pr~tre ouladepte, qui donne le pouvoir ou la facilit~ des

    sciences~ Vertu magique & la limite extreme

    de Ia nature et du surnaturel. Prodigieax etimpalpable auxiliaire qui se donne sans se

    diviser, qui se passe dhornme ii homme, gardeson effet propre et infaillible,. mais ne dive-

    loppe enti~rement son pouvoir que dafis lespritpr~t & lentretenir. Singuli~re fascination de ce

    courant subtil, de ce fluide vital qai anime lemembre du corps mystique.

    Saint-Martin sut discerner le r6le de linitia-

    tion et 1 1 cOmprit que son mecanisme ne ressor-

    tissait pas

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    II

    LA DOCTRINE MARTINISTE

    METHODE ET DIALECTIQUE

    Les principes naturels sontles seuls que lon doive dabordpresenter k 1inteltigence hu-niaine et les traditions qui

    viennent ensuite, qucique su-blues et profondes quellessolent, ne doivent janlais &reenip1oy~es que connie confirm-tions, parce quc 1inte]Iigence

    de 1honinie existait avant leslivres.

    Portrait n0 819 Euvres Pos-

    thumes, t. 1, p. 40-41.

    ____

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    Le martinisme est une mani~re de vivre. Maisses principes dactions sont subordonn~s ii une

    mani~re de penser. Le primat de lintelligenceet du sens moral doit ~tre respect~. Nul oppor-

    tunisme vulgaire, nul utilitarisme ne saurait

    ~tre admis. Les v~rit~s essentielles et ceitaines,que les livres ne font que confirmer,, r~gissent

    notre existence et notre activit~ totale. Quel quesoit le plan sur lequel lhomme se meut, sa

    conduite d~coule de ses certitudes profondes,intellectuelles, disons le mot philosophiques.

    Cest parce quil sait doii il vient et ob il va

    quo Phomme pourra orier~ter son action poli-tique et lui donner un sens. La r~ponse auprobl~me capital de la destin~e humaine contientaussi Ia solution de toutes les questions qui se

    posent ii lhomme. Avant de voir Ia logiquede cette d6duction, avant dexposer les cons&

    quences morales ou politiques de la doctrinemartiniste, demandons-nous dabord ce qui enfait le fondement. Quels sont, dans lesprit de

    Saint-Martin, les v~rit~s premi~res et comment

    les acqu~rons-nous ?

    Cest un spectacle bien affligeant, Iorsquon

    veut contempler lhomme, de le voir & la foistourment~ du d~sir de connaltre, napercevantles raisons de rien et cependant ayant laudace

    de vouloir en donner & tout (1). Ces premi~res

    lignes du premier ouvrage de Saint-Martin nous

    (1) Erreurs, 1782, I, p. 8.

    F

    62

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    62

    fournissent le point de d6part et le plan de

    toute Ia doctrine martiniste.Lhomme est la somme de tons les probl~mes.

    II est Iui-m~me un probl~me, l~nigme des

    ~nigmes. La question quil pose, que sa nature

    n~me renferme, il nous fait Ia rdsoudre. Vaineserait une thdorie qui ne viserait pas dabord

    < le bien de lhomme en -g~n6ral (I).

    Et ce bien ne peut r6sulter que de Ia r6ponse

    A linterrogation humaine. Lexistence de cette

    interrogation sera Ia premi~re certitude. Uneconstatation, en effet, simpose le4at de

    lhomme. Or cet stat se caract6rise pr6cis~mentpar langoisse, le sentiment ~Ijincompl~tude et

    dimperfection. Le fait que lhomme puisse

    ignorer et sen 6tonner, chercher et se tromper,

    esi le rnyst~re initial qul entralne logiquenientlobscarit~ du monde. Du statut humain on

    aboutit A des conclusions sur

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    64

    ~tres (1), nest pas un postulat cest une

    certitude, le fini dune exp~rience. Si le Marti-nisme nous fait retrouver lexplication de lUni-

    vers et Ia vision de Dieu, cest parce quil prendsa source dans ~ on ~oquel est

    son nom et A queue famille appartient-il? ou

    est-il grand, petit ou de taille moyenne ? Ii

    est certain que cet hoimme moiirrait avant depouvoir connaitre tout cela (2).

    Notre situation exige tine r6ponse pr6cise. Les

    autres prob1~mes sorit accessoires. R F Ia is Saint-Martin ne les bannit pas pour cela du champ

    de La recherche humaine. Ii ne sinterdit pas

    (1) Tableau Nature 1 , 1900, p. 2.(2) Masshinia Kikaya, 63.

    linvestigation philosophique. II estime rait

    m~me absurde que notre esprit soit avide, deconnaissance et ne puisse satisfaire cette

    soif (1). Simplement, il situe cette curiosit~

    intellectuelle. Lorsque thomme a reconnu L aVoie qui m~ne A Ia V~rit~, 1 1 peut se livrer A

    Ia meditation sur les myst~res de Dieu et de

    lUnivers. Mais on ne saurait accorder aux

    jeux de 1esprit, on m~me A ses d6marches

    abstraites la priorit~ sur Ia direction de notrevie. Dail]eurs, II nexiste pas de coupure entre

    ces deux ordres de recherches, mais une ant&riorit~ dialectiqQe de 1une A lautre. Car ii est

    remarquable que par une conspiration uni-

    verseHe, tout soit li~ et que la solution de la

    premi~re ~nigme apporte aussi celle des autres.It faut dabor~l soigner Ia blessure et enleverla f1~che. Mais en r6pondant A cette n~cessit~

    qui nous presse et qui est de nous sauver, onreconnait Ia nature de la plaie, Ia qualitd du

    trait et pour ainsi dire, sa marque de fabrique.

    La question de son origine et de sa prove-

    nance se trouve du m~nie coup ~clair~e. MaisLa gu~rison aura dabord ~ recherch~e, les

    rem~des auront dabord ~td indiqu~s. Lhu-

    manisme de Saint-Martin (2) nest d~nc pas

    ~1) Tableau Naturel, 1900, I, p. 1.

    (2) Le niot . n hunianisnie a cite applique A Saint-Martindans une ~tnde originale de M. Paul Salleron (Chronique

    de Paris, n0 9, jLsillet 1944). Lautenr aprbs Jacques

    Maritain distingue avec une subtile intelligence n lhuma-nisnie anthropocentrique et lhunianisnie th~ocen-trique ~. Cest ~videmnient par cette derni~re expressionque M. Salleron d~signe Ia doctrine niartiniste.

    I F

    I

    5

    I 66 67

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    66

    a priori, mais proc~de de lexp~rieflce la plus

    certaine et Ia plus inimddiate que puisse ~a1i-

    ser lhomme lexp~rience de soi, Ia conscience

    de son 6tat.Insistons un peu sur ce caract~re da priori

    que nous venons de nier dans le Martinisme.II convient de ne laisser subsister aucune ~qui-

    voque. Cest L a nature intinie de Ia doctrine deSaint-Martin qui est ici en question. On pentdire que Ia philosophie de Saint-Martin est a

    priori, parce quelle explique 1inf~rieur par lesup~rieur le bas par le haut, les faits par leur

    principe. Le mat6rialisme sera alors a posteriori

    parc~ quil explique Ia mati~re par Ia mati~re,~ explique ce qui parait ~tre frunscendant A

    Ia mati~re en le r~duisant A Ia mati~re m~me.En la transposant nous retrouverions ici Ia

    formule de W. James e lempirisme est

    lhabitude dexpliquer les parties par le tout. Tout spiritualisme est donc a priori et, le

    Martinisine plus que tout autre syst~me. Lelivre Des Erreurs et de la V~rit~ tend A

    montrer L a faiblesse et linsuffisance dune vi-

    sion xnattlria1i~te du monde.. Cette opposition

    nest nulle part plu,s sensible que dans Ia cri-tique du sensualisme poursuivie toute sa vie

    par Saint-Martin (I).Dun aini qui le qualiflait de < spiritualisle ,

    Saint-Martin disait Ce n~st point assez

    (1) L~pisode le plus ~c]atant de cette lutte inccssantcdont ttinioignent les livres et les ni~moires de Saint-Mar-tin est sa controverse avec Garat, lors de son sijonr hlEcole Norinale.

    67

    pour moi d~tre spiritualiste et sil me con-naissait, loin de sen tenir i& il mappellerait

    diviniste car cest mon vrai nom (1). Le

    martinisme spiritualiste au premier cher, estdonc bien, suivant le mot dHenri Martin, un

    ~i priori gigantesque (2). Mais que cetteexplication a priori soit donn~e a priori, queIlesoit pr~sent6e comme un postulat, que]le se

    montre inv~rifiable et quon [a puisse juger le

    fruit dune imagination, voilA qui est contraire

    A lessence de La philosophie de Saint-Martin.

    Car cette philosophie repose tout ent~re sur unecertitude et une dialectique que nous allons.examiner. Pour n~tre pas fond~e sur la mati~re

    ou sensible aux sens physiques, eUe nen est

    pas moms certaine. Nous dirions presque ~< aucontraire. Saint-Martin na4-il pas proclam~et ~e sommes-noas pas convi6s A expdrimenter

    avec lui que nous trouvons en nous des preuves

    plus convaincantes que nous nen trouverions

    dans la Nature enti~re ? (3)

    (1 ) Portrait n~ 576, I, p 72. Cf. ibid, n0 362: Mon ~uvre

    a sa base et son cours dans le divin, cue ne nianqucrapas, je lespere, davoir aussi son ferme dans ce ni~me

    divin

    (2) Henri MARTIN Histoire de France, Paris, Fume,1860, t XVI, p. 530.

    (3) Cf. Le Minist&e de lHomme-Esprit, p. 1-3, p. 7-8.,, Toutes les ressources tir~es de lordre de ce monde et

    de lanature sont pr~caires et fragiles.. 1 4 nous est bienpLus facile datteindre aux lnmi~res et aux certitudes qulbrillent dans Ic monde ofi nous ne somnies pas que denous naturaliser avec les obscurit~s et les t~nbbres quiembrassent le nionde oh nous somnies; ...enfin noussonimes bien plus pr~s de ce que nous appelons lautremonde que nous le sosnnies de celul-ci.

    68

    I69

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    Ces braves r6flexions sur la n~idthode marti-niste nont pas la pr~tention den determinerlessence. Celle-ci se d~gagera de lexposd m~me

    de Ia doctrine de Saint-Martin. Apr~s en avoirrelev6 quelques explications, nous en tirerons

    les caract~res principaux. Mais il convenaitdindiquer nettement Ia base de la rdflexion

    martiniste. Saint-Martin veut croire, 6critMatter (1), mais un peu en philosophe, il est

    mystique, mais avec intelligence. La th6oso-

    phie de Saint-Martin nest pas une ceuvre

    dimagination. Elle n~est pas un tissu dasser-K tions inv~riflables, ni de reveries mystiques

    4

    Pour s~lever vers les plus hauts sommets de Ia

    m~taphysique et de Ia spiritualit~, le penseur

    dAmboise ne sinstalle pas dans le plan inac-cessible au vulgaire des speculations abstraites.II nous prend & notre niveau au niveau de

    lhomme et cest de lii quil nous reconduira

    jusqaA ce Dien dont nous sentons si cruelle-ment 1~loignement.

    Litin~raire de ce parcours, voilA ce quil

    nous faut pr~ciser maintenant. Nous pourrons

    constater ainsi Ia coh6rence du syst~me marti-

    niste. Puis nous en examinerons successivementles diff~rentes parties qui, sans ce travail pr6-liminaire, risqueraient de paraitre sans fonde-

    ments. Esquissons donc le sch~ma dune dia-lectique martiniste. F

    Lhomme prend dabord conscience de son

    ~tat. Entendons par lA quil se connait en tant

    (1) MATrER Saint-Martin, le Philosophe Inconnu, p. 219.

    69

    quesprit et en tant que corps ou, plus explicite-

    ment, il constate en lui et hors de lui desmanifestations vari~es. Dans la mesure oii ces

    manifestations lui appartiennen t ou laffectent

    et comment les connaitrait-il sans en ~tre

    affect6 dans Ia mesure oii ces manifestationsle touchent de quelque mani~re, elles contri-

    buent A constituer son 6tat.

    Or ceux qui nauraient pas senti leur

    v6ritable nature, je ne leur demanderais que de

    se regarder pour ~tre A couvert des mdprises.Car dans ce quils appellent lhomme, dans ce

    quils appellent le moral, dans ce quils appellentIa science, enfiu dans ce quon pourrait appeler

    le chaos et le champ de bataille de leurs di-verses doctrines, ils trouveraient tant dactions

    doubles et oppos6es, tant de forces qui se corn-

    battent et se d~truisent, tant dagents clairernentactifs et tant dautres clairement passifs, et

    cela sans chercher m~me hors de leur propre

    individu, que sans pouvoir peut-~tre dire encore

    ce qui nous compose, ils conviendraient quesftrement tout en nous ne se ressemble pas et

    que nous nexistons que dans une perp~tuelle

    difference, soit davec nous-m~mes, soit davectout ce qui nous entoure et davec tout ce quenous pouvons atteindre et consid6rer. Ii ne

    sagirait pins ensuite que dappuyer avec

    quelque science ces diff6rences pour en aperce-

    voir le vrai caract~re et pour classer lJiommedans son v6ritable rang (1).

    (1) Le Nouvel Homme.

    71 70

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    Saint.Martin invite donc lhomme & se consi-

    d6rer lui-m~me et A analyser avec soin la r~aIit~quil aura atteinte. Ainsi lhomme ddcouvrira-t-il son v6ritable rang et percevra-t-il lharmo-

    nie du mpnde, suivant ladage fameux de

    Deiphes Connais-toi toi-m~me et tu connal-tras lUnivers et les Dieux. A 1invitation de

    Saint-Martin rendons-nous donc, en proc6dantA lexamen quil pr~conise, Jexamen de lhomme.

    La seule vue de sa situation pr6sente lui

    r~v~le que cet & ~ tat se ddfinit ainsi la coexis-

    tence de deux traits apparemment contradic-toires, mais tous deux objets dune explrience

    ~galement certaine.

    I. Lhomin,e se d~couvre tin principe sup&.

    rieur. II observ~ sa pens~e, sa volont~, tous

    ces actes, de genie et dintelligence qui ledistinguent toujours par des caract~res frap-pants et des signes exclusifs (1).

    Pourquoi donc lhomme peut-il s~carter

    de la Loi des sens... Pourquoi y a-t-il dans

    Vhomme une volont~ quil peut mettre en oppo-

    sition avec ses sens ? (2). Pourquoi lhomme

    est-il guide par un merveilleux sens moral,infaillible en son principe? Pourquoi? Sinon

    parce quil est essentiellement distingu~ par son

    (1) Tableau Naturel, 1900. I, p. 6. Lhoninie malgr~sa fatale degradation porte toujours des niarques ~videntesde son origine divine J. de MAiSTRE. Les Soirees deSaint-P~tersbourg. VII Entretien.

    (2) Erreurs, 1, 51.

    Principe inteliectuel (1) et quil est ici-bas

    le seul favoris~ de cet avantage sublime... (2)

    La conscience de soi donne A lhommeune premiere assurance. Quand nous avons

    une fois senti notre Arne, nous ne pouvons

    avoir aucan doute sur toutes (ses) possibili-t~s (3). Mais ce qui lui apparait av~int tout,cest Ia ~ouffrance essentiefle de se, sentir exile,

    cest la nostalgie cIun s~jour id~nique.

    Lhomnie, H est vrai, en qualit6 dEtre intel-

    lectuel, a toujours sur les Etres corporels

    1avantage de sentir un besoin qui liii est

    inconn~a (4). Le Philosophe r~unit alors ces

    preuves multiples, ces t~moignages irr~cusableset le spectacle de son Ame dicte & Saint-Martin

    cette r~v~lation

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    II est inutile de faire le tableau des faiblesses

    et des malheurs des hommes. Nul dentre eux

    ne les ignore car nul ne peut vivre sans enporter sa part. a Ii ny a personne de bonne

    foi, dit Saint-Martin, qui ne consid~re que Ia

    vie corporelle de 1homme est une privation etune souffrance continue[le > (1). Le rapproche-ment sav~re A Ia fois in6vitable et surprenant

    entre cette evidence et Ia certitude pr~c~dem-

    ment acquise.

    a Autant il est vrai que l~tude de lhomme

    nous a fait dt~couvrir en noun des rapports ~vec

    le premier de tous les principes et des traces

    dune origine glorieuse, autant elle nousen laisse apercevoir dune horrible d6grada-

    tion (2). Comment Ia liaison de ,ces deuxconclusions caract6rise notre ~tat, cest ce qua

    montr6 Saint-Martin .dans sa tr~s belle analyse

    du d~nilment spirituel. Pour expliquer unpassage dEcce Homo, le philosophe met envaleur lambivalence de lhomme, Ia dualit~ de( sa nature.

    a Le d~nilment spirituel, dit-il, est le senti-ment vif de notre privation divine dici-bas,

    op6ralion qui se combine : 4 avec le d6sir

    sinc~re de nous retrouver dans notre patrie;

    2 avec T ies reflets inFt~rieurs que le soleil divinnous fait quelquefois Ia grAce de nou s envoyer

    jusquau centre de notre ~me; 3 avec [a douleur

    que nous ~prouvons quand, apr~s~ avoir senti

    (I) Erreurs, t78~, I, p. 31.

    (2) Tableau Natural, V, 1900, p. 53.

    3

    quelques-uns de ces divins reflets si consolateurs,

    nous retombons dans notre r6gion t6n~breuse

    pour y continuer notre expiation (1). Pourreprendre une autre formule de Saint-Martin

    1 1 y a des ~tres qui ne sont quintelligents,

    ii y en a qui ne sont que sensibles; lhommeest & Ia fois lun et lautre, voil& le mot de

    La coniradiction jaillit de ce double aspect

    de lexistence humaine, comme elle surgit entre

    le d4sir de savoir et le trop fr6quent ~chec des

    tentatives pour y parvenir. aLhomme, un

    Dieu v~rit~;, nest-~e pas un prestige? CommentlHomme, ce Dieu, cet ~tonnant prodige, Ian-guirait dans lopprobre et Ia d~bilit~ s (3). L e

    probl~me est pose. Les donn~es en sont expri-

    m~es. La rencontre des deux exp~riences, leursimultan~lt~, voilA le depart de Ia dialectique

    martiniste. Car la tristesse de notre sort ne

    fournirait la mati~re daucune r~flexion siI nyavait justement lesprit pour en prendre con-

    naissance.

    a L~tonnement, disait Aristote, est le com-

    mencement de Ia philosophie. Ii comprenait

    que lattention se portait ainsi vers des pro-blames quignore le vulgaire. Mais l~tonnement

    est aussi un objet de meditation. Par son exis-tence m~me, l6tonnement, Iangoisse si lon

    veut, marque une opposition entre celui qui

    (1) Corresp., p. 36-37. Le texte dEcce Homo que Saint-

    Martin ~claircit dans cette lettre esi situ~ p. 56.(2) Erreurs, I, p 49.(3) Stances, 5, p. 20.

    1 1

    74 75

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    sitonne et ce dont il s~tonne. II est la plus Firrefutable r6plique au inat~rialisme. Ii emp~che

    de consid~rer le nionde mat~rie1 comme luniquer~alit~, se suffisant & [ui-m~me, existant seul,car il y a toujours le monde et celni qui le,

    juge. Le monde ne peut ~tre une machinenocturne, .car ii se trouvera lhomme pour la

    regarder burner. Ainsi est-il de la propresituation de lhomme. Son ~tonnement qui est,

    indiscutablement, semble d6jA un nmud decontmd[ctior~s. Mis~re de lhomme, exp6rience

    de tout moment. Grandeur de ]homipe qui se

    sait maiheureux. Grandeur et mis~re de lhommesinterp6nAtrent. La premiAre permettant deconnaitre l~ seconde et Ia seconde aidant lesprit

    & s6lever A lintuition de la premi~re~Que lambivalence de notre ~tre m~ne ~i.

    r~partir les ~tres et les choses en deux classes

    que la croyance en un principe mauvaispuissant, quoique soumis au Principe du Bien,

    soit issu de Ia in~nie r~flexion, cela est assur~,

    et confirme limportance de cette consideration.Mais nous nenvisageons ici que lar~te de Ia

    doctrine martiniste. Avant tout destin~e A

    instruire lhomrne sur lui-m~me, elle pourraensuite lul apprendre Ia Science du Monde et

    de Dieu. Mais ii est dabord Ia ni~lhode de sapropre etude. LHomme sint~resse dabord &

    lui-m~me. Si la connaissance de soi-m~me per-met daborder Ia recherche des lois qul r6gissent

    lUnivers, si m~me cette connaissance nous~[Ave jusquA ce[le de Dieu, el[e nen a pas

    moms pour objet Ia solution du problAme de

    [homme. Cest de ce prob]~me quil faut dabordsoccuper parce quiI est au fond le seul.

    Lhomme ne sen persuadera jamais assez.Admettons donc comme base de Ia doctrine

    martiniste cette contradiction, cette dualit~ de

    [a personne humaine. Est-~e lA que resideloriginalit~ de Saint-Martin ? Assuriment non.

    Nombreux furent les penseurs qui trouvArent

    dans Ia condition humaine un th~me riche

    denseignements. Aristote apr~s Platon savaithien que lessence de Ihomme, son Ame, , 6tait

    quelquc chose de divin . De Saint-Paul A

    Pascal, la lutte des deux [ois celle de la chairet, celle de lAme, constitu~rent des arguments

    classiques pour lapo1og~tique chr6tienne. a Je

    sens dans mes meinbres, dit Saint-Paid, uneautre Ioi qui sOppose A la loi de IEsprit etmernprisonne dans Ia Ioi du p6ch6 qui est dans

    mes membres (1).

    La grandeur de Ihonime est grande eii cequil se connaIt mis6rable, lit-on dans les

    Pensdes (2). La dicouverte par lhoinme de sad~ch~ance et Ia conscience de sa divine filiation,

    pour expliquer son stat pr~sent, est expos6e Aplusieurs itapes de Ihistoire de la philosophie.

    Et dailleurs, Saint-1~~Iartin ne cherche pas &innover dans toute sa doctrine. II se f~licite

    au contraire de rejoindre sans cesse les ensei-gnements traditionnels ou les d6couvertes des

    philosophes. Grande est Ia place quoccupe pour

    (1) Rom., VII, 23.

    (2) Ed. Brunschwicg, no 165.

    Fl

    76 77

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    lui la tradition. Et si nous citons volontiers

    Pascal, cest que sa doctrine recoupe parfoisla pens6e martin~ste. Saint-Martin a Iui-m~me

    signal~ cette parent& intellectuelle Lisez,

    dit-il en un texte assez peu connu, [es Penst~es

    de Pascal... Il a dit en propres termes ce queje vous ai dii et ce que jai imprim~, savoirque le dogme du p6ch~ originel r6sout mieux

    nos difflcuJt~s que tous les raisonnements des

    philosophes (I). Nous arrivons en effet, avec

    Saint-Martin comme avec Pascal, ~i r6soudrel6nigme que lhomme porte en lui. Apr~s avoir

    d~peint lhomme et lavoir finernent analyse, il

    appartient au th6osophe de tirer, selon sa

    m~thode, les cons~quences des faits quil vient

    de connaitre. Ici se manifeste son effort desynth~se. Saint-Martin va concilier les ~l6ments

    opposes qui forment lhomme, montrer quils

    peuvent se r~soudre dans une explication. Et

    Ia m~thode sera toujours lapprofondissementm~me de ces contradictions constitutives de

    lhomme.

    (1) Lettre du 27 Fructidor puhli~e par llnitiation,

    f~vr. 1912.Nous prenons ici lex~niple de Pascal parce que Saipt-

    Martin nous y invite lui-m~nie. Mais cette d~marche quileur est commune est celle du christianisme tout entier.Cf, par e,cemple, CALVIN : Institution chretienne (ed. Le-franc. Paris, Champion, 1911, p. 32) que J. de Saussureresume ainsi La r~v~lation de Dieu divise donc lAmeen deux convictions oppos~es : celle de sa dignit~ quantIi ses origines premibres et ii sa fin supreme, et celle deson indignit~ quant Ii son ~tat present. (A l~cole deCalvin. Paris. Je sers , 1930, p. 62).

    ~1

    III. Par le sentiment de notre grandeur,nous concluons que nous sommes sinon Pen-

    s6e Dieu , du moms Pens6e de Dieu (1).

    Par le sentiment douloureux de laffreuse

    situation qui est n6tre, nous pouvons nous

    former lid~e de l6tat heureux oii nous avons~t6 pr6c6demment. Qui se trouve malheureux

    F de n~tre pas roi, dit Pascal, sinon un roi

    d~poss~d~ (2). Et Saint-Martin Si lhomme

    n~a plus rien, cest quil avait tout (3).

    jjune part, Ia certitude de notre sublimeorigine, que nous en ayons lintuition dansnotre facult~ essentielle, ou quenous linF~rions

    de notre dcindment actuel. Dautre part, ced~neiment lui-m~me.. Seule Ia chute rend compte

    de cette opposition, de ce passage. Seule unedoctrine de la chute expliquera que lhomme

    soit tomb~. Puisque aussi bien l6tat primordial

    de bonheur est une assurance que nous avonsacquise et que la mis~re dans laquelle nous

    nous d6battons est une r~alit~ non moms 6vi-

    F , j dente, ii faut admeitre une transitiosi dun stade

    un autre stade. Telle est Ia chute.

    Sugg~rons une plus fine analyse de l6tatsublime qui rendait lhomme si grand et si

    heureux. Comprenons avec Saint-Martin quil

    ne pouvait naItre que de la connaissan6e intimeet de la pr~sence continuelle d u bon Principe.

    Nous obtiendrons le troisi~me jalon de ce quon

    (1) Ecce Hamo, 2,~p. 19.

    (2) Pensde. Ed. Brunschwicg, 409.

    (3) Erreurs, 1782, p. 30.

    79 7 8

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    peut appeler Ia dialectique niartiniste. On petitalors r6sumer le d~veloppement de cette dialec-

    tique en utilisant les paroles m~mes du th~o-

    sophe

    1. Lhomme un dieu ! v~rit&

    2. Comment lhomme ce Dieu, cet ~tonnantprodige, languirait dans lopprobre et la d~bi-

    litc~.

    3. Pourquoi cet homine languirait-il & pr&.sent dans lignorance, la faiblesse et dans la

    mis~re, si ce nest parce quil est s6par~ de ce

    m~me principe qui, est la seule lum~re etIunique appui de tous les Etres ? (1).

    Tels sont les principes. Tel est le chemin par

    lequel lhomme pai~vient A Ia comprehensionde son ~Lat. On peut bAtir sur ce sch6ma Iadoctrine martiniste tout enti~re. Ii est lindis-

    pensable fondement psychologique des appli-

    cations multiples quinspirera Ia pens~e du

    Philosophe lnconnu. Nest-elle pas claire d6sor-mais Ia destin~e de lbomme ? a Attach6 sur la

    terre comme Prom6th~e (2), exile de son

    v6ritable royaume, quel but pourrait-il se prci-

    poser sinon de le reconqu6rir et de r6int~grer

    sa patrie ?Et le moyen de retrouver le paradis perdu,

    ne le poss6dons-nous pas aussi ? Nous savons

    comment Ihonime en a 6t~ chass6. Or L a simple

    description de cet 6den nous montrerait quil

    est dispose a avec tant de sagesse quen retour

    (1) Erreurs, 1782, 1, p. 31.(2) Tableau Naturel, 1900, p 57.

    nant sur ses pas par les m~mes routes qui lont

    ~gar~, cet homme doit ~tre sAr de regagner lepoint central dans lequel seul il peut jouir de

    quelque. force et de quelque repos (1). Et la

    th6orie de la R6int~gration doit n6cessairement

    burner autour de Ia figure centrale du Rcipa-rateur. Cest tout le Martinisme, magnifique-

    ment coh6rent et assur~, qui se d~ploie dans

    lentendement A partir des intuitions fonda-

    mentales.

    Nous avons v u la dialectique de Saint-

    Martin et d~cit sous ce terme le parcours delhomme vers la connaissance de son origine et

    de sa destination. II est int6ressant de noter

    que cette marche de la pens~e reproduit la

    marche m~nie de l~tre. Comparons, en effet,lappr~hension de lhomme par 1ui-m~me avec

    ses con s6quences et 1aventure humaine que

    cette appr~hensiori permet de reconstituer.

    1 Lhomme jouit dabord du bonheur ~d&

    nique. Le a mineur prend conscience de son

    imperfection actuelle et de laspiration., de son

    esprit, en un mot retrouve lid6e ~de Ia beatitudeoriginelle. Il sen souvient en premier lieu.

    2 Puis il midite sur Ia souffrance qui est

    son lot dans cette vie. Il d6couvre [~tat apr~sIa chute. Ainsi lHomme dans sdn piriple tonibe

    du Ciel, pour venir sur la Terre.

    30 Enfin, lHomme miserable comprend le

    myst~re du passage, la distance qui s~pare ces

    deux ~tats. Ainsi lHomme duichu franchira de

    (1) Erreurs, 1782, p. 37F-38.

    80 81

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    nouveau la distance infinie, refera le trajet quim~ne au Bonheur et obtiendra sa R6int6gration.

    Tb~se, antith~se, synth~se. Bonheur primor-

    dial, chute et r~int6gration. Le mineur spirituel

    poss~de la ligne de son destin. 1 1 la reconnuestirement par une d6marche logique, ca]qu6e

    sur sa courbe ontologique. Chaque hommeretrouve en son esprit 16ternelle ~pop6e de

    lHomme.

    Je tiens pour vrai ce qui mest donna pour

    vrai dans le fond intime de mon A m e> ~ (1).Ainsi Salzniann d~finit-il la v6rit6. Saint-Martin

    naurait sans doute pas reni6 cette profession

    de foi dunil]umin~. Mais 1aurait-il jugt~ suffi-

    sante pour fonder une doctrine, pour pr~siderA

    une initiation, cest-A-direA

    tin commence-ment? Cest ce que Ion a parfois pr6tendu.

    Certains ont voulu bAtir sur ce seti] crit~resubjectif Iensemble du syst~me martiniste. EL

    cest pourquoi le tableau dont nous avons essay6

    de tracer les grandes lignes, paraitra peut-~tretrop intellectuel, trop intellectualiste. On nous

    reprochera peut-~tre davoir insist~ sur taspect

    rationnel. du Martinisme. Il serait facile de

    r~pondre que cet aspect est le sedl qui se puisse

    exposer ou discuter et quapr~s tout, la puremystique ne se d~crit ni ne se pr~che, quelexhortation, par le fait m~me quon la for-

    mule, subit lenipreinte de Ia raison et en

    reconnaft implicitement le pouvoir.Saint-Martin, dira-t-on, est un mystique. La

    (I) Lettre ~i M. Herhort.

    doctrine martiniste est une doctrine mystique.Assur~ment, mais ce serait trahir la m6moire

    de Saint-Martin pie deF le pr6senter comme un

    pur disciple de Mm Guyon.

    Baizac critique violemment certains ~crits

    mystiques Ils sont 6crits sans m6thode, sanseloquence et Jeur phras~oIogie est si bizarre

    quon peut lire mille pages de M m Guyon, ~deSwedenborg et surtout de J. Bohme sans y riensaisir. Vous allez savoir pourquoi. Aux yeux de

    ces croyants tout est d~montr6. (Pr~face du

    Liure Mystique. ~iEuvres completes, Calmann-L~vy, XXII, 423).. Si ces reproches peuvent & larigueur sappliquer A J. B6hme, ils ne touchent

    pas Saint-Nartin. Les ~lans de lHomme de d~sir

    reposent sur les considerations philosophiquesdes Erreurs et de la Vt~ritd, ou du TableauNaturel (1).

    1 1 faut sentendre dailleurs sur lexpressionmystique. Le mot mystique, comme lhindou

    yoga, sert A designer deux id6es diff~rentes

    dune part lunion A Dieu, Ia vie que les chr&

    tiens nomment unitive ,~ dautre part unevoie, tine m6thode, tine technique (parfois tr~s

    proche du plan physique comme dans le HathaYoga) qui m~nent & cette union. Dun c6t~ le

    but, de lautre les moyens de 1atteindre (2).

    (1) Qoc ]3a]zac, alors fervent martiniste, se garde hiendo utter.

    (2) o T,c Yoga est lensemhle des proc~d~s physiques,niwitniix et spirituels qul ont pour but la transformationpiofondo de lEtre humain, I~veil en lul de 1HommeNULLQc~I;IL qui, h ldtat normal, est transcendantal et mac-